samedi 15 avril 2023

SUOMI

 

Je vous écris aujourd'hui du pays "le plus heureux du monde" . 

Il s'agit de la Finlande (Suomi en finnois) qui figure en bonne tête du classement (depuis 5 années consécutives, selon une étude de l'ONU régulièrement publiée) devant le Danemark, l'Islande, la Suisse, les Pays-Bas. Il est à noter que la France n'occupe que la 21ème place tandis que le Canada est 13ème et la Belgique 17ème. 

C'est évidemment un peu bizarre ce palmarès et on peut volontiers s'en gausser. Parce qu'il faut bien le reconnaître : les pays les plus heureux du monde, personne ne s'y précipite pour les visiter. Il n'y a vraiment pas foule là-bas, on n'y croise aucune cohorte de touristes. C'est presque comme s'ils n'intéressaient pas. Pour ses vacances, on rêve de s'entasser sur une plage de la Méditerranée ou de se bousculer dans un musée florentin mais certainement pas de déambuler dans les rues d'Helsinki ou de Reykjavik. 

Les pays classés heureux par l'ONU semblent, en fait, être surtout des pays calmes et paisibles.  

Pas de villes monstrueuses, un environnement naturel vaste et préservé. Partout, des choses bien propres et bien rangées aux sens physique et moral des qualificatifs (un esprit sain dans un corps sain). Tout marche, tout fonctionne imperturbablement. Et puis, une mentalité écolo, faite de spontanéité et de naturel, teintée, en sus, de rigueur et d'austérité protestante. 

On est évidemment bien loin de l'exubérance et du foutoir slave et latin. Mais ça peut paraître ennuyeux et conformiste, cet hygiénisme, cette promotion du bien-être, cet appel à profiter des belles choses avec de belles personnes. C'est le fameux Hygge danois qui rencontre de plus en plus d'adeptes. En fait, l'angélisme, le sucre, ça devient vite écœurant et puis ça donne l'impression d'une trop grande docilité envers les Pouvoirs, d'une espèce de domestication généralisée des individus. 

Quoi qu'il en soit, la Finlande est un pays que j'aime bien. C'est la troisième fois que je m'y rends. Mais évidemment pas parce que ce serait le pays du bonheur. Le bonheur, ça n'intéresse personne et surtout pas moi. D'ailleurs, le côté involontaire de donneur de leçons de ces pays m'irrite presque, tant je le trouve culpabilisant. En fait, seul le malheur est intéressant.

Et de malheur, la Finlande n'en a pas manqué. Elle m'évoque un peu l'Ukraine, déchirée, comme elle, par l'histoire. La Finlande a, ainsi, été soumise a deux dominations successives: la Suède jusqu'en 1809 puis la Russie jusqu'en 1917. 

Et puis, elle a vécu deux grands drames qui ont forgé la conscience nationale: 

- la guerre civile de 1917, celle des Blancs contre les Rouges soutenus par les Soviétiques, qui s'est achevée par de terribles massacres; 

- puis l'héroïque "guerre d'hiver" de 1939-1940 contre l'URSS. 


De cette cohabitation avec des occupants, la Finlande a conservé un fort biculturalisme. Pas en provenance de Russie qui semble n'avoir laissé que de mauvais souvenirs et dont la pratique de la langue et même l'influence culturelle semblent s'être complétement effacées. 


Mais de la Suède, dont la langue est, aux côtés du finnois, la langue officielle du pays. Etonnant, quand on considère que les Suédois se sont politiquement retirés depuis plus d'un siècle. Et étonnant aussi quand on sait que les Finlandais ont longtemps entretenu un complexe d'infériorité vis-à-vis des Suédois, se percevant, par rapport à eux, comme des ploucs, des paysans incultes. Ca m'évoque, bien sûr, les Ukrainiens, confrontés aux Polonais puis aux Russes.  


Quoi qu'il en soit, le suédois demeure largement parlé à Helsinki. Ce qui ne m'avance guère pour communiquer mais, comme dans tous les pays scandinaves ou nordiques, tout le monde parle un excellent anglais. 


J'en profite pour jouer à "la prof" en précisant que la Finlande, c'est un pays nordique mais ce n'est pas un pays scandinave (même s'il y une forte imprégnation culturelle). Tout simplement parce qu'on y parle le finnois (et non le finlandais comme on dit souvent): une langue dite finno-ougrienne apparentée à l'estonien (dont elle est très proche) et au hongrois (mais Finlandais et Hongrois n'arrivent pas à se comprendre directement). Inutile de dire que je suis complétement larguée, que je n'accroche vraiment rien de rien au finnois. Je n'arrive même pas à me souvenir du nom de la rue de mon hôtel.


Alors, qu'est-ce que je viens fiche en Finlande ? Je me vois mal partir explorer ses immenses forêts et ses lacs innombrables. Je suis trop urbaine pour ça, la Nature, ça m'ennuie vite. Et puis, il y a plein de sales bêtes dont les pires ne sont pas les ours et les loups. Je veux simplement parler des nuages de moustiques et de moucherons, durant la période d'été, dont je conserve de cuisants souvenirs et qui m'ont, par le passé, rendue folle d'énervement.


D'abord, j'adore Helsinki. C'est une ville à taille humaine, modeste et sans touristes. Y faire des emplettes, c'est formidable. Pas seulement sur les marchés où on trouve plein de magnifiques produits qui me conviennent (des poissons notamment) mais dans les magasins de fringues et de design (le fameux design finlandais).


Mais je m'intéresse aussi un peu à l'architecture. Il faut ainsi d'abord savoir que le plan général de la ville d'Helsinki, son architecture globale, a été conçu et dessiné, durant la première moitié du 19ème siècle, par un seul homme: l'architecte prussien Carl Ludvig Engel. Il y a consacré 25 années de sa vie (de 1816 à 1840) dans un lieu qui était alors totalement hostile, épouvantable: rien que des rochers informes et des températures polaires 8 mois sur 12. Concevoir tout seul une capitale, en si peu de temps, je trouve ça fascinant, prométhéen. Impossible d'imaginer ça aujourd'hui.


Et cette préoccupation des Finlandais pour l'architecture, elle s'est perpétuée jusqu'à maintenant. Helsinki est d'abord devenue l'une des capitales européennes de l'Art Nouveau et de l'Art Déco. L'Art Nouveau, on s'est mis à considérer, dans la seconde moitié du 20 siècle, que c'était kitsch et de mauvais goût au point qu'à Paris, on a vandalisé plein de ses bâtiments majeurs. Ca revient en grâce aujourd'hui de même que l'Art déco. Personnellement, j'adore.


Et aujourd'hui même, à Helsinki, il y a plein de bâtiments iconiques, à l'architecture contemporaine renversante. Des Beaubourg ou des canopées des Halles ou des grandes Pyramides à foison.



Enfin quand j'ai commencé à m'intéresser à la Finlande, j'ai vite compris que sa façade lisse et ripolinée n'était qu'un artifice.


J'ai d'abord été fascinée par ses plus grands peintres : Akseli Gallen-Kallela (1865-1931) et Hugo Simberg (1873-1917). J'ajoute Helen Schjerfbeck (1862-1946). Tous les Finlandais se reconnaissent en eux mais on ne peut pas dire qu'ils respirent la sérénité.


Et que dire de sa littérature contemporaine, pas seulement Paasilinna dont on connaît tous la dinguerie ? Et son cinéma avec Kaurismäki qui promeut la déglingue généralisée.


Il en est des peuples comme des individus. Le calme trompeur à la surface des eaux dissimule les abîmes des tempêtes intérieures. 


Tableaux d'Akseli Gallen-Kallela, Hugo Simberg, Helen Schjerfbeck, Otto Mäkillä. Les 2 premières images sont les 2 tableaux les plus célèbres de Finlande. L'antépénultième image est une photographie de mon hôtel, le GLO-Hotel-Art. Le bâtiment est Art Nouveau, à l'extérieur et à l'intérieur. Est-ce que ça ne ressemble pas à une résidence de vampire ?

