samedi 7 août 2021

Apocalypse de l'esprit

 

J'ai profité du confinement pour remettre à niveau toutes mes "babioles électroniques". Pour essayer, en fait, d'apparaître à la pointe de la modernité et surtout, ne pas apparaître ringarde et dépassée. Mais il est évident qu'on a quand même toujours un temps de retard quelque part.

Mais bon, ça y est ! Je suis maintenant pourvue d'un ordinateur avec un processeur Intel Core i7, d'un téléviseur LG Oled 4k nouvelle génération et d'un smartphone 5 G. Pour éviter de me perdre dans le choix infini des "bonnes affaires", j'applique le précepte slave de mon père qu'il nous ressassait continuellement : "Les choses chères sont les choses bon marché et les choses bon marché sont les choses chères".

Je suis donc maintenant provisoirement "au Top" et c'est vrai que tous ces joujoux ont quelque chose de bluffant. Surtout pour moi qui ai été entretenue dans le souvenir des déboires de la technologie soviétique : les téléviseurs qui explosaient inopinément et qui réclamaient beaucoup d'imagination pour identifier des personnages au sein de tâches grisâtres; les téléphones très rares et dans les quels il fallait hurler quand on parvenait miraculeusement à obtenir une communication. Quant aux ordinateurs, leur utilisation par des particuliers relevait de la science-fiction.

Je pourrais donc être contente, frimer avec ça, mais le problème, c'est que je ne sais trop à quoi employer tout ce bazar. Ça me rend aussi perplexe qu'une poule devant un couteau.

Le pire, c'est le smartphone. Toutes mes copines me disent que c'est génial et qu'elles font tout avec ça. Et puis, quand je suis dans le métro ou dans un train, je suis stupéfaite de constater qu'absolument tout le monde tue le temps ou s'occupe aujourd'hui en bidouillant sur son truc. C'est vraiment un formidable aspirateur d'attention et cette aspiration, elle se fait au détriment de tout le reste, pas seulement de la lecture d'un journal ou d'un roman mais de la simple attention à son environnement immédiat, naturel et humain. C'est tout en consultant son smartphone qu'on visite maintenant  les Grandes Pyramides, fait le tour du Mont Blanc ou participe à un repas familial. La plus grande détresse éprouvée, c'est quand on a perdu, pendant un ou deux jours, son joujou. Heureusement, on peut, aujourd'hui, s'en procurer un nouveau quasi immédiatement.

Je me dis souvent que je suis précocement ringarde ou pas "normale" parce que je suis complétement hermétique à ça. Je refuse, en fait, de sombrer dans cette addiction parce que j'aurais l'impression que je ne pourrais plus tout dominer et que je ne serais plus moi-même : je me transformerais en un stupide poisson rouge qui se précipite sur l'appât que lui tend un pêcheur pour l'hameçonner. 

Sur un smartphone, hormis le téléphone, tout le reste m'apparaît, en fait, à peu près superflu. Photographier, filmer avec un smartphone, ça m'apparaît miteux et presque grotesque, comme si un duplicata de sa vie parvenait à l'arracher à sa médiocrité. Les réseaux sociaux, Facebook, Instagram, Tik Tok, Twitter, je pense que ça convient surtout à des ados rageurs, en quête de reconnaissance. Les sites de rencontre, je n'ai pas encore besoin de ça, il m'est plus simple de m'asseoir à la terrasse d'un café chic. 

Quant aux multiples applications, aux aides à la décision, je ne veux surtout pas de ça : c'est à force de tout déléguer à des prothèses électroniques qu'on perd ses capacités de mémoire et de réflexion. A contrecourant de la modernité, je continue ainsi de pratiquer le calcul mental et d'essayer d'"avoir tout dans la tête", agendas, rapports, compte rendus de réunions. Même la fonction GPS du smartphone, je ne la consulte qu'en dernier ressort. Suivre bêtement une flèche,  très peu pour moi. Je préfère être d'abord imprégnée d'une carte géographique.

