samedi 18 avril 2020

Nations et territoires


Je suis peut-être médisante mais il faut bien reconnaître que les Français ne sont pas très forts ni en géographie, ni en histoire. Ou plutôt, ils ne connaissent que ce qui relève de leur pays. C'est sans doute l'inconvénient d'appartenir à une grande nation.


Une exception toutefois : la Palestine. Quand on participe à une soirée avec quelques intellos "progressistes",  on a tout de suite affaire à des gens hyper pointus et on n'y coupe pas : on a droit à un long couplet sur les territoires occupés, sur chaque alinéa des accords d'Oslo et sur les crimes effroyables de l’État d'Israël.


Je me sens nulle mais je m'interroge. Cette passion pour un peuple opprimé est bien sûr estimable mais pourquoi justement la Palestine ? Des conflits territoriaux, ce n'est pas ça qui manque dans le monde mais, généralement, tant qu'on n'est pas directement concernés, on s'en fiche complétement. Ces mêmes intellos parisiens, la Transnistrie, l'Ossétie du Sud-Alanie, l'Abkhazie, Lougansk, Donetsk, la Crimée, ça ne les émeut pas beaucoup. Ou alors, quand ils en ont entendu parler, ils m'évoquent une hystérie anti-russe et l'intervention  généralisée, en Ukraine et dans le Caucase, des États-Unis qui y soutiennent des mouvements néo-nazis. Ils sont sans doute mieux informés que moi.


Pour en revenir à la Palestine, existe-t-il, d'abord, un peuple palestinien ? La Palestine, depuis l'empereur Hadrien jusqu'à la partition de 1948, ça a désigné le pays des Juifs. Ce nom a été abandonné par les Juifs pour adopter celui, originel, d'Israël, puis, il a curieusement été récupéré par les Arabes dans les années 50; les Palestiniens d'aujourd'hui, ce sont les Arabes d'hier qui se sont eux-mêmes désignés ainsi sans doute pour affirmer qu'ils incarnaient eux seuls et depuis toujours la Palestine. Ça permet ensuite de soutenir que Jérusalem ne saurait être la capitale d'Israël parce qu'il existe un peuple palestinien dont la culture propre et le territoire originel justifient la création d'un État indépendant.


Curieusement, ce renversement sémantique, où un mot n'a plus le même référent, a été effacé alors qu'il est tout de même récent (pas plus de 70 ans). Il est même complétement intégré dans le vocabulaire: les Palestiniens, ce seraient les Arabes qui peuplaient un territoire, occasionnellement peuplé par des Juifs.


Que tant de journalistes et d'historiens aient embrayé, sans broncher, sur cette falsification, cette réécriture de l'Histoire, ça laisse rêveur. Parce que dans cet interminable et sanglant conflit, la première exigence, pour parvenir à un accord, est celle de la transparence et de l'honnêteté.

Mais de quel droit je me permets d'évoquer ce que l'on appelle le conflit israélo-palestinien  ?


Je n'y connais rien, c'est vrai, mais j'ai l'impression que cette mythologie d'une "terre des ancêtres", d'un territoire originel et finalement d'un Droit du sol, est la plus dangereuse de toutes. Elle devient le support des nationalismes les plus terrifiants et a souvent pour conséquence l'épuration ethnique.


Comme illustration de ces propos, on peut se référer à "l'exemple" turc. La Turquie est aujourd'hui devenue une destination à la mode (du moins jusqu'à ces dernières semaines). C'est un joli pays; les touristes apprécient ses plages, ses paysages montagneux, la ville d'Istanbul et puis la population est tellement accueillante ! On a bien sûr vaguement entendu parler du génocide des Arméniens et de la répression des Kurdes. On condamne, bien sûr, mais qui se souvient du conflit gréco-turc au lendemain de la 1ère guerre mondiale ? On baguenaude ainsi en tenue décontractée dans les rues d'Izmir (autrefois la brillante "Smyrne") sans savoir qu'on se promène dans ce qui fut un vrai charnier : en 1922, les troupes nationalistes d'Atatürk, avec la complicité de la France et de l'Italie, se sont amusées à faire griller ses habitants, un des plus effroyables drames de l'histoire étrangement oublié.


