Je viens d'avouer mon caractère hystérique.
Une hystérie joyeuse, voire fantaisiste, avec la recherche éperdue de mon désir et de sa satisfaction. Et aussi mon goût des apparences et de la séduction.
Étrangement, c'est complétement en dehors de l'esprit du temps. Être moderne, c'est plutôt prôner la jouissance, la transparence et le "cool".
Je suis donc peut-être complétement ringarde ou alors franchement subversive. Ce qui est sûr, c'est que je me sens peu d'atomes crochus avec certaines figures de la modernité qui, aujourd'hui, prolifèrent.
Il s'agit d'abord des obsessionnels.Ceux là, ils m'effraient, je me sens une incompatibilité totale avec eux. Une hystérique et un obsessionnel, ça ne peut pas faire bon ménage. C'est d'ailleurs une autre déclinaison de la guerre des sexes parce que les obsessionnels sont surtout des hommes tandis que les hystériques sont surtout des femmes.
A mes yeux, les obsessionnels, ce sont tout simplement des gens qui préfèrent renoncer au désir et à la vie, qui se barricadent même contre le risque de leur émergence. Ils sont les produits achevés de nos sociétés bureaucratiques, de l'administration générale de nos pensées et de nos sentiments, de leur complète normalisation.
Les obsessionnels sont de parfaits citoyens, ils font d'excellents fonctionnaires, méticuleux et organisés, avec des dossiers bien classés et une procédure pour chaque chose. C'est peu dire qu'ils sont bien adaptés, ils sont sur-adaptés. Le capitalisme aventure, initiative, c'est fini. On est rentrés dans l'ère du capitalisme obsessionnel avec l'infinie prolifération de normes et de règles, de business-plans et de tableaux de suivi et d'évaluation.
A titre individuel, des obsessionnels, on connaît surtout les manies, les rites compulsifs infinis.On en pratique tous d'ailleurs quelques-uns et c'est anecdotique. De petites bêtises quotidiennes prennent une importance démesurée, mon destin est suspendu à quelques rites ou un signe minuscule. L'obsessionnel est minimaliste, mais c'est tout l'ordre du monde qui est ici en jeu. Il s'agit de s'assurer de sa solidité, de son bon agencement, de sa sécurité. En fait, l'obsessionnel est constamment agité par la trouille que les échafaudages ne s'écroulent, qu'il y ait une faille dans le système, une faille au travers de laquelle s'engouffrera l'imprévu.
Les obsessionnels, ça produit ainsi beaucoup d'écolos avec leurs "petits gestes", leurs "grands déséquilibres", l'homme responsable (et donc coupable). Et puis aussi des "collapsologues" et des "complotistes". Et enfin, l'immense cohorte des victimes de toutes sortes, tous ceux qui se sentent continuellement menacés. Quant à la pandémie actuelle, c'est une période bénie pour les obsessionnels : les gestes barrières, l'humanité fautive.
L'imprévu, c'est, pour l'humaine condition, d'abord la Mort, bien sûr, mais c'est aussi, à un premier degré, le désir puis la jouissance (le fameux couple Éros/Thanatos). Et c'est de cela dont l'obsessionnel ne veut justement absolument pas entendre parler. Ce qui terrorise l'obsessionnel, c'est la perte de son identité avec l'irruption du désir, son agitation, sa perturbation. La sexualité lui est un poids, un fardeau. Quant à l'amour, la passion, il faut surtout les éviter.
Si l'hystérique recherche sans fin son désir et sa réalisation, l'obsessionnel, lui, veut s'en prémunir absolument en le déclarant, d'emblée, tout simplement impossible. Il lui faut s'en protéger à tout prix mais, pour ça, il n'est jamais sûr que les barrières qu'il a érigées sont suffisantes, qu'elles ne vont pas céder sous la pression. C'est pourquoi il est dans le "doute permanent" : est-ce que les choses ne vont pas subitement se casser la gueule ?
La préoccupation première de l'obsessionnel, c'est d'abord celle d'un monde stable, immuable. Toute innovation devient alors impossible, irréalisable, à ses yeux. Il faut préserver le monde, obéir à la Nature, ne pas en transgresser les règles, ne pas sortir de sa coquille, de l'ordre établi. La répétition, la routine, c'est son refuge.
Une conversation avec un obsessionnel, c'est désespérant. Tout est d'emblée impossible. Il n'y a que des obstacles et pas de solutions. Avec un obsessionnel, vous êtes sûr d'aller déjeuner tous les dimanches chez vos beaux-parents et de passer toutes vos vacances à la Baule. Pas étonnant non plus que beaucoup d'obsessionnels soient des juristes mais des juristes "tordus" davantage préoccupés parce que l'on ne peut pas faire plutôt que par ce que l'on peut faire.
Inutile de préciser que l'obsessionnel répugne d'abord à l'action. A la question que faire ? il préfère ne pas apporter de réponse ou déléguer à l'autre la responsabilité du choix. Parce que décider, c'est s'exposer, c'est se mettre en jeu, risquer une partie de son existence. La procrastination infinie, c'est la marque de l'obsessionnel et d'ailleurs, il n'achève jamais rien. Tout reporter sans cesse, c'est sa manière d'éviter de réaliser ses désirs.