Tous ces objets sont pourtant révolutionnaires, je le reconnais volontiers, et ont profondément bouleversé nos relations sociales. En théorie, ce sont des outils fabuleux qui devraient nous permettre d'avoir accès à une immense partie des connaissances humaines. On pouvait espérer qu'avec eux, la science et la technologie allaient libérer l'humanité, la rendre plus tolérante et éclairée.

On sait bien qu'il n'en est rien et que le niveau culturel des populations n'a guère progressé avec leur introduction massive. On voit même souvent en eux un instrument d'abrutissement des masses qui nous rendrait bêtes et nous ferait subir un lavage de cerveau. La doxa considère même qu'ils s'agit d'excroissances du capitalisme, d'une grande manipulation mondiale visant à asservir les masses. C'est cette idée, quasi généralisée, d'une grande décision concertée cherchant à organiser la misère intellectuelle des masses. C'est finalement cette vision un peu rousseauiste d'un homme naturellement bon qui serait perverti, manipulé, par la société.


 On pense alors que l'offre crée la demande et on refuse en fait, avec force, cette idée que l'offre médiatique s'ajusterait simplement à nos appétits les plus immédiats. On répugne à envisager que cette offre dévoile et révèle simplement nos appétences et désirs. On préfère se référer à une anthropologie naïve, celle d'un homme rationnel, bon et pacifique par nature.

Nul doute pourtant que si tout le monde était épris d'Art et de culture, l'offre médiatique s'adapterait immédiatement. En fait, la réalité de notre fonctionnement psychique est beaucoup moins reluisante que l'Homme ne l'affirme. Toutes les études effectuées mettent en effet en évidence notre goût immodéré pour la conflictualité, le raccourci intellectuel (le "buzz"), l'exhibition sociale,  le sexe, l'humiliation de l'autre. A toutes ces passions souvent cruelles, les réseaux sociaux offrent un extraordinaire terrain de jeu.

Je me garderai bien de condamner ces passions au nom de la Morale. Je n'ai jamais cru en la sainteté de l'homme. Le premier problème, c'est que la violence peut maintenant s'exprimer en toute liberté et toute impunité. Mais ce n'est peut-être pas la chose la plus grave si ça permet, du moins, de fournir un exutoire et une compensation aux frustrations de ceux qui se jugent opprimés.

Le plus inquiétant peut-être, c'est qu'aujourd'hui le marché de l'offre médiatique est entièrement dérégulé, sans limites. Surtout, cette offre est en train d'aspirer, de siphonner, la quasi totalité de nos disponibilités mentales en exerçant une irrésistible attraction sur nos pulsions primaires. Il s'agit d'un véritable hold-up, une captation, un détournement généralisés de notre attention et de nos facultés intellectuelles. Et on consent bien volontiers à cette nouvelle servitude à tel point qu'on y consacre  maintenant presque tous nos loisirs, à pianoter frénétiquement, dans une folle addiction, sur nos smartphones. Tout notre "temps de cerveau disponible", il est aujourd'hui occupé, pillé, par les gadgets électroniques et les réseaux sociaux qui offrent, à bon compte, satisfaction à nos impulsions et affects.

Une grande civilisation de la culture, de l'esprit et de la "paix perpétuelle", ce n'est donc pas ce qui s'annonce aujourd'hui. On parle plutôt d'une véritable "apocalypse cognitive". Peut-être ! Ce qui est sûr, c'est qu'on vit une époque de tétanisation et de sidération mentale. On devient de plus en plus des "zombies" au comportement cruel et mécanique.


Peut-être finalement que notre époque est celle du mythe grec de Méduse, curieusement oublié. Les Méduses, c'étaient ces sœurs transformées par Athéna en monstres immobiles et à la chevelure formée de serpents. Il fallait surtout éviter d'en croiser le regard parce qu'il vous transformait instantanément en pierre. C'est bien cela notre époque : on est littéralement médusés, pétrifiés, face aux nouveau réseaux sociaux.

