samedi 13 août 2022

La société du renoncement


Les ambiances d'été à Paris sont, chaque année, plus étranges.


Ca devient la Grande Tétanie ! On est d'abord pétrifiés de chaleur : 30-35° tous les jours sans une ombre ni une goutte de pluie depuis deux longs mois. Alors, on s'efface soi-même. Les soucis d'apparence passent d'abord au second plan. S'apprêter, au moins ça va vite. Une robe légère, une culotte aussi légère, même pas de soutif, on sort presque nues. Même se maquiller, ça n'a plus grand sens : ça fond et dégouline tout de suite. Quant à un projet sentimental ou érotique, avec ces températures dingues, on renonce d'avance; la chaleur, il n'y a pas de pire tue-l'amour. Du coup, on s'enferme chez soi.


Et quand on se risque à sortir, on a l'impression d'être transportés dans un tableau de Chirico. De grands espaces urbains, quasi-déserts, accablés de lumière, avec des contrastes blessants. Sur l'esplanade de la Défense, je m'amusais à faire résonner mes talons. Mais je ne percevais que leur écho, personne pour me siffler. Pas un chat ! Le sentiment d'un grand vide général. L'impression que tout le monde s'est enfui, a mis les voiles. 


Difficile d'ailleurs de trouver ouverts un commerce, un restaurant, une boulangerie, un cabinet médical, un artisan. Une malencontreuse fuite d'eau s'est invitée dans mon appartement mais on m'a rembarrée tout de suite : "Ma pauvre dame, il faut attendre septembre !".  Même mes piscines municipales sont fermées pour grèves ou travaux. Tant pis pour les idiots qui sont restés à Paris et aiment nager ou cherchent un peu de fraîcheur. En France, les vacances, c'est la vacance généralisée. 


Cette véritable débandade estivale, je trouve d'ailleurs que c'est une bonne illustration de l'évolution des mentalités et de l'état d'esprit général de la population. 



Je regardais ainsi, un peu atterrée cette année, les traditionnels reportages sur les départs en vacances. On nous présente longuement des "héros de la route" qui se sont levés tôt (6H du matin), ont patienté interminablement, dans une chaleur d'étuve, aux péages et dans des bouchons, assommés par les criailleries des enfants et les aboiements de l'épouse et du chien. Enfin est venue, tard dans la soirée, l'heure de la "délivrance" avec l'installation sur leur coin-camping. De là, ils ne vont plus bouger pour se reposer, tout oublier, "profiter" comme on ne cesse maintenant de dire, une expression que je trouve moralement obscène. 


Mais pourquoi pas ? De quel droit puis-je ricaner ? Suis-je à ce point une affreuse conne pour juger que ça n'est pas respectable ? Il est vrai qu'au spectacle de ces migrations estivales se superposent pour moi les images de tous ces Ukrainiens adultes et enfants déportés en masse (près de 2 millions de personnes selon les estimations), dans des régions lointaines de Russie. Ou bien ces habitants de Kharkiv qui "campent" depuis 6 mois dans le métro pour se protéger des bombardements et ont aujourd'hui peur de regagner l'air libre.


Ce qui me désole, c'est peut-être cette impression de démission générale, d'enfermement collectif dans un grand cocon. On aime citer ces propos attribués à Lucrèce : "Il est doux de ne rien faire quand tout s'agite autour de vous". 

Mais on ne prend pas la peine de se reporter au texte original, infiniment plus complexe et, au total, glaçant : "Il est doux, quand la mer est haute et que les vents soulèvent les vagues, de contempler du rivage le danger et les efforts d'autrui : non pas qu'on prenne un plaisir si grand à voir souffrir le prochain, mais parce qu'il y a une douceur à voir des maux que soi-même on n'éprouve pas. Il est doux aussi, dans une guerre, de voir les grands combats qui se livrent en plaine sans que soi-même on ait part au péril".


Ce plaisir trouble à regarder les autres crever quand on se tient, soi-même, bien peinard dans son coin. C'est de cela dont il est question chez Lucrèce et il est vrai que cela explique bien des comportements actuels et passés.
 

Vivre et se laisser vivre, se détourner des autres pour "profiter" et se recentrer sur les petits bonheurs simples. Le repli, il y a déjà quelques bonnes décennies que l'Europe l'a choisi. Notamment en France où l'on a renoncé à toute ambition économique, politique, culturelle. Plus question d'être des porte-paroles, d'exprimer un message émancipateur.


