samedi 13 février 2021

Nos mythologies : transgenres et pères incestueux

 

Dans les médias français, en ce début d'année, l'actualité fait son miel de deux grandes questions : la transsexualité et l'inceste. Une étrange juxtaposition : d'un côté, un grand vent de libéralisation, de l'autre, des cris d'horreur unanimes. On ressasse comme des vérités des sondages sans s'interroger sur leur valeur : 20 % des jeunes (de 15 à 30 ans) ne se reconnaîtraient pas dans le modèle masculin/féminin, 10 % des Français auraient été victimes d'actes incestueux. 

Ça dessine bien l'évolution de l'imaginaire de nos sociétés, ses tentations et ses peurs. Mais je n'ai vraiment pas l'impression qu'on nous invite à réfléchir sur ces sujets. On est plutôt violemment sommés de prendre parti pour pouvoir nous classer dans les catégories des réacs ou des progressistes. On clame sans cesse qu'il faut s'exprimer prendre la parole et que celle-ci a une vertu libératrice. Mais j'ai plutôt le sentiment que ces grandes proclamations ont surtout pour objectif de nous interdire de penser. 


 * Les transgenres d'abord. C'est peu dire qu'on a cessé de les considérer comme des "anormaux", des malades à prendre en charge. La bienveillance devient générale et il faut évidemment s'en réjouir.

Mais c'est au point que l'on peut en venir à devancer les choses, à proposer, bien vite, une chirurgie de réassignation. Mais on évite de se poser cette question toute simple, même si elle affleure rarement à la conscience : de qui vient le désir de changement de sexe ? Des parents ou de l'enfant ?

Mais il est vrai qu'être transgenre, c'est parfaitement raccord avec "l'esprit du temps". C'est le monde de "Capitalisme et Schizophrénie" prophétisé par Gilles Deleuze. Le capitalisme, c'est le dé-codage et la déterritorialisation permanents. Et le transgenre, justement, il prétend s'affranchir des codes du masculin et du féminin. Il se revendique non-binaire, voire neutre.

Why not ? Mais qu'est-ce que ça veut dire concrètement ? Bazarder l'opposition du masculin et du féminin, ça revient à faire la promotion de l'auto-érotisme et du narcissisme. Ça revient à bazarder le désir qui n'est plus appel de l'autre mais simple émotion onaniste, simple jeu d'intensités. La mythologie transgenre, c'est celle d'un monde sans sexe qui se voudrait libéré des affres du désir, des incertitudes de la passion. Un monde affranchi de l'interdit et de la mort.

Et peut-on d'ailleurs se revendiquer neutre, non binaire, affirmer que la sexualité relève du "c'est mon choix", de ma construction personnelle ? Je n'ai pas encore rencontré de parents m'annonçant qu'un "enfant" avait rejoint leur foyer mais qu'ils attendaient quelques années, le temps qu'il se décide, pour m'en faire connaître le sexe. 

En réalité, on est tous travaillés profondément par la "dualité", c'est le fondement de la culture humaine. J'admets volontiers que celle-ci ne relève pas de la simple anatomie, de la biologie, qui feraient implacablement notre destin. Mais symboliquement, on est tous hantés, tiraillés, par cette opposition du masculin et de féminin. Et j'ai d'ailleurs l'impression que le transgenre n'est pas du tout non-binaire comme il le prétend, il exacerbe même la dualité des sexes. Son rêve ultime, c'est d'être plus femme qu'une femme, ou plus homme qu'un homme. Mais sa souffrance occultée, c'est qu'il sait que, quoi qu'en lui en dise et quels que soient ses efforts, il n'y parviendra jamais. Le Réel est cruel : il ne sera jamais qu'une copie imparfaite ou une caricature. La toute-puissance a des limites : on ne ruse pas avec la Mort.

 * L'inceste. Impossible d'évaluer l'ampleur de la transgression du tabou. Ce qui est sûr, c'est que les "comportements de meute" adoptés interdisent de comprendre le comportement d'un père incestueux. On se contente de faire usage d'une psychologie grossière, celle du secret, du sale petit secret de famille, après la confession du quel on croit tout comprendre.


