samedi 22 août 2020

Le pays d'Ubu roi


Depuis plusieurs années, c'est la grande plaisanterie qui court en Biélorussie. L'un des plus proches collaborateurs du Président Loukachenko s'adresse à lui, la mine contrite : "Monsieur le Président, j'ai deux nouvelles pour vous, une bonne et une mauvaise. La mauvaise, c'est que personne n'a voté pour vous aux élections présidentielles; la bonne, c'est que vous êtes réélu avec plus de 80 % des voix".


80 %, c'est presque comique mais c'est le taux invariablement retenu par les services de propagande à chaque élection présidentielle : en 2001, en 2006, en 2010, en 2015 et évidemment en 2020. A quoi bon finasser ? Ça suscite bien sûr un rire jaune, celui de la rage impuissante d'un peuple qui n'en peut plus de supporter, depuis 26 ans, un dictateur grotesque et paranoïaque.


Un type médiocre, presque un demeuré, qui ne sait que chanter les louanges de son Paradis; celui-ci serait tellement envié dans le monde que les Occidentaux comploteraient sans cesse pour le renverser. On ne sait d'ailleurs pas très bien de quoi vit la Biélorussie, hormis d'agriculture et d'aides financières extérieures, notamment de Russie. C'est du moins un pays idéal pour un écolo : la campagne est vraiment bucolique, on est partout submergés de verdure. Les villes en revanche, Minsk en particulier, sont d'une désolante laideur. Mais un tel trésor vert, il faut à tout prix le préserver et pour ça Loukachenko a heureusement la solution : il entend désigner comme successeur son fils, Nikolaï, aujourd'hui âgé de 16 ans, un grand nigaud qu'il a eu avec sa maîtresse.

Le pays a le charme de l'ancienne Union Soviétique (correctement approvisionnée néanmoins), administré par des armées de fonctionnaires incompétents et corrompus. Les services de sécurité continuent même de s'y appeler "KGB" et la police la "milice". Face à ces apparatchiks, quand on est confrontés à leurs fréquentes manifestations de mauvaise humeur, il faut toutefois demeurer stoïque : passé l'orage, tout peut s'arranger moyennant quelques billets discrètement transmis.


Inutile de dire que c'est le grand développement économique et social. Disons que c'est la grande égalité dans la pauvreté et l'isolement. La mesure la plus ahurissante, c'est d'avoir instauré, en 2017, une taxation des chômeurs pour inactivité ("Taxe sur les parasites"). Des manifestations ont néanmoins réussi à faire plier le pouvoir.


Les Biélorusses se sentent aujourd'hui humiliés par Loukachenko et c'est pourquoi ils réclament son départ immédiat. Le mouvement a une résonance complétement nouvelle, il ne se réclame d'aucune idéologie ni même de la Russie ou du modèle occidental. Il s'agit avant tout d'un mouvement de dignité civique, du besoin exprimé de ne plus être traités comme des gens "immatures" mais reconnus comme de véritables citoyens.


La revendication première, c'est simplement d'organiser d'abord des élections libres. Cette grande aspiration démocratique est enthousiasmante mais on ne peut également s'empêcher d'éprouver de multiples inquiétudes. Sur quoi peut-elle déboucher réellement ?


On peut d'abord rappeler que la Biélorussie, c'est un drôle de pays. Y a-t-il vraiment, en fait, une identité nationale biélorusse ? Historiquement, il n'y a jamais eu d’État indépendant biélorusse (hormis une courte période d'indépendance en 1918). Jusqu'au troisième partage en 1795, le territoire se situait au sein de l'Union Polono-Lituanienne et est même redevenu polonais, pour toute sa partie Ouest entre la 1 ère et la seconde guerre mondiale. Sinon, il a été sous domination russe puis soviétique. Il a subi deux grandes catastrophes dans son histoire : la 2 nde guerre avec l'extermination du tiers de sa population civile puis l'"accident" de Tchernobyl en 1986 qui a submergé le pays de la plupart des radiations nucléaires.