Quelques illustrations du mythe de Méduse par Rubens, Le Caravage, Arnold Böcklin, Fernand Khnopff, Jean Delville, Maximilian Pirner, Franz Von Stück, Laura Dreyfus Barney, Kotarbinsky,Wilhelm Trübner, Edward Burne-Jones

Ce post s'inscrit dans le prolongement de ma découverte récente des travaux de Gérald Bronner, sociologue dont les points de vue m'apparaissent radicalement novateurs. Il s'attache en particulier à l'analyse des mécanismes de l'esprit. C'est bien sûr critiquable mais ça se révèle fécond. C'est également à rapprocher des travaux de la "nouvelle économie comportementale" (Daniel Kahneman et Richard Thaler, prix Nobel d'économie en 2002 et 2017). 

De Gérald Bronner, je recommande tout particulièrement :

- "Apocalypse cognitive", (PUF, janvier 2021)

- "Cabinet de curiosités sociales" (PUF 2018). Ce second livre, agréable et stimulant, constitue une excellente introduction à son œuvre.

On trouve, par ailleurs, en poche les livres de Daniel Kahneman ("Système 1 Système 2 Les deux vitesses de la pensée") et Richard Thaler ("Les découvertes de l'économie comportementale"). Cette insertion de la psychologie dans l'économie ne m'apparaît pas fondamentale mais c'est quand même intéressant.


12 commentaires:

Nuages a dit…

Comme vous le savez probablement, je n'ai pas de smartphone, je n'ai même jamais eu de téléphone portable. Ce n'est pas du dogmatisme, c'est simplement que je veux m'épargner une possible dépendance, et aussi parce que je n'en ai pas vraiment besoin. Et je suis aussi consterné par ce spectacle désolant : tout le monde les yeux et les doigts rivés sur son "bidule", comme je l'appelle.

Je passe en revanche beaucoup de temps sur internet, mais pas sur les réseaux sociaux (ni Facebook, ni Twitter, ni rien). Mais plutôt pour me documenter, m'informer, voir des vidéos intéressantes sur Youtube. J'aime beaucoup, en particulier, deux chaînes rationalistes sceptiques, que je vous conseille vivement : "la Tronche en biais", du biologiste Thomas Durand, et "Méta de choc", de l'ancienne adepte du New Age aujourd'hui rationaliste sceptique, Elisabeth Feytit.

Quant à la technologie, je ne suis pas au top et je ne cherche pas à l'être. J'ai quand même deux portables Apple, dont l'un n'est pas trop ancien et me convient très bien (et qui a encore l'immense avantage d'avoir un lecteur DVD incorporé, ce qui est indispensable pour moi pour visionner des films sur mon canapé, l'ordi sur les genoux), une radio internet Sangean qui me permet, par sa liaison wifi avec mon modem, d'avoir accès à toutes les stations de radio que je veux (les préférées étant France-Inter et France-Culture, RFI étant bien aussi), et aussi un bon hybride Fuji avec deux zooms et deux focales fixes. Faire le choix de la technologie qui m'est utile, bénéfique, et me passer du reste.

Enfin, j'aime aussi beaucoup Gérald Bronner, dont j'ai lu quelques livres, dont "La démocratie des crédules". Je vous recommande aussi "L'opium des imbéciles", de Rudy Reichstadt, sur le complotisme.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/09/25/l-opium-des-imbeciles-rudy-reichstadt-vent-debout-contre-la-tolerance-au-complotisme_6012933_3232.html

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages,

Il y a encore quelques "résistants", comme vous, au smartphone.

Je comprends très bien cette démarche mais j'avoue que j'aurais du mal à me passer de la fonction téléphone. Et puis, pour des besoins professionnels, j'ai besoin de recevoir, en continu, mes mails vraiment très nombreux. Mais j'avais autrefois des "Blackberry" qui étaient justement très bien adaptés à une activité professionnelle, ce qui n'est pas le cas des smartphones et i-phones plutôt orientés jeux, loisirs, rencontres. Le problème, c'est que ça va devenir difficile de ne pas avoir de smartphone. Beaucoup de paiements s'effectuent en effet aujourd'hui avec le smartphone (à Paris, le stationnement ou la location d'une trottinette ou d'un vélo). Et que dire du fameux pass sanitaire plus difficile à scanner sur support papier ?

Les lecteurs DVD, ça a en effet disparu des nouveaux ordinateurs. Mais il faut reconnaître que leur rapidité est devenue extraordinaire. L'accès aux sites Internet est devenu quasi immédiat.

Mais dans ces nouvelles technologies, le plus impressionnant, pour moi, c'est la télévision. Avec la technologie Oled et la 4 K, on dispose aujourd'hui d'une qualité d'image quasi équivalente à celle d'une salle de cinéma. Ça vaut vraiment le coup quand on est cinéphile et ça n'est même pas très cher.

Les complotistes fleurissent évidemment avec les réseaux sociaux. Avec ces satanés smartphones, on se prépare un avenir pas forcément radieux. Ils développent une addiction bien supérieure à celle du seul Internet. Je vais m'intéresser à Rudy Reichstadt que je ne connaissais pas.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonsoir Carmilla!

Nous avons beaucoup de contenants, mais peu de contenu. Nous avons les moyens, mais nous ignorons comment nous en servir à bon escient, pour se distraire ça va, mais pour penser ce monde nouveau, nous errons. La substance nous effraye. La peur de la réalité nous tenaille.

Hier, j’ai été appelé pour ma deuxième dose de vaccin. Lorsque je suis arrivé au centre de vaccination, je me suis stationné près d’une camionnette. La chaleur était insoutenable, les fenêtres de nos véhicules étaient toutes ouvertes. Il y avait un type dans la camionnette au près de laquelle je m’étais stationné, casqué, lunette noire, habillé en jaune, le genre de ceux qui font la circulation sur les chantiers de construction. Assis devant son volant, il regardait intensément l’écran de son téléphone intelligent. Ce que je peux détester ce genre d’appellation, (téléphone intelligent), est-ce que j’affirme que mon marteau est intelligent? Certes pas, c’est un outil comme le téléphone, pas plus, par moins. Cette camionnette était à contre jour et l’intérieur était très sombre. Je distinguais mal. La personne à l’intérieur n’a jamais levé la tête, n’a jamais regardé vers moi, elle était beaucoup trop occupée, elle ne s’est jamais rendu compte qu’il y avait quelqu’un près d’elle qui l’observait. Je l’a regardais pianoter sur son appareil, lorsque je me suis rendu compte que ses longs ongles peinturés en bleu, au bout de ses doigts fins, ne pouvait appartenir qu’à une femme. La méprise était complète . C’était une femme. Le tout confirmé pas son anneau dans le nez. Je me suis retenu de ne pas rire. Puis, je me suis dirigé vers le centre de vaccination. Ici, présentement au Québec, c’est le cas de le dire, on vaccine à mort pour sauver des vies. On m’avait appelé la veille pour devancer mon vaccin. Si les autorités sanitaires agissent ainsi c’est qu’il y a de l’inquiétude dans l’air à cause des variants. Au Québec présentement 70% de la population a été vacciné pour une première dose, 60% ont complété la deuxième dose.

Une fois passé l’accueille pour l’identification, ont est posté en attente sur une file à deux mètres de distances des uns et des autres et pas question de transgresser, il y a des infirmières qui veillent au grain. Soudain, je me retourne, et qui je vois, la dame en jaune avec son casque de sécurité, ses lunettes fumées, et toujours occupée sur son bidule. Elle est dans un autre univers. On dirait une zombie. Le monde autour d’elle n’existe pas.

Je reçois mon vaccin, puis je vais m’asseoir dans la grande salle pour une quinzaine de minutes question de savoir si je va faire une réaction. Je dois dire que si mon scotch faisait aussi peu d’effet que le vaccin, j’arrêterais de boire immédiatement. Qu’est-ce que je vois apparaître? La dame en jaune scotchée sur son écran qui vient s’asseoir à quelques mètres de moi. J’ignorais qu’on vaccinait les zombies.

Cette personne, depuis que je l’ai aperçu dans sa camionnette n’a jamais levé les yeux de son écran. Elle a toujours son appareil en main et ne cesse de pianoter. J’ignorais qu’on pouvait vivre dans le monde réel et dans le monde virtuelle à la fois. Parole d’un homme du Néandertal. Personnellement, je suis un primitif , un déclassé, un dépassé, moi qui n’ait jamais eu un téléphone à poche!

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Cette petite histoire est un cas banal parmi tant d’autres. Et, les gens qui me connaissent peuvent facilement comprendre qu’il m’arrive de décrocher devant cette masse d’humains plantés comme des poteaux devant leur téléphone, non pas intelligent, mais à poche. Je préfère les grands arbres de la forêt, le silence des prairies, et mes pierres méditatives. Il me faut ces moments de reculs pour comprendre cette nouvelle masse d’humains esclaves de leur technologie. Alors, je fais comme au printemps dernier, je vais dans une autre dimension, au grand air, en laissant les pensées venir à moi, en m’interrogeant sur cette société. Je suis peut-être un être rustique et primitif, je n’en pense pas moins. Je ne suis pas un anti-communication, ni anti-technologie. J’ai déploré souvent nos pannes de radios en vol lorsque je volais dans le nord du Québec. Mais, communiquer c’est passer un message, cela peut-être un appel de détresse ou une demande de renseignements météorologiques. Là où ça compte vraiment. Certes, tous ces gens accrochés à leur téléphone à poche communique beaucoup, mais souvent inutilement pour ne rien dire.

Je présume que la dame en jaune de mon histoire, n’a jamais lu Michel de Montaigne, ni Étienne de la Boétie, encore moins Emile Cioran, ni Albert Camus et que Daniel Hehneman demeure pour cette personne un parfait inconnu. Ce qui signifie que dans nos trépidations intempestives nous ne savons plus décrocher. Nous n’arrivons plus à nous concentrer.

Je suis content Carmilla que vous avez évoqué Daniel Hehneman et son ouvrage : Système 1 et Système 2 qui est très révélateur sur nos manières de penser. Le système un est séduisant, parce qu’il est rapide, facile, réactionnaire, instinctif. La majorité des personnes pensent en Système 1, je dirais que c’est le temps court. Le système 2 est moins attrayant, parce qu’il demande des efforts de réflexions, qu’il est moins séduisant, plus difficile, plus complexe, mais il fait aussi parti de nos existences, c’est le temps long, ce qui répugne à beaucoup de gens. Nous vivons présentement une époque de temps court. Nous désirons tout, rapidement, sans effort, et surtout sans douleur. En cela, nous pouvons nous en référer à cette pandémie, cette crise sanitaire que nous vivons présentement, cette époque exige de nous des sacrifices, de nouvelles manières de faire et peut-être même de nouvelles conceptions. Cette crise touche le temps long. Je constate, que pour plusieurs, c’est douloureux. Attendez, c’est loin d’être terminé.

J’ai toujours été passionné de la manière donc l’humain pense, mais aussi de la manière dont il est influencé que se soit pour l’achat d’un produit, sa manière de voter, ses croyances religieuses ou politiques. Posons-nous la question, avons-nous besoin de tous les produits qu’on nous propose? Pourquoi nous sentons-nous aussi impuissant pour changer le cours des événements? Ce sont juste quelques questions très simples en passant. Pourtant nous nous laissons entraîner par des modes, des technologies qui finissent par nous dominer, des addictions dommageables, pour nous réfugier dans le placard de l’angoisse. De quoi avons-nous peur? Serais-ce de nous-mêmes?

Bonne nuit Carmilla pour ce qui en reste la-bas sur la France
Richard St-Laurent

Nuages a dit…

Bravo Richard pour votre deuxième dose ! Nous sommes ainsi, Carmilla, vous et moi, et plein d'autres, la majorité désormais (mais c'est encore insuffisant), protégés contre ce virus qui empoisonne nos vies. Hier cependant, 230.000 personnes, en France, ont manifesté contre le pass sanitaire, et beaucoup d'entre elles manifestaient en fait contre des vaccins fiables, utiles et gratuits.

Je suis heureux de partager mon opinion sur les smartphones avec vous, Carmilla, Richard. La description de la femme en jaune et noir, aux longs ongles bleus, rivée à son bidule, était édifiante.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard et Nuages,

Je suis, habituellement, favorable aux nouvelles technologies. Le développement d'Internet m'est ainsi apparu enthousiasmant parce qu'il favorisait un accès généralisé à la culture et à l'information. En plus Internet repose sur une démarche active et sollicite nos capacités d'écriture, ce qui constitue une rupture avec le spectateur passif de la télévision.

Mais avec le smartphone, on passe à tout autre chose et, sans faire de morale, on est en droit de s'interroger. On consulte beaucoup moins l'Internet "sérieux" sur un smartphone. On recherche plutôt des jeux, des réseaux sociaux, des adresses de loisirs, des sites de rencontre, du porno. De la culture, il n'y en a quasiment pas.

Je ne condamne pas ça mais ce qui m'apparaît inquiétant, c'est qu'on y consacre (en particulier les jeunes, enfants et adolescents) la presque totalité de ses loisirs et de son temps libre. On est en effet en train de fabriquer des générations de zombies dont la curiosité intellectuelle, l'ouverture aux autres et la tolérance ne seront pas les qualités premières.

Quant aux vaccins, j'ai, récemment, bien rigolé des propos de Brigitte Bardot préconisant d'attendre pour pouvoir en évaluer les effets secondaires. Je ne doute pas de ses compétences scientifiques mais, à son âge, 86 ans, elle risque surtout de n'avoir pas trop à attendre. Elle n'est hélas pas la seule "célébrité" (Annie Duperey, Juliette Binoche, Sophie Marceau)à diffuser de pareilles âneries. Je trouve ça consternant.

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla!

Merci à vous Carmilla et Nuages.

Je n’ai fais que mon devoir de citoyen, ni plus, ni moins. C’est d’un minimum vital. Protéger les autres pour se protéger soi-même. Malgré nos deux vaccins, la prudence reste de mise. Le virus est encore bien présent. Pour l’heure, ici au Québec nous nous en sortons bien, mais pas question de crier victoire parce qu’au cours de la dernière semaine au niveau provinciale, il y a une légère augmentation des cas d’infections. On dirait que le même scénario se répète, et qui ressemble à celui de l’an dernier. À l’été 2020 c’est à la fin juillet et début août que les cas ont recommencé à augmenter. On connaît le restant de l’histoire et l’horreur que nous avons vécu au cours de l’automne et du début de l’hiver. Maintenant nous pourrons constater ce que valent les vaccins qu’on nous a administrés. Le temps de l’épreuve est arrivée.

Autre question qui demeure en suspend parce que les scientifiques ne sont pas d’accord sur le sujet. Le taux de vaccination maximale dans une population afin de provoquer l’immunité collective. On évoquait 70% l’hiver dernier, maintenant le doute plane, on parle même de dépasser 90% de personne vaccinés à deux doses. Cela ne sera pas donné. Rien ne sera facile, mais nous pouvons nous en sortir. Ce qui est inquiétant, c’est la situation sanitaire internationale. Je souligne des pays comme le Brésil, l’Inde, la Russie, et même les USA, où les cas augmentent continuellement et où la vaccination stagne. On rapportait des journées totalisant 18,000 cas de nouvelles infections en Floride la semaine dernière. Rien de rassurant pour la suite du monde. Qui plus est, la frontière canadienne ouvrira demain. Tant qu’à moi, elle pourrait demeurer fermer pendant encore un bout de temps.

Dans votre texte Carmilla, vous avez évoquée l’utilité de toutes les fonctions de nos bidules électroniques et en parti de nos téléphones portables. Il semblerait qu’on puisse tout faire avec cette quincaillerie, mais il y a un fait qu’on évite de souligner, on peut les mettre hors circuit, il doit encore y avoir un piton on et off. Avons-nous abdiqué nos libertés? Je ne sais pas. Je n’ai jamais eu de téléphone à poche. J’ai un vieux téléphone conventionnel et comme ordinateur un vieux IBM 2004 qui fonctionne encore et qui me sert exclusivement à écrire et un autre plus récent pour aller sur le web et sur lequel je vous écris présentement, un Toshiba 2010. Plus ringard que moi, je pense que ça n’existe pas. Tout ce que j’utilise, je l’use à la corde, peu importe, vêtements, machineries, outils, ordinateurs, je ruine tout ce que je touche.

Tant qu’à Gérald Bronner, je ne connais pas, mais en lisant quelques résumés sur la toile : La démocratie des crédules et Apocalypse cognitive, j’ai senti que ça m’interpellait. Je pense que nous allons avoir l’occasion de nous en reparler.

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

En France, le variant indien ou variant delta progresse maintenant à toute allure du fait d'une contagiosité très forte. Le nombre de cas quotidiens est élevé (25 000 environ) mais la mortalité demeure contenue.

On ne sait absolument pas quand on va s'en sortir et quand, en particulier, on pourra, à nouveau, voyager librement (les Français ne peuvent guère aller au-delà de l'Europe). On estime en effet qu'il faudrait atteindre un taux de vaccination d'au moins 80 % pour aboutir à l'immunité collective. Aujourd'hui, en France, on est à 65 % pour au moins 1 dose et 50 % pour les 2 doses. Il est à noter que ces taux ont très fortement progressé depuis qu'a été annoncée la généralisation du passe sanitaire à tous les lieux publics (cafés, restaurants, cinémas, centres de sports et loisirs, trains, avions, grands centres commerciaux, musées etc...). La France qui comptait beaucoup d'antivax au départ est aujourd'hui l'un des pays les mieux vaccinés, preuve qu'un dispositif de responsabilisation est efficace.

Concernant les bidules électroniques, je comprends qu'on soit très réservé avec ça (c'est quand même très puéril) mais j'ai, personnellement, tendance à céder aux nouveautés même si je n'en fais ensuite qu'un usage très modéré (je n'aime pas être sous la dépendance de quoi que ce soit). Et puis les vies quotidiennes et professionnelles font qu'il devient impossible de s'en passer. On vous demande maintenant sans cesse de scanner un QR code et votre numéro de portable. Il faut enfin reconnaître que les progrès techniques de ces appareils sont fulgurants et impressionnants. Un ordinateur d'aujourd'hui, ça n'a à peu près rien à voir avec un ordinateur d'il y a seulement 5 ans. Leur rapidité est telle qu'on gagne pas mal de temps.

Gérald Bronner, c'est évidement très intéressant et agréable à lire. Je ne connaissais pas non plus il y a seulement 6 mois. Les deux titres que vous évoquez sont excellents mais n'oubliez pas non plus le "Cabinet de curiosités sociales". Et vous pourrez ensuite prolonger avec l'économie comportementale (largement américaine). Je pense que c'est très intéressant quand on exerce une activité commerciale. Pour la vente d'un produit, la façon dont est présentée une offre joue un rôle important.

Bien à vous,

Carmilla

Nuages a dit…

En Belgique, la vaccination avait commencé de manière lente et chaotique, mais à présent c'est un grand succès :
70 % de la population totale a eu une première dose, 61,5 % a eu deux doses (les chiffres pour les adultes de 18 ans et plus sont respectivement de 83,8 et 76 %). C'est très bien, mais encore insuffisant, s'il faut atteindre 80 % de vaccinés pour atteindre l'immunité collective. La quatrième vague n'est pas là à proprement parler, même si les chiffres montent lentement.
Pas encore de pass sanitaire en vue, comme en France.

Richard a dit…

 Si l’espèce humaine commence à être de moins en moins empathique et analytique, nous serons gouvernés par des démagogues »
Maryanne Wolf

Bonjour Carmilla

Qui est Maryanne Wolf? C’est une chercheuse américaine en neurosciences cognitives. Elle est l’auteure de : Proust et le Calamar. (Livre que je n’arrive pas à me procurer, éditer par un petit éditeur en France : Abeille et Castor.

Ses recherches et ses propos touchent directement votre texte Carmilla. La lecture possède plusieurs facettes, selon Wolf on ne lit pas de la même manière sur papier qu’à l’écran et cela modifie notre manière de penser, crée de nouvelles connexions au cerveau, donc modifie nos perceptions. Elle souligne nos difficultés de concentrations.

Elle affirme d’autre part que ce n’est pas le médium qui l’intéresse, c’est le cognitif, la manière donc nous percevons notre environnement, notre façon d’apprendre la lecture. On ne lit pas de la même manière devant un écran que devant une page imprimée, en poussant le bouchon plus loin, on ne rêve pas devant un écran comme devant un livre. La manière de lire influence notre manière de rêver, de percevoir.

À ce chapitre, nous pouvons nous inquiéter de l’évolution des humains, bombardés de nouvelles de tous genres et surtout de notre jugement face à nos sources de lectures et d’information. Ce qui pose la question de comment nous réagissons aux fausses nouvelles? Est-ce une perte d’esprit critique par une modification du cerveau? Est-ce l’apocalypse de l’esprit? Vous avez formulé la bonne question.

Prenons par exemple votre blogue. Vous avez décidé de mettre le fond en noir et le texte en blanc, ce qui est tout le contraire d’un livre, où le fond est blanc et le texte est noir. Je trouve que c’est plus facile de lire sur fond noir, ou sombre. Ce n’est pas le même confort. Personnellement, je trouve difficile de lire à l’écran sur fond blanc. C’est difficile pour l’œil, provoque de la fatigue, et use l’attention plus rapidement.

Et nous ne sommes pas entré encore dans le cognitif. Je vais poursuivre mes recherches pour me procurer le livre de madame Wolf.
Bonne fin de journée Carmilla et merci.
Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages pour ces précisions,

Vive la Belgique porte flambeau de l'Esprit des Lumières !

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Je précise quand même que mon petit post est bien modeste en regard des travaux de Maryanne Wolf.

J'avoue que je n'ai pas du tout les mêmes capacités de lecture sur un écran. Je suis beaucoup plus lente et je mémorise moins bien. En plus, j'ai beaucoup plus de mal à me concentrer. Je suis ainsi incapable de lire un livre sur ordinateur.

Je constate en outre que ceux qui affirment le contraire, qui disent que ce n'est qu'une question d'habitude et préconisent de se contenter d'une liseuse, ne sont pas, en fait, de grands lecteurs.

Des lettres blanches sur un fond noir, c'est effectivement plus reposant. Il me semble d'ailleurs que les premiers traitements de texte avaient tous un fond noir. Mais aujourd'hui, il n'y a plus que des fonds blancs. En ce qui me concerne, j'ai choisi un fond noir pour une simple raison esthétique, pour être mieux en accord avec la tonalité, tout de même un peu sombre, de mon blog.

Enfin, ce qui est sûr, c'est que l'explosion des nouveaux supports ne contribue guère à l'éducation et la bonne entente de leurs lecteurs. L'impulsion et la haine, plutôt que l'analyse et la réflexion.

Bien à vous,

Carmilla