 Chaque homme est une énigme, pétri de contradictions. Je n'aime pas que l'on offre à l'assouvissement de mes petites haines la désignation d'un abominable salaud pour lequel aucune peine ne serait assez forte. On en vient à faire de l'amitié un délit, de la dénonciation, une attitude morale. Il y a dans la délation une manière de s'auto-sanctifier, de s'exonérer de sa haine, qui me révulse. Je l'avouerai même : si je découvrais qu'un ami est un criminel, je n'irais pas le dénoncer, c'est mon éthique !

J'ai surtout besoin de comprendre, que soit analysé un parcours de vie. Comment, pourquoi, un homme de Loi, un homme d'ordre (Olivier Duhamel), ni pédophile, ni homosexuel semble-t-il, a-t-il pu briser le tabou fondamental ? On ne peut pas non plus négliger le fait qu'il était beau-père et non père biologique : quel esprit de vengeance, notamment vis-à-vis du premier mari, pouvait, éventuellement, l'animer ? On ne le saura sans doute jamais puisque toute parole de sa part est maintenant inaudible. 

Peut-être qu'aujourd'hui beaucoup d'hommes ne supportent plus les contraintes de la vie en société, la répression exercée sur leurs impulsions. Freud a développé là-dessus dans "Malaise dans la civilisation" et dans son dialogue avec Einstein : "Pourquoi la guerre ?" Peut-être, en effet, que certains sont habités par un profond désir d'anarchie, d'autant plus fort qu'ils occupent un poste de pouvoir qui a réclamé, de leur part, de multiples renoncements. Ça leur donnerait le droit de devenir des criminels en toute impunité : c'est le fantasme du passage à l'acte gratuit, de la toute puissance absolue. J'ai ainsi été particulièrement impressionnée par des récits de guerres "ordinaires" (en ex-Yougoslavie, en Afghanistan, dans le Donbass) où les hommes redécouvrent tout à coup quelques "plaisirs" primaires : ceux de tuer, de voler, de violer, d'exercer un pouvoir sans limites. Ces plaisirs de la guerre, c'est peut-être ce qui hante certains d'entre nous, de plus en plus nombreux. C'est ce qu'ils veulent retrouver, éprouver, la prédation, la violence, dans un monde aujourd'hui éduqué à mort.

C'est sans doute effrayant mais il faut aussi que nous nous interrogions sur nous-mêmes, nous les bien-pensants. On se met à ériger des remparts de moralité mais on dégringole dans la pudibonderie. "Le sexe et l'effroi", écrivait Pascal Quignard.

Je suis consternée par ces étudiants effarouchés qui appellent à une répression impitoyable. On semble revenus au début du 20 ème siècle lorsque Freud avait fait scandale en invoquant la sexualité infantile.

On va supprimer la présomption de consentement en deçà de 15 ans. On fige ainsi l'enfance et le début de l'adolescence dans un grand bloc de pureté, atone et insensible. J'ai pourtant l'impression que, pour ce qui me concerne, il m'est arrivé d'être parfois plutôt bouillonnante à cette époque de ma vie.


 On envisage même de relever la majorité sexuelle (aujourd'hui fixée à 15 ans). Dans le même temps, certains réclament un abaissement de la majorité civile (18 ans). Ça pourrait donner lieu à des situations cocasses : devenir élu de la République sans que vous soit reconnu, en même temps, le discernement suffisant à choisir un partenaire sexuel.

Enfin, on voudrait que les "crimes sexuels" deviennent imprescriptibles, les apparentant ainsi aux crimes contre l'humanité. Du crime sexuel, en effet, on ne se remettrait jamais, il vous détruirait complétement. Sans doute, peut-être ... Mais est-ce qu'on n'a pas aussi souligné le rôle de la "résilience", ce facteur majeur de la construction de soi-même ? De multiples humains ont su revivre après être revenus des camps de la Mort.

Un post dont le propos n'est pas de choquer; il n'a pas d'autre ambition, à l'encontre des éructations générales, que de poser des questions. Bien sûr, je ne parle pas de la souffrance des victimes mais celle-ci m'apparaît, par nature, incommunicable.

Sur la transsexualité, je recommande deux bons films récents : 'Petite fille" de Sébastien Lifshitz et "Girl" de Lukas Dhont. Deux films qui ont le mérite d'ouvrir le débat. Peut-être qu'ils n'évoquent pas suffisamment la souffrance du transsexuel.