Dans l'indifférence générale, les Turcs se sont même appliqués, depuis un siècle, à éradiquer tout l'héritage grec. Historiquement pourtant, le territoire turc (pas seulement la côte égéenne mais l'Anatolie jusqu'à Trabzon), c'est d'abord la Grèce. C'est la Grèce qui, d'Héraclite d’Éphèse au 6 ème siècle avant J.C. à la prise de Byzance en 1453, y a inscrit son histoire. Quel scandale ce serait pourtant si les Grecs rappelaient aujourd'hui cette longue Histoire et réclamaient un simple droit de s'installer à nouveau en Turquie et d'y vivre en sécurité ?




Ou bien en Europe. On s'est appliqués, au lendemain des guerres mondiales, à constituer une Europe des nations. Le Droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, proclamé par le Président Woodrow Wilson, s'est ainsi révélé une formulation politique aventureuse, porteuse de conflits et de haine. On a d'abord démantelé l'Empire d'Autriche-Hongrie qui avait pourtant, jusque là, réussi à faire vivre, en assez bonne entente, une multitude de communautés.


La caricature, c'est la Hongrie dont on se plaît aujourd'hui, dans les médias, à présenter une image détestable. Mais comment ne pas comprendre que la Hongrie a été punie, sous l'impulsion de la France (traité de Trianon), de manière totalement disproportionnée ? Alors qu'elle n'avait joué qu'un rôle mineur dans la 1ère guerre mondiale, on ne lui a laissé que le tiers, environ, de son territoire. Comble de l'humiliation: on a cédé la Transylvanie, largement magyarophone, à la Roumanie. Résultat : la Hongrie continue de vivre, un siècle plus tard, dans un nationalisme étriqué et revanchard. C'est condamnable bien sûr mais j'imagine mal ce qu'il en serait si la France avait subi un tel sort.


 Il y a quand même des pays en Europe qui ne se plaignent pas, ou n'osent pas se plaindre, de leur territoire. C'est le cas de la Pologne dont les frontières actuelles ne correspondent pourtant absolument pas à ses limites historiques (qui se situent largement en Ukraine). Pourtant, que dirions-nous si la Pologne se mettait, suivant l'exemple des Palestiniens, à revendiquer ses terres originelles ? Quel tollé !



Il faut cependant le rappeler : la Pologne était, avant la seconde guerre mondiale, le pays le plus cosmopolite d'Europe. Mais on a choisi de lui appliquer l'ordre l'ordre stalinien reposant sur l'épuration et l'homogénéité ethnique. Toute l'Europe Centrale a même été façonnée sur ce modèle : une mosaïque de pays aux populations homogènes, tous administrés dans le cadre du seul système soviétique. On a souvent comparé l'U.R.S.S. à un Empire mais cette comparaison semble erronée. L'U.R.S.S., c'était d'abord une formidable machine à broyer les différences et les particularismes, à normaliser entièrement une société : de haut en bas, de ses gouvernants à ses citoyens, et aussi horizontalement, dans l'ensemble de ses sphères, politique, artistique, culturelle et même individuelle, comportementale.



Voilà ce qui justifie mes réserves sur le conflit Israelo-Palestinien. Je le comprends mal. Dès qu'on pose un problème en termes de peuple, de territoire, de frontières, je me hérisse. C'est un héritage du début du 20 ème siècle qu'on n'arrive pas à liquider. Un pays, ce n'est pas un lieu.


Sans appeler au retour des Empires, je n'arrive pas à comprendre qu'il faille absolument deux États antagonistes et séparés pour résoudre le problème. Dépasser ses particularismes, définir un projet commun, établir un contrat de vie commune, c'est tout de même plus enthousiasmant qu'entretenir continuellement cette haine poisseuse.


Tableaux principalement de Magnus ZELLER (1888-1972), mais aussi de Mariane Von WEREFKIN (1860-1938), Otto DIX (1891-1969), Albert BIRKLE (1900-1986)

17 commentaires:

Nuages a dit…

Très intéressant billet.

