samedi 24 août 2019

La Grande Ourse telle qu'en elle-même















Emmanuel Macron vient de recevoir Vladimir Poutine au Fort de Brégançon.

Cette initiative a reçu, en règle générale, l'approbation de la classe politique et des journalistes spécialisés.

Tous les "experts" autoproclamés le serinent : il faut parler avec la Russie, il faut dialoguer avec elle, chercher des points d'accord.

Ce n'est évidemment pas mon point de vue mais je pense qu'on s'en doutait.


J'en étais d'autant plus convaincue en observant Poutine qui, ce lundi, était, comme souvent, "avachi" dans son fauteuil. Sa manière de signifier à son interlocuteur : "Cause toujours".

Recevoir Poutine aurait pu avoir une signification si la Russie avait fait, au cours de ces derniers mois, quelques progrès, si elle avait effectué quelques esquisses de conciliation, si elle avait témoigné d'une lueur d'esprit d'ouverture.

Mais on a assisté à l'exact contraire avec une multiplication des actes d'agression et d'intimidation.

















Emmanuel Macron a parlé d'"incompréhensions" entre la Russie et la France. Incompréhensions ! Comme si on était dans le registre de l'interprétation philosophique.

Il me semble tout de même qu'il existe d'abord quelques faits incontournables qui ne réclament pas beaucoup d'exégèse : la Russie a ouvert, il y a un an, un pont gigantesque reliant directement la Crimée à la Russie; elle détient abusivement le cinéaste de Simferopol (Crimée), Oleg Sensov, ainsi que, depuis l'automne dernier, 24 marins ukrainiens interpellés dans le détroit de Kertch. Contre toute évidence et les conclusions d'une commission internationale, elle nie farouchement sa responsabilité dans le crash, en juillet 2014, du vol 17 de la Malaysia Airlines qui a fait 298 morts principalement Néerlandais. Enfin, depuis le printemps dernier, la Russie distribue allègrement les passeports russes pas seulement aux habitants des Républiques de Lougansk et de Donetsk mais à tous les Ukrainiens.


Je ne parle que d'événements récents concernant le respect du Droit International (l'affaire Skripal et les manifestations pour des élections locales libres relevant plutôt de questions intérieures). Chacun d'eux justifierait un durcissement des sanctions, du reste bien légères, prises à l'encontre de la Russie. Mais ça n'effleure évidemment l'esprit de personne. Il est même quasiment acquis que la Russie réintégrera prochainement le G8.


Imaginez pourtant, M. Macron, que la Suisse, soudainement soucieuse d'agrandir son territoire, accorde généreusement la nationalité suisse à tous les habitants du Jura et de la Savoie qui en feraient la demande. Elle financerait en outre plusieurs autoroutes et trains à grande vitesse facilitant les liaisons entre la Suisse et les régions concernées. Accessoirement, elle jetterait en prison le cinéaste Jean-Luc Godard et l'écrivain Roland Jaccard, coupables de sympathies pro-françaises. Pareilles initiatives rencontreraient, j'en suis sûre, un grand succès auprès des Savoyards et des Jurassiens. Mais vous ne parleriez peut-être pas alors, M. Macron, d'"incompréhensions" entre la Suisse et la France. Vous vous rappelleriez probablement qu'il existe un Droit International qu'on ne peut bafouer impunément.


Les propos les plus surréalistes ont été tenus quand Emmanuel Macron a évoqué la Russie comme "grande puissance des Lumières" qui aurait "sa place dans l'Europe des valeurs aux quelles nous croyons". C'est tout de même le comble de la flagornerie parce que "les Lumières", elles ont certes été illustrées en Russie par quelques écrivains et artistes mais certainement pas par ses dirigeants politiques, hormis peut-être, épisodiquement, par Catherine la Grande (mais elle était Allemande).

