dimanche 28 juin 2015

De l'éducation


C'est la fin des classes, de l'école!

J'ai constaté ça, cette semaine, en côtoyant, dans le métro, un groupe bruyant de lycéens. Je me suis sentie, d'emblée et brutalement, en phase avec eux et j'ai retrouvé la joie que j'éprouvais alors, moi aussi. La fin de l'année scolaire, c'était toujours, pour moi, un soulagement extraordinaire.

Je vivais ça comme un immense bonheur. Jusqu'au baccalauréat, je détestais la contrainte scolaire et je n'aimais pas du tout mes profs aux quels je ne voyais que des défauts. Je les détestais même et n'avais pas grande estime pour eux. Intérieurement, j'étais une rebelle, une révoltée. L'école, ça a toujours été pour moi une horreur et une angoisse.

Ça peut sembler bizarre parce que je n'avais vraiment pas à me plaindre. J'étais même une privilégiée. Dans mes études, je me suis toujours baladée, tout a toujours été facile.

Je devais même être carrément odieuse avec mon petit air continuel de supériorité, ma manière de ne pas y toucher. On me surnommait "Cosmos". C'était lié, bien sûr, à mon nom, mes origines et sans doute, aussi, à cette impression que je devais donner d'être en dehors des lois et préoccupations de la Terre. D'ailleurs, sur ce plan là, je ne sais pas si, aujourd'hui, j'ai beaucoup changé.

La souffrance du cancre, je ne l'ai donc jamais connue.  Toutefois, je me suis toujours sentie proche d'eux et mes ami(e)s étaient souvent des cancres sans doute parce que j'étais sensible à leur révolte. Ma meilleure copine, Daria, était une terrible cancre en Russie mais je n'arrête pas de la considérer comme plus forte et supérieure à moi.

Au final, et même si c'est aujourd'hui devenu très incorrect de dire ça, l'école, ça a toujours été pour moi l'apprentissage de la sujétion, de la violence, de l'humiliation. L'école, c'est bien le premier instrument de la société disciplinaire.

Je suis toujours étonnée par les débats infinis sur l'éducation en France. On entend, sans cesse, parler de profs qu'on ne respecterait plus et même qu'on violenterait. Etre prof, ce serait être un soldat luttant contre la barbarie. On s'indigne violemment là-dessus. Ce serait l'illustration même de la décadence, du niveau qui baisse, du "tout fout le camp". Alain Finkielkraut en a fait son fond de commerce.

On rêve d'une Education Nationale entièrement pacifiée dans laquelle les profs seraient des "maîtres" unanimement respectés par des élèves entièrement dociles. On rêve d'une harmonie complète entre les profs et les élèves.

J'avoue que cette perspective, ça me fait bien rigoler. D'abord, c'est faux : quoiqu'on en dise, et en dépit de la complainte générale, on est bien plus cultivés aujourd'hui qu'autrefois, pas seulement en France mais dans le Monde dans son ensemble.

Le niveau monte, c'est ça la bonne nouvelle et c'est ce qu'il faut rappeler aux innombrables décadentistes.

Ensuite, les profs, c'est comme les parents: de toute façon, ils éduquent mal et leur bonne volonté est souvent contre-productive. D'ailleurs, les élèves méprisent le plus souvent ceux qui se montrent pleins de sollicitude.

En fait, le processus éducatif, il ne repose pas sur l'accord et l'harmonie mais plutôt sur le conflit et la dissension. C'est dans la résistance et la révolte, et non dans la passivité, que l'on construit sa personnalité. Avoir des profs nuls et méchants, c'est aussi formateur que d'avoir des profs exemplaires. Ce qui est important finalement, c'est d'avoir à affronter la contrainte et l'adversité pour pouvoir conquérir sa liberté propre.


Tableaux de Vincent Van GOGH - "La cour de prison" et d'Alexandre Tyschler (1898-1980): "Sacco et Vanzetti.

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