dimanche 16 décembre 2012

« Paradis pour tous »




Vous êtes peut-être comme moi. Vous en avez déjà par-dessus la tête des querelles sur le mariage homosexuel et l’homoparentalité.


Surtout, vous n’osez pas vous exprimer de peur qu’on ne vous range tout de suite dans la catégorie des crétins, à droite ou à gauche.

Des deux côtés, l’outrance et la mauvaise foi sont bloquantes.


Mais de toute façon, ça se fera, l’évolution est inéluctable.

On présente ça comme une mesure progressiste. Peut-être… On peut voir ça aussi comme une nouvelle étape de la bureaucratisation de nos vies. Sans cesse légiférer, c’est la préoccupation première… cette irrépressible prolifération juridique qui réglemente,  régimente maintenant  jusqu’à nos corps, nos sexualités.


Pourquoi diable vouloir à tout prix des textes de loi pour codifier ce que nous avons de plus intime ? La discipline des corps, c’est devenu la réalité de nos temps modernes; elle a été décrite par Nietzsche et Michel Foucault et ça n’a pas grand-chose à voir avec l’histoire d’un affranchissement.


Marcel Proust considérait l’homosexualité comme un crime mais il lui donnait ainsi une splendeur bouleversante.

Aujourd’hui, les homosexuels vont avoir droit au kitsch et au ridicule : celui du mariage et de la bébémania avec le désir d’enfant ; la sexualité enfermée dans les lois du couple. Drôle d’époque qui nous infantilise de plus en plus mais il est vrai que chacun a le droit de bêtifier.


Notre idéologie, c’est que la sexualité, c’est cool et c’est fun. On s’éclate forcément et ça ruisselle de bons sentiments. On est pleins d’amour les uns pour les autres.


Dans ce contexte, comment refuser à certains les joies de la famille ? Se priver du concours de toutes ces bonnes volontés pour l’édification d’une société harmonieuse où chacun ne voudrait que le bonheur de l’autre, son conjoint ou ses enfants ?



« L’égalité pour tous », proclame-t-on alors. Bien sûr, sauf qu’on occulte que la vraie différence n’est pas entre homosexuels et hétérosexuels mais, plus essentiellement (n’en déplaise aux adeptes de la théorie des genres), entre les hommes et les femmes. Et c’est tout de même bien de ça, de cette séparation radicale, que naissent et le désir et l’imaginaire. Comment rêver dans un monde où on est tous pareils ?


Et puis on sait bien aussi que les rapports humains, la sexualité, ce n’est pas du tout ça. Il y a aussi un côté sombre, une part cachée de nous-mêmes.Ca repose également sur la force, la violence, l’assujettissement. Freud soulignait que la perversion, le plaisir de faire le mal, étaient consubstantiels à la sexualité humaine.


Etre gay, ce n’est donc pas gai. Mais c’est exactement pareil pour les hétérosexuels.


On est submergés par l’angélisme et la niaiserie. Comme antidote absolue, je conseille de revoir le film de Pasolini : « Salo ou les 120 journées de Sodome ».  Trente ans après, ça demeure absolument immonde et scandaleux et ça recadre les choses. C’est vraiment étrange : voilà un cinéaste homosexuel déclaré qui filme de manière grotesque et hideuse des mariages entre hommes. De quoi vous secouer complètement et relativiser ce qu’on vous présente aujourd’hui comme la plus belle des choses. Et puis, ce lien du fascisme avec la pensée libertaire et l’athéisme, c’est complètement inaudible aujourd’hui. Et enfin, cette idée que la sexualité sans entraves, sans interdit, ça débouche sur le rien, sur la merde; ça amène à bouffer ses propres excréments. Totalement réactionnaire ou totalement lucide.


Tableaux de Vasily Kotarbinsky (1849-1921), peintre polonais de la Russie tsariste. On lui doit en particulier l’extraordinaire décoration de la cathédrale Saint-Volodymyr à Kiev.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

O la la carmilla ;vous êtes remarquable tant par l'illu que par
les textes ;vite , ouvrons les fenêtres ,respirons ,réfléchissons par tous les pores de la peau , sortons des lois ,des interdits ; c'est un beau cadeau à se faire en cette période de chocolaterie!
Lola

Carmilla Le Golem a dit…

Ouah, Lola, c'est vraiment gentil, même si ça m'apparaît un peu excessif !

2 précisions cependant : j'aime bien critiquer ce qui fait consensus et, pour ça, j'exagère toujours un peu. J'ai donc moins de certitudes que je n'en affiche.

En plus, mon point de vue est très influencé par mon prisme Europe Centrale où, c'est vrai, ces questions sont perçues différemment.

Carmilla