Surtout, la "philosophie des Lumières", Vladimir Poutine s'en moque éperdument, lui qui ne cesse de dénigrer la démocratie occidentale et d'annoncer la faillite du système libéral. Surtout, il n'a aucune sympathie ni attitude amicale envers l'Europe. L'Europe, il ne rêve que de son éclatement et de sa division ! Il ne veut surtout pas avoir à traiter avec un partenaire fort et uni, il veut pour seuls interlocuteurs des états-nations faibles et dépendants. La destruction de l'Europe, c'est le but de la Russie et c'est à cette fin qu'elle soutient aveuglément tous les groupes violents et sécessionnistes, notamment ceux d'extrême-droite (Le Front National et les gilets jaunes en France, Salvini en Italie, Orban en Hongrie etc...). De même, si la Russie est aujourd'hui dans les meilleurs termes avec l'Iran et la Turquie, ce n'est bien sûr pas par amitié nouvelle (c'étaient deux grands ennemis héréditaires). C'est une simple manœuvre de déstabilisation de l'Europe et de l'OTAN.


Discuter avec la Russie, ça ne peut être qu'un dialogue de sourds. Le seul langage que comprenne Poutine, c'est celui de la force.  Évidemment, pour l'exercer il faut savoir jouer de séduction mais ça n'est pas bien difficile pour la Russie qui dispose des immenses ressources financières procurées par ses matières premières.




Et tout cet argent, ce "pognon de dingue" qui se déverse sur la Russie, Poutine est disposé à l'utiliser, en presque totalité, pour réaliser ses ambitions de politique étrangère, surtout en Europe. C'est même sa priorité. Qu'importe le développement économique réel du pays. La Russie, c'est un pays comme l'Arabie Saoudite qui entretient une économie de la rente et de la consommation. Tant pis donc s'il y a plein de zones de sous-développement, l'important, c'est d'afficher des vitrines comme Moscou et Saint-Pétersbourg avec des magasins rutilants et des berlines haut de gamme. L'important, surtout, c'est qu'on fasse peur et qu'on nous respecte. Tant pis si on est pauvres.


Avant de faire des risettes à Poutine, avant de manifester à son égard un empressement servile qui conforte la Russie dans ses positions agressives et la replace, sans aucune contrepartie, sur l'échiquier mondial, il conviendrait peut-être de s'informer sur ce qui se passe réellement en Russie.

Ce qui se passe ? Pour en avoir une idée, il faut se mettre à l'écoute des médias russes. C'est bien sûr difficile pour des francophones mais ils peuvent en avoir une idée en consultant les sites, facilement accessibles sur Internet, de "Sputnik France" et de RT France (ancienne "Russia today"). C'est absolument insupportable à lire et écouter, ce n'est qu'un étalage de propagande grossière et mensongère mais c'est vrai que, comme on dit, "plus c'est gros, mieux ça passe". La tradition russe du grand mensonge ne cesse de perdurer, c'est grotesque et affligeant.


C'est un formidable retour plusieurs décennies en arrière, presque la résurgence de la  vieille idéologie stalinienne débarrassée toutefois de ses délires économiques.

Poutine s'est appliqué à construire, durant tout son règne, une véritable mythologie de la Russie reposant sur un nationalisme exacerbé avec cette idée d'une singularité et d'une supériorité du peuple russe. Il serait porteur d'une plus grande spiritualité, plus détaché des possessions matérielles; c'est ce cliché et cette bêtise de "l'âme russe" exploités par tous les réactionnaires et tenants de "la  Grande Russie" mais aussi par nombre de "russophiles" à l'Ouest. Quelle rigolade ! Tous ceux qui ont croisé des touristes russes à Paris ou sur la Côte d'Azur ont pu se rendre compte que la spiritualité ne les étouffait pas trop.


Ça s'accompagne d'un complotisme généralisé avec cette conviction que l'Occident en veut à la Russie et travaille, dans le secret, à sa perte. On construit l'identité nationale dans une logique d'affrontement.