Je n'ai découvert qu'assez récemment la littérature du Nord. Elle m'a, globalement, enthousiasmée. Voilà les auteurs qui m'ont "remuée" concernant la Finlande :

 - Arto PAASILINNA : évidemment "Le lièvre de Vatanen" et le "Cantique de l'Apocalypse joyeuse".  Tout est bon chez Paasilinna mais, peut-être, un peu répétitif.

- Sofi OKSANEN : elle a conquis une célébrité internationale avec "Purge" puis "Les vaches de Staline". Sa mère est estonienne et elle connaît donc bien le système soviétique et ses crimes. "Purge", c'est formidable. J'ai, en revanche, été plutôt déçue par son dernier livre, "Le parc à chiens", dans le quel elle parle longuement de l'Ukraine.

- Laura LINSTEDT : "Oneiron" et "Mon amie Natalia". "Oneiron", j'ai trouvé ça formidable, impressionnant. Laura Lindstedt est férue de psychanalyse mais manie celle-ci avec intelligence et subtilité.

- Monika FAGERHOLM: "Qui a tué Bambi". Dans le quartier résidentiel cossu d'une ville finlandaise, les zones d'ombre qui entourent un crime. Une auteur célèbre (qui écrit en suédois). Elle s'attache à décrire l'envers du décor: comment la vie heureuse repose souvent sur un grand silence entretenu d'un commun accord.

- Rosa LIKSOM : "Compartiment n°6". Ce livre a inspiré un bon film (avec le même titre) de Juho Kuosmanen.

- Katja KETTU : "Le papillon de nuit"; Un ouvrage sidérant qui évoque deux époques (l937 et 2015) et deux pays (la Finlande et la Russie et notamment l'atroce réalité des camps de Staline).

- Kjell WESTÖ : "Un mirage finlandais". Les années de l'entre-deux guerres avec les fantômes de la guerre civile.

Je précise, enfin, que je ne posterai pas la semaine prochaine (mais on peut toujours m'écrire). Come-back le 29 avril.

28 commentaires:

Richard a dit…

Bonjour Carmilla
Vous aimez bien ce pays pour y retourner, mais seul le malheur est intéressant. Les pays nordiques, et j’inclus le Québec et le Canada, à l’image des pays scandinaves, y compris la Finlande, ne donnent pas de leçon, peut-être que nous disposons d’un certain exemple. Nous pouvons être qualifié de pays qui fonctionnent. Ceci revient à notre nordicité. Dans le nord, sous nos latitudes, il faut impérativement que ça fonctionne. Lorsque la neige tombe il faut déblayer et lorsque le verglas nous assommes il faut se relever. Nous ne pouvons pas nous permettre d’être médiocres. Qui plus est, se sont des pays qui se sont donnés des filets sociaux avant tout le monde, ils ont été des précurseurs dans ce domaine. Nous soignons autant notre état de droit que notre démocratie.

1,300 kilomètres de frontières séparent La Finlande de la Russie, alors pourquoi ça fonctionne en Finlande, alors que ça cafouille en Russie? La Finlande ne menace pas la Russie, mais la Russie menace la Finlande. Poutine l’a clairement exprimé alors que la Finlande a demandé d’être accepté dans L’OTAN! Et voilà que c’est fait. Pourquoi on accepte la Finlande dans l’OTAN, et qu’on ne donne pas le même droit de passage à Ukraine? L’Ours de Moscou devrait y penser deux fois avant de sauter à la gorge de La Finlande.

Je comprends que ces pays nordiques ont choisi l’anglais pour communiquer internationalement, c’est une question pratique, qui va apprendre le finnois parlé par cinq millions d’individus? C’est la même situation pour les Suédois, les Norvégiens, les Danois, et même les Hollandais. Se sont des pays qui savent où se situent leurs intérêts. Cet esprit pratique dépasse largement le protestantisme.

Je vous recommande de ne pas venir au Québec, parce que nous aussi nous vivons avec les moustiques. Me semble de vous voir nager dans ma rivière, poursuivit par un essaim d’une multitude de moustiques comme les taons à chevreuil vers la fin de juin, qui ne piquent pas mais arrache la peau! Sans oublier les barbotes s’apprêtant à vous sucer les orteils, alors qu’au large croise un castor rieur. La nordicité c’est aussi cela. N’oubliez pas que les poissons que vous dégustez ont avalé beaucoup de moustiques. Lorsque je regarde des photos de La Finlande, je me reconnais avec tous ces lacs, tous ces marécages qui ressemblent à nos muskegs.

Est-ce vraiment le cas? « Il en est des peuples comme des individus. Le calme trompeur à la surface des eaux dissimule les abîmes des tempêtes intérieures. » Je n’en suis pas si sûr. Les Finlandais sont peut-être trop calmes pour les tempêtes intérieures. Pour avoir visionné des films sur leurs entraînements militaires, ils semblent rudement bien équilibrés.  Je plains celui qui va aller leur piler sur les pieds. C’est du sérieux, et tout le monde participe dans le pays.

C’est vrai que la littérature du nord est intéressante. Je ne m’en lasse jamais. Les habitants de ces pays, ont beaucoup de temps pour lire, surtout à l’époque des grandes noirceurs. 

Bon séjour en Finlande Carmilla, profitez-en bien!

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

A vrai dire, la campagne autour d'Helsinki est, en ce moment, assez décevante parce que le sol est tout gris avec une herbe brûlée par la neige. Le printemps n'a pas encore débuté et il fait même assez froid avec de nombreuses plaques de neige subsistantes. Et j'ai aussi remarqué qu'en dehors des mouettes et des goëlands, il n'y avait, pour le moment, guère d'oiseaux.

S'agissant des moustiques, la Suède les avait éradiqués en partie mais les moucherons s'étaient alors multipliés. Il fallait bien se protéger, dans les forêts, pour ne pas se sentir dévorés. Mais c'est bien sûr encore pire dans la Carélie russe.

Il vaut mieux, en effet, qu'un pays soit bien organisé quand il est très froid. Mais la Russie, où la pagaille est continuelle, s'en sort quand même.

Je donne peut-être l'impression de critiquer les gens du Nord mais ce n'est pas vraiment sérieux. C'est quand même agréable un pays calme, tranquille, où tout le monde est poli, courtois, où personne ne vous agresse, où on trouve toujours solution à un problème, où il n'y a ni foules, ni embouteillages, ni surpeuplement.

Mais il ne faut pas oublier que ces pays nordiques sont les champions du roman policier le plus noir et le plus effrayant.

Bien à vous,

Carmilla
.

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Lorsque l’hiver agonise, avec ses taches de neige sale, ses champs gris ou bruns, dans tous les pays nordiques, il y a une période, un entre-deux, où tout semble paralysé. L’impression que rien ne bougera plus s’installe à demeure. Éloigné de l’idée que notre imagination se fabrique en cette période d’une merveilleuse saison douce et agréable, une déception nous pèse où nous jardinons le doute de ne pas avoir de printemps. Le froid revient, l’humidité persiste, transperce tout, la boue s’installe dans les champs, les rivières débordent, rien ne va plus. C’est que nous avons vécu au cours de la semaine qui a suivit le verglas. Cependant, dans la dernière semaine, le soleil a gagné en puissance, la terre s’assèche, nous avons même connu des maximums de 25 degrés, mais les nuits demeurent froides, proche du point de congélation. Vendredi dernier, je suis allé faire une randonnée en forêt, à l’ombre des grands arbres, pins, sapins, épinettes, des grandes plaques de neige dormaient. Je me devais de choisir des endroits un peu plus ferme pour progresser. Ce fut une marche difficile. Lorsque je suis sorti du bois, mes pantalons étaient mouillés jusqu’aux genoux.

Aujourd’hui, je me suis rendu sur la plateau. J’étais assis sur une grosse roche, lorsque j’ai levé le regard, j’ai remarqué que les bourgeons d’érables étaient en train de percer. Il y a de quoi respirer un grand coup.