Le recul économique de la France, sa désindustrialisation, ça n'émeut pas grand monde. Il y a d'abord trois choses que l'on a en horreur absolue : la mondialisation, la finance et le libéralisme. On est absolument convaincus que ce sont les trois maux à combattre en priorité même si on n'a qu'une idée très vague de ce qu'ils recouvrent. 


Impossible de toute manière d'en discuter, de suggérer que la mondialisation, c'est aussi la modernité; que la finance, c'est ce qui permet aujourd'hui à l'Etat français de continuer à rémunérer se fonctionnaires; et, enfin, que la France est tout sauf un Etat libéral (c'est tout de même le pays développé qui consacre la plus grande part de ses richesses aux dépenses publiques, ce qui en fait une U.R.S.S. qui a plutôt réussi, comme on disait d'elle autrefois; et je ne parle pas de son "génie" administratif et réglementaire). Aux grandes ambitions économiques, on préfère une sécurité modeste mais tranquille, celle d'un statut d'employé à vie.


La promotion internationale des valeurs démocratiques ? Etrangement, le pays a plutôt honte de lui-même et prend plaisir à "se gratter la conscience". Louis XIV, Napoléon, le colonialisme, quelles horreurs ! Cette mise en doute du "camp démocratique" fait qu'aujourd'hui, on trouve facilement des excuses à Poutine. Les plus grands méchants, ce seraient d'abord les USA et l'OTAN. Et puis, il ne faudrait surtout pas que nos positions politiques aventureuses se traduisent par une ponction de notre pouvoir d'achat. L'Ukraine, elle commence à me gonfler quand je dois payer mon litre d'essence plus de 2€.


Quant à l'ambition culturelle, intellectuelle, inutile de développer. On se réjouit d'un taux de réussite au baccalauréat général de 96,1 % cette année. Ca veut dire que tout le monde l'a. Mais ça veut dire aussi que plus personne ne l'a.


L'ambition personnelle, professionnelle, c'est perçu comme une attitude élitaire. Gagner convenablement sa vie, c'est rejoindre le camp des oppresseurs. Des élèves issus de grandes écoles déclarent, en fin d'études, ne pas vouloir se consacrer au monde de l'entreprise. Ils préfèrent rechercher leur épanouissement personnel ou s'investir dans l'humanitaire ou l'écologie. On serait, paraît-il, tous des gens formidables mais dont la créativité serait bridée par le système. La modestie, le simple réalisme, ça ne nous étouffe pas.


Evidemment, ces nobles idéaux affichés sont d'une sincérité douteuse. Si on veut se rendre vraiment utile à son pays, c'est quand même bien en participant à la création de ses richesses et non en cherchant à atténuer sa culpabilité de "nanti". En fait, on ne veut plus d'une vie de labeur, affrontant la difficulté et la contrariété, mais on recherche plutôt une vie centrée sur soi et ses petits plaisirs. 


Paul Lafargue, le gendre français de Karl Marx, proclamait "le droit à la paresse", c'est à dire à l'oisiveté, pour chaque citoyen. Il y voyait l'attitude permettant de s'affranchir des chaînes du travail et d'exprimer son individualité. Simone Weil, la philosophe (que je connais très mal), a critiqué cette démarche avec justesse, me semble-t-il. Les marxistes n'ont qu'une vision réductrice, matérielle et mécanique du travail. Ils ne le voient donc que comme une aliénation. Mais il est également possible de conférer une dimension "spirituelle" à son travail et d'en faire ainsi le moteur d'une émancipation personnelle.


Un point de vue qui n'est partagé par presque personne aujourd'hui. On ne veut plus s'impliquer pour autre chose que sa satisfaction propre. Le désengagement est général. Ca concerne d'abord le monde du travail qui fait l'objet d'un rejet massif. On ne veut plus que du "modulable" en fonction de sa vie personnelle, on ne tolère plus que le télétravail. L'idéal, c'est de ne plus avoir à côtoyer de collègues ou de chefs. On ne s'avise pas qu'un chef et des collègues, c'est évidemment bien embêtant mais la confrontation avec eux, ça permet quand même de freiner notre hubris narcissique.


Tout devient égal, indifférent. Rien n'a vraiment d'importance, tout se vaut. On se réfugie dans l'abstention : plus de 50 % des Français viennent de renoncer à leur droit de vote. Et près de 50% de ceux qui ont voté ont porté leur voix sur de sinistres guignols extrémistes, aux programmes absurdes.