C'est cela le plus grave : la plupart des Russes sont ainsi convaincus qu'"on ne les aime pas". Le saviez-vous ?  beaucoup de Russes hésitent à faire, aujourd'hui, du tourisme en Europe ou aux États-Unis, ils ont peur d'y être agressés. De même absolument tout le monde est persuadé que l'Ouest a des projets militaires dirigés contre la Russie, d'encerclement d'abord, de conquête ensuite.


J'ai beau leur dire que les Russes, on n'y prête, à l'Ouest, pas plus d'attention qu'à d'autres (sauf peut-être à la plastique des filles) et qu'il n'entre certainement pas dans les projets des armées de l'OTAN de défiler prochainement sur la Place Rouge, je ne convaincs personne et je vexe même tout le monde. La réaction, c'est d'ailleurs : "vous ne nous aimez pas ? Et bien, nous non plus".

Le problème de ces convictions absurdes, c'est qu'elles sont difficiles à éradiquer. Surtout, elles risquent fort de donner lieu aux "prophéties auto-réalisatrices".


Et c'est justement exactement ce qui se passe. On assiste aujourd'hui à une militarisation générale de la Russie, matérielle et morale :

- matérielle d'abord avec une explosion du budget militaire. On vient ces derniers jours de découvrir, à l'occasion de l'accident près de Severodvinsk, que la Russie travaillait sur une arme imparable, un missile à propulsion nucléaire. A qui est-il destiné ? Il est programmé, rien que ça, pour atteindre les "centres de décision" occidentaux.


- morale et spirituelle ensuite. On n'arrête pas d'exalter le passé militaire glorieux de la Russie et surtout la "Grande Guerre Patriotique" contre le nazisme. La célébration du 75 ème anniversaire de la victoire, l'an prochain, va donner lieu à des cérémonies grandioses. Ça pourrait être considéré comme anecdotique si ça ne s'accompagnait pas d'une réécriture complète de l'Histoire. Celle-ci est tout de même beaucoup moins glorieuse qu'il n'est affirmé et le 9 mai 1945 n'a sûrement pas été une victoire de la liberté et de la démocratie. On le sait aujourd'hui (cf les travaux de Timothy Snyder), la période comprise entre 1933 et 1945 n'a pas tellement été celle d'un affrontement entre Hitler et Staline. Elle a surtout été celle d'un "meurtre politique de masse" (14 millions de civils), avec terreur nationale et nettoyages ethniques, commis conjointement par l'Allemagne nazie et l'Union Soviétique. C'est une réalité beaucoup plus dérangeante à la quelle Emmanuel Macron ferait bien de réfléchir avant de se rendre, comme il l'a annoncé, aux cérémonies du 75 ème anniversaire.

- Photographie d'une Femen protestant contre la venue de Poutine à Milan. On se ressemble pas mal même si ce n'est bien sûr pas ma tenue habituelle.

- Tableau de Laza Lissitzky (1890-1941) peintre de l'avant-garde russe ("bats les Blancs avec le triangle rouge")

- Affiche de Dmitri Stachievich Moor. Octobre 1917 6 Octobre 1920 Vive Octobre rouge à travers le monde

- Affiche polonaise des années 20 étonnamment prophétique: "la Liberté bolchevique". C'est Trotsky, peint en rouge, qui en est le personnage central.

- Autres affiches de Dmitri Stachievich Moor. "Sois sur tes gardes" et "Prépare toi à résister à la réaction croissante".

- Affiches de Nesterova : "Papa, tue les Allemands" et "A l'aide".

- Deux affiches de  Dmitri Stachievich Moor. La seconde, celle d'une fusée, est d'une étonnante actualité : "un cadeau rouge à un maître blanc".

- Deux tableaux d'Ilya Repine (1844-1930) peintre célébrissime, traduisant ce que l'on appelle l'âme russe. Le premier tableau surtout (Onéguine) représente indirectement la mort de Pouchkine en duel. Il a été tué par un rival amoureux français, tous les Russes savent cela. Le second tableau est celui d'Ivan le Terrible qui vient de tuer son fils. Celui-ci aussi fait partie de la mythologie russe.