Sur le capitalisme et la prolifération des nouvelles identités, je recommande à nouveau Gilles Deleuze (et Félix Guattari) : "L'Anti-Oedipe - Capitalisme et Schizophrénie". A mes yeux, l'un des plus beaux livres de philosophie du 20 ème siècle (même si je n'en partage pas les exhortations). Bien sûr, on ne comprend pas tout mais on ne peut qu'être transportés par la qualité littéraire détonante du texte.

On peut compléter par Jonathan LITTELL (l'auteur des "Bienveillantes") : "Une vieille histoire" d'inspiration typiquement deleuzienne mais je n'ai pas été convaincue.

De Freud, je recommande l'incontournable : "Malaise dans la civilisation" et "Pourquoi la guerre" (avec Einstein).

Enfin, puisqu'on est dans la psychanalyse, je recommande la très bonne série : "En thérapie" de Nakache et Toledano, diffusée sur Arte. Ça montre bien que les problèmes psychiques ne se réduisent pas à ces histoires grossières de secrets de famille dont on se repaît aujourd'hui.

19 commentaires:

Alban Plessys a dit…

Bonjour Carmilla,
Merci pour ce billet.
Comme je l’avais déjà écrit sous un autre billet, je suis un homme qui n’a pas de problème d’identité, et encore moins de genre. La question ne se pose jamais lorsque je me rase devant la glace.
Pourtant, je trouve interpellant ce vrai problème qu’ont certaines personnes avec les hommes en général, et avec les pères en particulier. Cet homme qui a vocation désormais à s’excuser d’avoir été un patriarche harceleur et dominant, qui peut être exhorté même à ne plus exister, à ne plus pénétrer, tout en étant invité à être un père responsable, apte à « porter ses c… » ; une sorte de « bon père de famille » transparent. C’est répugnant ! Il en résulte chez certains un retrait du monde, il est vrai, et des pratiques onanistes qui peuvent aussi relever d’une certaine esthétique. J’en connais. Plus prosaïquement, là ou je travaille, les RH ont mis au point un protocole pour les rdv entre hommes et femmes, pour éviter, évidemment, le systémisme des agressions sexuelles.
Sur la suppression du consentement, je suis d’accord avec vous. Une anecdote encore pour révéler le potentiel d’absurdité de ce « progrès ». Mon pote F a rencontré ma petite sœur A alors qu’elle avait à peine 15 ans et lui 22. Cela n’a posé de problèmes à personne ; ils sont mariés depuis plus de 25 ans et ont deux beaux enfants. Ce flirt devenu histoire d’amour pourrait relever des assises criminelles aujourd’hui.
Tout cela est aussi très idéologique : Libé ne traite pas du tout ces sujets de la même façon que le Fig. Ca relève donc aussi de la nunucherie d’une gauche qui peine à exister.
D'accord aussi sur la nouvelle expression de la toute-puissance narcissique. Mais j'ai déjà fait trop long...
Bien à vous.
Alban

Nuages a dit…

Moi aussi, j'ai énormément apprécié la série "En thérapie" et j'ai vu tous les épisodes, souvent trois ou quatre à la suite, chaque soir. Les acteurs sont exceptionnels.

Richard a dit…

Bonsoir Carmilla !

Oui, -3 degrés c'est réellement de la rigolade surtout pour des québécois. Pendant que je lisais votre texte en ce samedi matin, il faisait -30 degrés sur le seuil de ma porte, ça c'est l'hiver, le vrai. Il faisait tellement froid que la fumée des cheminée avaient du mal à grimper dans l'air. Cette semaine lorsque j'ai lu que vous étiez en alerte, cela m'a fait rire. En alerte par -3 degrés...franchement !

Par contre votre texte revêt d'un sérieux corrosif.

Je le vois comme la faillite de la quête d'identité. On dirait une bande d'égarés qui ne savent plus quoi faire pour impressionner. La France récidive et se met aux scandales sexuels en ce début de la nouvelle année, parce que l'an dernier si je me rappelle bien, c'était une histoire de consentement. Vous manquez de nouvelles comme vous manquez de neige et de froid ? Ou bien, est-ce une nouvelle tradition ? Rien de tel qu'un bon petit scandale pour oublier la pandémie pendant que les gouvernements cherchent des vaccins qui n'arrivent pas. Ce qui ressemble à une diversion. Je pensais que la force de la France c'était l'imaginaire, du moins, c'est ce que je suis en train de constater en lisant : Les Mémoires du Cardinal de Retz.