Après tout s'enchaîne. Voyager ? Oui, mais pas en dehors de sentiers étroitement balisés, en lieux de connaissance ou avec un programme détaillé. Lire ? Oui, mais des bouquins en prise avec les grands problèmes d'actualité (le réchauffement climatique, la montée des inégalités).
L'obsessionnel a les deux pieds sur terre, il est concret, engagé, pragmatique, il aime le bricolage, les travaux d'entretien. Et puis les collections de tout et n'importe quoi : des timbres aux boîtes de camembert, peu importe la qualité esthétique des objets, l'essentiel, c'est que ce soit complet, saturé. Et enfin, toutes les choses simples et saines dans les quelles l'obsessionnel pourra se retrouver, se ressourcer : la cuisine, l’œnologie, le yoga, la gymnastique, la méditation. Beaucoup de femmes apprécient les obsessionnels parce qu'ils assurent et rassurent, comme on dit, mais une vie pareille, ça m'apparaît plutôt l'antichambre de la mort.
L'ambition finale de l'obsessionnel, c'est de s'organiser un terrier, un terrier au sein du quel tout est bien en place, la famille, les amis, le travail, les loisirs. Un monde gelé, pétrifié, momifié. Le problème, c'est que ces infinies préventions contre l'imprévu, le désir, ne font qu'ajouter au fardeau de son existence et qu'à bétonner sa vie, il ne fait qu'accroître son égarement. Et qu'à refouler le Désir, on en vient finalement à désirer la Mort.
Photographies principalement d'Anka Zhuravleva et Ellen Sheidlin. Les deux dernières images, c'est un peu moi : "l'anti-obsessionnelle".
J'avoue que ce post est une diatribe contre les obsessionnels, presque un règlement de comptes; c'est peu dire que je ne les aime pas ces apathiques, épris d'ordre et de normalité; ils me font profondément suer, ils m'empoisonnent la vie. Mais il faut bien reconnaître qu'ils sont en train de gagner le combat : l'inertie obsessionnelle contre la fantaisie hystérique.
Si vous vous intéressez aux obsessionnels, il existe deux textes essentiels :
- Sigmund Freud : "L'homme aux rats" avec l'évocation d'un impressionnant supplice chinois.
- Alain Abelhauser : "Un doute infini - L'obsessionnel en 40 leçons". Ça vient juste de sortir. Excellent ! Ça en apprend beaucoup sur le fonctionnement général du psychisme humain. Une seule réserve : il faut déjà être familiarisé un peu avec la psychanalyse.
23 commentaires:
Bonsoir Carmilla !
(Vous ne me laissez pas le choix Carmilla)
Je vais encore vous parler d'Achab, c'est un magnifique sujet pour l'obsession !
Voilà le port, les montagnes qui se dressent derrière ce port.
Fin de la lecture de Moby Dick d'Herman Melville.
Je viens de tourner la dernière page.
Je dépose le livre sur la table de la cuisine, sous la lumière blafarde de ma lampe tempête.
Je suis revenu, encore une fois, plus riche, plus conscient, sans hystérie et sans regret, le regard fixé sur ce vieux volume tout cabossé, taché, déchiré, mais qui au moins, n'a pas fait naufrage comme le Péquod. L'important c'est d'éviter le naufrage au propre comme au figuré.
Étonné ? Peut-être pas autant que les terriens, immuables comme les rampants de leur race, masse compacte sur les quais qui s'exclame : Il sont revenus !
Le silence s'impose de lui-même devant cette somme de récits, d'histoires, de descriptions, de réflexions. Lire Moby Dick, c'est faire un grand tour.
Un grand tour comme j'en faisais régulièrement lorsque je pilotais dans le nord. Partir le printemps, pour revenir vers la fin de l'automne un peu avant les neiges alors que les laboures étaient terminés, que les troupeaux étaient tous rentrés, que cela sentait le foin à plein nez entre les dalots et les crèches.
Dans le silence du soir, je reste muet devant ce livre, qui est plus qu'un livre. Qui dépasse probablement tout ce qui a été écrit sur la chasse à la baleine. Peut-être même, sur tous les genres de chasses. Un livre qui peut trôner au-dessus de La Bible, du Coran, du Talmud, et les écraser tous, comme Moby Dick a pulvérisé le Péquod.
Après tant de paroles, tant de mots, tant de phrases, de paragraphes et de chapitres, seul le silence peut m'accompagner. Le même silence qui m'accueillait jadis troublé par un murmure à peine perceptible : Richard est revenu !
Richard St-Laurent
-2-
Qu'il fait bon revenir, surtout revenir de tout !
Finalement dans le village, je finissais par rencontrer le Grand Yvan, qui avait bourlingué avec moi dans le nord et qui finalement, dans sa sagesse, avait marié la Grande Nicole. Il avait compris, qu'il n'y avait pas d'avenir dans ce genre d'errance. Personnellement, je m'en foutais, je n'avais pas d'avenir et je n'en aurais jamais. C'était l'époque où je méprisais tous les parvenus, les petits bourgeois qui croupissaient dans la routine.
En secouant la main du Grand Yvan, il disait dans ses mots simples.