La confusion est telle que, petit à petit, ceux qui crient le plus fort, ceux qui proclament que tout est possible, que l'Etat peut pourvoir à tout, ceux-là s'installent et prennent possession de l'opinion. Afficher un peu de rationalité et de modération, c'est s'exposer au rejet et à la haine. La clameur et l'indignation deviennent les expressions de la vie politique. Le processus semble irréversible ... jusqu'à la déflagration finale. Pas de contraste plus saisissant qu'entre des Ukrainiens et des Européens de l'Ouest : entre ceux qui rêvent d'Europe et de valeurs démocratiques et ceux, emportés par le grand renoncement, qui se cherchent de nouveaux maîtres.


Tableaux de peintres (américains pour la plupart) qui ont été influencés par Edward HOPPER, même s'il faut reconnaître qu'ils ont moins de talent. Il s'agit notamment de Ralston Crawford, R. Kenton Nelson, Louis Guglielmi, George Ault, Sally Storch, Clark et Pougnaud.

J'ai conscience que ce post pourra apparaître "réactionnaire". Il est, pour ce qui me concerne, influencé par la situation internationale et mon attachement à l'esprit des Lumières et sa vision du progrès ainsi qu'à la pensée émancipatrice de la Révolution française.

Mes conseils :

- Andrzej BOBKOWSKI : "Douce France". J'ai déjà signalé ce livre iconoclaste évoquant la déroute française de 1940. Durant cette période, les Français voulaient continuer à vivre comme avant, "normalement", et ils ne comprenaient donc pas ce qui se passait. C'était, peut-être, la même attitude qu'aujourd'hui.

- Anne SEBBA : "Les Parisiennes - Leur vie, leurs amours, leurs combats 1939-1949". La vie quotidienne à Paris durant l'occupation. Un mélange de débrouillardise, compromissions, indifférence et aussi de courage et volonté.

- Cyril EDER : "Les comtesses de la Gestapo". Le noir du noir, mais comment comprendre, comment juger ?


8 commentaires:

julie a dit…

Bonjour Carmilla,
À propos des aoûtiens, voici une petite chanson qui va sans doute vous amuser. (sourire)

https://www.youtube.com/watch?v=ZoobuVKBuZw

Quant à l'école Club Med d'aujourd'hui... notre petit-fils de bientôt dix ans, passe davantage de temps en loisirs et diverses sorties extrascolaires, qu'apprendre à lire où écrire correctement.

Vos billets sont toujours enrichissants, merci Carmilla.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Julie,

Merci d'abord d'avoir le courage et la patience de me lire.

Merci ensuite pour cette petite chanson, bien drôle effectivement. Evidemment, c'est ambigu de se moquer des vacanciers parce qu'il y a tout de même parmi eux beaucoup de gens modestes pour qui cette période de l'année représente beaucoup. Mais c'est le côté grégaire des vacanciers, leur déferlement en troupeau, qui est désolant, ce que souligne d'ailleurs la chanson.

Quant à l'école en France, je suis mal placée pour exprimer un jugement. Il semble toutefois, d'après ce que l'on m'a dit et que j'ai lu, que la discipline y était autrefois très dure (peut-être jusqu'au début des années 80).

Mais depuis l'école n'est vraiment pas traumatisante et la permissivité est très grande. Quand je croise des lycéens dans le métro, ils n'ont vraiment pas l'air anxieux. Et les activités "culturelles" ou sportives, les voyages-découvertes occupent en effet, semble-t-il, une part croissante. A chaque fois que je me rends ainsi en Pologne, par exemple, j'ai la surprise de rencontrer, en pleine période scolaire, des groupes de lycéens français en voyage-étude. Je ne suis pas sûre qu'ils en retirent vraiment quelque chose (c'est un pays qui n'évoque à peu près rien, je crois, à des adolescents). Ce sont des voyages qui intéressent probablement plus les professeurs que les élèves.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonsoir Carmilla

Ne serais-ce pas le désabusement du vide?

Est-ce que la totalité des français font la gueule lorsqu’ils partent en vacances? Jamais content? Moi aussi je pense aux Ukrainiens qui en bavent présentement. Hier, j’ai passé ma journée sur cette fameuse étude de Yale. J’ai lu pendant huit heures sur ce sujet et la majorité des commentateurs et penseurs au sujet des sanctions semblent d’accord sur le fait que l’économie Russe est en train d’imploser. Par contre sur le terrain, les bombardements se poursuivent. C’est à se demander où ils prennent tous ces obus? Les Ukrainiens n’ont pas le temps d’être désabusés. Je me demande comment ils font pour tenir le coup après 168 jours de guerre?