La Biélorussie est donc issue d'une histoire tragique et elle est l'héritière d'un beau mélange culturel, à l'exact croisement d'influences antagonistes. Quant à la langue biélorusse, il faut bien dire que c'est encore pire que l'ukrainien, on ne l'entend vraiment parler que dans les campagnes. Le biélorusse, c'est un fort mélange de polonais et de russe mais, au total, la population est avant tout russophone.


Alors sur quoi peut bien déboucher le mouvement de révolte actuel ? Il est sûr qu'il ne s'éteindra pas et que, tôt ou tard, le régime s'effondrera. Loukachenko n'aura sûrement plus l'occasion de briguer un nouveau mandat. Le problème immédiat, c'est de trouver une solution pour "l'exfiltrer".


Mais on vient de rentrer dans un "grand jeu" tactique entre l'Union Européenne et la Russie. Pas question en effet pour cette dernière de laisser filer la Biélorussie à l'Ouest, de voir l'U.E. et l'OTAN se rapprocher de Moscou.

Poutine a toujours le projet d'une "Union" entre la Russie et la Biélorussie, union "progressive" devant conduire, à terme, à une fusion. Il s'agit en fait de transformer la Biélorussie en une "petite province russe" sur le modèle de la Crimée.

Pour emporter le morceau, il peut se livrer à une manipulation facile. Si la Russie se mêle des affaires intérieures de la Biélorussie, voire intervient directement, personne, pas même une instance internationale,  ne dira rien. On le voit bien en Ukraine.

En revanche, si les Occidentaux apportent un soutien trop marqué à la contestation biélorusse, voir décident de sanctions, il sera facile de hurler "au grand complot américain et international" et de dénoncer une inadmissible ingérence dans les affaires intérieures d'un pays. Les sanctions risquent, malheureusement, de se révéler contre-productives.

La Russie sera, dans tous les cas, gagnante parce qu'elle peut être sûre que l'Europe et les États-Unis ne vont pas trop se démener pour la Biélorussie. La solution vraisemblable est donc celle d'un scénario "à l'Arménienne".  La Russie acceptera la formation, en Biélorussie, d'un nouveau gouvernement sous réserve que ce dernier, en contrepartie d'une intégration financière et économique accrue, n'exprime pas de velléités d'indépendance vis-à-vis du "grand frère". Il pourra compter sur la lâcheté européenne dont la servilité est telle qu'elle vient de confier un rôle de médiation à la Russie (alors que Poutine vient, selon toute vraisemblance, d'empoisonner tranquillement son principal opposant Navalny).

Tableaux  de Marc CHAGALL (1887-1985) et Chaïm SOUTINE (1893-1943). Ils sont les deux grands peintres nés, à la même époque, sur un territoire qui allait devenir la Biélorussie (mais à cette date, c'était simplement la Russie). C'est bien connu pour Chagall né à Vitebsk où où l'on peut visiter sa maison natale et un intéressant musée. Ça l'est beaucoup moins pour Soutine pour des raisons qui m'échappent.

Autre célébrité biélorusse : la Prix Nobel 2015 de littérature Svetlana Alexievitch. Je conseille en particulier: "La supplication", un livre terrifiant décrivant les ravages de Tchernobyl en Biélorussie (où ses livres demeurent interdits).

14 commentaires:

Richard a dit…

Bonjour Carmilla !

Vous avez de la suite dans vos textes.

Nous allons encore parler de démocratie !

Je ne connais pas beaucoup la Biélorussie.

Est-ce que cette femme, Svetlana Tikhanovskaya, est capable de renverser cette situation ?

Est-ce le peuple est capable de la soutenir ?

Je regarde ses photos et il me semble qu'il y a quelque chose de fort dans son regard, de volontaire, d'honnête, c'est juste une impression, je ne la connais pas, et on ne peut pas faire de la politique avec seulement des impressions, mais J'aurais confiance en cette personne.

