samedi 3 août 2019

Des rats, des souris et des hommes


J'ai eu quelques tracas domestiques ces dernières semaines.

Ça s'est passé dans mon petit jardin où j'ai pris l'habitude d'attirer les oiseaux en les "régalant" de friandises.

Au début du printemps, j'ai toutefois remarqué que "mes oiseaux" semblaient ou particulièrement affamés ou particulièrement gourmands: chaque jour, un sac entier de graines était vidé.


J'ai commencé à m'inquiéter et à comprendre quand j'ai constaté que "mes oiseaux" manifestaient le même appétit la nuit et que les barres de céréales étaient soigneusement rongées. En fait, des familles entières de souris s'étaient invitées chez moi et elles grimpaient allègrement dans les arbres pour disputer la nourriture aux oiseaux dans d'épiques chassés-croisés (étrangement, les souris n'ont pas du tout peur des oiseaux même si ceux-ci essaient de les repousser en gonflant leur plumage et déployant leurs ailes).

Catastrophe ! Certes, les rats et les souris ne m'impressionnent pas plus que ça. C'est normal pour une vampire me direz-vous.


Mais j'ai toujours peur, dans mon immeuble ultra-bourge, d'être considérée comme une fille suspecte (une fille de l'Est entretenue, voire pire, avec tous les fantasmes associés d'espionne et de mafia). Je me fais donc discrète. Alors, si le gardien et les voisins en viennent à penser que j'attire les "nuisibles"...

Donc, aux grands maux, j'ai choisi d'appliquer les grands remèdes, allassent-ils à rebours de tous mes principes. Pas de piège ni de poison, tout de même, mais simplement un bon gros chat. Miracles de l'Internet : à Paris, on parvient assez facilement à accueillir un félin pendant la période des congés. J'ai donc hébergé pendant 15 jours un matou peu aimable (Alphonse, il s'appelait) mais visiblement efficace. Il a semblé en tous cas apprécier son séjour : le jardin, ça le changeait de l'appartement où il était cloîtré dans le 19 ème avec une maîtresse complétement folle qui me considérait d'une drôle de façon (compte tenu de mon look et de mon appartement, elle ne me faisait visiblement pas du tout confiance et elle a du se torturer pendant toutes ses vacances à se demander à quelles turpitudes je pouvais bien me livrer avec son chat; il est vrai que je lui avais demandé si son chat avait du "caractère"). Enfin... en contrepartie de ses bons services, j'ai appris au dénommé Alphonse un peu de russe et de polonais. Il a tout de suite accroché mais je ne sais pas si ça pourra lui être utile à l'avenir.


Mais je vous entends me dire: "Ton blog tombe bien bas. On n'en a rien à fiche de tes histoires domestiques. T'as qu'à être plus propre et plus soigneuse".

Certes ! Mais ma petite histoire m'a conduit à m'interroger sur la persistance de l'extraordinaire répulsion (universelle dans le monde, je crois) éprouvée envers les rongeurs, rats et souris.


Historiquement, ça a pu se comprendre. Les rats favorisaient les famines  en détruisant les récoltes et puis ils étaient vecteurs de la peste avec les puces qu'ils transportaient.

Mais aujourd'hui, comment expliquer cette véritable phobie ? Il s'agit d'animaux craintifs qui ont beaucoup plus peur de nous que nous n'avons peur d'eux. Quant à se faire mordre par un rat ou une souris, c'est hautement improbable. Un rat apprivoisé est d'ailleurs, paraît-il, tout à fait affectueux et câlin.


Je ne peux d'ailleurs m'empêcher d'évoquer un souvenir personnel : enfant, à Téhéran, j'avais emmené mon hamster (je me demande bien comment mes parents avaient pu se le procurer) à un centre vétérinaire. J'ai cru y provoquer une véritable émeute; j'aurais été porteuse d'une arme, j'aurais soulevé moins d'émotion. Je me suis évidemment bien vite fait sortir.


Les rongeurs continuent, indubitablement, de susciter plein de fantasmes. Les informations télévisées françaises ont récemment diffusé des images effrayantes de poubelles parisiennes infestées de rat. Chaque Parisien sait qu'il y a beaucoup plus de rats (4 millions) que de Parisiens et chaque Parisien est convaincu que leur nombre ne cesse d'augmenter.