Nous les nantis/chanceux, nous n’avons aucune raison de nous plaindre, même si on payait le litre d’essence à $5.00 le litre. Ce qui est étrange c’est que le prix à la pompe a baissé depuis un mois, de $2.35 le litre nous sommes descendus à $1.85, mais il n’y a pas de quoi pavoiser. Je me souviens très bien qu’on justifiait le $2.35 le litre à cause de la guerre en Ukraine. La guerre continue, et soudain les prix des carburants baissent. La prochaine fois, il faudra me trouver une meilleure explication. Les prix des céréales ont aussi subit une baisse. Ce ne sont pas les prix qui me fâchent, se sont les raisons sans fondement qui tiennent plus du mensonge pour justifier les prix.

D’autre part pour en revenir à mes lectures, selon certains analystes et cela a été confirmé, que cette guerre en Ukraine, c’est juste un prémisse, parce que la Russie voit grand, soumette l’UE dans un grand tout de Lisbonne à Vladivostok, un immense marché commun sous la férule des Russes. L’appétit vient en mangeant? Vous avez sans doute raison Carmilla, pendant que certains luttent pour leur liberté, d’autres se cherchent un maître! Cela sent la soumission avant la capitulation. Ça me répugne. Plus j’avançais dans mes lectures, plus me revenait les images de Prague en 1968 et Budapest en 1956. Nous voilà 70 ans plus tard dans le même merdier.

Lavrov la semaine dernière ne s’est pas caché et a révélé que les vues de la Russie dépassaient largement la simple conquête de l’Ukraine. C’est étrange, j’ai retrouvé les mêmes propos dans d’autres textes d’hommes politiques russes, qui ont précédé Lavrov. Les tergiversations de l’UE ressemblent à celles de la Société des Nations dans les années 1930… Ce fut une journée de lectures très instructives. En autre cette petite phrases : « La Russie ce n’est pas une nation, c’est une maladie. »

Si le sort des armes est défavorable aux Ukrainiens, dans une avenir plus ou moins éloigné, et dans des circonstances semblables, nous pourrions encore une fois nous retrouver devant les russes. J’espère qu’il n’en sera pas ainsi…

Bonne nuit Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Personnellement, je ne crois pas du tout que les Russes envisagent de conquérir l'Occident. Il n'y a que les Occidentaux qui croient à cela. Les propos de Lavrov ne sont que des rodomontades et lui-même n'y croit pas.

Les Russes sont eux-mêmes lucides. Ils veulent bien admettre qu'ils font peur mais qu'ils sont une grande puissance, non. Chaque Russe sait bien que son pays est celui du foutoir, de la désorganisation, de l'irresponsabilité. Les Russes n'ont eux-mêmes pas confiance : ils n'achètent pas de produit russe parce qu'ils savent qu'il est de mauvaise qualité et que le travail a été bâclé (cf. défiance envers le vaccin Sputnik V). C'est vraiment un pays où rien ne marche vraiment, où il y a toujours quelque chose qui risque d'exploser. C'était comme ça du temps de l'URSS et ça n'a guère changé. Le rapport aux catastrophes, aux accidents, à la mort, n'est d'ailleurs pas le même.

Et puis, contrairement à la propagande, l'armée russe n'a jamais été très brillante. Elle a connu plein de défaites humiliantes et ne s'en est tirée qu'au prix de boucheries effroyables. Confrontés à l'Ukraine, ils se montrent plutôt pitoyables, de médiocres stratèges. Ils ne savent que bombarder.

La Russie, c'est vraiment un "tigre en papier". Il existe toutefois un risque majeur. Elle possède l'arme nucléaire et Poutine est capable de tout. Il méprise complétement la vie humaine.

Bien à vous,

Carmilla

Nuages a dit…

Je m'étonne souvent de ce que l'on ne parle pas du tout des centaines de milliers d'Ukrainiens qui ont été évacués des zones de combats, déportés en fait, vers la Russie. Que deviennent-ils ? Peuvent-ils quand même réussir à regagner l'Ukraine (à part quelques cas isolés) ? Pourquoi n'en parle-t-on pas plus dans les médias ? Même Zelenski évoque peu la question. C'est quand même une question majeure de droit international : des centaines de milliers de personnes transférées vers un autre Etat que le leur.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages,

C'est en effet une question majeure et largement passée sous silence. C'est surtout le grand historien américain Snyder qui évoque le problème. Des milliers d'Ukrainiens (2 millions peut-être) sont en effet déportés en Russie où ils disparaissent pour la plupart dans des contrées inhospitalières (dans des camps, des prisons ?).

C'est en effet la tactique russe déjà éprouvée sous Staline. Les déportations, les Russes savent faire : on vide les territoires nouvellement conquis pour y substituer de nouvelles populations entièrement russes et fidèles au régime. Nul doute que les référendums organisés seront très favorables à Moscou.

