Il faut le reconnaître: on aspire tous à l'exercice du pouvoir! On est convaincus que les gens qui ont du pouvoir sont heureux parce qu'ils concentrent l'attention et bénéficient de davantage de considération.
C'est pour ça qu'on se démène pour faire carrière, qu'on se tue à passer des examens, des concours, pour accéder, ensuite, à des responsabilités élevées, quitte à sacrifier sa vie personnelle pour ça.
En fait, on a complètement intégré tous les schémas de la hiérarchie et de la domination sociales. C'est même profondément ancré en nous. Toutes les belles considérations démocratiques et égalitaires n'y changent pas grand chose. Le phénomène ne semble d'ailleurs pas propre à la société française. Partout, on ajuste notre attitude en fonction de la situation sociale de notre interlocuteur. Et partout, les gens les plus malheureux, ce sont ceux qui se sentent privés de toute forme de pouvoir.
Pour preuve: il y a tous les "humiliés", les "offensés", qui se vengent: les innombrables "petits chefs" qui exercent une effroyable tyrannie: boutiquiers, gardiens, videurs de boîte de nuit, agents administratifs... On est souvent d'autant plus odieux qu'on est petit et qu'on vous concède une parcelle d'autorité. Le pouvoir, ça semble vraiment une aspiration humaine essentielle.
Le pouvoir, je connais ça un peu: j'ai eu la chance de réussir (je ne sais pas comment) des concours un peu prestigieux. Donc, quand on connaît un peu mon C.V., on est toujours gentil, souriant, aimable avec moi. Quand je demande quelque chose, je sais qu'on va chercher à me donner rapidement satisfaction. Si j'ai besoin d'un médecin, je suis tout de suite reçue par l'un des meilleurs spécialistes. C'est bien sûr affreux mais comment refuser ça ? Est-ce que je vais attendre 3 mois comme tout le monde ? Et si j'avais des enfants, est-ce que je ne m'arrangerais pas pour qu'ils étudient à Louis-le-Grand ou Henri IV ?
Le copinage, la corruption (l'esprit d'entraide), ça existe dans tous les pays (pas seulement en France). On aime se vanter d'avoir "le bras long". Mais que serait une société sans aucune corruption ? Une société où l'on appliquerait, implacablement, les règles du droit ? Ce serait sûrement invivable ! Qui n'a jamais recommandé un ami, un parent ?
Oui ! C'est vrai que c'est pas mal d'avoir un peu de pouvoir. C'est une satisfaction narcissique ! On peut croire, de brefs instants, que l'on est quelqu'un d'exceptionnel.
Mais ça a un prix exorbitant !
On est assaillis de multiples demandes contradictoires aux quelles on ne sait pas répondre. On ne s'en sort pas, on est crevés, épuisés! On ne fait pas 35 heures par semaine, mais 35 heures par jour. Toutes nos nuits sont hantées par le boulot. Mais tant pis pour nous, on n'a pas à se plaindre, on est payés pour ça.
Bien sûr! Mais contrairement à ce que l'on imagine, on ne nous aime pas du tout. On nous épie continuellement, on scrute notre vie personnelle ! Et puis, régulièrement, on nous traîne dans la boue ! La solitude du pouvoir, c'est un thème très banal mais très réel.
En plus quand on est une femme, c'est le blocage sexuel complet. C'est le contraire du harcèlement autorisé aux mâles. Qui va oser se taper la directrice ?
Et puis je sais que quand je quitterai ma boîte, quand je n'aurai plus de pouvoir, tout ça sera effacé !
Je ne serai plus rien pour la plupart parce que je n'aurai plus de pouvoir d'influence.
Ça permet du moins de compter ses véritables amis.
C'est peut-être triste, dommage, mais c'est la vie ! Ça n'a pas non plus de réelle importance !
Parce que je ne saurais, de toute manière, échanger ma vie, qu'elles qu'en aient été les difficultés, la souffrance. Elle n'appartient qu'à moi, dans sa beauté et son angoisse.
Je continue avec mes petites photos parisiennes. Tant pis pour leurs imperfections. Je précise qu'elles ont été principalement prises dans le 5ème (square Scipion, église Saint-Médard, rue du Pot-de-Fer, Collège des Irlandais). La 1ère image, c'est évidemment le Parc Monceau et la dernière, la gare d'Austerlitz.