C'est conforme à l'ambiance générale de sentiment de décadence, de pauvreté et de saleté accrues. Mais c'est en fait complétement faux : Paris est, malgré tout, de plus en plus propre et la population des rats, pour autant qu'on puisse l'estimer, serait stable depuis plusieurs décennies. Si on a l'impression qu'ils sont plus nombreux et plus visibles, c'est surtout parce qu'ils sont chassés de leurs refuges par les nombreux travaux de démolition.

Cette stabilité de la démographie des rats est d'ailleurs remarquable si l'on sait que chaque ratte est en capacité, au cours de sa brève existence (2 ans), d'enfanter environ 60 ratons: les amateurs de calcul exponentiel apprécieront. Il semble en fait que les rats pratiquent d'eux-mêmes une limitation des naissances en fonction des ressources alimentaires laissées à leur disposition. D'une manière générale, dans toutes les villes du monde, on constaterait un ratio de 1,5 à 2 rats par habitant.


Les histoires de rats et de souris ont ainsi, d'abord, plein de connotations politiques aux relents nauséabonds:  celle des "vermines" et de ces populations grouillantes venues des ténèbres qui se multiplient sans frein en vivant de rapines sur les populations "de souche".

Les rats, ce sont "les autres", les étrangers qui menacent de nous envahir, mais aussi les profiteurs rapaces (en Europe, les rats sont assimilés à l'avarice).


Et puis, au-delà de cette dimension politique, il y a le registre psychologique où la répulsion devient phobie. C'est surtout vrai chez les femmes, dit-on, pour qui le rat évoque, anxieusement, le sexe masculin incontrôlable, susceptible de vous pénétrer à toute vitesse, à son corps défendant. Le rat serait ainsi une espèce de "tigre de papier" fomenté par la femme pour compenser son angoisse fondamentale, celle de la pénétration et du viol. Mais ce déplacement de son angoisse sur un objet phobique (le rat) répond à une véritable économie psychique de conservation : elle permet aussi à la femme de préserver son désir pour l'homme. Sans ce glissement, beaucoup de femmes n'éprouveraient qu'horreur pour la sexualité. Ne vaut-il pas mieux avoir peur des rats plutôt que peur d'être pénétrée ?


Quant à l'homme, le rat est plutôt pour eux le support de fantasmes de dévoration à connotation souvent homosexuelle. Le sommet en est un supplice chinois particulièrement horrible, le supplice du rat décrit par Sigmund Freud : un condamné est attaché et sur son postérieur est fixé un pot renversé dans lequel on fait entrer des rats. Ceux-ci pénètrent alors en vrille dans son anus et dévorent ses intestins.


Surgit ainsi la figure du rat criminel qui se venge, de manière atroce, des persécutions qu'il subit de la part des hommes. Ce supplice nous effraie tous, je pense, parce que nous avons tous commis des méfaits (pas seulement sur des rats) et nous nous en sentons plus ou moins fortement coupables. Surtout, nous redoutons d'en être un jour punis par un châtiment effroyable.


Je ne serais pas honnête toutefois si je me contentais de véhiculer cette image négative du rat et des souris dans nos sociétés. Depuis quelques décennies, en effet, on présente, sous un autre jour, rats et souris. Ce sont les dessins de Beatrix Potter,  les bandes dessinées (Mickey Mouse et Minnie, Tom et Jerry, Chlorophylle et Sibylline de Macherot, Pacush Blues et Rat's de Ptiluc, Maus de Art Spiegelman) et le cinéma (Basil, détective privé et surtout Ratatouille).


On s'efforce aujourd'hui d'humaniser rats et souris, de les rendre sympathiques et plus proches de nous. Cela signifie peut-être qu'on est devenus sensibles à leur condition de parias. On se dit que leur destin misérable pourrait aussi être le nôtre.

En effet, on a détecté leur remarquable intelligence. "Si le rat pesait 20 kilos, l'homme ne serait pas le maître du monde" aurait dit Albert Einstein. Une revanche des rats serait-elle un jour envisageable ?



Enfin et surtout, la société des rats entretient de troubles affinités avec la société humaine. Elle semble, elle aussi être hantée par le mal : sexualité débridée, violence, tromperie, convoitise.