Sur le fond cette histoire de (transgenres) m'apparaît futile, on ne veut plus être même rien, neutre, ni un homme, ni une femme, ce qui dépasse mon entendement d'être primitif. C'est vrai que je n'ai pas rencontré de transgenre entre le grand lac Memphrémagog et l'immense lac Noacocane.

Lorsqu'on n'est plus capable de s'assumer comme être humain, qu'on ne sait plus qui nous sommes, c'est que nous sommes prêts pour la capitulation, la soumission, voir l'esclavage, et j'ajouterais tous les genres d'esclavages. Ce qui promet lorsque nous embarquerons de plein pieds dans le transe-humanisme. Se sera une grande faillite difficile a repartir sous un autre nom.

Bonne nuit Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Alban,

Il faut en effet bien réfléchir : si on suit les demandes médiatiques en supprimant la présomption de consentement en deçà d'un certain âge et en relevant la majorité sexuelle, on risque d'encombrer les Assises. Que d'affaires effroyables en perspective! On infantilise curieusement les adolescents mais ça ne signifie pas que je dédouane automatiquement leurs agresseurs.

Quant à la transsexualité, bien sûr que personne n'est complétement à l'aise dans un modèle identitaire. Mais ça n'annule pas, me semble-t-il, la dualité masculin/féminin. On se construit toujours par rapport à un autre, c'est l'origine du désir. Sinon, on s'enferme dans une perspective onaniste.

Comme vous, je m'interroge enfin : pourquoi ces deux thématiques font-elles aujourd'hui la une de l'actualité ? On est devenus curieusement très libéraux concernant la transsexualité mais très répressifs concernant les relations sexuelles adultes/adolescents, enfants.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages,

La série "En thérapie" montre bien, en effet, tout la complexité des situations humaines. Elle n'enferme pas les patients dans un diagnostic (paranoïaque, névrosé etc...) mais dévoile toutes les ambiguïtés de la parole et du désir qui y affleure.

Ça donne lieu à beaucoup de jolis "retournements". Dans des propos communs, que dit-on en réalité, que cherche-t-on à exprimer ? C'est la grande ambiguïté humaine, on est à la fois sincères et menteurs.

Mais il faut aussi souligner qu'on a affaire, dans cette série, à un thérapeute "intelligent" qui sait intervenir et faire preuve d'empathie. Ce n'est pas toujours le cas.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Ce dont j'ai le plus la nostalgie en France, c'est d'un vrai froid avec de la vraie neige. C'est tellement beau ! Je suis très irritée quand j'entends tous ces gens se lamenter dès qu'il gèle un peu (ce qui est devenu exceptionnel en France).