« Tu t'en es sorti encore une fois. »
« Ouais. »
Alors, c'était comment ? »
« Pire que la dernière fois, mais je ne peux pas te garantir que je vais m'en sortir la prochaine fois. »
Et, nous partagions de grands éclats de rires.
Qu'est-ce que j'aurais pu répondre, obsédé par l'aventure ? Je jouais à Achab tout en sachant que ce n'était pas un jeu, mais que c'était absolument et rudement excitant. Il n'y avait pas de baleine au bout de mon harpon, il n'y avait que la vie si fragile.
Alors on allait à la taverne du Château écluser quelques bières en plein milieu de l'avant-midi sous un soleil d'automne défaillant, évoquant cette période où le Grand Yvan m'accompagnait, alors que je frappais aux portes des compagnies aérienne pour m'engager. Mais, personne ne m'engageait. Ce qui renforçait mon exclusion. La belle affaire, j'en faisais ma force !
L'obsession, c'est l'extrémité extrême de la passion.
On le voit très bien dans Moby Dick, Achab est obsédé par la baleine blanche. Plus rien ne compte pour lui. Il est tout à son affaire, méprisant son équipage, sa sécurité, son bateau, la vie, la mort, les femmes et l'argent. C'est le genre de détachement qui confère un pouvoir infini. Il était devenu dangereux, non pas seulement pour les autres, mais aussi pour lui-même. D'une volonté implacable, d'une énergie sans faille, il poursuivait un seul but, affronter Moby Dick dans un combat singulier pour assouvir la vengeance de sa jambe perdue. Ce qui est beaucoup plus que l'obsession de la perfection.
Richard St-Laurent
Il n'y a pas plus de disposition ou de manière de faire face, soit à la baleine, ou encore au taureau qui vient de déboucher dans l'arène face au torero. Si tu n'es pas obsédé par le taureau, tu vas finir ton dimanche après-midi en charpie. Se sera comme dans la chanson de Cabrel : « Et la femme du torero pourra dormir sur ses deux oreilles. »
Comme ont dit par ici, ne te laisse pas secouer par la vie, secoue-là !
Prochaine lecture, je serai encore dans la chasse, qui est plus qu'une chasse, parce que c'est une quête. Un autre de mes livres de chevet.
La vérité à la lumière de l'aube
Par Ernest Hemingway
Éditions Gallimard 1999
L'action se déroule en Afrique dans la région du Kilimandjaro, où Hemingway prépare sa femme pour qu'elle tue son premier lion. Encore une fois, c'est plus qu'une histoire de baleine, de taureau ou de lion. La vérité à la lumière de l'aube, n'est pas une fiction, c'est un récit, c'est un vrai. Les événements évoqués dans cette ouvrage ont été vécus.
Bonne nuit Carmilla et dormez bien !
Richard St-Laurent
Merci Richard,
Vos extraits de textes sont beaux et intéressants.
Mais il ne faut pas se méprendre. Le capitaine Achab n'était certainement pas un obsessionnel.
L'obsessionnel répugne fondamentalement à l'action et n'a d'autre but que de se fondre dans le moule de la société.
Achab souhaite, quel qu'en soit le prix, dépasser sa condition limitée. Il est celui qui affronte la mort (à la différence de l'obsessionnel qui se dérobe), ce qui confère à son existence une dimension tragique.
Vouloir absolument la réalisation de son désir, c'est donc l'exact contraire de l'attitude obsessionnelle.
Quant à Hemingway, je n'ai rien lu et je n'ai guère envie. Mais c'est sans doute un préjugé.
Bien à vous,
Carmilla
Bonsoir Carmilla,
j'ai lu attentivement vos deux derniers billets en les confrontant à ce que je suis et, étonnamment, je me suis reconnu dans les deux, sans pouvoir clairement établir de hiérarchie. Cela confirme toutes les réticences que j'avais à l'endroit des taxinomies psychanalytiques. Nous sommes tout de même infiniment plus complexes que toutes ces identifications binaires auxquelles ils prétendent nous réduire. J'ai par exemple lu, ici et ailleurs, des billets sur les victimes et les bourreaux, les gentils zèbres et les méchants PN, et cela m'a franchement fait mourir de rire une fois passée l'envie de dégueuler. Beurk...
Le problème avec le désir et la séduction, c'est qu'il n'y a rien à en dire. Ils sont. On ne rendra jamais un plouc prouteux agressif désirable ni un fâcheux victimisé séduisant. Se savoir Beau (et non pas tout-puissant comme l'affirment les avachis!), dans une certaine mesure, devrait nous inviter à l'humilité, à la bienveillance, mais cela encore ne se décide pas. On ne décide pas d'avoir de la gueule ou d'être énergétiquement apte à la passion, à l'intelligence, et aucune psychanalyse n'y changera rien.
Pour finir, vous vous trompez sur le yoga car vous n'en avez que des représentations. Mais ce n'est pas illogique tant elles sont communes à ceux qui ne le pratiquent pas, tout comme à ceux qui s'en réclament sans savoir. L'état de yoga est ce que vous décriviez plus bas à propos de votre sensation d'être de plus en plus aérienne, éthérée. C'est juste ça. Le reste n'est que conjecture.