"Le crime signe l'espèce humaine" dit-on. Ce n'est pas complétement vrai parce que le rat est aussi le seul animal, avec l'homme, qui tue éventuellement ses congénères. Rat, mon frère, Toi !



Si vous vous intéressez aux rats, je vous conseille d'abord de vous rendre dans la ville allemande d'Hameln au Sud-Ouest de Hanovre. Elle aurait été le théâtre de la légende du célèbre conte des frères Grimm, "Le joueur de flûte de Hameln". Celui-ci parvint à entraîner tous les rats de la ville pour les noyer dans la rivière, la Weser. Partout dans la ville de Hameln, de petites décorations rappellent ce conte et, en été, on peut assister à de nombreuses représentations théâtrales.

Je vous recommande par ailleurs trois grands livres :

 - "Mémoires d'un rat" d'Andrzej ZANIEWSKI. Ce roman polonais a été publié en France en 1994. Il vient d'être réédité avec la bande-annonce suivante: "Le livre que Johnny Halliday offrait à ses amis". Je n'ai jamais pu supporter Johnny Halliday mais il m'est apparu tout à coup plus complexe : qu'évoquait pour lui ce roman terrible aussi loin que possible de sa vie de star ? Le livre est, en tous cas, remarquable mais effrayant. A lire absolument pas seulement si on est fan de Johnny.

- "L'attrapeur de rats" d'Alexandre GRINE. Une longue nouvelle, éditée très récemment, d'un auteur russo-polonais (1880-1932). Elle a pour cadre le Saint-Pétersbourg des années 20, à l'époque plongé dans la misère et la faim.On peut compléter avec deux autres nouvelles (difficiles à trouver): "L'enterrement des rats" de Bram STOKER et "Les rats dans les murs" de LOVECRAFT.

- "L'homme aux rats" de Sigmund FREUD. Une analyse de cas éblouissante décrivant une névrose obsessionnelle.

Je recommande également vivement toutes les bandes dessinées sus-visées (PTILUC, Chlorophylle, Maus) que j'aime beaucoup.

Au cinéma, le film de Werner Herzog, "Nosferatu, fantôme de la nuit", offre des images saisissantes  d'une invasion de rats.

Il faut enfin excuser la longueur de ce post: j'aime trop les rats et souris.

11 commentaires:

Richard a dit…

Bien le bonjour Carmilla la fille de l'Est !
Écrire ou parler pour évoquer son quotidien domestique, voilà qui me plaît. J'aime lorsque les gens, tout comme vous le faites si bien, évoquer leurs petites problèmes ce qui les rends particulièrement humains à mes yeux.
Les rats et les souris, c'est tout à fait normal, mais parce que les gens qui vivent en ville perde le sens de la nature, de la biodiversité et le sentiment naturel de faire partie de cet univers animal. Nous l'oublions souvent, nous sommes des animaux, qui plus est, les plus redoutables prédateurs sur terre.
Votre texte évoque pour moi, plein de souvenirs, et chacune de vos phrases me ramenaient à la ferme, où nous vivions avec les souris et les rats. Nous aussi nous avions des chats, surtout des chattes qui sont plus efficaces que les mâles, pour contrôler les populations de rongeurs, qui ne manquaient pas de faire des incursions dans les poulaillers pour bouffer les grains des poules.
Une véritable chatte de grange qui n'entrent jamais dans une maison, deviennent très efficaces même face à un gros rats. Nous étions souvent témoins de combats furieux.
Un soir en terminant ma besogne à l'étable, je suis allé vérifier l'eau des poules qui étaient toutes perchées, car nous étions en automne. Lorsque je suis entré dans le poulailler j'ai ouverte la lumière et j'ai vu l'une de mes chattes, une magnifique femelle tricolore en train de repousser un gros rats dans un coin du poulailler. C'était assez impressionnant, elle l'a acculé dans le coin, puis après deux ou trois feintes, et elle l'a pris à la gorges et l'a tué.
Avec toutes les provisions que nous accumulions pour les vaches, foin, grain, moulée, lorsque l'automne arrivait, toutes ces bestioles s'invitaient dans les granges, les gaineries, et silos à grain, alors on s'en remettait à nos chattes qui ne faisaient pas de quartier. Elles ne manquaient jamais leur coup. C'est ainsi qu'on arrivait à contrôler les rongeurs. Vous avez bien réagit.
Alors Alphonse, il a aimé cela la vraie vie de chat ? Il n'a pas tenté de prendre le large pour retrouver sa maîtresse ? J'ignorais que les chats s'intéressaient aux langues étrangères. Franchement, il a été bien traité Alphonse. Cours de langue plus des souris en prime. Peut-être qu'un jour vous aurez la surprise de voir Alphonse revenir, bien assis devant votre porte-fenêtre, ne riez pas, cela se produit parfois, attendant que vous lui ouvrez.