C'est très curieux en effet. Les médias français ont fait de la transsexualité et de l'inceste les deux grandes thématiques de l'actualité de ce début d'année. Ça inonde les journaux télévisés et les maisons d'édition. On ressasse qu'il faut parler mais on ne s'avise pas de ce que l'on encourage la délation. Et puis, on somme la puissance publique d'intervenir sur ces questions. Il faut croire qu'en effet, on souhaite, de plus en plus, que l’État régente ce qui relève de la sphère privée. Ça a peut-être un lien avec la demande actuelle d'un État sanitaire omnipotent.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla !
Vous avez raison, oui c'est tellement beau la neige, le froid, parce que j'ai le privilège d'habiter un beau et grand pays, qui lorsqu'il s'habille en hiver devient encore plus beau. C'est comme si j'étais plongé dans des lignes pures très minimalistes, une couche de blanc d'épaisseur variable, qui s'accorde parfaitement bien avec le bleu du ciel, mais aussi avec la grisaille des nuages. L'impression de vastitude semble s'accroître sur une portion d'infinie sans limite que j'ai le plaisir de parcourir sur mes skis de fond. Quoi de mieux que de s'arrêter en plein milieu d'un champ d'une blancheur aveuglante, de respirer un air vif et froid, de savourer la véritable paix agrémenté d'un profond silence, de se sentir appartenir à un monde unique. Je me sens alors plus vivant en hiver qu'en été. Je suis né en hiver et l'hiver fait partie de ma personne, sans hiver, il me manquerait quelque chose. Tard l'automne j'attends la neige, impatient je guette le moindre premier flocon, redoute le moindre redoux et suis inconsolable lorsque le tout tourne à la pluie. L'hiver reste pour moi synonyme de neige. Faire du ski de fond hors sentier c'est renouer avec ce sentiment de flotter sur la neige, tracer sa propre piste, faire son chemin, franchir tous les obstacles, s'éloigner de la société, assumer une grande liberté, visiter les mystères des sous-bois, aller et revenir, construire sur de l'éphémère ; parce que c'est aussi cela la neige, quelque chose d'éphémère comme la vie. Manière de se sentir très vivant comme un besoin d'une plus grande soif d'espace. Oui, toujours plus d'espace, ce pays je le voudrais toujours plus grand, je le sens sur ma peau mais aussi dans l'intimité de mon pays intérieur. Je ne peux pas me réduire à une tanière, à un espace contrôlé, parce que pour effleurer le fond des choses, il faut parcourir beaucoup de distances. Autrement dit, les petites surfaces, ce n'est pas fait pour moi. L'hiver pour nous québécois, c'est comme un temps d'arrêt, une immense remise en question, comme le disait mon grand-père : le temps de tirer des plans. Je ne pense bien qu'assis devant ma fenêtre pour me gaver du spectacle de la neige qui tombe, ce qui est loin d'être une perte de temps, je dirais que c'est comme une régénérescence, sur le seuil d'une époque nouvelle où un besoin viscérale de penser autrement s'impose. Face aux mauvaises nouvelles, aux décevantes décisions, aux errances diverses, rien ne vaut une randonnée sur la neige. Respirer l'air froid vous stimule, vous remet les idées en place, et lorsque tu rentres tu es heureux de ta fatigue. Pour les humains de ma race, l'hiver c'est un grand nettoyage spirituel, oui, le renouveau recommence sous la neige. Un petit vent d'est se lève présentement. Le ciel se barbouille de nuages. Je sais, une dépression remonte la côte est. Nous aurons de la neige !
Bonne fin de journée Carmilla
Je voulais partager une partie de mon hiver avec vous !

Richard St-Laurent

Nuages a dit…

En Belgique, on a depuis peu une ministre de la Fonction publique et des entreprises publiques, Petra De Sutter, du parti écologiste flamand Groen, qui est une femme transgenre. On en a un peu parlé, à peine, ce n'était presque pas un événement.

https://www.rtl.be/info/magazine/c-est-pas-tous-les-jours-dimanche/petra-de-sutter-est-la-premiere-ministre-transgenre-en-europe-je-ne-veux-pas-etre-jugee-sur-cet-aspect-la--1249050.aspx

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Il y a effectivement une grande beauté des paysages de neige faite de mélancolie et d'exaltation. Avec de grands espaces vierges que vous évoquez si bien. Et puis aussi le plaisir du ski de fond ou du patinage sur glace. Deux plaisirs hélas quasi inconnus en France.

La "fraîcheur" est déjà terminée à Paris où on annonce même 15 ° pour le week-end. L'hiver, c'est déjà terminé, ça n'aura duré qu'une semaine. Durant tous ces derniers mois, on n'a eu que de la flotte, ce qui n'est vraiment pas drôle. Le froid sec et la neige, c'est tout de même infiniment plus agréable.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages,

Voilà qui est positif et peut contribuer à l'évolution des mentalités.
Je ne sais pas si c'est concevable en France. En Russie, absolument pas; en Ukraine, c'est moins inenvisageable; en Pologne, on peut rappeler qu'il y avait, il y a peu de temps, une députée transgenre.