Vous souhaitant de passer un bonne soirée.
Alban
Bonsoir Carmilla !
« Dans la nuit j'entendis un lion grommeler à plusieurs reprises pendant qu'il chassait. Miss Mary dormait profondément et sa respiration était douce. Je restais là, éveillé, et pensais à bien trop de choses mais surtout au lion et à ma responsabilité à l'égard de Pop et du chef de la réserve et des autres. Je ne pensais pas à Miss Mary sauf à sa taille, un mètre cinquante-cinq, par rapport aux grandes herbes et aux buissons, et même s'il faisait froid le matin, elle ne devait pas mettre trop de vêtements car la crosse de la Mannlicher 6,5 était trop grande pour elle si elle avait plusieurs épaisseurs à l'épaule et elle risquait de laisser le coup partir en levant la carabine pour tirer. Je restais éveillé à réfléchir à tout cela et au lion, et à la façon dont Pop aurait manœuvré, et au fait qu'il s'était trompé la dernière fois mais qu'il avait vu juste bien plus souvent que je n'avais vu de lion. »
Ernest Hemingway
La vérité à la lumière de l'aube
Page -56-
L'obsession de l'hystérie. Miss Mary est obsédé par ce vieux lion intelligent et dans son hystérie elle manœuvrait à la manipulation pour forcer Hemingway de lui permettre d'abattre le fauve. Certes, on ne chasse pas le lion comme on chasse le lapin. Il faut être plusieurs surtout en Afrique, des pisteurs, des chasseurs auxiliaires, des porteurs, des conducteurs, puis trois ou quatre autres bonnes carabines, qui pouvaient vous abattre un lion après que Miss Mary l'aurait manqué, ou blessé. Parce que la loi de la réserve stipulait, que tous animal blessé ne pouvait être abandonné sur place. Il fallait l'achever. Un lion demeure dangereux, même blessé. Miss Mary ne manque pas de jouer de la séduction sur tous les hommes du camp de chasse surtout lorsqu'elle abat un buffle en mettant la balle juste derrière l'oreille. Mais on s'entend un buffle n'est pas un lion, encore moins une gazelle. Hemingway demeure perplexe parce qu'il est obsédé par l'hystérie de sa femme, même si elle fait plusieurs beaux cartons à chaque fois qu'ils partent chasser pour la viande du camp. S'installe une psychologie de la chasse et surtout la question fondamentale de : Est-ce qu'elle est prête ? Ce qui trouble Hemingway et le laisse dans des insomnies interminables, lui le chasseur de gros, qui plus est, a été nommé d'office comme garde-chasse auxiliaire dans cette réserve. Ce qui dépasse la simple chasse, lorsqu'un habitant vient le voir parce qu'un troupeau d'éléphants vient de piétiner son samba ( samba : champ en culture), pour exiger d'Hemingway qu'il abatte quelques éléphants pour effaroucher les autres.
Mais laissons Miss Mary à son sommeil et surtout à ses manipulations obsessionnelles. J'y reviendrai...
Bonne fin de nuit Carmilla
Richard St-Laurent
Bonsoir Carmilla !
Entretient entre Hemingway et Philip Percival, dit Pop
« Cela faisait plus de de vingt ans que nous étions installés pour la première fois, Pop et moi, près d'un feu ou des braises d'un feu et avions discuté de la théorie et de la pratique du tir du gibier dangereux. Il n'aimait pas les tireurs exercés ou les chasseurs de marmottes et s'en méfiait.
« Ils vous mettaient une balle de golf dans la tête du cadie à une mile, disait-il. Un cadie en bois ou en acier. Pas en chair et en os. Toujours pile au milieu du carton jusqu'au jour où il doivent tirer un koudou de belle taille à vingt mètres. Alors là, pas capable de toucher la Montagne ! Ce sacré fusil qui moulinait autour du grand tireur tremblant jusqu'à ce que j'en tremble moi-même. Ne faite jamais confiance à un individu avant d'avoir vu tirer sur quelque chose de dangereux ou à tout prix à cinquante mètres ou moins. Ne le croyez jamais avant de l'avoir vu tirer à vingt. Une cible rapprochée révèle ce qu'on a dans le ventre. Ceux qui ne valent rien la manqueront toujours ou tireront à la distance où nous sommes sûrs de ne pas pouvoir la rater. »
Ernest Hemingway
La vérité à la lueur de l'aube
Page -66 et 67-
Memsahib Miss Mary fait des beaux cartons, mais les deux chasseurs d'expérience doutent. Il en va de la sécurité de Miss Mary, l'épouse d'Hemingway et de tous ceux qui seront de la battu. Un lion blessé peut charger furieusement. Cela pourrait bien être votre dernière chasse.
La question est de savoir, bien au-delà de la compétence, si la femme ou l'homme que vous avez devant vous est opérationnel.