Il faut se souvenir que Helsinki, de même que Stockholm, et Oslo, avoisinent le 60e de latitude. Ce qui est très nordique. Au Canada se serait dans la région Whitehorse au Yukon, et au Québec dans la Péninsule d’Ungava. Si on cultive dans le sud des pays scandinaves, ici c’est le grand nord, même à certain endroit il n’y a même plus d’arbre. Vous avez entièrement raison Carmilla, lorsque vous évoquez que le sud du Québec est plus froid que l’Europe sous les mêmes latitudes. Le 45e passe juste au nord de Bordeaux, ce qui est la même situation pour Sherbrooke; mais je suis sûr qu’on cultive plus de variétés, autant légumes que fruits, qu’on n’arriverait pas à faire pousser dans ma région. D’autre part les oiseaux sont arrivés depuis la fin de mars, sauf pour les hirondelles et les colibris.

De toute façon vous êtes entrée dans les (grandes clartés). Et ça va progresser rapidement jusqu’au solstice d’été. La lumière c’est une puissante force de la nature.

Vous avez entièrement raison, le nord, c’est agréable, beaucoup d’espace et comme vous dites, pas de foule, pas d’embouteillage, ni de surpeuplement, et finalement une liberté qui ne ressemble à rien de ce qu’on peut voir ailleurs. Dans ce nord, je me sens très privilégier! Comment ne pas aimer tous ces grands espaces?

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Depuis mon arrivée en milieu de semaine dernière, j'ai eu droit à 5, 6° dans la journée et 0, - 1° la nuit. Mais ça devrait se réchauffer cette semaine en passant la barre des dix degrés.

Mais je crois que l'hiver dans les pays nordiques est plus tardif (novembre, décembre sont encore assez doux) qu'au Québec mais se prolonge davantage.

Et puis Helsinki est sensiblement plus froid que Stockholm et Oslo et même Reykjavik (réchauffé par le Gulf Stream).

Ce qui est sûr, c'est que la Finlande n'est pas un grand pays agricole. Même l'élevage, je doute que ce soit possible. Dans les restaurants, on propose couramment toutefois de la viande de renne et même d'ours (c'est bon). Et puis le saumon et les harengs sont vraiment délicieux.

Quant à la durée du jour, elle est en effet déjà sensiblement plus longue qu'à Paris.

Et s'agissant enfin de la vie quotidienne, c'est vrai qu'elle est d'un calme, d'une sécurité et d'une sérénité impressionnants. Je pense que ça repose surtout sur une grande discipline collective.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Comment ne pas reconnaître ce peuple de seulement 5.5 millions d’habitants, imaginatif, industrieux, travailleur? Je me souviens qu’il y a longtemps, j’ai porté des bottes de sécurité pour bûcher, que le Québec importait de la Finlande fabriqué par Nokia, qui faisait à l’époque dans les pâtes à papier et qui fabriquait des équipements de protections pour le bûcherons. Jamais, je n’ai porté d’aussi bonnes bottes, qui étaient légères, mais très robustes. Je regrette qu’elles ne soient plus importées au Québec. Mais Nokia, ne s’est pas arrêté au domaine forestier. C’est beaucoup plus que cela. On se souviendra qu’au environ 2010, ils dominaient le domaine des téléphones portables. Ce qui est intéressant chez les Finlandais, se sont leurs capacités à changer, à s’adapter, et à se diriger dans des domaines où on les attends pas. Ils sont dans la métamorphose continuellement. Le changement, il n’y a que cela de vrai. Ils ont bien compris ce concept.

Ce qui est étrange, c’est leur discipline, qui ne semble pas imposée, lorsqu’on les écoute parler, ils n’ont pas l’air de personne sous la contrainte. Cela semble tout à fait naturel. Dans tous les cas, l’ours russe à côté, cela n’a pas l’air des énerver. Ils émanent d’eux, un genre de confiance que je ne retrouve pas ailleurs, une confiance en eux-mêmes qui leur est propre. C’est une belle particularité. Il fallait posséder cette belle confiance, lorsqu’ils ont résisté aux russes au début de l’hiver 1939.

Je constate que vous vous nourrissez bien, du renne, de l’ours, du saumon et du hareng. Ce qui a tout pour vous plaire. C’est une autre particularité des pays nordiques, une nourriture simple et savoureuse.

Si je vous comprend bien, c’est encore le printemps à ses débuts qui n’a pas encore décollé vers des températures plus douces. Je suis surpris que Helsinki soit plus froide que Stockholm et Oslo, moi qui mettait tout cela dans le même paquet! C’est quand même étonnant d’avoir bâti les villes aussi haut dans le nord.

Hier ici, c’était les bourgeons d’érables qui éclataient. Ce matin, pendant que je suis en train d’écrire ce texte, je remarque que les trembles sur l’autre rive de la rivière sont en train de verdirent. Même les mélèzes ont changé de teinte. Mais pour l’heure, après avoir connu une semaine presque estivale, nous allons retourner à des températures plus modestes + 10 le jour et près du point de congélation la nuit, le tout sous la pluie et la grisaille. Mais rien ne sert de se désoler, nous venons de vivre une très belle semaine. Cette lumière intensive nous a procuré un grand réconfort. Je remarque que les saules aussi font leur représentation verdoyante. Changement agréable que nous procure cette lumière. Personnellement, je sens cette énergie qui bouillonne en moi.

J’espère que nous aurons droit à quelques photos lors de votre retour.
Cela serait grandement apprécié!

Bonne fin de journée
Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Il faut cependant préciser que le décollage économique de la Finlande a été assez tardif. Dans les années 60-70, il y a ainsi eu une émigration massive (+ de 800 000 personnes soit une proportion considérable de la population) de Finlandais vers la Suède. Cela en raison du chômage et de la pauvreté du pays.

Le début du miracle s'est produit au début des années 90 quand le pays a fait le choix de se tourner vers les technologies de l'information. Ce fut une grande réussite. On connaît tous Nokia bien sûr qui, en 2005, assurait à lui seul environ le 1/4 de la richesse du pays. Nokia s'est écroulé mais l'élan a persisté avec de multiples entreprises dans le domaine des TIC. La Finlande est aujourd'hui l'un des pays les plus informatisés et connectés au monde. Il semble en outre que son système d'éducation soit excellent.

Les Finlandais sont fiers aujourd'hui de leurs réussite car ils avaient un peu le sentiment d'être considérés comme des paysans par les Danois et les Suédois. Aujourd'hui, ils n'ont rien à leur envier. Quant aux Russes, ils savent bien que le pays demeure misérable comparativement à eux.

On peut en effet se demander pourquoi des hommes se sont autrefois installés dans des pays aussi inhospitaliers. Surtout que les hivers étaient bien pires qu'aujourd'hui. Il ne faut pas oublier néanmoins que jusqu'à la fin du 18 ème siècle, Danois et Suédois terrorisaient l'Europe.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonsoir Carmilla

Pourquoi Nokia s’est écroulé?

J’en ai entendu parlé un peu, mais je ne suis pas arrivé à comprendre, peut-être que vous savez?

Merci Carmilla et bonne nuit

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Nokia ne s'est pas complétement écroulé mais, depuis 2013, il ne fabrique plus aucun téléphone portable. Il a été dépassé par la révolution du smartphone inaugurée par Apple et poursuivie et amplifiée par les Coréens et les Chinois.

Nokia s'est aujourd'hui reconverti dans la conception des grands réseaux de téléphonie. Ils ont notamment pris le contrôle, il y a quelques années, de la firme française Alcatel-Lucent. Ils sont donc toujours bien en vie mais c'est à peu près tout ce que j'en sais.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Merci Carmilla

Nokia ce n’est pas juste les télécommunications, c’est aussi les pâtes et papiers, le sciage de long, le bois d’œuvre, pour ce que j’en sais, et en fin de compte c’est une agglomération de compagnies. J’ai appris qu’elle avait commencé ses activités au XIXe siècle. Ce qui me rappelle la compagnie Husqvarna en Suède qui avait vu le jour au XVIIe siècle et qui produisait à l’époque des mousquets. On peut comprendre que c’était à l’époque des guerres qu’entretenait la Suède. Comme c’est étrange, tout se croise, le besoin créé l’outil. Aujourd’hui, Husqvarna se sont les champions pour la fabrication des scies à chaîne d’excellente qualité. Ce qui me fascine autant pour la Finlande, que la Suède ou la Norvège, c’est cette recherche dans la qualité d’un produit qu’ils mettent en marché. Certes on paie le prix, c’est toujours plus cher, mais en retour vous avez un produit fiable. Tabler sur la qualité, c’est cela à mes yeux une véritable économie basée sur la réputation. Un bon outil cela se paie.