Le plus étonnant : en Iran, les interventions chirurgicales de réassignation sexuelle sont parmi les plus nombreuses au monde et sont approuvées par les mollahs. C'est, à leurs yeux, la thérapie adéquate pour "soigner" l'homosexualité. Mais ça conduit aussi à de multiples drames individuels parce qu'on sait bien aujourd'hui que l'homosexualité et la transsexualité, ça n'a à peu près rien à voir.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla !
Le vent de l'est ne ment jamais, et encore une fois, je le savais hier en sortant sur le pas de ma porte, que les conditions météorologiques tourneraient au vinaigre. Il arrive discrètement, on ne le voit pas, on le sent, avec son humidité caractéristique qui perce nos vêtements, envahie nos murs, s'incruste dans nos planchers. Les habitants du coin savent déjà de quoi il en retourne. Même nos bâtiments deviennent difficiles à chauffer. Le temps devient comme suspendu sous la grisaille des lourds nuages qui s'accrochent aux collines et aux montagnes. La visibilité baisse. Le vent d'est augmente de vitesse accentuant tous les facteurs. C'est une période très désagréable. La neige arrive comme le vent. Des petits grains sous forme de grésil qui vous pince la peau du visage. Cela peut varier d'une minutes à l'autre entre la neige franche, ou bien, une pluie verglaçante. Le vent d'est en profite pour s'installer, s'accrocher au pays. Soudain le grésil cesse pour laisser place à la neige comme ce matin. Il en est tombé entre 10 et 15 centimètres au cours des dernières heures. On en attend encore une quantité semblable au cours de la journée qui commence. Vent d'est, paralysie totale, déjà que ça bouge pas fort avec la crise sanitaire, ce matin, seul les chasse-neige circulent. Les écoles sont fermées. Les rues sont vides. C'est la fête des camions et de la machinerie lourde. Nous célébrons le vent de l'est à notre manière, un café à la main, en roulant sur des routes glacées, dans l'attente de l'inexplicable.

Gilles Vigneault a très bien, parlé, raconté, et chanté l'hiver. C'est lui qui a écrit :

« Mon pays ce n'est pas un pays, c'est l'hiver »

« Dans ce pays de poudrerie mon père à fait bâtir maison. »

Le Québec pourrait s'appeler : HIVER, que ça ne changerait pas grand chose. Le vent d'est serait toujours un tourment. Entre la pluie et la neige, resterait le grésil, l'humidité dans nos murs comme dans nos corps, cette excitation avant la tempête, ressenti autant par les enfants que par les adultes, où l'on sent que nous allons vivre un moment unique encore une fois. Chaque tempête est unique, comme chaque vent d'est. La neige n'est jamais pareil.

Je reste et demeure encore un homme d'hiver.
Parce que, tout comme le père de Gilles Vigneault.
Mon arrière-grand-père a fait bâtir maison dans ce pays de poudrerie.

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent

N.B. Le café n'est jamais aussi savoureux qu'au cœur de la tempête.

Alban Plessys a dit…

Bonsoir Carmilla,
juste quelques mots sur vos commentaires sur la France.
Le ressenti climatique n'a pas été inventé récemment comme vous le dites, il est un indicateur depuis longtemps utilisé par ceux qui vivent et travaillent dehors. Chacun, ayant vécu au froid, sait qu'il vaut mieux sortir par une température de -20 sous anticyclone à 1030 et vent nul que par une température de -5 par vortex de Nord-Est avec 40km/h de vent. Ce qui a été le cas pendant qq jours en France, en Belgique, et ailleurs.
Paris ne connaît pas le ski de fond, ni la mare du Parc Monceau le patinage artistique, c'est vrai. Mais il est vrai aussi que la France est dans les 5 meilleures nations sur les spatules, derrière les Scandinaves et devant les Russes et les Ukrainiens. Et que dirent du biathlon (skating et tir)! E. Jacquelin vient d'être sacré champion de la poursuite, après la médaille d'argent au sprint de S. Desthieux, et ce n'est qu'un début! Plus de 100000 licenciés, des millions de pratiquants-loisir. A noter que le premier Canadien au classement de la coupe du monde est... je n'ose le dire...
Vous voulez avoir froid? Allez à Mouthe! Il y a fait - 22 la semaine dernière avec un ressenti à - 37. C'est à deux heures de train du 17ème arrondissement.
Voyez-vous, la représentation du réel rencontre toujours un problème quand on généralise comme vous le faites depuis des impressions d'étrangère.
Bonne soirée et continuation.
Alban

Richard a dit…

Bonsoir Carmilla !

