dimanche 10 mai 2015

De la misogynie au féminin


Dimanche 10 mai, c'est le premier tour des élections présidentielles en Pologne. Je n'ai encore lu aucun article sur le sujet dans la presse française. Ça en dit long sur l'ouverture internationale du pays.

Mais bon! c'est comme ça! La Pologne, même si c'est un tigre, ça n'est jamais que la 6 ème puissance économique européenne. Dans 20 ans, voire 10 ans, les choses auront peut-être changé. Je me suis, quant à moi, un peu intéressée à ça; d'abord parce que je lis la presse polonaise et, ensuite, parce qu'il y a, au moins, trois candidats qui sortent franchement du commun: un ancien rocker, une députée transsexuelle (Anna Grodzka) qui devrait faire un score tout à fait honorable et puis la candidate de la gauche, Magdalena Ogorek (prononcer ogourek en accentuant sur le ou). Je ne suis pas sûre qu'on soit près de voir, en France, des candidats aussi décalés. Mais peu importe! Pour moi, ma préférée, c'est Magdalena Ogorek, celle pour qui je voterais, sans hésitation, si j'en avais la possibilité.


Magdalena Ogorek, il faut, bien sûr, d'abord reconnaître qu'elle est d'une beauté troublante, dérangeante.En plus, elle est cultivée, polyglotte, diplômée (titulaire d'un étrange doctorat en Histoire de l'Eglise). Elle s'est d'abord présentée comme porte-parole des jeunes: avant tout libérale en matière de mœurs et de pensée (c'est-à-dire en opposition à l'Eglise).


Les premiers sondages lui ont d'abord été favorables mais elle s'est rapidement effondrée au point qu'elle ne semble plus avoir aucune chance aujourd'hui (elle est en dessous de 10%). 

Il faut dire qu'elle a aussitôt été violemment attaquée. On ironise, ainsi, méchamment: 

- sur son nom (ogorek, en polonais, signifie concombre, ce qui est, évidemment, complètement ridicule), 
- sur ses tenues vestimentaires (des chemises de nuit trop courtes), 
- sur sa froideur (elle évite les interviews, elle ne dit pratiquement rien), 
- sur son cynisme (elle serait briseuse de ménages), 
- sur son incompétence (elle connaît les problèmes militaires et économiques comme moi, le point de croix). 

Il se révèle en fait que beaucoup d'hommes, même s'ils rêvent tous de la baiser, ne vont pas voter pour elle parce qu'ils estiment qu'une femme aussi belle ne peut être qu'une idiote. Quant à l'électorat féminin, c'est de lui que vient la principale difficulté. La plupart des femmes, en Pologne, détestent en fait Magdalena Ogorek et ne veulent à aucun prix d'elle comme Présidente, tout simplement parce qu'elle les renvoie, sans cesse, à leur propre médiocrité. C'est la Pologne bien sûr mais je pense que ce serait, à peu près partout, pareil (en France, en Belgique, en Suisse, au Canada, etc...).


C'est une nouvelle illustration de la haine que se vouent souvent les femmes entre elles. La solidarité féminine, c'est une vaste fiction! Les plus misogynes, ce sont souvent les femmes elles-mêmes! Là-dessus, il y a un tabou complet.

Je me faisais cette réflexion en lisant, cette semaine, dans le journal "Libération", une tribune dénonçant le sexisme et la misogynie au quotidien: les propos graveleux, les attouchements furtifs, le harcèlement dans la rue. C'est vrai! mais outre qu'il m'apparaît d'un moralisme grotesque de vouloir réprimer ça (voire de l'interdire et pourquoi pas le punir), on pourrait aussi dénoncer la propre misogynie des femmes.


Parce que c'est souvent bien ça: en général, les femmes se détestent, elles sont d'une atroce jalousie et ne supportent pas qu'une autre soit mieux qu'elles, plus belle, plus intelligente. J'écoutais, comme ça, une interview de la célèbre mannequin Anja RUBIK. On peut avoir tendance à penser que, quand on est Anja Rubik, on n'a pas d'interrogations et on se satisfait de son sort.  Mais non! pas du tout! Elle déclarait, très sincèrement, qu'elle était continuellement dans le doute par rapport à elle-même et, surtout, qu'elle avait, souvent, des complexes par rapport à d'autres femmes. 

Il faut reconnaître cette terrible réalité: les femmes sont soumises à une effroyable compétition entre elles mais aucune ne dénonce cela et ne souhaite mettre fin à cette logique mortifère.Même si c'est à nuancer selon les cultures, la plupart des femmes sont prêtes à tout, les pires horreurs, les plus effroyables bassesses, pour éliminer une rivale.


La forme extrême et mythique de cette impitoyable cruauté, c'est la comtesse Bathory qui l'illustre. Dévorée par la hantise de la vieillesse, la comtesse hongroise Erzsébeth Bathory aurait torturé et tué, au tournant des 16 et 17 ème siècles, des centaines de jeunes filles dans son château de Cachtice en Slovaquie. Jusqu'où en effet une femme est-elle prête à aller pour avoir l'assurance qu'elle est la seule belle et la seule aimée? Pas sûr que les choses aient beaucoup changé aujourd'hui même. La peur de la beauté qui passe, la terreur de ne plus être aimée, désirée, c'est plus que jamais lancinant.


Images de Wladyslaw BENDA (1873-1948), peintre et illustrateur polonais, très célèbre aux Etats-Unis avant la 2 nde Guerre.

Je conseille par ailleurs vivement la visite des ruines du château de la comtesse Bathory, à Cachtice. C'est à proximité de Trencin, une jolie ville de Slovaquie.

Et ci-dessous, la candidate que je soutiens à fond, Magdalena OGOREK, pour devenir, grâce, je l'espère, à un miracle, Présidente de la République Polonaise.Elle fait tout de même davantage rêver que Hollande ou Mélenchon, sans parler de cette pouffe de Le Pen.




8 commentaires:

Anonyme a dit…

Coucou Carmilla... comment se nomme le peintre dont illustre ton blog ce jour! Je te revient sous peu... je regardais les photos de Mme la depute Ogorek que ma 1/2 m'INTERPELLE c'est qui celle la ??? Je calme la situatio et te revient ...
Thierry

Carmilla Le Golem a dit…

Bonjour Thierry,

Je l'ai mentionné. Il s'agit de Wladyslaw BENDA.

Sinon, Magdalena Ogorek était tout à fait inconnue jusqu'alors. Elle n'était même pas députée.

Carmilla

nuages a dit…

Je viens tout récemment de voir qu'il y avait le premier tour des élections présidentielles polonaises. Ça m'intéresse toujours parce que je suis assez versé en géographie électorale, et que je contribue souvent à un site ("electoralgeography.com") en faisant des cartes de telle ou telle élection.
C'est ainsi que j'ai vu, sauf erreur, que Magdalena Ogorek était la seule femme candidate. Belle, jeune, intelligente et docteur en histoire, j'avais lu sa biographie sur le net.
Elle est la candidate du SLD, lointain avatar réformé du parti communiste, devenu social-démocrate voire social-libéral.
En me documentant un peu, j'avais vu qu'outre le Mouvement Palikot, assez controversé, il y avait aussi un petit parti ("Racja", ou raison de la gauche polonaise) qui semblait intéressant dans un pays où la religion a semble-t-il encore beaucoup d'influence...

Sinon, votre billet est très intéressant et interpellant, comme c'est souvent le cas !

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages pour vos remarques pointues.

Magdalena Ogorek est soutenue par le SLD mais n'appartient pas elle-même au SLD. Ses positions, notamment en matière économique, s'écartent d'ailleurs, assez fortement, de celle du Parti Socialiste.

On ne sait d'ailleurs pas grand chose d'elle. Elle était jusqu'alors totalement inconnue. Même ses études, on ne sait pas trop si c'est de l'histoire ou de la théologie. Ce qui est sûr, c'est qu'elle n'est pas idiote mais elle a continuellement été violemment attaquée.

J'aime assez le mouvement Palikot (un drôle de nom qui signifie: "il brûle le chat"). C'est un mouvement ultra-libéral mais anarchisant: contre l'église et les vieilles chimères nationalistes (Smolensk), pour la libéralisation générale des moeurs. Ce parti compte d'ailleurs la seule députée transsexuelle d'Europe.

Sinon, c'est vrai que le poids de l'Eglise demeure très fort en Pologne. Cependant , les choses évoluent beaucoup depuis la chute du communisme. La nouvelle génération se détourne massivement de l'Eglise, sans oser toutefois la critiquer trop violemment.

Carmilla

nuages a dit…

A propos de la comtesse Erzsebet Bathory, j'ai trouvé dans ma médiathèque le film "La comtesse" de / et avec Julie Delpy (et aussi Daniel Brühl et William Hurt), que je vous recommande.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages!

Effectivement, "la Comtesse" de Julie Delpy est un excellent film et évoque bien cet effroi d'une femme face à une beauté qui se dérobe. J'avais d'ailleurs évoqué ce film dans l'un de mes posts en mai 2010.

Les films de Julie Delpy sont toujours étonnants et inhabituels.

Mais je vous le conseille encore une fois: allez un jour à Trencin puis de là, à Cachtice.

Carmilla

KOGAN a dit…

Sigmund FREUD disait:

"La femme est un vaste continent noir...on n'y voit rien on ne la comprend pas..."
Pourtant il n'y a pas plus lumineux que vos propos...
Et ...vous avez le N° du portable de Magdalena OGOREK?

Carmilla Le Golem a dit…

Grand merci Kogan pour cette appréciation sans doute excessivement flatteuse.

Quant au portable de Magdalena Ogorek, je ne l'ai malheureusement pas. Il faut dire qu'elle a un peu disparu de la circulation depuis ces derniers mois.

En outre, je ne sais pas quel est son niveau en langues étrangères. Je crois qu'elle parle un peu français.

De plus, elle est hyper-polonaise et ça n'est donc pas facile, pour un Français, de bien appréhender son monde.

Carmilla