Je me souviens à l'époque que dans compagnies d'aviation de brousse au Québec, nous avions une épreuve. Le chef pilote venait me voir en privé et me demandait d'amener un type le lendemain pour un déménagement de camp loin de la base, cela pouvait être un camp de géologues, ou encore de foreurs, une dizaines de passagers, parfois plus, ce qui comprenaient aussi, les tentes, la nourriture, les outils, enfin tout le campement. C'étaient des vols courts habituellement moins de quinze minutes. Donc chargement, vol, atterrissage, et déchargement au nouvel emplacement. Un travail épuisant au travers des mouches, la chaleur, la saleté, et en prime la fatigue. Je me souviens du Gros Carpentier, un chic type. Avant de nous installer dans le cockpit je lui avais dit pour le mettre en confiance. « C'est toi qui va voler pendant ce contrat du commencement à la fin. Je ne touche pas aux manettes. Je vais t'aider au chargement et au déchargement, aux accostages, mais le reste cela va être ton affaire. » Nous avons déménagé 45,000 livres en vingt voyages pendant trois jours, plus les passagers. Ce fut une belle expérience. Carpentier s'en était bien tiré.
Pendant ce temps Miss Mary dort toujours !
Bonne nuit Carmilla
Richard St-Laurent
NB : L'appareil utilisé un De Havilland DHC-3, Otter, sur flotteurs
Merci Alban,
Vous avez raison ! La personnalité d'un individu ne se laisse pas enfermer dans quelques catégories. Du reste, une psychanalyse ne consiste pas à asséner un diagnostic mais à essayer de reconstituer la cohérence d'un parcours de vie à partir notamment de ce qui se répète en nous. Une psychanalyse, c'est plutôt un roman policier conduit à partir de quelques fragments de souvenirs.
Cela étant, il existe quand même bien quelques typologies caractérielles. Entre Isabelle Adjani et Jean Castex, par exemple, il y a plus que des nuances. Il faut aussi reconnaître que la majorité des individus des sociétés occidentales sont de grands névrosés. Ça va de pair avec cette généralisation de l'esprit victimaire que vous évoquez.
La séduction, chez les femmes, elle répond largement, me semble-t-il, au besoin éperdu d'être regardée. C'est malgré tout une conduite active, voire positive. Je pense quand même que ça n'est pas une donnée naturelle et que chacun peut devenir un peu plus désirable. Je regrette, enfin, que l'on réprouve aujourd'hui la séduction qui donne davantage de couleurs à la vie. Un monde sans séduction, c'est une caserne.
Le Yoga, c'est vrai que je n'y connais rien. Mes préventions sont surtout liées à mon histoire personnelle et ma fréquentation d'adeptes qui ne m'inspiraient guère. Ce qui me gêne dans le yoga, c'est ce fatras spiritualiste auquel je ne comprends pas grand chose. Et puis les thérapies de l'âme, du bien-être, de la paix intérieure, je trouve ça des machines à broyer et normaliser (j'exagère évidemment). Le moteur de la vie, c'est plutôt le conflit et la discorde.
Bien à vous,
Carmilla
Merci Richard pour ces textes d'Hemingway,
Mais j'avoue être sceptique. "La vérité à la lueur de l'aube", rien que ça ! C'est tout de même un peu bravache. Les héros, la "vérité de l'homme", je n'y crois pas. L'antidote absolue, à cet égard, c'est Louis-Ferdinand Céline : une humanité ballotée, "chiasseuse", qui se carapate comme elle peut. La virilité affichée d'Hemingway, son assurance, sa croyance en une "vérité" de certains hommes, m'apparaît surtout l'envers d'une grande angoisse et d'une incertitude de lui-même.
Je préfère quand même les gens qui éprouvent des doutes. Et je ne parle pas de l'éventuelle misogynie du texte. Je le précise à nouveau : être obsédé ne signifie pas être obsessionnel et inversement.
Enfin, ce que j'écris ci-dessus n'a bien sûr absolument rien à voir avec votre expérience professionnelle propre qui, plutôt que sur une posture, repose avant tout, me semble-t-il, sur l'apprentissage et l'amour du travail bien fait.
Bien à vous,
Carmilla
Bonsoir Carmilla,
Merci pour votre réponse. Pour moi, le mental étant insaisissable, il est rigoureusement inopératoire d’essayer de comprendre ses modes de fonctionnement pour les diriger. Chez moi, en tout cas, cela ne fonctionne pas et il n’y a pas d’histoire policière mais juste une succession d’instants. C’est mon écosystème et évidemment je ne conteste pas qu’il puisse ne pas fonctionner chez d’autres, ou que d’autres schémas, auxquels je n’adhère pas, puissent avoir des résultats.
En réalité, mon commentaire fait suite à une vidéo consternante que j’ai consulté d’une « psy » en vogue sur la façon de traiter Un manipulateur quand on est Une haut potentiel sensible (sans avoir fait les mesures de QI adaptées au CHU bien évidemment), le tout à 90 boules les 30 minutes pour les « clientes ». Le tout également sur la base de définitions extravagantes de la sensation de toxicité (genre, « je me sens mal-à-l’aise en sa présence » ok, what else ?!) et de la manipulation (« il ne m’a pas répondu et est resté silencieux »). C’était… juste… un simple comptoir commercial à la névrose généralisée que vous évoquez plus haut ! Hilarant !