Le vent de l'est a tourné le dos pour ne pas se mesurer au vent du nord qui règne en maître sur l'Amérique du Nord. On ne plaisante pas devant le vent du nord, surtout pas de la part du vent d'est qui peut bien se payer une bordée, ou encore, une petite tempête. Lorsque le vent du nord décide que cela a assez duré, peu importe les plaintes de l'est, du sud, ou de l'ouest, le Grand Nord met le poing sur la table pour signaler à tout le monde que c'est terminé. C'est ainsi que ce matin, nous nous sommes retrouvés sous un ciel bleu, devant une neige fraîche éclatante, le tout dans une étonnante beauté qui laisse que de l'étonnement. Il y a de quoi passer du gris très sombre à cette étonnante débauche de lumière qui colle les épaules au plancher à n'importe qui. Je crois même que l'hiver s'agenouille devant le vent du nord. De toute façon, ici nous savons tous qu'ils sont complices. Le Grand Nord, c'est le grand nettoyage. Il vous vide un ciel bloqué de nuages en moins d'une nuit sans trop d'efforts. Il égalise la neige laissant épart quelques bancs de neige. Assèche le fond de l'air, chasse les restants d'humidité, immobilise le pays et nos esprits dans sa plus intégrale beauté. Ne demande jamais son reste en tournant le dos dans son indifférence non feinte. La Grand Nord avec sa puissance, c'est la vérité pure. Il le sait. Il n'a pas besoin de mentir. Il déborde de confiance en lui-même, lorsqu'au milieu du jour, il diminue l'intensité de sa vélocité. Il imagine le vent d'est en train de jouer ses dernières partitions entre la Gaspésie et Terre-Neuve, alors qu'il ira se perde en Atlantique Nord secouer quelques bateaux aventurés entre des vagues dévastatrices. Le Grand Nord recouvrera le Québec d'un manteau de froid comme une grande paix, ce qui nous forcera à ralentir en toute humilité. C'est encore lui, que l'été venu, en grande canicule, tapera sur son épaule pour qu'il modère ses transports apportant une petite fraîcheur tant souhaité. Il sait qu'il est l'équilibre de tout ce système météorologique complexe, mais il n'en fait pas tout un plat. Après une bonne journée de travail, il tourne le dos, pour se retrouver avec lui-même face au nord. On le croit toujours disparu lorsqu'il ne souffle pas, mais je sais qu'il demeure tapi quelque part autour du pôle. Là, où il se retrouve avec lui-même comme tous les solitaires du monde au cœur de sa solitude parce qu'il comprend les sautes d'humeur du vent d'est, les effronteries du vent sud, et les inconstances du vent de l'ouest. Il attendra la prochaine dispute entre tous les vents de la terre. Depuis le temps qu'il est en fonction plus rien ne l'étonne. Mais, lorsqu'il souffle, je sais que j'ai un allié stable, puissant, et sur lequel je puis compter. C'est ainsi que les tempêtes s'épuisent face au Grand Nord !

Bonne nuit Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Alban,

C'est vrai que je suis à peu près totalement incompétente en météorologie.

Et je reconnais que la France a produit de grands champions dans les "sports d'hiver" (notamment en ski alpin et en patinage sur glace).

Mais je ne suis pas sûre que ce soit lié à son climat froid. J'ai commencé ma carrière professionnelle à Grenoble et j'avoue que, de la neige, je n'en ai pas beaucoup vu sauf à bonne altitude. J'ai même trouvé les stations assez laides avec leur surpeuplement, leur architecture déprimante et leur neige artificielle continuellement arrosée par des canons.

Je sais que certaines régions du Jura se donnent le titre de petite Sibérie mais je suis quand même sceptique. Du froid, de la neige, j'avoue n'en avoir connu que très épisodiquement en France alors qu'en Europe du Nord, les fleuves et la mer continuent de geler régulièrement (même si l'hiver est de plus en plus tardif et de plus en plus court). Mais c'est vrai que ce sont peut-être des "impressions d'étrangère" avec leur pointe de nationalisme bêta.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard pour vos descriptions de l'hiver au Canada et dans le Grand Nord. Je crois d'ailleurs que l'hiver, chez vous, c'est beaucoup plus âpre qu'en Russie occidentale et davantage proche de la Sibérie.

Je n'ai, à vrai dire, rien à ajouter si ce n'est que cela réveille en moi de multiples nostalgies. Comme les Canadiens, les Européens du Nord se vivent comme des gens d'hiver. C'est une saison davantage en harmonie avec notre psychologie. Quant à l'été et la chaleur, on ne les aime pas beaucoup.

Enfin, je connais la chanson de Gilles Vigneault.

Bien à vous,

Carmilla

Alban Plessys a dit…

Bonsoir,
soyons précis, j'utilise le terme d'"étrangère" en miroir à des textes, les vôtres, qui expriment systématiquement une profonde distance vis-à-vis des identités françaises. Il ne s'agit évidemment pas de nationalisme (dont je me fous).
C'est juste que la capacité qu'ils expriment à représenter ces France que vous ne connaissez pas m'apparaît extravagante car je ne les comprends pas. Et sur ce point, vous avez raison, ces billets ressemblent aux ressentis de Mme Huston.
Mais pourquoi pas ?! C'est drôle à lire, cette France des étrangers.
Pour le reste, il n'y a pas de sujet, si ce n'est qu'on ne sait exprimer les choses clairement que depuis les quelques mètres qui nous relient à notre naissance et depuis aussi la distance qui nous en a éloigné.
Très sincèrement.
Bien à vous.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Alban,

Ça ne me gêne nullement d'être qualifiée d'étrangère. C'est d'ailleurs vrai du moins pour ce qui est de mon identité culturelle. Et il y a beaucoup de domaines aux quels je ne comprends sans doute à peu près rien : la chanson française, la cuisine, les relations homme-femme.

Mais être à côté me donne aussi un sentiment de liberté critique. J'aime bien verser un peu de poil à gratter même si je sais que ça irrite parce que toutes les nations sont chatouilleuses.

Je veux bien admettre que ce que j'écris est faux et de parti pris. Qu'importe ! J'en retiens que cela vous fait du moins rire. Je trouve cela positif, c'est l'une des ambitions de mon blog.

Mais le rire est souvent défensif et je ne suis pas sûre que la naissance garantisse une plus grande vérité. La culture française, elle est faite pour moi d'un mélange d'adhésion et de regard critique.

Bien à vous,

Carmilla

dominique a dit…

Bonjour Carmilla!

J'ai vu les films dont vous parlez et j'ai un ressenti très personnel sur ces œuvres. D'abord dans " Petite fille" j'ai été choquée que la psychiatre ne cherche pas à amener l'enfant ( Sasha donc) à s'interroger sur son symptôme de vouloir devenir une fille. Car pour moi, c'est un symptôme! pas un désir qu'il faudra automatiquement réaliser à coup de traitements hormonaux et de chirurgie le moment venu! Ces traitements sont néfastes au corps et c'est une mutilation. La situation n'est pas facile, certes, puisque toute la famille de Sasha semble avoir accepté de jouer cette comédie. Je ne trouve pas que le film ouvre le débat.
Quant à Thérapie, de mon point de vue, les patients se fichent de lui, les femmes en particulier. Il ne contrôle rien là dedans, et c'est de sa faute. Pourquoi donc appelle-t-il les patients par leur prénom? L'adolescente je veux bien, mais les autres sont tous trentenaires ... il leur permet d'utiliser ses toilettes, de téléphoner en séance, les femmes piétinent le canapé avec leur bottes, les patients décident eux-mêmes de partir quand ça leur chante! Non, je me trompe, il appelle parfois Adel , monsieur! comme quoi les forces de l'ordre font encore leur petit effet...
Bah, je suis d'une autre génération, que voulez-vous...
Bonne journée à vous
Dominique.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Dominique,

En effet, il me semble que n'est pas interrogé le désir de Sasha et qu'on lui apporte plutôt un soutien immédiat. Ça ne m'apparaît pas à ce point évident parce que l'attitude très bienveillante des parents peut aussi conduire à se demander si ce n'est pas leur désir à eux que Sacha devienne une fille. C'est un peu la même chose dans le film "Girl". C'est finalement très difficile de trouver la bonne attitude sachant que trop de complaisance peut être aussi nuisible que la répression.

Quant à "Thérapie", les patients sont effectivement un peu agressifs avec le thérapeute. Mais je trouve qu'il sait bien "retourner" les situations en pointant justement les raisons de leur attitude. Je trouve que les dialogues sont intelligents parce qu'ils montrent bien que tous nos propos sont "orientés" et pleins d'ambiguïté. Toutes nos paroles, toutes nos attitudes et postures, même anodines en apparence, ont un "sens" à déchiffrer.

Bien à vous,

Carmilla