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Naître à la campagne fut pour moi, une véritable chance. Cela m'a ouvert les portes de l'univers et de vivre de multiples expériences. Aujourd'hui, je puis connecter mes expériences personnelles avec mes lectures, et ça forme un tout savoureux. Il n'y a rien d'inutile dans la nature à partir de l'insecte jusqu'à l'humain.
L'autre histoire, fut sans doute le plus violent combat d'une chatte avec une belette. C'était par un dimanche midi d'hiver, nous venions de terminer le repas de midi, que nous les Québécois nous appelons le dîner. Je suis sorti après le repas et lorsque j'ai ouvert la porte de la cuisine qui donnait sur la shed à bois, j'ai vu l'une de nos chattes, le poils raides sur le cou. J'ai compris qu'il se passait quelques choses. Je me suis avancé et j'ai vu cette magnifique belette blanche. L'été elles sont brunes. Elle était dos aux cordés de bois de chauffage, mais n'avait aucune envie de fuir devant la vieille chatte expérimentée. Un furieux combat s'est engagé. C'était tellement intense, que des fois il était impossible de distinguer la belette et la chatte. Cela formait une boule de poils mobile. Ni la belette et ni la chatte n'ont remarqué ma présence à moins de deux mètres. Finalement la chatte a eu le dessus, mais ce ne fut pas sans peine qu'elle a réussi à tuer la belette. Après que la lutte eu pris fin, elle a tenue la belette dans sa gueule pendant un long moment. Contrairement aux souris ou aux rats, elle ne l'a pas dévoré, parce que la peau d'une belette est épaisse et solide. Finalement, elle a laissé tomber la belette sur le sol et j'ai pu examiner ce magnifique animal, toucher sa fine fourrure. Une chatte était capable de tuer une belette. Après le souper, je me suis rendu à la grange, où la chatte était assis sur un établi, et j'ai remarqué qu'elle avait été mordue aux lèves et dans le cou où le sang avait perlé. La chatte a survécu.
La semaine dernière, j'ai assisté à un autre combat, entre une araignée et un guêpe noire. Cette guêpes s'est empêtrée dans la toile qu'avait tissé l'araignée à l'extérieur de l'une de mes fenêtres. L’araignée s'est élancée comme d'habitude lorsqu'une proie, lui a sauté dessus, mais surprise, la guêpes à réagit attaquant l'araignée. Je n'avais jamais vu cela. Elle est même parvenu à se libérer des fils de la toile forçant l'araignée à retraiter. Puis sans doute se sentant de force égal, la guêpe une fois libéré n'a pas demandé son reste et l'araignée à repris sa position d'attente en bordure de la toile. C'était la première fois de ma vie que j'assistais à ce genre de confrontation. Je n'avais jamais vu un guêpe dans une toile d'araignée et encore moins une araignée s'élancer sur une guêpe. La nature est vraiment étonnante.
Richard St-Laurent

Richard a dit…

Vous avez évoqué que les rats pratiquent la limitation des naissances. Ils ne sont pas les seul dans le règne animal. Le champion c'est le coyote. Dès que la nourriture se fait rare, la femelle n'ovule plus et cesse d'être gravide.
La sexualité, si on le prend au niveau purement biologique, c'est pour la fécondation ; autrement dit la fécondation c'est un surplus, un plus si les conditions sont bonnes. Plus la nourriture est abondante, plus il y aura de naissances, moins de nourriture se traduira par moins de naissance. La nature ne fait pas de morale.
Plus que le nombre d'humains augmentent, plus il y aura de souris et de rats. Donc l'abondance de ces rongeurs seraient un indicateur de notre niveau de vie. Faut voir ce que nous rejetons comme déchet domestiques voir le gaspillage de nos aliments. Cela révèle nos habitudes de vie.
Cette semaine en travaillant dans mes jardins, j'ai pu contempler le vol d'une buse qui patrouillait au-dessus des champs. La buse se nourrit de souris et de petits rongeurs. Elles se font rare, parce qu'il y a moins de rongeurs dans les champs où l'on pratique les cultures industrielles. Un champ de maïs transgénique, c'est une zone de mort, surtout arrosé au rondup, vous en savez quelque chose en France parce que vous avez eu des débats sur ce sujet. Donc, il y a moins de rongeur, donc moins de buses.
Comment se porte votre petit jardin présentement ?
Au Québec, c'est à l'image du restant de l'année. Après un vrai hiver, nous avons subit un printemps minable, si bien que nous avons tous semé en retard. Cependant depuis le début de juillet la chaleur a pris le dessus. Tout explose, les pommes de terre sont magnifiques, par contre j'ai certains carrés de maïs qui traînent de la patte. J'ai croqué mes premières fèves ce matin. Hier soir j'ai savouré mon premier zukini. Voilà, c'est parti. J'ai hâte aux tomates en espérant que fin août et début septembre seront épargnés par la gelée. Depuis octobre 2018, jusqu'en juin 2019, pendant ces neufs mois, nous avons été sous les normales saisonnières en ce qui concerne les températures. juillet aura été notre premier mois au-dessus des normales
Donnez-nous des nouvelles à savoir si Alphonse a fait du bon travail ? En espérant que les souris soient moins nombreuses et que les oiseaux profitent de vos largesses.

Bonne fin de journée.
J'ai vraiment apprécié votre texte.
Merci.

Richard St-Laurent

Anonyme a dit…

Bonjour Carmilla,

Intéressante cette association que vous opérez entre la phobie des rongeurs et l’angoisse de la pénétration.

Lors de mes séjours au Vietnam, il m’est apparu que la population des villes ne partageait pas la phobie très européenne pour le rat. L’espace est beaucoup moins hygiénique qu’ici; il n’y a le plus souvent pas d’assainissement ni de ramassage des ordures, de sorte que les rats assurent une fonction de nettoyage essentielle. On les voit ainsi gambader librement dans les rues la nuit, ce qui m’a occasionné nombre de frayeurs et une belle chute de scooter. L’un d’entre eux a en effet sauté sur ma monture alors que j'étais ivre en pleine nuit et je n’ai pas su contrôler ma peur... Ils ne sont mêmes pas poursuivis par les chiens! Il est fort probable que la religion bouddhiste largement dominante participe aussi à leur tranquillité.

Bonne fin de dimanche.

Bien à vous.
Alban

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Il me semble, en effet, que ce qui fait l'attrait d'un blog c'est qu'il met un peu en jeu son rédacteur en le conduisant à s'exposer et à parler de lui. J'aurais pu me contenter d'une dissertation sur la figure du rat dans l'histoire et selon les cultures; ça aurait peut-être été plus facile. Mais je pense qu'il est plus intéressant de parler d'abord de son expérience concrète propre avant de chercher à l'universaliser. Mais parler de soi, ça n'est pas facile non plus, on se demande toujours si on n'est pas trop exhibitionniste ou trop arrogant.

En général, je ne parle pas en français, mais dans un mélange de russe et de polonais, aux animaux et aux enfants. Je ne sais pas pourquoi. D'expérience, je puis donc vous dire que les animaux comme les enfants "accrochent" très vite: en 2 ou 3 jours, ils comprennent l'essentiel. Je crois qu'ils sont surtout sensibles à la "musique", les intonations, la mélodie, d'une langue. Ils perçoivent tout de suite l'hostilité ou l'affection exprimées.

Il semble en effet que le nombre de rats soit à peu près proportionnel au nombre d'humains. On cite ainsi un ratio, à peu près universel, de 1,5 à 2 rats par habitant.

Je pense en effet, sans prétention, que mon logement est un paradis pour un chat parisien avec un jardin plein de cachettes et une vaste cour sécurisée. Mais les chats mâles ne sont pas des sentimentaux et il est difficile de cerner s'ils sont ou non attachés à vous.

Quant à mon jardin, les hortensias sont, cette année, magnifiques. Mais ils sont devenus gigantesques et très envahissants. En bref, mon jardin est devenu une vraie jungle. J'envisage de faire appel à un professionnel, cet hiver, pour le réorganiser.

A Paris, il fait extrêmement chaud depuis le début de l'été. Surtout, il n'a quasiment pas plu depuis le 21 juin et la sécheresse devient préoccupante.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Alban,

Cette association entre la phobie des rongeurs et l'angoisse sexuelle de la pénétration chez la femme ou de l'homosexualité chez l'homme n'est bien sûr pas de moi mais se trouve dans la littérature psychanalytique. On n'est évidemment pas obligés d'y adhérer. L'important, c'est qu'elle fasse question.

Sinon, vous avez raison: en Inde et en Extrême-Orient, la représentation du rat est beaucoup plus positive.Il y a d'ailleurs une année du rat en Chine et le rat est souvent associé à la chance et à la prospérité (alors qu'il est symbole d'avarice en Europe). Le bouddhisme joue en effet probablement un grand rôle dans cette vision.

Mais en Europe même, l'image du rat évolue lentement, principalement en raison de l'intelligence qu'on lui reconnaît.

Mais il y a quand même des tabous difficiles à surmonter. Je me souviens avoir mangé du castor en Lituanie. J'en ai éprouvé des nausées.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour madame Carmilla.

Le castor chaud c'est bon, j'en ai mangé plusieurs fois avec les Montangais.
Par contre le castor froid, ça c'est autre chose.
Les indiens peuvent manger cette viande cuite mais aussi refroidie, c'est comme un restant.
On m'en avait offert en plein milieu de l'après-midi alors que j'étais arrivé au campement pour une chasse à l'outarde.
Je n'avais rien avalé depuis le déjeuner. On m'a demandé si j'avais faim et j'ai avoué que j'avais un petit creux.
Dominique Ashini, l'un des Montangais a sortir une rôtissoire et m'a donné un morceau de castor froid.
J'ai eu l’impression de manger un morceau de viande froide dans un bain d'huile de ricin. J'aime bien le castor chaud, mais froid figé dans la graisse, il ne faut pas avoir le cœur proche des lèvres. Par contre si vous êtes dans des conditions extrêmes, c'est un morceau de viande qui peut vous sauver la vie. Ça vous coupe l'appétit et il n'en faut pas beaucoup pour vous soutenir.
Les viandes sauvages en général sont plus soutenantes que les viandes domestiques. L'outarde en est un bon exemple.
Cette question des tabous est intéressante.
Comment se fait-il qu'une personne développe une répulsion pour une viande ou un légume en particulier ?
Je pense à ces peuples d'Afrique qui mange des insectes et des chenilles et qui semblent y prendre plaisir.
J'en parlais la semaine dernière avec mon voisin de ces peuples qui mangent des insectes et il me disait, avec une bonne couche de fromage gratiné ce ne doit pas être si mal. Va pour le fromage gratiné, mais je ne me voyais pas en train de croquer une sauterelle même enrobé de fromage.
Et certains affirment que se seraient une voie d'avenir pour nourrir l'humanité ?
Pour l'heure à 8 heures heure locale, lourd brouillard automnal par +6 degrés, on est passé près.
Nous aussi nous avons connu un mois de juillet relativement sec. Hier dimanche, il y avait comme quelque chose dans la lumière qui m'annonçait l'automne, il a fait tout juste 19 degrés. Ce fut une très belle journée confortable et j'avais l'impression d'avoir retrouvé mon énergie.

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Bonjour Richard,

La Lituanie est le seul pays d'Europe, et peut-être du monde,où l'on puisse se faire servir, dans quelques restaurants, du ragoût de castor. C'est une spécialité culinaire lituanienne, évidemment chaude, dont vous pouvez trouver la recette sur Internet. Puis-je également commander du castor dans un restaurant canadien sans passer pour une folle ?

Comme je suis par nature curieuse, j'ai essayé le castor. C'est plutôt bon mais l'idée de la bête m'a perturbée. De même, comme beaucoup de Slaves et de gens d'Europe Centrale, je n'arrive pas à manger de lapin ou de lièvre.

Les tabous alimentaires constituent, en effet, un sujet passionnant. On dit que l'un des coups de génie du christianisme est d'être une religion sans tabou alimentaire. Mais ça n'est pas exactement vrai.

De même, Juifs et Musulmans se détestent généralement mais, curieusement, ils ont à peu près les mêmes tabous alimentaires (hormis le vin).

Ou bien les Français qui adorent les escargots et les grenouilles (moi-aussi). Quelle serait leur réaction si on leur servait, à la place, des limaces et des crapauds ?

On peut également rappeler qu'au Moyen-Age, les mets les plus prestigieux étaient le cygne et le paon. C'est peut-être très bon mais imaginez la tête de vos invités si, aujourd'hui, vous leur serviez un paon ou un cygne au cours d'un dîner !

Bien à vous

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla !

Vous avez de la chance, vous ne passerez pas pour une folle parce que vous commandez du castor au Canada. Je ne connais aucun restaurant qui offre cette viande.

J'ignorais qu'il y avait du castor en Lituanie.

L'idée de la bête vous a perturbé, ce qui explique que vous ne déguster ni lapin, ni lièvre. Se serait en partie culturel, les slaves ne mangent pas de lapin. D'autre par, c'est comme les enfants sur une ferme qui ont élevé un cochon tout l'été, impossible de le tuer à l'automne, les enfants se sont pris d'affection pour leur cochon. Il est très facile de s'éprendre d'un cochon surtout lorsqu'on l'élève pendant toute un été, qu'on le soigne, voir le gâte, il devient alors très affectueux. Intelligent le cochon, je dirais qu'à ce niveau, il dépasse le chien. Et, puis avec un cochon tu peux rire, sauf lorsqu'il envahit votre carré de pommes de terre !

Éprouver le sentiment de la bête que je suis en train de déguster ne m'est jamais venu à l'esprit. Je n'ai pas développé cette faculté. Il est vrai que dans le domaine je suis un peu rustre.

Est-ce que nous développons nos tabous, surtout alimentaires ? J'avais déjà constaté la chose par rapport aux Juifs et aux Musulmans. C'est une bonne observation de votre part.

La nourriture devient une fenêtre culturelle.

J'aime bien les escargots, mais les grenouilles me laissent indifférentes, je trouve leur viande insipide.

Qui sait, peut-être que les crapauds ont de l'avenir, tant qu'aux limaces j'ai des doutes. Qu'est-ce que les humains mangeront dans deux siècles ? Ils ne peuvent pas en rester au Macdonald.

Après un repas de poule mon grand-père avait une phrase assassine très sarcastique : « Alors, elle était bonne la poule morte toute seule ? »

Alors que j'élevais des lapins jadis, des gens m'avaient dit que jamais il ne mangerait de lapin. Un jour j'ai préparé un grand repas avec divers mets, il y avait un plateau de lapin tranché sur le long, j'avais réussi un beau plat, que j'ai glissé parmi les autres et les convives ont vidé ce plateau, après j'ai avoué qu'ils avaient tous mangé du lapin. Ils l'avait trouvé délicieux.

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Si je comprends bien Richard, je pourrai donc, la prochaine fois que je me rendrai dans un restaurant au Québec, demander à la serveuse : "Il est comment votre castor aujourd'hui ?"

Il y a en effet quelques castors en Lituanie mais je ne pense pas qu'ils soient les mêmes qu'au Canada.

Quant au lapin, il n'est en effet pas apprécié en Europe du Nord (pays slaves, Scandinavie, Allemagne)mais certains en mangent quand même. Pour moi, c'est totalement exclu parce que c'est un animal que j'aime beaucoup.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bien le bonjour dame Carmilla.

Vous pourriez aussi lui demander du Manitou rôti à la sauce moutarde de loup-garou. Si jamais vous vous livrez à ce genre d'échange, je veux être présent pour jouir de la réaction de la serveuse.

Pour dessert du pimbina volant à la crème glacée bouillie.

D'après ce que j'ai vu et lu, il ne semble pas y avoir de différence marqué entre nos castors et ceux d'Europe ou de Sibérie. Par contre je suis toujours impressionné par les animaux sauvages en Europe surtout là où les populations humaines sont nombreuses.

À ce chapitre, pour les animaux sauvages, Tchernobyl ça devient très impressionnant, comme de quoi que les humains pourraient disparaître et que la nature reprendrait toute sa place.

Après l'avoir pratiquement exterminé on est en train de réintroduire le loup en Europe. Ce qui ne manque pas d'intérêt. Se sont des sujets qui me passionnent.

Pourrions-nous recréer un monde naturel artificiellement ?

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent