samedi 5 décembre 2020

De la Liberté des Moeurs

 

En France, on s'excite beaucoup, en ce moment, sur les libertés publiques, les libertés politiques. C'est positif, c'est l'exercice normal de la démocratie.

 Ce qui m'étonne en revanche, c'est que cette passion pour la chose politique s'accompagne (mais pas seulement en France) d'un désintérêt à peu près total pour la législation relative à nos mœurs. Une seule exception, les  polémiques vite étouffées à propos du mariage pour tous. Mais même l'importante réforme des dispositions relatives à la prostitution n'a guère soulevé d'objections (et pourtant...).

Nos mœurs, elles sont régies  par le Code Civil et le Code Pénal. C'est donc notre liberté la plus intime qui se trouve largement façonnée par le Droit. On pourrait donc s'attendre à ce que chaque citoyen soit parfaitement au courant de tous ses articles et en débatte passionnément. Curieusement, c'est presque l'exact contraire. A peu près personne ne sait précisément à quoi il est est autorisé en matière de comportement, de mœurs, ni quelle peine il peut éventuellement encourir. Cette méconnaissance de la Loi en matière de mœurs est vraiment troublante.

Je ne prendrai que quelques exemples. En me limitant à la France, sait-on ainsi que :

- Un père et sa fille, une mère et son fils, un frère et une sœur peuvent vivre en couple et avoir des enfants. Ce n'est pas interdit, puni par la Loi, dès lors que la relation concerne deux adultes consentants. La législation française, sur ce point, diffère de celle de nombreux pays européens (Allemagne, Suisse). Du reste, l'inceste n'y est pas visé en tant que tel dans le Code Pénal. Le premier critère, c'est finalement celui de l'amour que deux adultes se portent. Bien sûr, un mariage est inenvisageable mais c'est tout de même incroyablement moderne ou incroyablement permissif (selon les points de vue)..

- On peut se marier entre cousins, même germains. Mais on ne peut pas épouser son oncle ou sa tante, son beau-père ou sa belle-mère. Le mariage entre beau-frère et belle-sœur suppose une dispense (c'est la considération de l'alliance dans la parenté qui prime, c'est une grande différence avec les cultures musulmane et juive).

- Il existe une majorité civile (18 ans) et une majorité sexuelle (15 ans). Ça signifie qu'un adulte (>18 ans) s'expose à de graves ennuis s'il a des relations sexuelles avec un mineur (<15 ans). Mais il n'y a pas d'interdiction de relations sexuelles entre individus de moins de 18 ans. Toutes les éventuelles conséquences pénales d'une relation sexuelle, quel que soit l'âge en fait, dépendent finalement de la notion de "consentement". Une notion qui est une véritable bouteille à encre, impossible à définir en termes juridiques, qui ouvre la porte à des procès sans fin.

- On peut adopter des enfants (adoption plénière) bien sûr mais on peut aussi adopter des adultes (adoption simple). Il faut pour cela avoir au moins 28 ans et 15 ans de plus que l'adulte adopté.

- On peut avorter (depuis 1974) dans un délai qui vient d'être porté à 14 semaines pour l'IVG chirurgicale et 9 semaines pour l'IVG médicamenteuse. Ça suscite, de ma part, une simple réflexion (bien éloignée, évidemment, de celle des militants anti-IVG) : il y a tout de même près de 230 000 IVG pratiqués en France; un chiffre qui ne décroît guère et que l'on ne peut pas ne pas rapporter au nombre annuel de naissances: 750 000. Ça prouve surtout, me semble-t-il, que les femmes continuent d'entretenir un rapport trouble à la sexualité et à la maternité : désirées, redoutées. De la sexualité, il faut encore se punir. A cette fin, on renonce à utiliser la contraception.