Merci Carmilla

Richard St-Laurent

Nuages a dit…

Apparemment, il y a quand même quelques grosses entreprises d'Etat en Biélorussie (machines, camions, mines de potasse), qui sont maintenues à flot pour assurer une sorte de contrat social. Un régime autoritaire mais qui maintient un emploi ouvrier important, peu payé, mais avec la stabilité de l'emploi. La peur d'une privatisation sauvage, comme l'ont connue la Russie et l'Ukraine dans les années 90, doit jouer un rôle dans la stabilité passée du régime.

C'est en tout cas remarquable de voir, grâce aux photos prises par des électeurs dans les bureaux de vote, des procès-verbaux de dépouillement des votes, soigneusement remplis, et qui donnent partout une grande majorité à Svetlana Tikhanovskaïa, alors que les résultats officiels frauduleux ne lui donnent que 10 %

Quand je vois ces foules biélorusses, habillées de blanc, avec le drapeau traditionnel (blanc - rouge - blanc), je ressens beaucoup d'émotion et de solidarité avec tous ces gens. J'espère que cette fois sera la bonne. Ce sont des Européens, comme nous.

Un commentaire laissé depuis la terrasse du café-resto "La Grange" à Avioth, grâce au wifi dudit resto, en buvant une bière ardennaise à la cerise, de la marque "Ardwen".

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Personne à vrai dire ne connaissait jusqu'à ces dernières semaines Tikhanovskaya.Elle a pris la succession de son mari, candidat de l'opposition mais jeté en prison. Loukachenko l'a autorisée à se présenter pensant qu'elle serait inoffensive, notamment parce qu'elle est une femme.

Elle semble bien en effet. Elle a su faire preuve de beaucoup d'habileté notamment en refusant de présenter un programme politique et en s'engageant simplement sur la tenue d'élections libres, premier pas dans la construction d'une démocratie.

Tout se joue en ce moment. Sans doute Loukachenko devra se retirer mais on ne sait pas quand ni comment. Il semble jouer la montre, l'usure, en ce moment. Il multiplie les manoeuvres militaires aux frontières, parle d'activistes polono-lituaniens (la Biélorussie était autrefois sous leur domination) qui chercheraient à déstabiliser le régime, ce qui est plutôt malin quand on connait la détestation des Russes pour la Pologne et la Lituanie. L'Europe et les États-Unis ne bougent pas, ce qui était prévisible. Poutine non plus mais on peut penser qu'il attend avant de pousser ses pions.

A suivre mais je ne suis pas très optimiste. Tout le monde s'en fiche, à vrai dire, si la Biélorussie se fait manger et annexer par la Russie.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages,

Effectivement Loukachenko a été relativement populaire au début de son règne mais ça n'a pas beaucoup duré. Il n'a pas fait de réforme radicale ce qui a évité un effondrement économique comparable à celui de la Russie. Il a entretenu tout le monde dans une pauvreté égalitaire, sans évolution possible.

Mais aujourd'hui, le pays est complétement dépassé, largué, en voie de tiers-mondisation. Il suffit de le comparer à ses voisins polonais ou lituaniens sur les quels il a une bonne vingtaine d'années de retard. Il est complétement absent des industries de pointe. Il a certes conservé une petite industrie mécanique mais celle-ci est complétement obsolète. Il y a vraiment urgence à conduire des réformes profondes car c'est maintenant que le pays est au bord de l'effondrement.

La bière "Ardwen" à la cerise, je ne connais pas mais ça donne envie.

Bien à vous,

Carmilla

Alban Plessys a dit…

Bonjour Carmilla,

j'apprécie cette catégorie de billet car ici nous ne savons à peu près rien des pays d'Europe orientale. On pourrait chercher des informations dans les médias dominants mais, ici Loukachenko est présenté comme très très méchant, mais à cause des Russes (Le Monde), alors qu'il est juste méchant ailleurs, mais sans les Russes (Le Figaro). Bref ! On ne sait rien ! Sans doute les réseaux sociaux ont-ils une fonction essentielle en ce qu'ils livrent des images chocs sans le filtre du mainstream bien-pensant auquel ne cessent de nous confronter ce qui furent des journaux de qualité. Même s'ils étaient chiants à lire, c'est vrai. Je me souviens à ce propos de l'harengue de Beuve-Méry à l'endroit des jeunes journalistes qui se présentaient au Monde dans les années 60 : "Vous voulez faire du bon? Faites chiant!". Le monde a bien changé, dans tous les sens du terme; mais je suis hors-sujet.

C'est sans doute ce qui nous fait concevoir les mœurs politiques russes ou biélorusses avec beaucoup d'étonnement, soit avec nos propres curseurs. Comment peut-on empoisonner une vingtaine d'opposants sans que cela ne fasse vraiment réagir? Comment peut-on tenter de faire croire à la population, AK-47 à l'épaule, que l'OTAN est en train de déployer ses troupes pour envahir le pays et venir menacer directement la grande armée rouge. C'est juste délirant et ce serait loufoque si cela ne se traduisait pas par des morts.

L'Ouest s'en fout, vous avez raison, et c'est bien dommage. Cela fait 20 ans que la Biélorussie demande son intégration au Conseil de l'Europe et la refuser, quand on l'a accepté pour la Russie ou l'Ukraine des années 1994-1995, a été une erreur politique majeure.

Sinon, j'ai eu à discuter avec une personne qui avait été formée à l'Université de Minsk et j'ai pu constater que son niveau était tout-à-fait acceptable.

Bien à vous.

Alban

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Je viens de lire que Alexeï Navalny a été empoisonné.
L'hôpital allemand a trouvé des traces de poison.

Tikhanovskaya a intérêt à surveiller ses arrières.
Ces gens-là ne reculeront devant rien.

On dit qu'elle s'est réfugiée en Lituanie, est-ce que ce pays est sécuritaire ?

Ça commence a être glauque cette histoire !

Bonne nuit Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Alban,

Je ne suis pas journaliste et je ne prétends pas être une "spécialiste" de l'Europe de l'Est. J'ai simplement mis les pieds là-bas et connais un peu les mentalités. Et puis, j'y comprends ce qu'on me dit.

Loukachenko est effectivement un "démagogue", très médiocre intellectuellement. Sa propagande est grotesque et il essaie de placer "aux manettes" toute sa famille (ce que je raconte sur son fils est authentique). Les Biélorusses en ont honte. C'est de plus une "grosse brute", rusé et "méchant", impitoyable avec ses adversaires qu'il s'empresse de faire "disparaître" (exécution, torture).

Ce qui est pour moi incompréhensible, c'est effectivement l'extraordinaire complaisance de "l'Ouest" vis-à-vis de ces dictatures. Peu importe que l'on mente continuellement, que l'on massacre, torture, empoisonne, on continuera toujours de traiter avec respect la Russie et ses sbires. Macron vient de demander à Poutine d'intervenir pour favoriser une solution en Biélorussie (c'est demander au loup d'assurer la protection de brebis)et Trump souhaiterait que l'on réintègre la Russie dans le G8.

Point positif tout de même dans ces dictatures : le niveau d'éducation y est bon même si la culture y est à la traîne.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Je ne pense pas que Tikhanovskaïa soit en danger en Lituanie. Il serait trop risqué pour Loukachenko de s'en prendre aujourd'hui à elle.

Quant à Poutine, l'affaire Navalny ne devrait pas lui causer tort. Ce n'est pas la première fois que des opposants sont éliminés (Politkovskaïa, Litvinenko, Estemirova Nemtsov, Skripal etc...). Lui et Lavrov continueront de mentir effrontément (plus c'est gros, plus ça passe) et les "enquêtes" qui seront menées ne donneront bien sûr rien. L'Occident s'en accommodera très bien et on continuera de le traiter comme un partenaire respectable. Poutine a bien compris qu'il peut compter sur la servilité de l'Ouest.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla !
Quelles sont les raisons du transfert de Navalny en Allemagne ? Je ne m'explique pas. Je ne comprends pas. Les autorités Russe n'avaient pas lésiné avec Politkovskaïa, un cas qui m'avait vivement intéressé à l'époque dont j'avais apprécié la lecture de : Douloureuse Russie. Les dissidents russes m'ont toujours intéressés, ce qui souligne que la véritable démocratie ne s'est jamais implantée dans ce pays qui demeure bien mystérieux à mes yeux.

Tant qu'à l'ouest, surtout pour l'Europe, l’UE n'a pas envie de se faire couper le gaz russe. Encore une fois une question d'énergie qui refait surface.

Les États-Unis non plus ne bougerons pas, le blondinet de Washington admire Poutine qui souhaite sa réélection.

Les Biélorusses ne peuvent compter sur l'aide de personne. Ils sont largués. S'ils arrivent à s'en sortir seul, ils auront toutes mon admiration. Tikhanovskaya me semble bien courageuse de s'engager dans ce combat. Est-ce que les événements auront raison de sa ténacité ?

Les chemins de la démocratie ne sont pas faciles, et ceux de l'autonomie sont encore plus difficiles.

Lorsque vous avez affirmé qu'il était plus facile de vivre aujourd'hui qu'il y a trente ans, qu'il y a plus de démocratie aujourd'hui qu'à l'époque, je demeure perplexe. Combien d'états dans le monde se vantent d'être des démocraties, alors qu'ils n'en n'ont même pas les apparences ? Même pas besoin de gratter la peinture pour retrouver la rouille.

Lorsque je regarde des photos de la Biélorussie, j'ai l'impression que c'est un magnifique pays qui possède un potentiel immense, tout comme la Russie d'ailleurs. Ils se complaisent à gaspiller, efforts et temps dans des vacuités désolantes. Je sais, c'est une impression de Nord-Américains, venant d'un immense pays peu peuplé, où la démocratie est un fondement de la société, et il faut bien l'avouer, où la vie est facile. Mais, qu'est-ce qui empêche, la Biélorussie, l'Ukraine, ou la Russie d'en faire autant ? Juste à proximité les pays Baltes semblent bien s'en sortir, ainsi que les pays scandinaves.

Merci Carmilla pour vos commentaires et bonne fin de journée !
Richard St-Laurent

NB : Je vais commander deux livres de Svetlana Alexievitch, La supplication et La fin de l'homme rouge.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Concernant Navalny, je n'en sais pas beaucoup plus que vous. Ce sont ses amis et sa famille qui ont demandé son transfert dans un autre hôpital. On peut les comprendre.

Sur Tikhanovskaya, j'ai eu de nouvelles informations beaucoup moins positives. Son mari, notamment, n'est pas un personnage très recommandable. Il aurait fait fortune en étant lié à des oligarques russes. C'est trop long à développer mais méfiance. Ce qui est sûr, c'est que la Russie est à la manoeuvre et que le projet poutinien d'une absorption de la Biélorussie est plus que jamais d'actualité.

La Biélorussie vous plairait sans doute en effet beaucoup. La campagne et la nature y sont en effet magnifiques, préservées comme autrefois si l'on peut dire...

Quant à Alexievitch, j'ai une remarque concernant "La fin de l'homme rouge". C'est la description du vécu de la population soviétique mais absolument pas de celui des pays satellites d'Europe Centrale. L'idéologie de l'homme rouge n'y a pas fonctionné et la chute de l'URSS n'a suscité aucun désarroi mais au contraire un immense bonheur.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla !

Si vos informations sont bonnes, alors il se pourrait que ce couple soit à la solde de Poutine. C'est plausible. Un mari en prison ? Une épouse éprouvée ? Il aurait fait fortune avec des oligarques russes ? Le tout c'est de savoir s'il est avec le bon groupe d'oligarques ? Alors tout le monde est dans le coup ? ce n'est plus une révolution, c'est de la magouille criminelle.

Remarquez que la nature humaine est d'une complexité étonnante.

C'est ce que je suis entrain de lire dans Kim Leine : Les prophètes du fjord de l'Éternité. Que cela se passe en Biélorussie ou au Groenland, c'est toujours le même vieux fond de commerce. C'est un ouvrage très intéressant.

Tant qu'à Navalny s'il a été transféré en Allemagne à la demande de sa famille, c'est qu'elle a eu l'autorisation des autorités Russe. Il y a quelque chose d'étrange qui m'échappe ici.

Tant qu'à Alexievitch, c'est une entrée à la matière, c'est surtout La supplication qui m'intéresse et je sais que les peuples de l'Europe Centrale n'ont pas pleuré sur le cadavre de l'URSS. Je ne manquerai pas de lire les deux ouvrages.

Merci pour vos informations et commentaires.

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Il est difficile de faire le tri des bonnes informations mais Tikhanovskaïa n'a peut-être pas un grand avenir politique. Ce qui est sûr, c'est que Poutine fera tout pour conserver la Biélorussie dans l'orbite de la Russie. Il y a déjà un nom qui émerge : Babariko, un ancien de Gazprom, qui conviendrait tout à fait au Kremlin. A voir.

S'agissant de Navalny, les Russes ont certes accepté son transfert mais en faisant traîner les choses suffisamment longtemps pour que toute trace du poison ait disparu. Pas de chance : il en reste encore un peu mais peut-être pas assez pour établir une preuve absolue.

Coïncidence. Je lis aussi, en ce moment, "les prophètes" de Kim Leine. C'est moins bouleversant que "L'abîme" mais ça demeure un grand livre.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla !

Les coïncidences m'étonneront toujours ! Être à des milliers de kilomètres l'un de l'autre, et sans s'être consulté, lire le même livre.

Lorsque j'ai fais mes recherches sur Leine alors que je fouillais pour l'Abîme, j'ai lu ce titre : Les Prophète du fjord de l'Éternité, un titre qui m'a immédiatement accroché. Instinctivement, je me suis dit : Il faut que tu lise ce livre. Et bien voilà, je le lis présentement, et je ne suis plus capable de m'en détacher. Pourquoi ? Parce que j'aime le mot fjord. Ayant fréquenté les côtes du Labrador, j'ai visité quelques fjords qui demeurent pour les aviateurs d'hydravions et les marins, des havres, afin de se soustraire aux humeurs de l'océan. Le Labrador c'est peut-être moins spectaculaire que la Norvège ou le Groenland, mais ça ne manque pas de mystères et de beautés. Je me souviendrai toujours de cette journée où j'ai déposé deux géologues américains à Marianne Fjord. Après avoir déchargé l'hydravion, nous nous sommes regardés, on n'arrivait pas à le croire que nous étions dans la beauté extrême et l'un d'eux à dit : « C'est étrange, je me sens transformé, il y a quelque chose ici qui ne s'explique pas. » Un long bras de mer, flanqué de falaises verticales, qui plus est, obstrué vers la mer par un banc de pierres rondes polies par l'eau salée, qui protégeaient l'intérieur avec un canal au milieu pour évacuer l'eau du Fjord, mais pas assez profond pour qu'un bateau puisse s'y engager. J'ai regardé un moment vers l'est et j'ai pensé là-bas, de l'autre côté, c'est Groenland !

Lorsque j'ai lu ce titre : Les prophètes du fjord de l'Éternité, quelques pensées me sont venues à l'esprit. Nous pouvons habiter un fjord, peuplé de prophètes et cela pour l'Éternité.

Merci pour votre texte très instructif, je ne manquerai pas d'y revenir, comme les Juifs : tous ceux qui errent ne sont pas perdus. Des fois nous mettons du temps à trouver notre Fjord !

Bonne journée Carmilla !

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Kim Leine vient à vrai dire de publier, en traduction française, un nouveau livre : "L'homme rouge et l'homme noir". Ça se passe également au Groenland à une époque antérieure à celle des "prophètes". J'avoue que "les prophètes", c'est assez terrifiant. Ça n'incite pas beaucoup à séjourner là-bas même si les conditions ont bien changé. L'hiver russe, ça n'est rien en comparaison.

Ce qui est m'étonne, c'est la richesse et la qualité de la littérature d'un aussi petit pays que le Danemark (5,8 M habitants). Grondhal, Jensen et Leine sont en effet des écrivains de classe mondiale. Il est vrai toutefois que le Danemark a été une grande puissance et a une histoire riche et passionnante.

Bien à vous,

Carmilla