Bien sûr que la séduction est essentielle, mais, pour moi, elle ne se décide pas. Elle est ; et, quand on se sait séduisant et qu’on l’assume, on n’est évidemment victime de rien, et logiquement, dans le monde que vous décrivez justement, on est vite pris pour un bourreau (de rien, si ce n’est de l’ennui).
J’oubliais, sur les juristes : ceux qui rabâchent ce qu’on ne peut pas faire ne sont pas des artisans du droit mais des gestionnaires. Les plus brillants juristes que je connaisse sont tous fiscalistes ; aptes à toujours savoir tracer une action libre dans un code de 10000 pages. Ils sont monstrueux d’intelligence, de finesse, voire de fourberie ; mais ils se mettent trop facilement au service de ceux qui ont déjà tout, ce qui me les rend peu sympathiques.
Bien à vous et bonne soirée.
Alban
Bonsoir Carmilla !
« Nous observâmes Charo qui se déplaçait d'un couvert à l'autre et Mary qui le suivait, s'accroupissant comme lui. Le kongoni était hors de vue à présent, mais nous vîmes Charo s'immobiliser et Mary le rejoindre et lever la carabine. Et puis il y eut la détonation, le ploc puissant de la balle et Charo partit en courant et disparut du champ, Mary sur ses talons.
Mthuka sorti de la route et coupa à travers les fougères et les fleurs jusqu'au moment où nous arrivâmes à la hauteur de Mary et Charo, et du kongoni abattu. Le kongoni ou bubale, n'est pas un bel animal, ni dans la vie ni dans la mort, mais il s'agissait en l'occurrence d'un vieux mâle, très gros et en parfaite condition, et sa longue tête triste, ses yeux vitreux et sa gorge tranchée ne lui ôtaient rien de son charme aux yeux des mangeurs de viande. Les femmes massaï étaient surexcitées et très impressionnées par Miss Mary et ne cessaient de la toucher dans leur émerveillement et leur incrédulité ».
Ernest Hemingway
La vérité à la lumière de l'aube
Page -425-426-
Finalement Memsahib Miss Mary s'est réveillée et elle aura été plus compétente avec son kongoni qu'avec son lion, parce qu'elle ne l'a seulement blessé. Il aura fallu le feu croisé de Hemingway et de G.C pour le tuer. Par contre quelques semaines plus tard, c'est elle qui a repéré le kongoni la première, et elle l'a bien tiré. Ce qui fait d'elle, un incompétente pour abattre un lion et une opérationnelle pour le kongoni.
La vérité à la lumière de l'aube est un très grand livre contrairement à ce qu'en pense plusieurs. C'est celui que je préfère d'Hemingway. Tout ces rapports de force entre les protagonistes, sans oublier les pisteurs qui sont de différentes tribus. C'est un grand passage dans le monde tribal africain et c'est rudement intéressant. C'est terre à terre, d'un réalisme incontournable, je dirais d'un réalisme à la Hemingway, à chaque ligne nous sentons le journaliste.
Ce n'est pas rien, il recevra le Prix Nobel de la littérature en 1954, un an après Winston Churchill. Pas mal pour un homme qui avait tout juste complété son lycée. Bien des intellectuels américains sont morts de jalousie de voir cet homme reconnu au niveau international. Il a été adulé, reconnu, et honoré ; mais aussi détesté et méprisé.
Richard St-Laurent
NB: Je tiens à m'excuser, j'ai fauté hier soir en écrivant : La lumière à la lueur de l'aube, parce que c'est La vérité à la lumière de l'aube.
Le doute.
Je classe Hemingway dans ma bande d'exclus. C'est un écrivain exclu parce qu'il a choisi un autre métier d'exclus, le journalisme. Il fallait avoir du front tout le tour de la tête pour s'expatrier en pleine première guerre mondiale en Europe, parce que Monsieur Hemingway avait été réformé de l'armée américaine à cause d'un problème à un œil. Lorsqu'on songe au tireur de gros qu'il allait devenir, on peut se poser des questions sur les médecins examinateurs. Où aller sur un continent en pleine guerre ? Il a traversé la France et il s'est rendu en Italie et s'est engagé comme brancardier, à l'époque où l'armée italienne en avaient plein les bottes avec les autrichiens. Courir les blessés entre les tranchés est aussi dangereux que de combattre, ce qui lui vaudra d'être blessé grièvement aux jambes et terminera la guerre dans un hôpital américain sur le front autrichien, où il rencontrera le premier amour de sa vie. Ce qui donnera dix ans plus tard un roman proche du récit : L'adieu aux Armes. Dans les faits il aura autant été blessé physiquement qu'amoureusement dans son existence. La belle infirmière l'avait largué parce qu'elle était plus âgée que lui et ne voyait pas d'avenir avec ce jeune homme. Après, il aura été correspondant à Paris, pour un journal canadien : Le Toronto Star et aussi divers magazines. Il en découlera un charmant petit livre : Paris est une fête. Il faisait parti de la fameuse génération perdue dont parle Gertrude Stein, qui errait dans un Paris d'après guerre. Puis, il y a eu la Guerre Civile espagnole où il sera reporter de guerre. Il accumulait les expériences comme les accidents d'automobiles et les naufrages amoureux. Puis, il sera correspondant de guerre en Europe lors du deuxième conflit mondial. Il participera à la libération de Paris où il a fait le coup de feu, la fameuse histoire du Ritz, ce qui a fait sortir les généraux américains de leurs bottines. Ce n'était pas un grand séducteur, mais il avait un don certain pour se faire détester autant par les généraux que par les femmes. Après la guerre viendra la reconnaissance. Il publiera un petit roman au début des années cinquante. Le vieil homme et la mer. C'est l'histoire d'un vieux pêcheur pauvre à Cuba qui va livrer un combat avec un énorme marlin, combat courageux qu'il gagnera, mais perdra son poisson dévoré par les requins. C'est le premier livre d'Hemingway que j'ai lu. Cette pêche, en résumé, ressemble à sa vie, livrer bataille, gagner, puis perdre. Après le récit de: La vérité à la lumière de l'aube, il sera victime de deux accidents d'avion toujours en Afrique après son safari. Il disait qu'il est permis de douter jusqu'à un certain point, après, le doute n'était plus permis, il fallait se lancer.
Je suis très confortable avec ce genre d'exclus.
Bonne fin de nuit Carmilla
Richard St-Laurent
Merci Alban,
Je me méfie beaucoup également de tous les "psys" qui encombrent les magazines féminins et émissions télévisées, qui voient partout des harceleurs, des pervers narcissiques, des bipolaires. C'est de la psychologie comportementale moralisatrice, presque policière.
La psychanalyse, c'est pour moi bien différent. Ça a d'abord une dimension philosophique et elle est effectivement enseignée, en France, dans les départements de philosophie. D'une manière générale, la psychanalyse vous conduit à éviter de formuler des "diagnostics" sur les autres. Il s'agit plutôt de repérer quelques "logiques" du désir.
Quant à la séduction, je n'ai pas d'avis tranché mais il me semble qu'il y a, du moins, des gens qui renoncent à la séduction et la refusent.
S'agissant enfin du Droit, je me suis autorisée, dans mon post à venir, quelques réflexions qui, je l'espère, n'apparaîtront pas trop farfelues. Il peut y avoir un aspect presque démiurgique du Droit, confinant à la toute puissance. On sent bien que les grands avocats, les grands juristes, ont le sentiment d'avoir échafaudé un monde supérieur, au dessus des contingences.
Bien à vous,
Carmilla
Merci Richard,
J'ai du mal à vous parler d'Hemingway parce que je n'ai quasiment rien lu de lui.
J'ai l'impression, quand même, qu'il tombe progressivement dans l'oubli. Un peu comme pour Malraux en France, cette littérature de l'engagement apparaît "faussée" parce que les "vérités supérieures" ça n'existe pas.
Je reconnais toutefois qu'il a eu une vie hors du commun, extraordinaire. Affronter la mort, il y trouvait sa dignité, son identité. Mais est-ce qu'une vie se résume aux événements historiques que l'on a traversés ? Est-ce que la littérature, c'est l'Histoire ?
Excusez-moi si j'écris des bêtises.
Bien à vous,
Carmilla
Bien sûr! Rien de farfelu.
Et c'est une excellente intuition que vous avez eue! En ce sens, le droit et la psychanalyse (telle que vous la décrivez car je la connais peu) peuvent constituer des objets philosophiques.
Votre commentaire sur la toute-puissance m'a évoqué les Six Livres de la République de Jean Bodin qui est en Europe l'un des premiers théoriciens de l'Etat au sens moderne du terme, qu'il caractérise en tant que seul titulaire de "la Puissance suprême de commandement", contribuant ainsi à définir la souveraineté, l'absolutisme et à séculariser le pouvoir politique et ses objets (Paris, 1576) : la Loi, la Guerre, la Justice, l'Ordre et la Sujétion. Nous y sommes encore complètement empêtrés, ce qui permet aussi de comprendre à quel point nos sociétés "libérales" ne sont pas, ne peuvent pas, être libres ! (mais c'est sûrement un autre sujet :-)
Bien à vous et bonne soirée.
Alban
Bonsoir Carmilla !
La littérature s'inspire fréquemment de l'Histoire, un peu comme cette plongée vertigineuse que je suis en train de faire dans le dernier Ken Follett qui s'intitule : Avant les piliers de la terre, le crépuscule et l'aube ; mais l'Histoire n'a pas d'inspiration, elle est ou n'est pas, c'est comme l'amour ou la séduction, qui sont ou bien ne sont pas. Ils vous tombent dessus comme un orage violent qui détruit tout sur son passage, pour vous retrouver une heure plus tard sous un soleil éclatant devant les dévastations. Autrement dit, la littérature à besoin de l'Histoire, mais l'Histoire n'a pas besoin de la littérature.
Il y a de ces gens qui traversent l'Histoire dans la plus grande indifférence. Ils ne ressentent rien devant les faits historiques même s'ils en subissent les conséquences. La pandémie en est un bel exemple présentement. Pour d'autres, ils carburent à l'Histoire, Hemingway, tout comme Malraux que vous évoquez, ou encore Churchill, et que dire de Romain Gary, pour n'en nommer quelques uns, carburaient solide à l'Histoire.
Si la (Vérité Supérieure) n'existe pas, il n'y aurait pas d'État d'Israël aujourd'hui. J'ai un faible pour les photographies de guerre et surtout pour les photos de groupe de fantassins, surtout celles qui sont prises à chaud sans mise en scène. Ce que je regarde attentivement, se sont les visages, et surtout les regards. Surtout si tu ignores que dans dix minutes tu peux être pulvériser par une explosion, ou te retrouver le lendemain matin accroché à un bout de planche en Méditerranée parce que tu n'a plus de pays et que tu as été refoulé à la mer. Même chose pour les pompiers qui partent au feu. Je regarde les visages de ces hommes qui grimpent dans les camions, pas un sourire, pas une parole chacun avec ses affaires, que dire, avec sa propre vérité. Peu importe la nature de cette vérité, c'est un puissant carburant. Nous pouvons nous interroger sur la nature de cette vérité ; mais sans vérité tu n'as rien à faire, ni sur un champ de bataille, ni devant un incendie et encore moins devant un feu de forêt.
Tant qu'à Follett, c'est un auteur que je visite occasionnellement, parce que c'est un bon romancier de l'Histoire. J'avais bien apprécié : Les piliers de la terre dont le sujet était les constructeurs de cathédrales au Moyen-Age. Le crépuscule et l'aube se déroule en l'an 997 sur les rives de l'Angleterre alors que les Vikings écumaient l'Europe.
Tant qu'à glisser dans l'oublie, j'en doute. Lorsque j'entre dans une librairie et que je fouille dans le rayons des livres de poches, à la lettre H, je retrouve toujours quelques bouquins d'Hemingway. Faut pas oublier, il est dans la classe de Steinbeck, Faulkner, Miller, qui n'étaient pas des petites pointures.
Merci de votre commentaire
Bonne nuit
Richard St-Laurent
Merci Alban,
Il me semble que le Droit est inséparable de la violence qu'il a pour finalité de détourner, réprimer. C'est sa fonction pacificatrice et, dans l'histoire des sociétés humaines, il a mis fin aux mécanismes du bouc émissaire et des vengeances.
Mais l’État en est ainsi venu à détenir un monopole de la violence. Un immense sujet...
Bien à vous,
Carmilla
Merci Richard,
On a vite fait de se brûler les ailes à trop adhérer à ce que l'on croit être le "sens de l'Histoire".
J'ai personnellement davantage été marquée par les campagnes napoléoniennes de Stendhal et sa description de la bataille de Waterloo dans "La Chartreuse de Parme". Il entretient une étrange distance avec l'Histoire. L'homme ne s'y résume pas. Napoléon, Churchill, n'étaient pas que des chefs de guerre.
Quant aux grands noms de la littérature, il y a un reclassement perpétuel des valeurs établies. En France, qui lit encore (en dehors de profs et d'étudiants) Sartre, Gide, Malraux, Aragon, de Beauvoir, Giono, Giraudoux ? Leur influence est restreinte, les préoccupations, les perceptions, ne sont plus les mêmes. Romain Gary, en revanche, après être quasiment tombé dans l'oubli, est redevenu curieusement populaire. Mais il a traversé l'histoire sans jamais y adhérer complétement. C'était un combat personnel.
Bien à vous,
Carmilla
Oui, c'est la conception sociologique prussienne de la fin du XIXème siècle. Elle est aujourd'hui extravagante et au demeurant bien réelle.
Imaginons que l'Etat, qui est une personne ne l'oublions pas, soit expertisé dans ses attributs par un psy. Il serait immédiatement interné en tant que dangereux pervers immature :-)
Raisons pour laquelle c'est à l'Homme d'être libre, et à personne d'autre.
Bien à vous et merci pour ce rebond!
Alban
Bonjour Carmilla
Merci pour vos commentaires
« Qu'elle est la différente entre une Vérité Supérieure et le sens de l'Histoire ? »
Bonne fin de journée
Richard St-Laurent
Merci Richard,
Il me semble que tous ceux qui croient en une vérité supérieure (le christianisme, le communisme) font de son avènement le sens de l'histoire. Ce sont aussi tous les mouvements messianiques.
Je trouve tout cela très dangereux.
Si l'Histoire a un sens, j'espère qu'il est bien celui indiqué par le philosophe Hegel: le progrès de la Raison. J'y crois malgré tout.
Bien à vous,
Carmilla
Le christianisme et le communisme ont au moins ceci en commun, au delà de leurs énormes différences : la croyance en un paradis futur. Après la mort pour le christianisme (et la plupart des autres religions), dans un futur terrestre éloigné, qui sera atteint par des épreuves et des phases intermédiaires (la collectivisation, la "dictature du prolétariat"...) pour le communisme.
Merci Nuages,
C'est vrai qu'avec le Christianisme, on rentre dans l'Histoire. A un temps cyclique et répétitif, on a substitué une progression linéaire. On accède à l'espoir mais aussi à l'incertitude.
Je crois que c'est très positif. Ça s'accorde avec la passion humaine de la découverte et du savoir. Mais communisme et christianisme envisagent aussi, avec une révélation de la Vérité, une fin de l'Histoire. Et c'est cela qui est sans doute très inquiétant.
Bien à vous,
Carmilla
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