- On peut changer de sexe mais ça ne peut pas être simplement déclaratif comme dans certains pays (Argentine, Espagne). Ça suppose encore en France une réassignation chirurgicale préalable, soit le recours à des procédures longues, lourdes et complexes. On peut penser que les choses vont bientôt évoluer sur ce point. Car il faut bien le dire : le transsexuel (ou plutôt la négation de la différence des sexes, ce qui n'est pas la même chose) est devenu le grand fantasme de nos sociétés.

- La procréation médicalement assistée (PMA) va bientôt être étendue à tous: les couples de femmes d'abord et, peut être bientôt, les couples d'hommes. Les "progressistes" et les "réactionnaires" n'ont pas fini de disserter sur ce bouleversement de la filiation: qu'est-ce que ça induit de ne plus avoir de parents des deux sexes ? Personnellement, j'y vois aussi la réalisation d'un autre grand fantasme : celui de procréer sans passer par le détour d'un rapport sexuel. Avoir des enfants sans s'encombrer des tourments du désir et d'une relation amoureuse, voilà ce à quoi l'on semble aujourd'hui aspirer..

- Être voyeur, c'est devenu dangereux. Il faut éviter de trop reluquer les filles, de regarder sous leurs jupes et, pire, d'en prendre une photo avec son smartphone ("upskirting"). C'est le délit de "captation d'images impudiques"dans un texte du Code Pénal visant à réprimer le voyeurisme. Inutile de dire que ce texte, inspiré par des féministes, ouvre la voie à une foule de dérives. Le voyeur s'expose tout de même jusqu'à deux ans de prison et 30 000 euros d'amende.

- Puisant à la même géniale source d'inspiration,  on a décidé de pénaliser, en 2018, le harcèlement de rue. Désormais sifflements, propos grivois et même compliments déplacés peuvent valoir à leur auteur une amende de 90 euros en paiement immédiat à 750 euros, et même jusqu’à 3 000 euros en cas de récidive. On ne dispose, bien sûr, d'aucun bilan concernant cette mesure et son efficacité. Il faudrait aussi parler du harcèlement moral mais ça nous entraînerait trop loin. Nul doute, en tous cas, que le harceleur omniprésent est, aux côtés du pervers, une des grandes figures de ce monde anxiogène que nous avons créé.

- Il y a une véritable tolérance en France concernant la consultation de sites pornographiques. Mais attention tout de même : le Code Pénal  punit de 2 ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende "le fait de consulter habituellement ou en contrepartie d'un paiement un service de communication au public" ou même simplement de "détenir" une image pornographique d'enfant mineur. Dépêchez-vous donc de balancer les photos que vous avez enregistrées de David Hamilton ou Irina Ionesco.

- C'est depuis la Révolution Française qu'ont été dépénalisés simultanément (en 1791) l'homosexualité et la zoophilie. C'était à l'époque d'une audace incroyable et la France était alors très en avance sur le reste du monde. 

Sur l'abolition du crime de sodomie, je n'ai bien sûr aucune objection si ce n'est qu'une jeune femme est aujourd'hui tenue de l'apprécier si elle veut passer pour un "bon coup". C'est une question qui n'est jamais évoquée tant est grande la peur de ne pas apparaître moderne et libérée. 

- S'agissant des animaux, il faut préciser que, jusqu'à une époque récente, vous ne risquiez à peu près rien si vous assassiniez sauvagement le chien ou le chat de votre voisin. Vous pouviez même avoir des relations sexuelles, en toute impunité, avec un animal. Depuis 2004, toutefois, cette liberté est restreinte : on peut porter plainte contre vous pour cruauté exercée envers des animaux (reconnus, dès lors, comme "êtres sensibles"). C'est alors puni de 2 ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende (c'est simplement ce que risquent les mystérieux tueurs de chevaux qui effraient tant, aujourd'hui, en France). Mais ça ne concerne que les animaux domestiques. Si vous voulez continuer de donner satisfaction à vos instincts, il faut donc vous reporter sur les animaux sauvages mais ça risque d'être plus compliqué.

- La prostitution est devenue légale en France. C'est une évolution majeure mais qui fait l'objet de peu de débats. L'exercice de la prostitution et le racolage sont désormais permis mais c'est l'achat de services sexuels qui est devenu illégal et réprimé. En d'autres termes, le système repose maintenant, comme en Suède, sur la "pénalisation du client": amende de 1 500 euros et même de 3 750 euros en cas de récidive. Cela semble, de prime abord, une mesure positive puisque les personnes prostituées ne sont désormais plus inquiétées par la police. Mais la France se refuse à mettre en œuvre la seule réforme indispensable: dépénaliser également le client  et réglementer et encadrer (comme en Allemagne ou en Belgique) la prostitution : établissements dédiés et contrôlés. Avec le système français, la prostitution se fait, en effet, de moins en moins "visible". De peur d'être arrêtés et verbalisés, les clients exigent en effet  des rencontres dans des lieux secrets et dissimulés. La pénalisation du client a finalement pour conséquence d'aggraver l'isolement et la clandestinité des prostituées, les exposant ainsi à des risques accrus de violence de la part de leur client.  La violence et la criminalité exercées contre elles auraient effectivement beaucoup augmenté mais on se garde bien d'en parler tellement on se juge progressistes parce qu'on pénalise désormais le client. Preuve encore une fois que les bonnes intentions se retournent souvent contre elles-mêmes.

 - On peut, à volonté, fumer, boire, s'abrutir de somnifères. Mais en matière de drogues, leur simple usage, même à titre récréatif et en privé, est interdit par la loi. Il s'agit d'un délit puni d'un an d'emprisonnement. Et puis, on a vite fait de rentrer dans la catégorie de "trafic de stupéfiants" (10 ans de prison). Il suffit de cultiver quelques pots de cannabis, d'avoir des réserves un peu trop importantes, d'échanger quelques joints avec des amis, de franchir une frontière avec quelques produits. D'une manière générale, les peines sont extrêmement lourdes, voire disproportionnées. Cette extrême sévérité conduit paradoxalement à entretenir une grande délinquance: plus les risques sont grands, plus les gains financiers potentiels sont en effet élevés. On peut s'interroger aussi sur l'embolisation des forces de police obligées de se concentrer sur la répression de la drogue pour des délits souvent mineurs et détournées, de ce fait, de la lutte contre la véritable criminalité.

Je m'arrête là même si je pourrais évoquer de multiples autres sujets. J'apparais sans doute excessivement bavarde mais il est vrai que ces histoires de mœurs me passionnent. Ce qui m'étonne, c'est que cet intérêt ne soit nullement partagé et que la plupart des gens vivent dans une bienheureuse ignorance de la réglementation relative aux mœurs. Ça engage pourtant notre vie intime et ça m'apparaît donc aussi important que toutes les questions, mille fois rebattues, concernant l'organisation politique et administrative de la France. A quand, un "Grand Débat" sur les mœurs en France ?

Œuvres du peintre dublinois Francis BACON (1909-1992) qui a fait l'objet, il y a un an, d'une belle exposition au Centre Georges Pompidou.

Je ne suis pas juriste. J'espère donc que des "spécialistes" sauront corriger mes possibles erreurs. La difficulté est que la réglementation est mouvante, évolutive et qu'on n'est pas toujours au courant des derniers textes. 

J'ai déjà écrit des textes plus développés sur ces différentes questions (mars-avril 2019). On peut donc éventuellement s'y reporter.

Sur les relations entre le Droit et la sexualité, je recommande les livres de la controversée Marcela Iacub que je juge, personnellement, très pertinente.

Je recommande également l'"Histoire des mœurs" éditée, dans les années 90, en 3 volumes dans la collection La Pléiade (Gallimard).


7 commentaires:

Richard a dit…

Bonjour madame la juriste Carmilla !
S'exciter devant la loi, ce n'est pas la réformer, c'est juste de la perte de temps. Tenir à jour le code criminel et surtout le code civil devient une tâche absurde qui exigerait des armées de fonctionnaires. Ici ce qui m'intéresse se sont les mœurs toujours évolutives, pas les textes de lois qui sont souvent dépassées, par contre ce que j'aime bien c'est lire la jurisprudence. Ce qui m'arrive rarement juste quand je dois me présenter devant un tribunal, ce qui ne manque jamais de se produire. Il faut bien se préparer et l'historique des jugements rendus est un bon outil. Dans cette jurisprudence nous pouvons constater l'évolution des mœurs. Jadis dans certains pays ont pouvait être condamné pour son homosexualité, puis ont a toléré l'homosexualité, et soudain on l'a accepté ; même chose pour les dettes, jadis si on ne remboursait pas ses dettes vous pouviez être condamné, on s'est rendu compte que ce n'était pas très productif, alors on a inventé la faillite. Il y a un côté absurde très inconfortable lorsqu'on est condamné sous des textes de lois vétustes ou carrément dépassés surtout si vous avez à faire à un juge conservateur et ultra religieux. Le droit comme la justice c'est très aléatoire. Quoi qu'au Canada vous pouvez demander directement à la cour que votre cause soit jugé par un autre juge. J'ignore si c'est le cas en France. Qui plus est, comment les citoyens devraient être au courant de toutes les lois ? Il est bien dit et bien écrit : que nulle ne doit ignorer la loi. C'est pour cette raison que nous retrouvons avec des avocats, si toi tu ne le sais pas, lui devrait le savoir. Quoi que j'aime bien me représenter moi-même lorsque je défends mes causes. Débattre, j'adore ! Une cour de justice c'est en quelque sorte un parlement, ça fait parti de la démocratie. Tant qu'au débat sur les mœurs, ça c'est une autre question. Je me demande, pourquoi on se lancerait dans un débat sur les mœurs ? Mais, c'est quoi en fait les mœurs ? Le synonyme le plus employé serait pour mœurs : le comportement. S'ajoute coutume, habitude, tradition, usage. Plus qu'on ajoute de synonymes, plus ça devient en quelque sorte glissant, aléatoire, incertain. Ce qui porte à l'interprétation des textes des lois. Je pourrais avancer, que si vous vous lancez dans un débat sur le mœurs, lorsque vous en aurez terminé, il se pourrait fort bien que les mœurs soient autres choses. Le plus bel exemple que nous venons de vivre au Canada c'est le dossier de sur la légalisation du pot, qui n'a pas manqué de faire débat et quel débat ! Une vraie perte de temps. Dès les débuts j'ai trouvé cette situation stupide. Les gens qui en fumaient à ce que je pouvais constater n'avaient pas l'air malade, et cela n'a jamais empêché que quelqu'un poursuive sa vie brillamment. Tout d'abord on a condamné, puis on a puni, puis on a tolérer en fermant les yeux, et aujourd'hui c'est légal. Tout cela pour ça ? J'aime bien les débats, mais il faut qu'ils soient utiles. Pourquoi cela a tourné ainsi ? C'est simple, la marijuana était entrée dans les mœurs, les prisons étaient trop petites pour accueillir tous les (fumeurs). Encore une fois la réalité nous avait rattrapée. Les mœurs avaient dépassées les lois. Et dire qu'il y a des gens en France qui essaient de pondre une loi sur (la sécurité globale).

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Bonjour Carmilla pour la deuxième fois aujourd'hui.

Cette semaine La France a perdu une femme exceptionnelle qui par ses textes : Anne Sylvestre


Surtout deux textes solides

Les gens qui doutent

et

Une sorcière comme les autres


À écouter et à réécouter
À lire et à relire !

Écrire, c'est simplement cela

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Je ne crois pas qu'il soit inutile de connaître les Lois. Qu'on le veuille ou non, le Droit modèle nos mœurs et en est un reflet. Et le Droit, quoiqu'on en pense, n'est pas exclusivement répressif. Il est parfois en avance sur les opinions.

On laisse l'initiative au législateur, sans trop s'en préoccuper, mais c'est sans doute dommage. Beaucoup de questions mériteraient un sérieux débat public : la filiation, la procréation, la prostitution, la fin de vie, les addictions, la civilité, la définition du genre, notre relation aux animaux etc... Ça m'apparaît largement aussi important que cette Loi de sécurité globale que vous évoquez. Je comprends mal qu'on abandonne ces questions de mœurs aux juristes.

Quant à Anne Sylvestre, je ne vous cacherai pas que je suis largement hermétique à la chanson française. Je ne veux pas en dire de mal mais, simplement, je m'y sens vraiment étrangère.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

À la fin du livre : La route d'hiver, j'ai trouvé cette citation.

«À chaque monde qui se dissout, s'éteint, s'émiette, se consume ou qu'un autre monde rencontre et pulvérise, c'est une expérience magnifique qui commence, un espoir merveilleux qui s'approche, et peut-être un bonheur inconnu puisé à même l'inépuisable inattendu. Qu'importe qu'ils gèlent ou s'embrasent, se ramassent ou se dispersent, se poursuivent ou se fuient ; la matière et l'esprit, quand ils ne sont plus réunis par le même hasard misérable qui les joignit en nous, se doivent réjouir de tout ce qui advient ; car tout n'est que naissance et renaissance, départ dans l'inconnu peuplé d'admirables promesses et peut-être pressentiment de quelque ineffable arrivée... »

Maurice Maeterlinck

Tiré de : La route d'hiver
Leonid Youzefovitch
Page -402-

Dans cet ouvrage de Youzefovitch, il cite à plusieurs reprises Maeterlinck. Ça donne une idée du niveau de culture de cet auteur Russe. Étrange, je me suis accroché à cette citation. Ce qui nous rappelle notre situation présente, un départ dans l'inconnu peuplé d'admirables promesses et peut-être pressentiment de quelque ineffable arrivée.

Ça laisse songeur mais avec une bonne dose d'espérance.

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Maurice Maeterlinck fait partie de ces écrivains qui ont eu un temps de célébrité mais qui sont maintenant complétement tombés dans l'oubli. Il a tout de même été Prix Nobel de Littérature. Mais qui le connaît, le lit encore ?

Ces propos que vous citez sont effectivement très beaux. Peuvent-ils augurer de notre avenir ? Ce qui est sûr, c'est qu'il y aura sans doute de profonds bouleversements,sociaux, économiques, psychologiques. Mais je ne sais pas s'ils seront positifs. J'ai surtout perçu de petites haines et un repli sur soi.

Quant à Youzefovitch, il était surtout connu en Russie pour ses romans policiers historiques : "Le Prince des vents", "Une maison de rendez-vous", "Le costume d'Arlequin" avec le commissaire Poutiline (ça ne s'invente pas). On peut encore trouver ces 3 livres aux éditions Noir sur Blanc.

Personnellement, j'aime beaucoup mais c'est comme pour Boris Akounine. C'est très lié à l'histoire de la Russie, alors est-ce qu'un lecteur occidental ne va pas se sentir perdu et noyé ? Le fait que vous ayez apprécié "La route d'hiver" prouve le contraire mais vous êtes un lecteur peu banal, plus capable que moi de s'ouvrir à des cultures étrangères.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla !

Cette citation de Maeterlinck m'incite à lire cet auteur. C'est d'abord un poète, mais il a écrit plusieurs essais philosophiques. J'ai été impressionné par son style d'écriture et par les sujets abordés. J'ai déjà lu, il y a de cela très longtemps, La vie des abeilles, La vie des fourmis. Mais, ce n'est pas le cœur de sa production.

Je viens de terminer la lecture de : La première pierre par Carsten Jensen. Mous pouvons le classer dans le rayon des romans d'aventures. Mais, je pense que cet ouvrage dépasse largement le simple roman d'action, parce qu'il y a beaucoup de réflexions. Disons que c'est entre : Le grand jeu et les Bienveillantes. À lire pour les cœurs solides.