J’ai trouvé intéressante la saga des téléphones portables, surtout celle de Nokia. Ce fut surprenant de les voir dans le peloton de tête pendant quelques temps, mais ce fut de courte duré. Un si petit pays jouer dans la cour des grands! De ma part, c’est étrange, de m’intéresser au cheminement économique des portables, alors que je n’en n’ai jamais possédé! Sans oublier le côté sociologique de l’affaire, cette espèce d’addiction. Ce qui me fascine ce n’est pas le téléphone portable, ce n’est pas sa technologie, mais l’addiction qu’il provoque. Je sais, dans ce domaine je suis complètement nul, mais je n’éprouve nul manque. Et puis un jour, peut-être qu’on greffera le téléphone au cerveau? Les humains, auront ainsi, les mains libres, mais le cerveau encombré. Je tiens cependant à vous rassurer, mon cerveau est tellement encombré qu’il n’y a pas de place pour un téléphone. Je sais...c’est mon côté moqueur!

Une autre domaine qui me fascine, c’est l’importance de la pratique des sports dans les pays scandinaves, et surtout en Finlande. Je dois reconnaître qu’au niveau du hockey sur glace, les finlandais et les finlandaises nous en font voir de toutes les couleurs. Retenons toujours qu’ils ne sont que cinq millions d’habitants. Ils sont aussi reconnus pour leur athlétisme. Le sport est un domaine aussi sérieux que le travail.

J’espère que vous passez du bon temps et que vous faites de belles découvertes. Dans notre époque de super efficacité, cela réconforte de pouvoir flâner.

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Il existe un proverbe slave: "Les choses chères sont les choses bon marché et les choses bon marché sont les choses chères". J'essaie le plus souvent d'appliquer ça.

J'aimerais pouvoir me passer d'un smartphone mais je crois que c'est en passe de devenir impossible. Dans la vie professionnelle, on est est désormais censés pouvoir être joignables à tout moment et en tout lieu. Et puis, on est inondés de mails (j'en reçois entre 100 et 200 chaque jour). Si on relâche son attention, on est tout de suite noyé.

Et puis, dans la vie pratique, ça devient compliqué sans smartphone. Simple exemple: on ne m'a donné aucun billet papier pour mon vol avion à destination d'Helsinki. On s'est contenté de m'envoyer un fichier électronique sur mon smartphone. Ou bien les musées et transports parisiens aujourd'hui: il y a de moins en moins de guichets et les tickets sont expédiés sur smartphone. Et d'ailleurs bientôt, tous les paiements se feront par smartphone.

C'est vrai que les smartphones sont très addictifs si l'on se consacre aux réseaux sociaux. Je n'ai heureusement pas de temps pour ça. Mais il est effrayant de constater que c'est désormais la principale source "d'information" des jeunes. Un univers totalement artificiel au sein du quel se constituent des meutes haineuses et se construit une dictature de l'opinion et du "moi, je". Un gouffre générationnel est en train de se creuser, les parents n'ayant plus qu'une faible part dans l'éducation de leurs enfants.

Quant au sport finlandais, j'avoue manquer de références. Ayant pratiqué la course à pied, je connais quand même Paavo Nurmi et Lasse Viren.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

À part l’addiction, et, son efficacité incontournable, reste sa vulnérabilité. Tout le monde met ses œufs dans les même panier, comptes bancaires, rapports d’impôts, paiement des factures, c’est facile, rapide, et souvent insipide, on fait par téléphone, on ne rencontre plus personne, alors on se plaint de solitude. Le pire de tous ce système après l’addiction, c’est sa vulnérabilité. Ici, nous venons encore de le vivre lors du dernier verglas, ceux qui avaient subis le plus fort de la tempête ont été privés de communications. Le réseau est tombé en panne tout simplement par manque d’énergie, plus quelques tours de retransmissions réduites au silence. Remarquez, que je ne suis pas contre les techniques, les innovations, les progrès, je suis contre la concentration, la dictature d’une mode, le manque de porte de secours, l’inconscience collective. Ceux qui ont vécu avant toutes ces nouvelles inventions peuvent vivre sans. Je suis conscient qu’en cas d’urgence un téléphone portable cela est d’une grande utilité, ça peut sauver des vies. Nous pouvons le constater dans la Guerre d’Ukraine, de l’importance des communications. Cependant cela ne m’empêche pas d’aller bûcher en solitaire, je le reconnais, je le sais, c’est imprudent, mais j’ai passé ma vie à jouer à cela, s’est ajouté à de longues distances parcourues sans communication dans le nord. J’ai traversé ce contient à deux reprises, sans téléphone et surtout sans GPS, qui plus est, pratiquement en solitaire. Je ne vais tout simplement pas traverser la rivière à la nage avec une balise de repérage.

Reste le défi de la vie privée! Mais qu’est-ce qui reste de la vie privée? Est-ce qu’on y pense sérieusement? Les vandales se sont reconvertis, terminé les forçages de coffre-fort, les vols de banques, on est maintenant à la recherche d’informations, surtout de vos informations personnels. Nous pouvons le constater présentement sur Internet, là aussi les choses changent, pour accéder à certains sites, on vous demande votre numéro de téléphone, on force la publicité, on veut vous faire consommer, ou encore tout simplement vous pirater jusqu’au plus profond de votre être, savoir votre date de naissance, ou encore votre numéro d’assurance sociale.

La semaine dernière, le Premier Ministre Ukrainien est venu en visite au Canada afin de rencontrer notre premier Ministre. Étrange, nous avons été la cible de piratages électroniques. Ce n’est qu’un exemple. Je suis sûr que cela s’applique au commerce, à la finance, aux échanges. L’an dernier, c’est la firme Bombardier qui a été la victime d’attaques informatiques. Les usines ont été mises en arrêt et il a fallu plusieurs semaines pour les redémarrer. Étais-ce seulement du vandalisme?

Le pire, c’est que personne n’est imputable. Sommes-nous en train de former des générations d’imputables? Vous en êtes très consciente, lorsque vous évoqué l’éducation des enfants. Je suis conscient du débat en France sur l’éducation, parce que toutes ces quincailleries changent la donne au niveau des savoirs, et par le fait même, de la manière de se comporter, de penser, et de se construire une singularité, une originalité.

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

On peut penser, en effet, que l'accès généralisé et continu à Internet et aux réseaux sociaux va bouleverser les mentalités et les relations familiales.

Le savoir ne vient plus des parents. Quand l'enfant a une interrogation, il consulte Internet. Les parents sont ainsi déconsidérés, dépossédés de l'autorité de ceux qui savent. C'est un peu pareil pour les enseignants.

De plus en plus, les enfants s'autonomisent par rapport à leurs parents. Avec les réseaux sociaux, ils s'évadent du milieu familial et vivent entre eux, en "bandes" constituées sur Internet, généralement peu amicales. La famille, ça leur devient un peu extérieur.

Il est trop tôt pour prédire ce que ça va donner, en bien ou en mal. Il y a le meilleur et le pire sur Internet. Mais on peut d'ores et déjà s'interroger.

Et puis Internet, c'est un univers d'images, de symboles. Des mots, on en échange de moins en moins. Est-ce qu'après avoir passé plusieurs heures sur Internet, on peut avoir envie de se confronter à un texte écrit, à cet objet qui devient de plus en plus étrange, un livre ou un journal ? J'observe ça tous les jours dans le métro et les transports: plus personne ne lit. Qu'est-ce que ça va donner ça aussi ? Probablement des crétins en majorité mais peut-être aussi quelques génies.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Comment les finlandais vivent tout cela, eux qui sont l’un des pays les plus branché au monde? Est-ce que leurs réflexions sont différentes de celles de la France ou de d’autres pays européens?

On nous parle souvent de leur système éducatif très performant? Qu’en est-il? Tandis qu’en France on ne se prive pas de critiquer l’éducation? Je sais que vous êtes en vacances, mais vous ne devez pas manquer de remarquer certaines situations. Vous avez un certain sens de l’observation. Les voyages c’est une belle activité pour s’interroger et se comparer. Cela nourrit la réflexion.

Nous utilisons toutes ces techniques, mais je sens que la réflexion ne suit pas. Hier soir, j’écoutais à la radio de Radio-Canada une émission sur l’intelligence artificielle. Ce que j’ai trouvé étrange, j’ai entendu des réflexions qui remontaient à Harari, comme la possibilité de composer des histoires, ou encore de la musique, où de remplacer les humains dans certains secteurs de l’activité humaine. Nous sommes rapides en techniques, du moins nous en donnons l’impression, mais je sens que la réflexion ne suit pas.

Personnellement, je sais que je ne pourrais me passer de la lecture conventionnelle, un livre reste et demeure un socle, Internet reste un outil, cela permet d’autres possibilités, mais reste que nous nous devons nous interroger sur ces phénomènes.

Qu’est-ce que nous allons faire de la capacité imaginative de l’humain? Avons-nous développé une fausse appréciation face aux performances de cette intelligence artificielle? La famille et l’éducation, du moins de la manière dont nous les connaissons sont en train d’être larguées, au point de perdre nos repères. Je reconnais que ces questions nous déstabilisent.

À ce sujet je viens de terminer la lecture de : Le Cinéma intérieur, projections privée au coeur de la conscience, de Lionel Naccache. Le coeur du sujet c’est : Comment fonctionne l’œil, et comment le cerveau réinterprète toutes ces informations pour en donner ce que nous voyons. Je n’ai pu m’empêcher de penser à tous ces merveilleux outils dont disposent aujourd’hui les neurologues. Mais, en lisant Naccache, nous sentons chez lui une forte culture générale, un sens critique profond, une capacité à analyser ses erreurs, et surtout de se remettre en question. Oui, une grande culture, mais aussi, une forte capacité à penser autrement.

Voilà la grande question : Comment penser autrement si nous voulons innover?

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Bonjour Carmilla
Vous avez fait une belle synthèse. La barré était haute, et dans mon cas elle n’est jamais assez haute. Je ne possède pas cet esprit se synthèse, tout est large et vaste avec moi. Votre milieu était morne, le mien était restrictif, tout était défendu, c’est ainsi qu’on nous éduquait, c’est-à-dire à la soumission. Alors, je lisais pour m’informer, me cultiver, et surtout pour me libéré dans un genre de transgression. La lecture était devenu étrangement un acte de transgression. Ce qui m’a forcé à m’intéresser aux apprentissages, à l’enseignement, à la formation, à la mémoire, au cerveau, aux sociétés en général, et à la politique en particulier. Et, je n’ai jamais cessé de vivre ainsi tout au long de mon existence. Alors si quelqu’un revient de voyage, vous pouvez être sûr qu’il sera bombardé des questions de ma part. Mais sur le fond cela a fait ma vie. Et, je puis poser la même question que vous : Si je n’avais pas été éduqué dans cet univers restrictif, qu’est-ce que je serais devenu? Voilà ce qui explique nos cheminements. L’imaginaire aura été la porte de nos libérations. Du moins c’est ainsi que je le vois.
Cependant nous pouvons faire advenir l’humain de bien d’autres manières. L’éducation devrait être très personnalisée, afin de pouvoir augmenter les capacités des individus, pour les propulser dans une évolution riche. Nous y gagnerions tous! Pour déboucher sur des sociétés plus libres, plus érudites, et surtout plus intéressantes. Remarquez que c’est une interprétation tout à fait personnelle. C’est peut-être même une lubie utopique?
Comment ne pas revenir à ma lecture d’hier soir, alors que je suis plongé après le souper, dans : Nous sommes tous des femmes savantes par Lionel Naccache, où l’auteur tente dans cet essai de faire le lien entre la connaissance et le sexe. Pour illustrer son propos, il reprend une pièce de Molière : Les femmes savantes. Il décortique la pièce en fouillant la dizaine de personnages, qui pour certains, la vie se résume à la connaissance, et pour les autres personnage à la jouissance de la vie sexuelle. On voit toujours Molière comme un amuseur publique, là où la thèse de Naccache devient intéressante, c’est qu’il biffe la comédie et en fait un genre de drame en partant de deux évidences :
Première évidence : la sexualité est une composante centrale et épineuse de notre identité subjective
Deuxième évidence : la connaissance est une composante centrale et épineuse de notre identité subjective. (Naccache, Nous sommes tous des femmes savantes, page 11)
Et tout au long de son argumentaire il va pousser dans le sens que la sexualité et la connaissance, se rassemble, parce que leur cheminement se ressemble. Défaisant le mythe que la connaissance ne s’accorde pas avec la sexualité, et que cette sexualité n’a rien à faire avec la connaissance. On ne peut pas séparer la connaissance et la sexualité, qui sur le fond psychiatrique sortent du même processus.
Naccache en allant voir cette pièce de théâtre, n’y a pas seulement vu une comédie, il y a vu aussi un drame, parce que dissocier la connaissance de la sexualité, pour l’humain, c’est une drame. Il lui aura fallu quatre années avant d’écrire cet ouvrage. Il y a eu un long processus de macération. Un neurologue sort de sa spécialité pour expliquer ce qui semble hors de son expertise.
Ce que j’aurais aimé avoir un professeur de ce calibre! J’espère Carmilla qu’un jour vous lirez ce livre. Je vous le recommande…

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Beaucoup de gens se construisent dans la rébellion et la résistance. Je crois que cela a été mon cas, au risque d'apparaître particulièrement ingrate parce que je n'ai été nullement maltraitée. Mais on veut souvent autre chose que la réalité, morne et ennuyeuse, qui nous est proposée. C'est ce qui initie la lecture et la soif de connaissance. Si j'achète un nouveau livre, c'est parce que je pense que celui-ci est susceptible de changer, substantiellement, ma perception de la vie.

Je n'étais donc pas une enfant/adolescente facile. Toujours ailleurs. Ce n'est pas pour rien qu'on me surnommait "Cosmos" en référence à mon nom bizarre et à mon attitude. Le pire, c'est que je suis, sans doute, toujours un peu comme ça, à l'écart des attitudes et préoccupations conventionnelles.

Ca m'a conduit aussi à m'interroger sur l'éducation scolaire. Un système d'enseignement autoritaire, comme celui autrefois pratiqué, peut broyer beaucoup d'élèves, leur faire perdre toute confiance en eux, les convaincre qu'ils sont définitivement nuls. A l'inverse, un système d'éducation trop libéral et permissif n'offre aucun point d'appui sur le quel exercer son esprit de résistance. Les profs gentils sont généralement méprisés. On a malgré tout besoin d'un "maître" auquel s'opposer.

Il n'est, enfin, nullement exclu que je lise prochainement Naccache dont les livres ont un grand succès en France.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Où fallait-il passer pour devenir ce que nous sommes devenus? Voir quelqu’un se faire broyer ça me révoltait, et ça me révolte encore. Se construire dans la rébellion ce n’est pas toujours le bon chemin. Pour certains se sera très formateur, pour d’autres se sera une certaine tyrannie de l’agonie, ou encore pire, une ruine finale. Et, dire que des gens admirent ce genre de société comme si elle était indépassable, comme si nous avions perdu la faculté de nous dépasser, d’imaginer et de créer. Nous nous disons : Cette société n’est pas si mal, et nous nous contentons de cela, et justement seulement de cela. Nous refusons le changement, ou même l’opportunité de changer.
Naccache écrit dans, Nous sommes tous des femmes savantes page 229  : « Il n’est pas aisé de prendre le risque de se transformer. La résistance au changement figure parmi les facteurs d’inertie subjective les plus puissants de l’évolution animal, et en particulier chez l’homme ».

