Impossible de dormir avec l'horrible chaleur de ces dernières semaines ! Surtout, je suis assaillie de rêves ou plutôt de cauchemars. Je ne sais pas bien, à vrai dire, distinguer l'un de l'autre. On glorifie le rêve comme s'il était systématiquement empreint de félicité, associé au plaisir et à l'accomplissement. En fait, il est plutôt pour moi porteur d'angoisse, de frustration, de culpabilité. Et un mauvais rêve, ça vous déstabilise, ensuite, pendant toute la journée parce qu'on se rend bien compte que ça correspond bien à une réalité très forte en nous. C'est vraiment notre "renard intérieur" qui se plaît à venir dévorer nos entrailles.
Mais à vrai dire, je fais toujours un peu les mêmes rêves: quelques thèmes inlassablement répétés avec quelques variations. J'ai recensé comme ça quatre grands types de rêves chez moi.
D'abord, c'est celui de l'échec à un examen. Comme ça, je rêve souvent que je me vois dans l'obligation de repasser le baccalauréat et, bien sûr, j'échoue lamentablement. C'est, bien sûr, bizarre parce que je n'ai pas échoué à mon baccalauréat ni d'ailleurs à aucun examen. Mais il paraît que c'est ainsi..., qu'on ne rêve que des examens que l'on a réussis. De toute manière, que l'on soit reçu ou collé, un examen c'est, toujours, une période d'angoisse, une effroyable épreuve pour notre narcissisme. Pour ce qui me concerne, je me souviens que l'époque du baccalauréat, c'était l'apogée de mon arrogance et de mon orgueil. Je me sentais toute puissante, je me croyais admirée. Le baccalauréat, ça ne pouvait être que le moment de gloire de la petite prodige venue du bout du monde, de nulle part. J'étais vraiment une connasse, j'étais sûrement infecte, d'une épouvantable condescendance; pouvoir me côtoyer était un privilège que j'accordais parcimonieusement. J'étais tellement odieuse que j'ai quand même eu peur de ne pas être à la hauteur. Depuis, la vie et ses claques m'ont un peu tempérée mais pas complètement non plus, bien sûr.
Après, c'est le retour des morts... Mes parents, qui sont morts affreusement, font, tout à coup, leur réapparition. Ils sont sinistres, ensanglantés, et ils viennent m'engueuler : "Quelle tête de linotte tu es, Carmilla! Tu t'es empressée de nous mettre dans un cercueil et de nous enterrer mais tu n'as même pas pris la peine de vérifier si on était bien morts." Je suis évidemment confuse mais, heureusement, ils meurent généralement à nouveau à la fin du rêve, pour de bon cette fois. Enfin! ce retour incessant des morts-vivants, ça montre bien qu'on se sent continuellement coupables de la mort de ses parents.
Ensuite, je suis assaillie de rêves érotiques. C'est surtout avec les maris, compagnons, de mes copines mais c'est uniquement ceux avec lesquels je n'ai effectivement jamais couché. Ou bien alors, c'est avec de vieux libidineux de mon entourage mais qui ne m'ont, jusqu'alors, jamais harcelée. Ça se passe dans des lieux invraisemblables et on fait des trucs pas possibles que je n'ai jamais osé faire pour de vrai. Evidemment, on est découverts par ma copine ou par des proches et c'est très embarrassant.
Enfin, je rêve souvent que j'ai commis accidentellement un crime. Mais j'ai choisi de cacher ça, persuadée, au départ, qu'on ne me découvrira pas. Mais, petit à petit, l'étau se resserre et je sens qu'on va me démasquer, que je vais devoir avouer...C'est une angoisse terrible.
Evidemment, je peux me dire que tout ça est absurde et que ça ne mérite pas que je m'y arrête. Mais je m'interroge en fait souvent. Qui suis-je vraiment: le rêveur ou le rêvé ? J'ai aussi de bonnes raisons de penser que je suis également le rêvé et que, même si c'est effrayant, c'est finalement une réalité très forte.
Tableaux (le 1er et le dernier) d'Arnold Schoenberg (1874-1954). Le grand musicien était également peintre.
Oeuvres également d'Odilon REDON, Zdzislaw Beksinski.