- A contrario de ces critiques virulentes, j'ai voulu terminer avec deux images de la Russie que j'aime.  Le chat noir "Béhémoth",  le chat le plus célèbre de Russie, bavard et buveur de vodka. Un énorme chat très méchant et maléfique, une espèce de Belzébuth qui hante le roman de Boulgakov: "Le maître et Marguerite". Si vous allez un jour à Moscou, il faut absolument que vous visitiez l'appartement de Boulgakov. Vous y ferez connaissance avec "Béhémoth". Si j'avais un chat, je l'appellerais évidemment "Béhémot" et il représenterait une autre Russie.

Enfin, il y a sur la Russie et son actualité politique, une littérature surabondante. Je ne partage pas l'admiration qu'ont les Français pour Hélène Carrère d'Encausse : plus insipide et plus lénifiant, il n'y a pas. Je recommande en revanche deux livres qui viennent tout juste de sortir :

- Galia Ackerman : "Le régiment immortel. La guerre sacrée de Poutine". Voilà quelqu'un qui sait de quoi elle parle.

- Ben Macintyre: "L'espion et le traître". Dès que vous aurez ouvert ce livre, vous ne parviendrez pas à le lâcher. C'est un formidable roman d'espionnage mais ce n'est pas un roman, c'est le récit de l'histoire véridique d'Oleg Gordievsky, colonel du KGB qui a trahi son pays pour l'Angleterre dans les années 80. Le livre démonte admirablement toute la machinerie du KGB (qui employait tout de même 1 million de personnes du temps de l'URSS). C'est très intéressant parce que ça éclaire le mode de fonctionnement actuel d'un autre colonel du KGB qui, visiblement, n'a rien oublié : Vladimir Poutine

7 commentaires:

Richard a dit…

Rebelote

Bonjour madame Carmilla !

Rebelote encore une fois ? Quand même, je croyais que nous avions évolué. Et le gros blondinet du sud en rajoute, il faudrait réintégrer Poutine au G7. Je ne m'habitue pas aux mauvaises nouvelles du sud. Parler avec les Russes ? Mais est-ce qu'ils désirent parler avec nous ? Que Poutine parle ou garde le silence, ce qui ne change rien, il ressemble à un raton laveur qui véhicule la rage. Peu importe de quelle rage nous parlons, elle reste une maladie mortelle. Cause toujours, c'était bien trouvé, mais plus j'observe cet homme, plus ma méfiance augmente. Personne ne veut en venir aux mains avec un tel personnage. Une intuition me tenaille, rebelote un copier-coller genre Hitler et Oncle Jos, mais en plus intelligent, donc en plus dangereux. Je pense que je lui ai trouvé un surnom : Cousin Vladimir.

Vous les connaissez mieux que moi Carmilla, la conciliation n'a jamais été leur fort et lorsque vous pensez que vous venez de faire une bonne affaire avec eux, c'est qu'ils viennent de vous fourrer. Les communistes hors Russie, les internationaux qui ouvraient dans les démocraties, s'expliquaient mal, le traité de non-agression avec Hitler en 1939. Deux ans plus tard, ils se sautaient à la gorges. Est-ce que nous allons traiter avec ces gens-là ? Déjà, lorsqu'un de ces foutus personnages de l'Histoire intimidait c'est que dans son esprit l'agression n'était pas loin. Ce qui est intéressant dans ce jeu, c'est que la presse occidental, autant en Europe qu'en Amérique ne parle jamais de la diplomatie de La Chine et de l'Iran, voir de la Turquie avec le gros ours Russe. Pourquoi ? À Paris, Londres et Washington, les murs doivent bien suinter quelque part ?

Entre l'incompréhension et la surdité la marge devient incommensurable, aucune comparaison ne tient. Macron n'a peut-être pas utilisé le bon mot ? Excès de prudence, de diplomatie, ou bien, erreur linguistique ?

Maintenant, ils essaient de construire des ponts en essayant de démontrer leur bienveillance à l'endroit des Ukrainiens. On donne des petits billets de faveurs, des passeports, mais on ne reconnaît rien, surtout pas d'excuse, mot qui ne semble pas exister dans la langue Russe. Excusez-moi, c'est du déjà vu. Pour Malaysia Airlines, c'était prévisible, je savais dès le début de cette histoire, que Cousin Vladimir ne reconnaîtrait jamais sa responsabilité.
Richard St-Laurent

Richard a dit…

Jamais aucune sanction économique n'a fait pliée un pays, voir un empire. Le cas de l'Iran demeure un bel exemple. Donc les sanctions économiques je n'y crois pas, c'est de la poudre aux yeux.

Les lois internationales de la guerre ne tenaient pas entre La Russie et l'Allemagne en juin 1941 lorsque l'opération Barbarosa a été déclenchée. Hitler avait dit à ses généraux : soyez sans pitié, les conventions de la guerre ne s'appliquent plus. Le jeu de massacre pouvait commencer.

Franchement Carmilla vous devriez donner des cours de séduction à Emmanuel Macron, voir de diplomatie. Où il a puisé cela : une grande puissances des lumières ? Les 24 marins ne sont pas prêt d'être libéré.

L'Europe est l'otage de la Russie lorsqu'on pense que vous y achetez une grande partie de votre énergie. Mauvaise position pour négocier, ou montrer les dents. Je me souviens d'un certain mois de décembre, il n'y a pas si longtemps ou ils ont faillit vous couper le gaz. On y revient aux problèmes d'énergie...

On dirait que l'Iran s'est jeté dans les bas de l'Ours Russe. Je comprends difficilement l'Iran d'entretenir des relations diplomatiques, voir d'amitié avec un état infidèle. Pourquoi les Américains sont de gros méchants infidèles et que les Russes sont des amis fidèles ?

À ce que je sache l'Iran n'a jamais été dans l'OTAN. Tant qu'à la Turquie sa signature n'a aucune valeur à mes yeux, elle n'est pas fiable. La Russie n'a pas besoin de ces deux états pour déstabiliser l'OTAN, le gros blondinet à Washington y arrive très bien tout seul. Je vous l'ai déjà dit, et je sais que c'est décevant, ne vous fiez pas trop à l'OTAN.

Faire peur, pour ceux qui lisent l'Histoire, c'est encore rebelote, Hitler faisait peur à tout le monde dans les années 30 en Europe, et les démocraties s'agenouillaient comme ils l'ont fait à Munich. Churchill, seul dans son coin avait tout compris : « Entre la honte et la guerre vous avez choisi la honte et vous allez avoir la guerre ».

Pourtant, la Russie pourrait être un pays immensément riche, en plein développement. Ce n'est pas la capitale ou les grandes villes qui sont intéressantes, c'est l'arrière pays, là où des gens simples peinent pour vivre. Pas besoin de s'étendre longtemps sur le sujet, ni de faire une dessin lorsque tu vois une vieille babouchka bottes au pieds entrain de couper son bois et de transporter son eau.

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Lorsqu'on évoque l'âme Russe, je ne comprends pas, non, je n'arrive pas à comprendre. Ce que je constate, c'est que lorsque ce n'est pas une catastrophe ou un désastre ce n'est pas Russe. Ces derniers devraient se souvenir, malgré leurs cruelles et insoutenables sacrifices en vies humaines, que c'est nous l'Amérique, (États Unis et Canada) qui les avons sauvé. Les problèmes des Russes face aux troupes nazies ce n'était pas l'armement, c'était l'intendance. Nous leurs vendus (je ne suis pas sûr que le tout a été payé), 90,000 camions, des avions de transports, des locomotives, des wagons, pour qu'ils puissent ravitailler leurs troupes, des lignes de montages pour fabriquer des tracteurs, etc. Il faut se rappeler des convois en direction de Mourmansk qui partaient de nos pays la peur au cul de se faire torpiller par les sous-marins allemands. C'est en plus des avions de combats que nous leurs avons livrés : les Bells Air Cobras. Sans oublier tout le ravitaillement en nourriture. Est-ce que les Russes s'en souviennent ? J'en doute à les voir agir aujourd'hui.

Si je donne à quelqu'un, je m'attends au moins à une reconnaissance, un merci même si tu es incapable de payer. On s'arrangera.

Je me demande comment l'armée canadienne et même l'armée américaine pourraient encercler le plus grand pays au monde. Ce n'est certainement pas nos soixante milles soldats de l'armée canadienne qui vont encercler la Russie. C'est incroyable ce qu'on peut faire croire aux gens. Vous avez raison, plus c'est gros, plus ça s'avale bien. L'encerclement c'est dépassé aujourd'hui avec les armes modernes. Les militaires tous confondus, peu importe le pays ils sont encore en retards d'une guerre. Si vous pensez que la dernière guerre a été terrifiante, attendez de vivre la prochaine, personne d'une manière ou d'une autre ne sera épargné. Ils ont de la difficulté à nourrir leur population et depuis la dernière guerre mondiale, le Canada leur a vendu des millions de tonnes de blé, de beurre et de lait en poudre. Le tout naturellement, pas avec des pris d'amis, mais des prix fortement à rabais. Avec notre beurre, du vrai beurre, il le diluait pour en faire un genre de babeurre, on peut imaginer facilement le reste. J'ai travaillé un bon bout de temps dans l'est du pays, et j'en ai vu des cargos et des bateaux de pêches russes, lorsqu'on regardait cela, on n'en revenait pas qu'ils puissent naviguer avec de tels rafiots. Il m'est arrivé souvent de penser : Comment ils ont fait pour vaincre les armées allemandes ?
Richard St-Laurent

Richard a dit…

Personne ici, ne souhaite la guerre, nous avons bien d'autres problèmes à résoudre beaucoup plus intéressants et utiles. Si quelqu'un quelque part fabrique des armes et surtout exacerbe le nationalisme, nous pouvons craindre qu'il se servira de ces armes un jour. J'avoue que ce n'est pas très rassurant. La vigilance est de mise, mais pas la soumission, l'aplaventrisme, l’insouciance. J'ai aimé lorsque vous avez évoqué Snyder, qui dit en substance dans Terre Noire, que nous ne devons pas seulement nous souvenir des horreurs passées, mais nous appliquer à comprendre ces genres de régimes qui veulent vous égorger. L'important, c'est comprendre comment tout cela est possible. Pour cela, il faut lire et discuter. Il ne semble pas y avoir d'opposition en Russie, comme il n'y en avait pas en Allemagne en 1934. Les Russes autant que les Allemands ont laminé les états de droits en Pologne et en Ukraine, plus d'état de droit permet de faire tout ce que tu veux. Ils n'y ont pas manqué. Snyder fait remarquer que là où l'état de droit avait été conservé dans les pays comme au Danemark, en France, en Belgique, il y a eu beaucoup moins de massacres, voilà une information éclairante. Les principaux camps de concentrations, que dire, d'usines de la mort, se sont retrouvées en Pologne et en Ukraine, sans oublier les Einsatzgruppens.

Je ne vois pas présentement pourquoi on ferait une guerre, avec les armes que nous avons, il n'y a aucun profit à l'horizon pour toutes les nations dans le monde, et plus particulièrement pour les Russes et les Chinois. Cela ne veut pas dire que nous devons nous endormir sur le rôti. Lorsqu'on y songe sérieusement, tout cela relève de l'absurdité. Par contre ce qui est inquiétant, se sont les dirigeants politiques, ça c'est une autre histoire. Le gros blondinet n'a aucune idée de ce qu'il faut faire, aucune culture, et dire qu'il peut être réélu l'année prochaine. Qui connaît les véritables attentions de Cousin Vladimir ? Personne. Les Chinois, je dirais que c'est encore pire. Pour le reste, La France sur le continent ouest européen vous avez la seule armée opérationnelle, reste la Grande Bretagne. Vous risquez de vous retrouver aux premières loges. Espérons que tout cela ne restera que des mots.

À lire ou relire l’œuvre au complète de Timothy Snyder. Autre les titres intéressantes d'un auteur allemands Hans Magnus Enzensberger qui a écrit un livre très intéressant : Hammerstein ou l'intransigeance. Officier allemand qui a démissionner de l'armée lorsque Hitler est arrivé au pouvoir. Le tome 2 Les Mémoires De Guerre de Winston Churchill, toujours d'actualité.

Je vous souhaite autant à vous Carmilla et à tous les autres : Bonne chance.
Espérons qu'on n'en n'arrivera pas là !
Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Je ne suis pas du tout d'accord pour que l'on réintègre la Russie au sein du G7 (qui redeviendrait le G8). Ce serait offrir une reconnaissance internationale à un pays qui pratique impunément l'agression et l'intimidation.

Le respect du Droit International, ça m'apparaît tout de même la condition première de participation au G7. Sinon, c'est une association de bandits.

En matière de politique tant intérieure qu'extérieure, la tactique du gouvernement russe n'a pas changé depuis Staline : le mensonge énorme et la dissimulation. Le problème, c'est qu'il y a toujours des "idiots utiles" qui le croient et le relaient.

Ce qui est inquiétant, c'est que les Russes pensent effectivement qu'on leur en veut et qu'on est disposés à les attaquer. C'est le fantasme absurde de l'encerclement et des visées de l'Otan. C'est pour ça qu'ils renforcent considérablement leur effort militaire.

Ce n'est pas pour rien que Poutine a travaillé au KGB. Je vous recommande, à ce sujet, son auteur favori : Julian Semenov. C'est le John Le Carré russe. On vient de traduire en français son livre "La taupe rouge". Entre le héros de ce roman et Poutine, il y a plein de correspondances troublantes et notamment une parfaite indifférence au Bien et au Mal.

Bien sûr que la Turquie et l'Iran sont les ennemis historiques de la Russie. Dans ces deux pays, on n'arrête pas de ressasser la traîtrise et le cynisme de la Russie. Je suis donc sceptique concernant la nouvelle amitié naissante.

L'âme slave, c'est une idée réactionnaire que je déteste. Ça permet surtout de s'autoriser à faire n'importe quoi. Je reconnais cependant qu'il y a des différences culturelles importantes que je porte en moi-même. Je trouve souvent, par exemple, que les Européens de l'Ouest sont bien conventionnels.

S'agissant des sanctions économiques, il faut tout de même préciser qu'elles sont bien légères, voire insignifiantes, à l'encontre de la Russie. Je suis persuadée qu'un durcissement (par exemple la perte d'accès au système bancaire international)ferait sérieusement réfléchir la Russie.

Je connais bien Enzensberger. Son dernier livre "Tumulte", une espèce d'autobiographie, est remarquable.

Bien à vous,

Carmilla

Nuages a dit…

Votre enthousiasme pour Emmanuel Macron serait-il en baisse ?

D'abord, céder quelques milliards d'euros en réponse au mouvement des gilets jaunes, et maintenant dérouler le tapis rouge pour Poutine…

N'êtes-vous pas un peu déçue ?

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages,

Pas du tout !

Emmanuel Macron est bien un Président issu de la philosophie des Lumières et de la vision démocratique développée par Tocqueville.

Mais la démocratie, ça consiste aussi à savoir débattre et critiquer.

Bien à vous,

Carmilla