Je vous conseille, pour ce qui est de la "terre d'Israël", de lire les ouvrages de l'historien israélien Shlomo Sand : "Comment le peuple juif fut inventé" et "comment la terre d'Israël" fut inventée.

Pour ce qui est de la focalisation des intellectuels de gauche occidentaux sur la Palestine, et avant ça sur l'apartheid, alors qu'ils se sont aveuglés successivement sur le stalinisme, le maoïsme, le castrisme, les dictatures "progressistes" du Tiers-Monde et maintenant sur l'islamisme, je conseille de lire l'essai revigorant d'André Versaille, "Les musulmans ne sont pas des bébés phoques".

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages,

Je prends bonne note de ces livres que je vais essayer de me procurer (après réouverture des librairies).

Ce problème du conflit israelo-palestinien est tellement englué dans les présupposés idéologiques qu'on n'ose plus s'exprimer.

Je suis peut-être idiote mais Juifs et Arabes ne peuvent-ils parvenir à s'entendre dans le cadre d'un État unique au sein duquel les 2 communautés se respecteraient ?
C'est d'ailleurs ce qui se passe au sein même d'Israël, en dehors de tout accord diplomatique et de tout dispositif institué. Les Arabes y sont de plus en plus nombreux et possèdent la nationalité israélienne. Ce n'est pas forcément une menace pour les Juifs. Tout dépend des rapports de confiance établis.

J'espère que votre confinement continue de bien se dérouler.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Les Rendez-vous Manqués

Bonsoir Carmilla.

Je m'en voudrais de commencer mon commentaire sans ces deux citations :

« Les raïs a effectivement trébuché, entraînant tous les Arabes dans sa chute, et pour longtemps. Dans l'un de ses derniers discours, prononcé quelques mois avant sa mort, il disait, en parlant d'Israël : ( Tout comme l'ennemi ne peut pas se permettre de perdre une seule bataille, nous non plus nous ne pouvons plus nous permettre de perdre de perdre. Lui il se bat le dos à la mer, et nous, nous nous battons le dos au néant. »

« La défaite est quelques fois une opportunité, les Arabes n'ont pas su la saisir. La victoire est quelques fois un pièges, les Israéliens n'ont pas su l'éviter »

Amin Maalouf
Le naufrage des civilisations
Page -130-et-133-

Entre la fin de la Deuxième Guerre mondiale en 1945 et la création de l'État d'Israël en 1948, il y a eu des pourparlers entre les Palestiniens et les Juifs. C'est étrange que les historiens ne le soulignent très peu comme si on était étouffé par la honte. Les Israéliens voulaient un nouvel état, sans toute fois spolier les Palestiniens. Avant l'État Israélien il y avait eu des Juifs qui étaient demeurés même pendant les 2,000 ans d'errance, qui s'était légèrement accentué avec le sionisme au début du XXe siècle. Ces gens-là vivaient ensemble, sur la même terre, souvent voisins très proches, difficile de s'ignorer, certains on même tissé des liens, parfois même des solides amitiés. Après la Shoah, il a bien fallu prendre une décision. La question qui se posait, c'était : qu'est-ce qu'on fait avec les juifs qui avaient échappés aux massacres ? Ils y avaient plusieurs acteurs qui au niveau international qui avaient bien des choses à se faire pardonner. L'idée d'Israël même si elle était dans l'air depuis longtemps fut une gestation difficile. Les juifs ont tendu la main aux Palestiniens et cela a bien failli réussir. Créer un pays avec les deux entités, c'était un beau risque. Même les autorités palestiniennes et les chefs religieux y étaient favorables à l'époque.

Richard St-Laurent

Richard a dit…

À chaque fois qu'on évoque le (problème) palestinien, ce sont ces trois années d'où mon titre : (Les Rendez-vous Manqués) qui me reviennent à l'esprit. J'ai eu exactement la même réaction hier en lisant votre texte. Ces trois années où l'on aurait pu établir un véritable plan, l'asseoir sur des bases solides, nous auraient épargner biens des peines, des horreurs, et des déboires, tous peuples confondus.

La diplomatie c'est la recherche d'un compromis et le conflit c'est la faillite d'un compromis et l'avortement de la diplomatie.

Je puis comprendre, qu'après la Shoah, il y avait des nations qui avaient intérêts à baisser les yeux et se regarder les pieds sous la table. Je fais remarquer que certains de ces adeptes des souliers bien cirés ont voté en faveur de la naissance de l'État d'Israël lors du vote historique à l'ONU.

Avant ce vote les juifs avaient tout fait pour avoir leur État, mais aussi pour inclure les palestiniens qui vivaient sur ce territoire. Les Palestiniens au lieu de saisir cette chance, ont préférer se soumettre aux pressions extérieures. On leur a fait croire que cette nouvelle liquidation, allait de soi, qu'elle serait brève et rapide.

Trouvez moi un peuple sur cette terre après tout ce qu'ils avaient vécu de se retrouver en guerre dans la minute après le vote historique à l'ONU sur sa reconnaissance. Le bébé n'était pas déposé dans le berceau qu'il devait prendre les armes. Les juifs n'en avaient pas demandé autant. Il n'y a eu personne qui a levé le petit doigt pour aller les secourir. Ils ont se sont débrouillés avec des vieux surplus militaires hétéroclites, une armée disparate, et, ils n'ont pas reculé jusqu'à la mer. C'était une question de vie ou de mort. Ils allaient retenir la leçon. Ne jamais oublier que les juifs c'est le peuple du livre, ils savent la signification du mot : Mémoire.

Bien sûr on a oublié : Les Rendez-vous manqués) de 1945-48. Cette période aurait pu changer à jamais le visage du Moyen-Orient. J'ai des frissons lorsque je pense à tout l'argent et les efforts qu'on a mis à se taper sur la gueule depuis 70 ans dans cette partie du monde. Si on avait dépensé les mêmes montants pour l'éducation, le développement économiques, le savoir, la science, où en serait ces peuples ?

On a préféré la vengeance au savoir !
Richard St-Laurent

Richard a dit…

La terre appartient à qui ?
Question sans doute banale pour certains, pertinente à mes yeux.

J'ai toujours éprouvé un sentiment ambiguë envers la possession. J'ai eu une ferme, ce qui implique de la terre. Un carré ou un rectangle, arpenté, cadastré, travaillé, clôturé, et ce sol, cette terre, m'appartenait, je m'étais présenté chez mon notaire, j'avais signé un contra d'achat, légalement, c'était ma terre. Mais qu'est-ce que la possession ? Légalement un bout de papier. Philosophiquement, c'était bien autre chose. J'ai toujours eu l'impression, que ce sol ne m'appartenait pas. Je n'arrivais pas à avoir l'impression que ce sol m'appartenait, et du fait même, qu'il n'avait jamais appartenu à personne, pas plus à moi-même, qu'aux Abénakis ou encore aux Français, ou aux Anglais colonisateurs, qu'on ne pouvait ni le revendiquer et encore moins le remettre aux supposés anciens propriétaires. Depuis que les (progressistes intellos) comme vous le dites si bien Carmilla, ici court un débat au Canada, lorsque les Premières Nations revendiquent leurs terres ancestrales. Les indiens se sont éloignés des propos ancestraux qui disaient : «  La terre n'appartient à personne parce que les humains appartiennent à la terre. » J'ai bien aimé vos propos sur les supposés propriétaires de jadis. Ce qui souligne, qu'il y a toujours eu d'autres humains qui nous ont précédé. Alors, ce bout de papier dans le fond de ta proche, ou sur une tablette de coffre-fort, ça vaut quoi ? La possession est une conception purement intellectuelle, qui date de très loin dans l'histoire humaine. On ne l'a pas cherché, elle émane de cette époque, où les groupes d'humains quittèrent la vie de chasseurs-cueilleurs, pour celle d'agriculteur, où soudain on a érigé des clôtures, donc des limites, des murs, des frontières, des possessions. Sans l'écriture et le calcul ont est incapable de concevoir ce système. Cette notion de possession était inconnue des indiens avant l'arrivée des colonisateurs européens. Ces derniers n'ont pas manqué de faire un raccourci intellectuel en se disant : « Puisque personne ne possède ces terres, alors elles nous appartiennent. » La suite n'est certes pas plus brillantes que les histoires du Moyen-Orient et sans doute dans plusieurs endroits dans le monde. Nous aussi, nous avons eu:(Nos Rendez-vous Manqués.)

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Un pays n'est pas un lieu ?

Dites-moi Carmilla, est-ce que vous en avez parlé avec vos anciens ou actuels patrons, qu'un pays n'est pas un lieu ?

Ils doivent bien avoir quelques opinions sur ce genre de sujet ?

On s'est pas sauté à la gorge au cours des siècles précédents parce qu'il n'y avait pas de lieu.

Peu importe les régimes politiques, et, économiques. Les indiens d'Amérique étaient sans terre, ce qui ne les empêchaient pas de commercer. Ils avaient une notion de l'éphémère, de cette vulnérabilité que nous retrouvons avec horreur en cette période de crise. Notion qu'on pensait avoir occultée. Est-ce que la réalité est en train de nous remettre devant : Les Rendes-vous Manqués ?

Tant qu'à cette notion d'honnêteté et de transparence, d'après ce que je vois présentement ou dans l'histoire récente, lorsqu'on affirme haut et clair qu'il n'y a pas d'augmentation radiations en Europe alors que Tchernobyl est train de sauter, ou qu'un pays ne sait pas faire la différence entre un avion civil ou un appareil militaire, qui viennent nous dire à la face du monde que : non, non, c'était un défectuosité technique ; ou bien, la cerise sur le gâteau sur des propos tenues en décembre 2019 par le pouvoir Chinois : Non, il n'y a pas de pandémie, tout est sur contrôle. Je puis comprendre, même à mots couverts, les interrogations de votre Président.

Serions-nous devenus des spécialistes dans l'art de : Manquez nos Rendez-vous ?

Ne manquerait plus que de basculer dans une crise économique mondiale, suivit d'un conflit qui s'apparenterait à une troisième guerre mondiale. Loin de moi cette pensée. Je ne veux pas y croire. Pourtant toutes les hypothèse sont sur la table, et aucune n'est à exclure. Le cas de la Palestine nous ramène à des réflexions fondamentales. Les israéliens dos à la mer et les arabes dos au néant. On peut critiquer Nasser, mais cette fois-là, avant de mourir, je crois qu'il avait vu juste. Des fois les défaites sont des opportunités ; des rendez-vous qui s'offrent comme une chance à saisir ; et les victoires peuvent être des pièges mortels de fausses sécurités.

Merci pour votre texte très pertinent en cette époque !
Je l'ai apprécié....

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Je souscris globalement à vos propos.

Je ne suis pas une spécialiste mais je regrette en effet qu'un accord entre Juifs et Arabes n'ait pu être trouvé au départ. La solution d'un "État Palestinien", que tout le monde semble aujourd'hui retenir, m'apparaît dangereuse et risque d'aiguiser les conflits. On peut craindre en outre que le premier souci de ce nouvel État palestinien sera de financer une armée puissante.

Un pays n'est pas un lieu, un territoire. Oui! c'est ma conviction. C'est peut-être plus difficile à comprendre dans des pays dont les frontières ont été à peu près stables au cours des siècles (notamment la France). Mais ça n'a pas été le cas pour tout le monde et beaucoup ont du s'accommoder de frontières à géométrie variable. Ces exemples là (principalement l'Europe Centrale et les pays scandinaves) montrent bien qu'un pays, c'est d'abord une culture et une langue avant d'être un territoire.

Sur la désinformation, je suis d'accord. Mais elle joue également dans les deux sens. Sur Tchernobyl par exemple, il y a une propagande écologiste qui en caricature les conséquences.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla.
Il semble que les Palestiniens ont été largués par leurs alliés arabes. Ils ont l'air d'un peuple abandonné, pendant que les grands frères se disputent entre eux. C'est ainsi entre les hommes peut importe la race, ou la civilisation, lorsqu'on accumulent les défaites, cela tourne aux ressentiments, à la haine, à la guerre civile, ou bien comme dans les partis politiques qui subissent défaites après défaites ce qui provoquent des disputent interminables, qui se terminent souvent par une disparition.
Les arabes se battent entre eux, ce qui dans un certain sens fait l'affaire des Israéliens, pendant qu'ils s'égorgent, Israël peut se consacrer à autre chose qu'à la guerre, sans toute fois, ne jamais baisser la garde. C'est le tournant que les affaires ont pris après le Yom Kippour de 1973. Depuis, il y a bien eu des bavures, mais pas de conflit généralisé. Ce n'est pas la guerre, mais ce n'est pas la paix non plus.
Tant qu'aux Palestiniens, c'est eux qui sont pris au milieux de ce merdier. La communauté internationale ne semble pas pressé de régler l'affaire. On dirait que cela fait l'affaire de quelques uns ?

Il semblerait que vous avez un printemps fabuleux en France et particulièrement à Paris. Ici avril se traîne les pieds, à mon levé ce matin à cinq heures, le thermomètre indiquait -5 degrés. Hier, le maximum n'a pas dépassé +5 degrés agrémenté d'un petit vent du nord coupant. Il faut voir les cyclistes passer emmitouflés comme en hiver.

Si je me lève tôt, c'est que je surveille mon nouveau visiteur au bout de l'île. Depuis le milieu de la fin de semaine dernière un cormoran vient passer ses avant-midi sur un tronc d'arbre échoué au bout de cette île. Depuis deux jours il s'est trouvé une compagne. Alors, ils sont deux sur le tronc à profiter du soleil. Habituellement, ils ne sont que de passage dans mon secteur, mais on dirait que ce couple a envie d'élire domicile sur ce bout d'île. Ça commence a être intéressant. Qui sait nous pourrions nous retrouver avec des petits cormorans. Ce qui signifie qu'il y a du poisson, parce que les cormorans habituellement occupent les endroits sur cette rivière là où ils trouvent de quoi manger. C'est un excellent plongeur, pas très spectaculaire mais efficace.

6 heures 30 : On dirait que ce ne sera pas pour ce matin. Pas vu mes cormorans !

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Bonsoir Carmilla !

Lettre LXXXI

La Marquise de Merteuil au Vicomte de Valmont

« Croyez-moi, Vicomte, on acquiert rarement les qualités dont on peut se passer. Combattant sans risque vous devrez agir sans précaution. Pour vous autres hommes, les défaites ne sont que des succès de moins. Dans cette partie si inégale, notre fortune est de ne pas perdre, et votre malheur de ne pas gagner. Quand je vous accorderais autant de talents qu'à nous, de combien encore ne devrions pas vous surpasser, par la nécessité où nous sommes d'en faire un continuel usage !

Supposons, j'y consens, que vous mettiez autant d'adresse à nous vaincre, que nous à nous défendre ou à céder, vous conviendrez au moins, qu'elle nous devient inutile après le succès. »
Laclos
Les Liaisons Dangereuses
Page -211-

Peu importe l'intelligence et l'habileté qu'on met à faire aboutir une relation amoureuse, cela devient inutile après le succès.

Savoureux comme bout de texte. Je l'ai relu plusieurs fois.

Merteuil est une véritable manipulatrice et Valmont un magnifique intriguant.

Je ne m'imaginais pas trouver autant de satisfaction dans cette lecture.

Finalement mon Cormoran est revenu ce matin vers huit heures, mais seul cette fois-ci. Il est demeuré un bout de temps sur son tronc d'arbre échoué, par contre aujourd'hui j'ai eu droit à son spectacle de plongeons.

Le cormoran à ceci de particulier, que sa ligne de flottaison est assez haute, c'est tout juste si on lui voit le dos et son long cou émerger à la surface de l'eau. Mais, il s'en fou, parce qu'il passe de long moment sous l'eau. Ce matin, il a fait une minute quarante-cinq secondes. Ce qui est pas mal. Mais, mon préféré chez les plongeurs c'est le Huard, certain dépassent deux minutes en plongé et il est beaucoup plus élégant que le cormoran.

15 heures 30 : La pluie tombe depuis midi. On a perdu notre beau soleil, et la nuit prochaine selon les prévisions on devrait recevoir 5cm de neige !

Pas mal pour un mois d'avril !

Bonne nuit

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Bonjour Carmilla !

Sherbrooke, mercredi, 22 avril 2020. 9 heures du matin.

Les prévisions étaient justes. Je m'y attendais, 5 cm de neige à mon réveille. Température -6. Ciel couvert, il neige encore, poudrerie et chasse-neige sur Le Chemin De La Rivière.

Ce qui n'a pas empêché mes deux cormorans d'occuper dans la plus grande indifférence, leur tronc d'arbre échoué. Je dirais même, que sous la neige, ils émanent d'eux une certaine prestance.

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Oui, sans doute ! Les Pays Arabes hésitent aujourd'hui à soutenir de manière appuyée les Palestiniens. Mais ce n'est pas pour des raisons politiques, ils n'ont pas changé sur ce point. Leur rêve, c'est toujours d'exterminer Israël. Il faut dire qu'ils sont tous, en fait, dans une situation économique désastreuse et incapables de s'engager dans une aventure militaire.

A Paris, après un hiver doux mais très pluvieux, nous avons un grand soleil depuis plus d'un mois. Mais on ne peut pas en profiter à cause du confinement (on ne peut sortir qu'une heure par jour dans un rayon de 500 mètres)et on commence à craindre la sécheresse.

Quant aux "Liaisons dangereuses", c'est vraiment un grand livre de la littérature mondiale. Vous me donnez envie de le relire.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla !

Les matins ici se suivent, mais dans des contrastes tranchés. -5 degrés ce matin sous un ciel parfait, sans nuage, et un magnifique soleil.

Ma population de cormorans a grimpé à 6 individus hier après-midi. À la jumelle j'en ai vu plonger, remonter à la surface avec un poisson dans le bec, puis le faire glisser dans leur long cou. Impressionnant.

Disons, que c'est une manière dure de gagner sa vie !

Tout le monde le sait, les arabes rêvent de repousser les juifs à la mer, l'idéal se serait l'extermination, mais les juifs sont intelligents, eux aussi sont las de ces conflits, alors économiquement, ils leur rendent la vie économiques impossibles. Sur le fond, la cause Palestinienne n'intéresse personne d'autres que les Palestiniens. Qu'est-ce que c'est que de de se retrouver sans allié ? D'être abandonné par des gens peu fiables ? La cause Palestinienne cela n'aura servi que de prétexte pour foutre le feu partout au Moyen-Orient.

Je vous assure que c'est vraiment le temps de lire ou de relire : Les Liaisons Dangereuses. On a tout son temps, rien ne presse, et cela change les idées. Nous pouvons occuper nos esprits à nos lamentations, à nos « Black Dogs, » pour s'apitoyer sur nous-mêmes ; mais il reste l'esprit, l'imaginaire, des fouillis d'histoires étranges, des mondes que nous avons déjà visités et que nous aurions en cette période non seulement le temps de les revisiter, mais d'explorer plus à fond, surtout avec une maturité qui a pris du coffre. Qui plus est, nous pouvons le lire lentement afin de savourer chaque phrase. Comme par exemple :

« On eût dit qu'elle travaillait en silence à perfectionner son ouvrage. Ma tête seule fermentait ; je ne dirais pas de jouir, je voulais savoir ; le désir de m'instruire m'en suggéra les moyens. »
Lettre LXXXI
La Marquise de Merteuil au Vicomte de Valmont
Laclos
Les Liaisons Dangereuses
Page -214-

Allez Carmilla, replongez-vous dans cet univers, où la lecture rapide n'a pas sa place.

Personnellement je trouve cela aussi savoureux qu'une Veuve Clicquot.

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent

Nuages a dit…

A propos de lectures, je suis en train de lire "Les services compétents", le dernier livre de Iegor Gran, et c'est vraiment très bien.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages,

J'aime bien Iegor Gran dont l'oeuvre est portée par un humour décapant (je vous conseille tout particulièrement "L'écologie en bas de chez moi").

J'ai apprécié "les services compétents". Son point de vue sur l'Union Soviétique est très juste : une dictature certes mais surtout un monde absurde, grotesque, humiliant dont le fonctionnement repose sur l'incompétence, le je m'en foutisme généralisés et les petites combines.

Ma frustration, c'est que ce livre est un peu "court". Je m'étonne que ce soit seulement la première fois que Iegor Gran évoque l'URSS, qu'il connaît pourtant parfaitement, et son père. J'attends donc avec impatience son grand bouquin sur la question. Mais ça ne viendra peut-être jamais, peut-être qu'on n'a pas envie de parler de ce qu'on connaît trop.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

A Paris, il y a beaucoup de mouettes en hiver. Elles ont remonté la Seine pour venir. Mais des cormorans, je ne crois pas.

Dans les grandes villes, il y a en fait beaucoup plus d'oiseaux qu'on ne l'imagine. Ils y trouvent facilement à manger. J'ai toujours le souvenir des corbeaux innombrables qui survolent Tokyo, c'est impressionnant.

Je ne suis malheureusement pas sûre que la cause palestinienne ne serve un jour, à nouveau, de prétexte à de nouveaux embrasements au Moyen-Orient. Je connais peu Israël mais j'avais été impressionnée par l'extrême modernité du pays.

Quant aux "Liaisons dangereuses", je suis bien sûr d'accord mais c'est aussi, je le répète, toute la littérature française libertine du 18 ème siècle qui est à reconsidérer: elle est unique par sa liberté et son audace de pensée. On comprend vraiment à la lire ce qu'était l'esprit des Lumières. On est bien loin de ça aujourd'hui.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Le cormoran que nous retrouvons ici sur la rivière Saint-François, c'est le cormoran le plus commun, celui que l'on nomme : cormoran à aigrettes. C'est le seul de son espèce à vivre aussi bien en eau douce qu'en eau salée, tous les autres cormorans vivent sur les rivages des océans.

J'ai passé mon après-midi hier à observer mes cormorans surtout lorsqu'ils sont à la pêche, et cette pêche aura été fructueuse, de quinze à trente secondes pour attraper un poisson.

Hier il faisait un soleil grandiose, pas un nuage dans le ciel, lorsqu'on se souviendra que la journée précédente il neigeait à plein ciel, c'était une journée pour observer. Les outardes retiennent mon attention et hier, en examinant l'île sur sa longueur, j'ai découvert une outarde en train de couvé. Ce matin, j'ai pris mes jumelles pour examiner l'endroit où je l'avais aperçu hier, et elle était là ! L'île aux couleuvres va devenir le royaume des outardes et des cormorans. Et, je puis comprendre qu'ils choisissent cette île, il n'y a pas de prédateur.

Des prédateurs, il y en a sur les deux rives de cette rivière. La semaine dernière, pendant deux jours de suite, j'ai vu un magnifique renard sur l'autre rive de la rivière qui longeait la voie de chemin de fer.

Mes jumelles ne sont jamais loin, présentement elles ne me quittent pas. Si je ne m'étais pas intéressé aux cormorans hier, je n'aurais pas découvert le nid d'outarde.

Entre mes lectures, mon ménage, mes écrits, mes plans qui poussent devant ma fenêtre, mes journées sont très occupées et si les autorités lèvent le confinement en mai je vais prendre la direction des forêts, autrement, je risque de me fondre avec la nature et de disparaître comme cela. Ce qu'il y a de beau avec les forêts, c'est qu'il n'y a que la loi de la forêt !

Vous avez raison, dans les villes ont retrouve beaucoup d'oiseaux. Plusieurs s'acclimatent et y vivent très bien. À Montréal, il y a des couples de faucons pèlerins qui habitent sur des buildings, on en a même fait des sujets d'études.

Par les temps qui courent, c'est une chance que d'habiter en campagne ou en forêt, les confinements et les quarantaines sont promulgués pour les villes. Ici, l'isolation c'est quotidien comme quelque chose de très naturelle. La solitude ne pèse pas, elle a toujours été présente.

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Nuages a dit…

Toujours les lectures : en ce moment, je lis "Donbass" de Benoît Vitkine, que je trouve aussi très bon.
Je crois me souvenir que vous en avez parlé dans votre blog.