C'est ce qui est en cours actuellement. Des disparus, il y en a un nombre incalculable. C'est surtout très cruel pour les enfants qui perdent leur famille et tout leur entourage et qui sont soumis à une éducation russe forcée. Je trouve ça horrible. Malheureusement, il est impossible de documenter cette barbarie russe.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Ne jamais prendre un ennemi à la légère aussi médiocre soit-il.
Hitler s’était venté au printemps 41 avant de lancer sa grande offensive à l’est : Dans trois mois tout sera terminé et nous serons à Moscou! On connaît la suite.

Pendant une quarantaine d’années les Russes ont occupé l’Europe de l’Est, et personne dans ces pays-là n’ont oublié cette époque de misère noire.

Ils ont appris une chose dans cette guerre avec l’Ukraine. Ils savent qu’ils sont détestés et que sur leur arrière pèse une résistance lourde qui occupe bien des régiments russes. Alors, ils font le vide, mais cela accapare beaucoup de ressources. On le sait tous qu’ils sont en train d’exterminer. Pendant ce temps-là, l’UE se tripote, dans ce que vous nommez , la société du renoncement. Il faut bien le reconnaître, l’Europe de l’ouest craint plus sa perte d’énergie que les russes eux-mêmes. Ils craignent plus de perdre leur petit confort que leur liberté, tout en oubliant que cette liberté est garante de ce petit confort.

D’autre part, des 70,000 Ukrainiens que nous avons accueilli depuis le début de ce conflit, je me demande combien retourneront en Ukraine après cette guerre? Il fait bon vivre ici en sécurité! Ils le savent et en sont reconnaissants. Qui plus est, se sont des gens travaillant et responsables.

Aujourd’hui, nous sommes le 14 août, et si les sanctions fonctionnent comme prévu, on devrait logiquement assister à cette implosion de l’économie russe, et pourquoi pas à l’implosion du régime en place, le tout avant la fin de l’année.

Il a été beaucoup question de l’emploi de l’arme atomique au cours des six derniers mois de ce conflit. Il y a une question dont on a peu parlé : Est-ce que les généraux et responsables de ce pays vont obéir à leur maître? Sur le fond, je crains beaucoup plus ces actions dangereuses autour des centrales nucléaires en Ukraine. Ce qui pourrait résulter en un genre de Tchernobyl en plus violent. Ce qui pourrait s’avérer mauvais pour nos petits conforts. C’est ainsi que la société du renoncement ne peut plus se permettre de procrastiner.

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Oui ! Poutine était bien comme la plupart des Russes, il méprisait les Ukrainiens. Les Ukrainiens, ce sont des paysans illettrés et parfois même des sauvages, des bêtes, comme les Galiciens.

Il était donc convaincu de boucler en quelques jours son "opération spéciale". Le pire, c'est que les Ukrainiens, moi comprise, n'entretenaient eux-mêmes aucune illusion. Et puis, dès le premier jour de la guerre, il y a eu un "miracle". Ca a été peu analysé mais les Ukrainiens ont mis en échec l'opération aéroportée russe sur Kyïv et ont massacré les parachutistes russes. Ca a été un déclic : tout à coup, les Russes ont pris peur et les Ukrainiens pris confiance. Le siège de Kyïv a ensuite été un cauchemar pour les Russes. Ils n'ont pas osé bombarder la ville espérant pouvoir la conquérir avec les tanks. Leurs chars se sont alors fait canarder avec des pertes considérables.

Ces échecs ont donc refroidi les Russes et les ont conduit à changer de tactique. Désormais, ils bombardent et rasent complétement les villes avant d'y risquer leurs soldats. Ca devient donc terriblement violent.

Mais ça risque aussi de durer très longtemps en campant sur des positions figées. Ca peut convenir aussi à Poutine parce que ce qu'il veut avant tout, c'est déstabiliser profondément l'Ukraine. Et il n'a peut-être pas besoin d'utiliser l'arme nucléaire pour ça. La misère devient terrible en Ukraine et je ne sais vraiment pas comment la population pourra endurer ça pendant des mois ou des années. Poutine peut chercher à tabler sur la lassitude et l'épuisement.

C'est pour ça qu'il est, à mes yeux, indispensable que l'Occident arme rapidement l'Ukraine en équipements lourds pour qu'elle puisse repousser les Russes à brève échéance.

Quant à un départ ou une destitution de Poutine, je suis sceptique. Ceux qui l'entourent sont peut-être encore pires que lui. Il ne faut vraiment pas croire à son remplacement par un jeune, libéral, démocrate et pro-européen.

Bien à vous,

Carmilla