Présentement je traverse : Le dernier voyage de Jensen, lecture complètement différente, nous ne sommes plus dans le même registre, nous embarque pour un voyage au Groenland. Par contre j'ai hâte de mettre la main sur : Nous les noyers.

Je viens aussi de terminer un ouvrage intéressant sur l'état des États-Unis d'Amérique : Rumeurs d'Amérique par Alain Mabanckou d'origine Congolaise qui a fait une partie de ses études en France et qui enseigne présentement en Californie. Vision intéressante d'un homme qui a été éduqué en Afrique, qui a vécu en France pour aboutir aux USA ce qui résulte en des propos savoureux entre récit et essai. Je vous le recommande.

Prochaines lectures, deux ouvrages que j'ai reçu aujourd'hui. Suite à des recherches, j'ai découvert : Purge de Sofi Oksanen que je ne connais pas, mais qui m'intéresse.

L'autre ouvrage, je vous le donne dans le mille : Gran Balan par Christiane Taubira. Comme un enfant qui sort d'une pâtisserie, j'ai été incapable de me retenir et j'ai lu quelques pages, je pense que nous en reparlerons.

Certes je vais dans toutes les directions. Un lecteur peu banal, merci, je vais le prendre comme un compliment. Je n'ai pas de mérite, je suis ainsi, c'est dans ma nature curieuse qui me dévore. Voilà deux ans, à la même époque, j'étais dans : Les livres de Jakob d'Olga Tokarczuk et si je regarde ma liste de lectures depuis ce temps, il y a de quoi avoir le tournis. Je continue de penser qu'on peut ouvrir des portes à de nouvelles connaissances, de nouvelles civilisations, qui débouchent sur d'autres valeurs, de provoquer la curiosité chez d'autres personnes. Donnez du bon, du beau, et qui sait, provoquer l’appétit de l'ouverture sur le monde afin de mieux le comprendre. Je me sens souvent comme un passeur. Tant qu'à la capacité de s'ouvrir à d'autres cultures, nous le faisons tous à notre manière. Ce qui est très personnel, difficilement quantifiable, qualifiable, et qui s'enveloppe dans notre liberté d'expression.

Merci Carmilla et bonne nuit !

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Maeterlinck, je connais seulement son nom. Je ne sais pas si c'est encore lisible. Il faut demander à nos amis belges.

Carsten Jensen, c'est quand même bien plus qu'un roman d'aventures. C'est d'abord un extraordinaire document sur l'Afghanistan et la guerre qui s'y déroule. L'Afghanistan, c'est un pays où je regrette profondément de ne pouvoir me rendre. J'ai connu beaucoup d'Afghans en Iran et les cultures sont très proches (même s'il ne s'apprécient guère). Quant aux horreurs d'une guerre, elles sont parfaitement décrites, même si je reconnais qu'il faut avoir le cœur bien accroché. On découvre qui nous sommes réellement en temps de guerre et c'est bien loin de l'image affichée. "La première pierre" est un très grand livre, de ceux qui vous remettent en question aux côtés des "Bienveillantes", de "L'abîme" et de "la fabrique des salauds".

Bien sûr, en effet, que la littérature est une formidable ouverture sur une culture étrangère. Mais je pense quand même qu'on apprécie mieux si on s'est rendu sur place. Les littératures slave et d'Europe Centrale m'intéressent d'autant plus que je peux visualiser les lieux et les gens. Après être allée au Japon, j'ai davantage apprécié sa littérature. Sinon, ça m'apparaît plus abstrait et j'accroche moins. Dostoïevsky sans Saint-Pétersbourg, Murakami sans Tokyo, Rimbaud sans Charleville, Proust sans Paris et Cabourg, qu'est-ce que ça peut donner ?

Quant à Sofi Oksanen, oui ! c'est très bon. Elle est une vraie star en Finlande et en Estonie.

Bien à vous,

Carmilla