Même faire ce genre de constatation est difficile et cela m’a pris beaucoup de temps pour la comprendre, et d’essayer de l’analyser ce genre de phénomène qui se présentait sous mes yeux pratiquement quotidiennement, l’animal qui se présente au même endroit à la même heure, qui suit le même chemin, et Naccache a raison, c’est encore plus puissant chez l’homme. Nous n’avons qu’à constater, lorsque survient une réforme qui engendre des résistances, des violences, jusqu’aux guerres. Comment transformer tout cela? Il est rebutant pour l’humain de sortir de sa zone de confort.

Entre un système scolaire et j’ajouterais social répressif et autoritaire, et d’autre part, un laissez-allé à la facilité, y a-t-il une troisième voie? Jadis, lorsque je faisais ce constat, je sombrais dans la déception, puis, encore une fois lentement, j’en suis venu à imaginer, que l’évolution de l’humain, demeure un processus lent. Qu’il est difficile d’engager une masse d’humains dans une direction, et que si vous vous tromper, se sera la catastrophe. Les tentatives de changements effectués sous la contrainte ont données souvent des résultats catastrophiques. D’autre part, devant tous ces événements déroutants, ne sommes-nous pas parvenus à une autre possibilité l’évolution? Une piste qui pourrait nous mener vers des solutions inédites comme l’écrit Naccache.

Je suis à la fois étonné et content que des gens s’intéressent à ces genres de réflexions. Ça m’étonne quand même que les livres de Naccache connaissent une certaine popularité en France. Ça je l’ignorais totalement. Tout n’est pas perdu. Ayons confiance.

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Je ne dirais pas que les livres de Naccache sont des best-sellers mais ils figurent en bonne place aux devantures des librairies. Et le personnage est régulièrement invité sur les plateaux de télévision.

Quant aux itinéraires individuels, ils sont tous différents. Et c'est sûr qu'il n'est pas facile de changer, d'évoluer; l'inertie est souvent le premier choix. Mais être trop aimé, choyé et valorisé par son entourage, favorise justement cette inertie. Freud a en outre souligné que beaucoup d'enfants redoutaient de surpasser leurs parents et préféraient alors échouer dans leurs études. Cela me semble très vrai.

Dans l'apprentissage de la vie, il faut, me semble-t-il, parvenir à avoir un regard critique sur soi-même et ceux qui nous entourent. Percevoir les défauts des autres et les siens propres, c'est important. Pour cela, je crois aux vertus du conflit. Pour construire son identité, on a en effet besoin d'être reconnu, de se sentir désiré. Pour cela, il ne faut pas se dérober mais accepter la confrontation pour parvenir, in fine, à s'affirmer.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla
Le conflit ne m’effraie pas, bien au contraire, à une certaine époque, je le recherchais. Éduqué dans le conflit, la haine, et l’humiliation, les promesses d’avenir ne brillaient pas; par chance qu’une petite flamme brillait en moi, celle de la connaissance, mais une connaissance acquise en solitaire, pour finalement me rendre compte, que les conflits ne réglaient pas tous nos problèmes. Oui, certes formateurs, pourvu qu’on en sorte. De-là : (De ton manque fait ta force). Donner naissance à autre chose qui dépasse les douloureux conflits. Parce que dans les conflits tu souffres, mais aussi tu fais souffrir les autres. Ces souffrances ne possèdent pas toujours les promesses de guérisons, de reconnaissances, et encore moins de se sentir désiré. Au contraire tu risques de te retrouver dans le clans des rejetés, des exclus, des ostracisés, des moins que rien, de ceux qu’on enferme dans des camps comme Auschwitz, ou des camps vacances comme au Goulag.
Il appert, que tu peux transformer le tout en force, en puissance, voire en indifférence, et souvent en vengeance, qui s’installe à demeure dans un climat maudit, qui nous incite à rejeter plusieurs pans de l’existence, pour focaliser seulement sur quelques facteurs que l’on transforme en arme, en autre comme la (connaissance). Alors la sexualité ne t’apparaît plus comme une possibilité d’émancipation, mais comme une source de conflit qui donne la famille, l’école, la société, et nous pouvons ainsi voguer jusqu’à la guerre! Nous pouvons nous engager sur ces routes douteuses pour ne pas dire, boueuses. Et, pour certains, ils passeront au travers des mailles du filet, ils transgresseront tous les jugements, couleront tous leurs examens, ils se construiront des univers personnels, les exemples ne manquent pas : Hitler, Staline, Pol-Pot, et quelques autres. Nous savons, que nous ne pouvons pas tout régler par la guerre, pas plus que nous pouvons les régler par les conflits familiaux, qui ressemblent à des guerres civiles en miniatures, et qui laissent des empreintes indélébiles dans les esprits des protagonistes. Des traces impossibles à oublier, et même des marques que tu ne veux surtout pas oublier. Exit la (dissonance cognitive). Oublier? Jamais! Est-ce vraiment ce que nous désirons? Sculpter nos cicatrices afin qu’elles s’installent à demeure dans tout notre être afin qu’elles ne s’effacent pas!
Les routes, ou bien les solutions qui s’offrent à nous comme des choix logiques, incontournables, évidents, revêtent de leurs plus chatoyantes séductions, se transforment souvent en chant de sirènes irrésistibles. Quelle facilité! Aux fils de mes lectures, de mes plus cruelles expériences, de mes réflexions, à la croisé des chemins, au environ de la vingtaine, j’ai vu clair dans ces choix qui s’offraient à moi. Les routes et solutions faciles, aussi séduisantes puissent-t-elles s’introduire en désires ne m’offraient rien dans la duré. J’ai coupé plusieurs liens, et j’ai choisi le grand large, personne ne m’enfermerait plus jamais nulle part. Promesse à moi-même tenue malgré toutes les tempêtes. Ce fut souvent douloureux, mais très gratifiant. Je ne crois pas être devenu un névrosé, au contraire...Terminé les dogmes, les embrigadements, les idéologies faciles toutes faites, les ordres, les soumissions, les esclavages, les tromperies, les trahisons. Je comprends qu’avec un tel état d’esprit, qu’on m’ait détesté. Ce qui m’a valu bien des congédiements, des portes fermées, des refus, mais ce fut un univers riches en découvertes, surtout sur la nature humaine.
Richard St-Laurent

Richard a dit…

Vous l’aurez compris Carmilla il n’y a pas de vertu aux conflits. Une guerre est toujours une sale guerre, une dispute de famille est toujours un sale moment à passer. Le seule facteur, c’est qu’on ne peut pas passer sa vie dans cette eau. C’est ce que je retrouve présentement dans un ouvrage singulier de Paul Auster qui porte un titre évocateur surtout pour les américains : Pays de sang. Une histoire de la violence par arme à feu aux États-Unis. Auster, on le connaît surtout comme romancier, je dirais même comme romancier sociale et aussi romancier de la famille. Mais, c’est aussi un excellent raconteur et essayiste!
Chaque année, 80,000 américains meurent par arme à feu aux USA. Il y a de tout là-dedans, mais surtout des disputes, et des disputent familiales, on ne peut pas appelé cela la vertu du conflit. Pas plus que ceux qui se suicident par balle, suite à ces disputes. Certes les USA, terre de démocratie, terre de la libre expression, mais aussi avec tout ce qu’elle comporte de violence. On peut comprendre cette chanson de Cabrel : Être né dans un canot entre les crosses de carabines. Certes, il y a une culture des armes aux États-Unis, et ce n’est pas une petite culture. Il faut connaître la puissance économique et politique de la (NRA)National Rifle Association of America. Ainsi les citoyens américains vivent continuellement au coeur des conflits. Ils ne semblent pas avoir appris de tous ces conflits. Surtout lorsqu’on se remémore certains assassinats : (John F. Kennedy, Malcom X, Martin Luther King, Robert F. Kennedy) et cette liste pourrait s’allonger de tous les quidams qui sont tombés sous les balles. Reconnaissons d’autre part que les américains sont un peuple très religieux, très biblique, vous pouvez être sûr qu’ils connaissent très bien cette phrase célèbre : Aimes ton prochain comme toi-même...Le gros livre d’une main, (La Bible) et la la Winchester de l’autre. Je pourrais même affirmer que les États-Unis D’Amérique se sont édifiés sur ces valeurs.
Il en va de même pour le Canada, et je l’ai constaté lors de mon périple dans l’ouest, lorsque je descendais de voiture dans un petit village, et que je regardais le type qui descendait de son pick-up, où tu pouvais voir les crosses de carabines derrière le siège du conducteur, et il ne s’en cachait pas. Le moindre coyote qui rodait autour des troupeaux risquaient de finir en passoire.
Il appert, qu’il y a aussi des gens qui pensent sur cette culture des armes, et l’un d’eux est Paul Auster, qui a mes yeux demeurent un des grands penseurs américains. Mais, qui lit Auster aux USA ? Certes pas celui qui caboche des rats dans un dépotoir, qui passent sa fin de semaine sur un champ de tir, ou bien qui chassent les chevreuil en Pennsylvanie. Allez expliquer les vertus du conflit aux USA. Vous risquez de faire rire de vous !

Et en bon connaisseur, c’est qui, qui fournit les armes des Ukrainiens présentement ?

Auster dresse un portait saisissant de cette situation américaine, inédite à travers le monde, sans oublier dans ce livre les photos de Spencer Ostrander qui a photographié nombres de lieux, où ont eu lieu ces massacres, mais il a prise ces photos sans humains, les places sont vides, paisibles, des photos toutes en atmosphères, mais troublantes. Cet ouvrage est édité chez Actes Sud, la maison d’édition de maintes penseurs, en autre Nancy Huston, elle aussi qui a connu des violences en Amérique !

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Résolution de conflit? Nous pouvons maintenant, nous interroger sur le conflit en Ukraine. Qu’est-ce qui va en résulter? Y aura-t-il des solutions? Lorsqu’on observe ce conflit pour prendre une expression polie, nous savons tous qu’il y aura une suite qui ne risque pas d’être une conclusion. Peut-on toujours avoir une résolution d’un conflit. Il ne faut pas oublier qu’il y a seulement l’Ukraine dans cette histoire. Qu’est-ce qui va se passer en Russie si les événements tournent mal pour elle? Il ne faudrait pas échapper l’affaire. Et puis, il y a aussi le restant de l’Europe tremblante, et l’on peut la comprendre après les massacres de 14 et de 39, sans oublier la Yougoslavie. Est-ce qu’on va remettre cela après la fin des hostilité? Mais pas de la haine. Les conflits engendrent la haine, tous comme les conflits au sein des familles, et les traitées de paix, quoi qu’on en dise, sont souvent des mauvais papiers qu’on s’empresse de déchirer et de jeter à la poubelle de l’Histoire. Au pire une défaite, au médiocre un cessé de feu, ce qui n’est jamais une garantie de paix. Il en est de même pour les familles. On se disputent, puis pour ne pas envenimer le conflit, on se sépare, on fuit, pour se réfugier dans la solitude et le silence, on change de ville, on émigre dans un autre pays, on refait sa vie ailleurs. À moins que se soit cela la véritable connaissance et leçon du conflit? Pourquoi faudrait-il être reconnu et être aimé par des gens qui nous détestent, nous haïssent? Faudrait-il vivre le déchirement jusqu’à la dilapidation de l’humain?

On peut toujours évoquer la légitime défense. C’est ce que semble avoir compris les Ukrainiens. Au ce sujet de cette pensée dérangeante l’Europe se cache la face, parce que sur le fond elle a compris. Comment oublier les réflexions de Jean-François Colosimo à ce sujet? Comment rétablir des liens? Nous pourrions nous pencher sur cette horreur qui ne trouvera sans doute jamais de solution, le conflit des conflits, entre les Israéliens et les Palestiniens. Conflit où les Israéliens n’ont jamais fuit, et où les Palestiniens n’ont jamais dételés. Aux USA on n’a jamais oublié : La Guerre de Sécession, qui a peut-être mis fin à l’esclavagiste, mais certes pas au racisme. Et, n’en déplaise à certains, nous nous retrouvons maintenant en Europe avec un conflit qui pourrait s’étirer dans le temps comme le conflit Palestinien. Parce que la résolution d’un conflit, ne peut ressembler à humiliation.

Cette semaine le prix International pour la photo  : World Press Photo, de l’année a été attribué à Evgeniv Maloletka, pour cette femme blessée en train d’accoucher dans une maternité évacuée par quatre hommes dans une couverture au travers des ruines. Elle va mourir de ses blessures, en mettant son enfant au monde, qui lui aussi décédera. Je n’avais pas oublié cette photo. Je l’ai immédiatement reconnue lorsqu’on l’a présenté. C’est ce qui risque de se produire lorsqu’on ne règle pas les problèmes, qu’on se traîne les pieds, et c’est juste un événement au travers de tous les autres qui continuent de se produire en Ukraine.

Notre destin serait-il de mourir dans la violence, de terminer, vitrifié, irradié? Criblé de balle? Brûlé? Se serait une bien triste conclusion!

Bonne fin de journée Carmilla et merci pour votre commentaire.

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

En évoquant "le conflit", je n'avais, à vrai dire, pas en tête les conflits armés entre pays.

Je pensais simplement aux conflits formateurs de la psychologie individuelle. Tous ces affrontements quotidiens avec notre entourage dont nous ne percevons, le plus souvent, ni l'intention ni la finalité. Toutes ces expressions d'amour ou d'hostilité dont les motivations son en fait inconscientes mais qui modèlent, peu à peu, notre personnalité.

Il y a une extrême complexité des relations humaines. On n'entretient jamais de complète franchise avec les autres. On est pervers et retors car on pratique sans cesse la dissimulation. C'est cela "la violence des échanges en milieu tempéré".

Cela se transpose-t-il à l'échelle d'une guerre entre deux pays ? C'est sans doute un peu plus compliqué mais il est vrai que la guerre offre, aux appétits de vengeance de beaucoup de gens, une sombre satisfaction.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla
Paul Auster dresse un constat d’une réalité implacable de ces meurtriers. Portrait imbuvable de cette Amérique profonde, que dire, sans fond, qui dépasse tout entendement, parfaitement incompréhensible, de ces laissés-pour-compte, de ces exclus. Rejeté par leur famille, vivants perpétuellement au coeur de conflits familiaux, qui se transportent dans le milieu sociale, où ils deviendront des mésadaptés, avant de passer à l’acte pour commettre l’irrémédiable, comme d’entrer dans une église un dimanche matin ou un samedi soir en ville dans un cinéma. Gestes qui nous rappelle, que nous pouvons tous devenir des meurtriers. C’est une possibilité qu’on ne doit jamais exclure.

La démence n’est jamais très loin chez l’humain, la ligne est mince, et à chaque fois que j’entends à la radio où que je lis des nouvelles se rapportant à ces massacres, une petite pensée dérangeante me traverse l’esprit.
« Et, si c’était moi le meurtrier? » C’est quoi la différence entre ce meurtrier et moi? Est-ce que je pourrais agir ainsi? Quelles seraient mes pensées?

On ne sait jamais comment une guerre va finir, pas plus que l’on sait comment une dispute familiale va se terminer. Et, c’est bien là le coeur de l’affaire. Tout peut dérailler…

Soyons conscient que tout ne soit pas ainsi tout le temps. Déjà qu’aux USA, 80,000 morts par armes à feu c’est beaucoup. Et surtout arrêtons d’évoquer la folie, parce que Auster dans son analyse dresse un constat dérangeant, ces meurtriers n’improvisent pas, ils sont parfaitement conscients de ce qu’ils vont faire, ils dressent des plans, veillent soigneusement à leurs équipements, ils se rendent à plusieurs reprises sur les lieux de le futurs massacres. C’est de la pure préméditation!

Je me connais. Je sais qui je suis. J’ai grandi sur une ferme. Nous avions des armes. Il n’y avait pas une maison dans mon rang sans arme. Nous étions tous armées. Et pourtant, il n’y a jamais eu de massacre. Nous étions tous très conscients qu’une arme c’est un outil à la fois de pouvoir et surtout de responsabilité. On commençait à chasser vers 14 ans. Je me souviens très bien encore le compartiment de rangement de ces armes dans le cuisine près de la porte qui donnait sur la grange. Cette porte n’était jamais fermé à clé.

Face à un conflit, vous avez deux solutions, l’affrontement, ou bien la fuite. La fuite n’est pas toujours possible, et l’affrontement peut être mortel. Dans ces circonstances la connaissance de soit est incontournable, primordiale, fondamentale. Connaissant mon caractère, j’ai pris souvent la fuite, ça valait mieux, et ce n’était pas de la lâcheté, bien au contraire. C’est une décision difficile à assumer.

Lire : Pays de sang de Auster, c’est un plongeon vertigineux au coeur d’une Amérique engendré dans la violence, un voyage fabuleux au centre de ses politiques, une lecture sociale déstabilisante, mais aussi une descente dans l’âme humaine qui n’a rien a envier à l’enfer. En autre on y apprend que la grand-mère de l’auteur a assassiné avec un pistolet son mari!

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

J'évoquais la confrontation comme une lutte symbolique pour une relation de pouvoir. C'est universel et largement constitutif de la psychologie humaine.

Quant au crime, il est plutôt le fait des assujettis, me semble-t-il.

Je connais trop mal les Etats-Unis pour avoir la prétention d'exprimer un jugement à leur sujet. Je me souviens d'un entretien avec Madonna (que j'admire). On lui avait dit que les Etats-Unis apparaissaient, depuis la France, un pays dont les mentalités apparaissaient puritaines et conservatrices, dominées par le politiquement correct. Elle avait répondu intelligemment que c'était un pays où l'on pouvait rêver très fort et où les rêves pouvaient devenir réalité. C'est un peu ce que j'avais éprouvé au cours de mes séjours, notamment à New-York.

Quoi que l'on en pense, les Etats-Unis ont une extraordinaire capacité de renouvellement et de créativité. C'est ce mouvement perpétuel, cette évolution constante, qui fait qu'ils dominent le monde. On les croyait en déclin à la fin des années 80. Ils ont alors inventé Internet et toutes les technologies de l'information et de la communication. Ils sont aujourd'hui à la pointe en matière d'intelligence artificielle et de métavers. Toutes les grandes révolutions technologiques continuent de venir d'eux. Et ça ne modifie pas seulement nos conditions de vie matérielles, ça a aussi un impact sur les mentalités collectives.

Les gens qui se déclarent anti-américains mais se dépêchent d'acquérir un ordinateur, un smartphone, une voiture électrique et ont recours aux plateformes de streaming me font ainsi bien rigoler.

J'ai, bien sûr, remarqué le dernier livre d'Auster. C'est un écrivain que j'apprécie même si ses livres sont inégaux. Mais est-ce que son point de vue n'est pas ici un peu restrictif même si la question du port d'armes est, bien sûr, très importante ? Les Etats-Unis, ça ne se résume pas à ses abrutis, me semble-t-il, même si, je le répète, je connais mal.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

New-York ce n’est pas tout les États-Unis, comme Moscou n’est pas la Russie. Effectivement, c’est le pays des rêves, et quelques fois ils se réalisent. Ils ont leurs problèmes comme n’importe quel pays dans le monde. On ne peut pas les réduire exclusivement à leur grandes villes. C’est beaucoup plus vaste que cela. Quoi que New York possède une indéniable exclusivité, un caractère hors de l’ordinaire, une originalité surprenante. Paul Auster vit à New-York et il semble s’y plaire.

Je n’ai aucune affinité avec Madona, je lui préfère Billie Holiday, Nina Simone, Ella Fitzgerald. Les blondes platinées à la Marilyn Monroe sont loin de m’attirer, c’est trop artificielle et superficiel pour moi. Je suis très loin de cet univers.

Les Américains, soient qu’on les adore, ou bien, qu’on les déteste. Je me suis exprimé sur ce sujet à de nombreuses occasions dans mes commentaires. Auster touche ce sujet dans Pays de sang. C’est le pays des inventions, mais c’est aussi les pays des faillites retentissantes. Ils peuvent se le permettre. Ils ont les capacités de leurs rêves. Depuis ma jeunesse que j’entends que les Américains sont sur le déclin. Ils semblent toucher le fond du baril, puis soudain ils rebondissent.

Les Européens ont une immense dette envers les Américains, en oubliant trop rapidement ceux qui ont œuvré à leur libération lors des deux Guerres mondiales. Je trouve dommage que ce genre de rebuffade et de mauvaise diplomatie européenne s’étale partout, particulièrement en Afrique, et en Russie. Un jour, ils resteront peut-être les bras croisés, et certains s’en mordront les doigts. Ils vous largueront avec vos problèmes.

Je suis en train de lire le genre d’ouvrage que j’apprécie tout particulièrement, qui s’intitule : À la croisée des nouvelles routes de la soie. Coopérations et frictions, un ouvrage collectif des Presses de l’Université du Québec sous la directions de Frédéric Lasserre qui traite des politiques diplomatiques et économiques de La Chine dans le monde, qui n’ont rien à envier à l’impérialisme américain. Ouvrage très instructif et passionnant.

Viens de terminer la lecture d’un merveilleux livre. Je ferai le tour du monde par Alexandra Szacka. Polonaise d’origine, elle a émigré au Québec à 17ans avec ses parents, parce que vers 1967 en Pologne, il y a eu une vague d’antisémitisme. Après maintes tâtonnements, elle deviendra correspondante international à Radio Canada. Elle sera témoin des événements de Tian’anmen, correspondante en Russie pendant plusieurs années, couvrira aussi l’Europe. Femme volontaire, déterminée, d’une grande culture, qui a écrit :
« Impossible n’est pas un mot que j’affectionne particulièrement. En fait, il suffit qu’on me dise quelques chose est (impossible) pour que ma détermination devienne presque incontrôlable. » Alexandra Szacka, Je ferai le tour du monde, page – 122 -.

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

L'image que j'ai, mais c'est peut-être un cliché caricatural, c'est que coexistent aux USA d'un côté des gens très éduqués et créatifs et de l'autre une grande masse inculte de gens très primaires mais sûrs d'eux-mêmes (une foule de petits Trump).

Et puis aux USA, si les grandes villes sont fascinantes, les villes de province respirent en en revanche un ennui mortel. C'est le triomphe de la banalité.

Mais le phénomène se répand en Europe où la laideur gagne aussi du terrain avec d'effroyables centres commerciaux, tous les mêmes, implantés à la périphérie des villes. Les centres villes se vident, de leur côté, de leurs petits commerces. C'est vraiment déprimant.

Mais je le répète, je connais trop peu les USA pour m'autoriser à avoir un jugement.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

J'ai oublié de préciser que je ne connaissais pas Alexandra Szacka mais vous m'avez donné envie de rechercher ses livres.

Comme je suis maniaque avec ça, je me permets de préciser que son nom se prononce chatska en accentuant le 1er a.

Carmilla

Nuages a dit…

Sur un autre sujet, je viens de revoir, en DVD, le film "Frost" du cinéaste lituanien Sharunas Bartas :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Frost_(film,_2017)

Un peu lent, mais prenant et convaincant. Un jeune couple de Lituaniens convoie un chargement d'aide humanitaire pour l'armée ukrainienne, jusqu'au front du Donbass.


La Finlande est à présent membre de l'Otan. Ça doit contrarier Poutine. Pour la Suède, il faudra encore attendre un peu ; peut-être les choses se débloqueront-elles après l'élection présidentielle turque que, je l'espère, Erdogan perdra.

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

À propos de madame Szacka, son livre est édité chez Boréal.

C’est son seul livre, mais comme elle est à sa retraite, j’ai appris au cours de certaines entrevues, qu’elle se propose d’en écrire d’autre. Ce que je souhaite. Elle vit présentement en Italie et que la retraite pour elle, ce n’est pas rien faire.

Peut-être qu’à La Librairie du Québec à Paris, vous pourriez le trouver?

J’espère que vous aller le trouver, ça vaut la peine.

On s’en reparlera.

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent