Aujourd'hui, c'est Noël. L'occasion de récapituler 2020.
D'abord, et surtout, tout ce que je n'ai pas fait :
- Je n'ai pas du tout voyagé. Sûrement une première dans ma vie.
- Je ne suis quasiment pas allée au cinéma ou au musée.
- Je n'ai presque pas pratiqué la natation.
- Nouvelles rencontres amicales, amoureuses, sexuelles, c'est juste un peu plus que zéro.
* Voilà pour les "moins". Vraiment pas brillant même si c'est largement la conséquence du Covid.
Pour les "plus" et en compensation, voilà ce que j'ai fait :- J'ai marché comme une folle, souvent deux heures, trois heures, quatre heures, dans les rues d'un Paris déserté. Ça m'a un peu calmée.
- J'ai stressé comme une dingue avec deux petits problèmes de santé, dont une intervention chirurgicale. Mais il faut dire que je suis devenue une grande hypocondriaque.
- J'ai perdu 4 à 5 kilos. Je me demande comment c'est encore possible. Je n'arrête pas de devenir aérienne. Comment font ceux qui grossissent ? Du coup, je deviens encore plus redoutable en course à pied mais je ne veux pas relancer ça. Je vais finir par impressionner avec mon apparence.
- J'ai alimenté mon blog imperturbablement : un post par semaine. Ça ne m'était encore jamais arrivé mais est-ce que ça ne devient pas un peu vain ? Je me pose de plus en plus la question.
- J'ai découvert la littérature scandinave contemporaine. Kim Leine, Carsten Jensen (Danemark), Lina Wolff (Suède), Laura Linstedt (Finlande), croyez-moi, ça vaut le détour. Ça change d'une littérature française totalement prévisible et bien pensante, qui se veut de plus en plus en phase avec les "grands problèmes de société". Au secours ! Deux exceptions toutefois : Mathias Enard et le tout récent prix Goncourt, Hervé Le Tellier ("Anomalie").
- La Bourse a fait de jolies montagnes russes. Il fallait prendre la vague au bon moment.
A part ça, j'ai quand même organisé un Réveillon de Noël en comité ultra-limité. Avec un grand sapin (c'est mon côté gamine). Au menu, d'abord des trucs slaves avec des écrevisses et une carpe accompagnées d'un borchtch (que, pour une fois, j'ai très bien réussi). C'est sanglant, répugnant, sacrificiel, croyez-moi, quand vous devez assassiner, préalablement, une pauvre carpe frétillante et châtrer des écrevisses. Heureusement, je peux toujours compter sur des cœurs insensibles qui se chargent de la basse besogne.
Et en accompagnement, des trucs français (mais pas de viande) avec des huîtres, des couteaux, des ormeaux, des bulots, des tourteaux, des bouquets, des oursins. Les fruits de mer, ça n'est pas du tout apprécié en Europe Centrale mais, sur ce point, je déroge complétement. Pour finir, le gâteau "Ispahan", tellement évocateur (un voyage à lui tout seul), de Pierre Hermé.
Surtout, je perpétue, à l'occasion du Réveillon de Noël, une coutume slave que je trouve merveilleuse. On réserve toujours un couvert pour un éventuel visiteur imprévu. Même un inconnu qui frappe à votre porte, on se doit de l'accueillir. Quel qu'il soit : connu ou inconnu, riche ou misérable, bandit ou saint.

Ça peut réserver de sacrées surprises. Qui peut-il être, en effet, ce convive imprévu ? L'ethnologie (Claude Lévi-Stauss) nous apprend que le repas de Noël, c'est une espèce de "Banquet des Morts". En offrant des cadeaux aux enfants, les parents (les survivants) leur demandent d'intercéder en leur faveur auprès des morts et des dieux pour qu'ils leur consentent encore un répit dans leur misérable existence, pour qu'ils en suspendent son amertume.
Le visiteur inconnu qui vient s'asseoir à votre table, ça peut alors être aussi bien un Bienfaiteur, qui va vous apporter Bonheur et Fortune, que la Mort elle-même qui vient vous signifier votre dernière fête.
Photographies réalisées par moi-même, à Paris, en des lieux que je fréquente de manière habituelle.Vous remarquerez qu'on peut rencontrer des rennes même sur la Place Vendôme.Les dernières images sont prises chez moi pour vous montrer mon sapin avec ses décorations russes. Vous pouvez constater que j'aime bien les miroirs mais, qu'en bonne vampire, je ne m'y reflète pas.
"Le convive des dernières fêtes", c'est une nouvelle de Villiers de l'Isle Adam extraite des "Contes cruels". C'est remarquable (célébré notamment par Borges qui l'a préfacée) mais ça n'a rien à voir avec le repas de Noël.