dimanche 19 juin 2016

Intranquille


Jamais, je ne suis calme, paisible, même si c'est mon apparence générale.


Sans cesse, y compris dans les instants de la vie la plus banale, je suis traversée d'angoisses, rêveries, cauchemars et même de penchants obscènes ou criminels. C'est très fort dans les périodes de grande pression sociale ou professionnelle. Quelquefois, j'ai le sentiment d'être capable de passer à l'acte: tuer ou me tuer. Ou bien, les fantasmes oppressants de débauche... Mourir, baiser, c'est l'obsession habituelle.


"N'avoir pas froid aux yeux", c'est une expression française que je trouve magnifique. Je pourrais en faire ma devise.


Je choque peut-être mais je ne crois pas être bien différente des autres. Simplement, c'est une chose que l'on n'ose pas avouer à une époque où l'on prône le calme, la sérénité, l'harmonie intérieure. On n'ose pas dire que l'on est torturé et que l'on aime renverser les tables. Moi, chaque nuit, chaque jour, un renard me bouffe les tripes. La mort, le sexe, je ne sais pas si c'est mon carburant ou mon frein.


L'idéal du bonheur, aujourd'hui, ce serait la domestication généralisée. La vie comme hygiène! Des individus sains, dépourvus de mauvaises pensées, en accord avec eux-mêmes et la société toute entière. De parfaits citoyens pour une société parfaite. Un monde lisse sans aspérités, expurgé du mal. Le rêve totalitaire d'une société de moutons, écolo-démocrato-responsables, broutant leurs 5 fruits et légumes par jour.


Le mot d'ordre, aujourd'hui, c'est d'être "cool", serein. 


Je me sens complètement à côté de ça. Je suis, tout le temps, désaxée, déconnectée, à côté.

Par exemple, toutes les thérapies de relaxation, ça me fait bien rigoler. Une copine me conseillait, récemment, de faire du yoga. Mais, mais ... je lui ai répondu: je suis bien trop perturbée, bien trop secouée, bien trop libidineuse, pour m'adonner à ce truc. Et puis, j'ai envie de rester comme je suis, je préfère vivre dans la noirceur, la tempête, l'agitation, plutôt que dans la tranquillité. Etre dingue, ça me plaît quand même, j'y trouve mon équilibre.


Les loups, j'aime, j'adore même !


L'angoisse, la peur, plutôt que le silence, l'atonie, l'unanimité !


Images de Charles Vess (1951), Emil Schmidt, Georges Seurat, Christian Chan, Rovina Cai.

Je recommande, surtout, d'aller voir, de toute urgence, le film: "The Neon Demon" de Nicolas Winding Refin (il est Danois et non pas Américain comme on le suppose généralement). Etrangement, les critiques ont été mitigées en France mais je vous assure que c'est magnifique, renversant, dérangeant !

7 commentaires:

KOGAN a dit…

Bonjour CARMILLA

« votre devise N’avoir pas froid aux yeux…. »

« Cette expression date du XVIe siècle. « Avoir froid » était régulièrement associé à une partie du corps pour désigner un sentiment, une sensation. Dans ce cas-là, les yeux sont associés à la peur, employée à la forme négative. Cela désigne alors une personne audacieuse…

Si, aujourd'hui, cette expression ne s'utilise que sous une forme négative, au XVIe siècle, "avoir froid" était une locution souvent utilisée avec une partie du corps. Ainsi, "avoir froid aux dents" voulait dire "avoir faim" et "avoir froid aux pieds" signifiait "être jaloux" (mais pourquoi donc ?).

Lorsqu'on sait qu'en argot des brigands, au milieu du XIXe siècle, "avoir froid", ellipse de "avoir froid au cul", c'était "avoir peur", on peut imaginer que cette forme venait d'une ancienne "avoir froid aux yeux" qui aurait signifié "être lâche, peureux" et qui, avec le temps, se serait transformée, les 'yeux' étant d'autant plus facilement remplacés par le 'cul', qu'en argot l'anus s'appelle aussi 'oeil'.

Cette expression, qui est attestée chez Alexandre Dumas Père et Honoré de Balzac, ne serait donc que la forme négative de l'ancienne "avoir froid aux yeux".

Exemple
« Vous ne savez donc pas que la petite Micheline a plu au baron Gouraud ?... Allez, c'est une gaillarde. Elle n'a pas froid aux yeux... »
Emile Zola - La curée

« Mourir, baiser, c’est l’obsession habituelle »

Vous avez inversé le « sens» des verbes c’est révélateur…

Assurément, on va tous y passer un jour, quand ? comment ? c’est la surprise du chef…

L’idéal serait la crise cardiaque en plein orgasme….mais je dois faire vite…l’âge avance…et cela est d’autant plus difficile car de tous temps, les femmes ont fait marronner les hommes …autour de leur petit doigt…

C’est un verdict cruel car de plus, la beauté et l’amour ne créent pas de fait l’exubérance et l’émoi, il y faut un peu de boue et d’obscénité…pour atteindre la fusion suprême...

Finalement la jouissance n’est pas une histoire drôle…le partage des orgasmes n’étant pas équitable, il rend inévitable le retour du dégoût…

Maintenant, je l’avoue, plus personne, ne me fait trembler le pouls…avec ou sans 5 fruits et légumes par jour…et je suis tranquille...

Bien à vous

Jeff

Richard a dit…

Bonjour dame Carmilla.
Cette nuit se sont les coyotes qui on hurlé par très loin de ma tente. Au sud du fleuve Saint-Laurent, il n'y a pas de loup, il faut aller au nord pour en voir, mais les coyotes font amplement l'affaire. Là-bas, sur le plateau, je n'ai pas rêvé, sans doute que mon sommeil était trop profond. On dit qu'une nuit sans rêve est une nuit perdue, mais lorsqu'ils ont poussé leurs cris, je me suis réveillé pour sortir, malgré une belle lune, je n'ai pu les repérer.
Je suis tout le contraire de vous. Plus souvent qu'autrement, en plénitude, je n'en n'ai pas de mérite, je suis né comme cela. On dit que j'ai le bonheur facile ; mais les autres disent de moi que je suis difficile à vivre. L'angoisse je ne connais pas, s'il avait fallu avec les métiers que j'ai pratiqué...Les cauchemars c'est pour les autres. Par contre je suis pour la lutte, le débat, et je suis comme les vieux juifs ; je me méfier de l'unanimité.
Pour le reste, pas grand chose à voir avec cette époque qui est en train de devenir malade de sa santé, qui veut interdire le tabac et légalisé la marijuana, qui tourne en rond, qui baigne dans l'eugénisme, et qui désire la vie éternel. Ils me font l'effet qu'ils ne savent pas ce qu'ils veulent.
La nature est violente, sans but défini et très opportuniste et comme animal humain, il faut faire avec.
Moi aussi, j'ai été très à part dans la vie et je le suis encore et je le revendique.
J'assume cette différence.
J'ai tué beaucoup d'animaux dans ma vie, c'est une chose que l'on m'a montré sur la ferme, tuer proprement, mais jamais je n'ai tué d'humain, mais des fois je pense que cela pourrait se produire. Nous sommes vraiment l'espèce la plus dangereuse qui habite cette planète.

Oui, je regarde ces sociétés, mais de loin, elle me fascine et me répugne à la fois. Tuer, mais pourquoi ? La mort ça se mérite.
Bon, comme je suis vivant, je retourne sur le plateau.
Une autre journée au grand air dans les champs de la liberté.

Un jour je vous raconterai une histoire de loups, que j'ai vécu loin là-bas dans le nord.

Salutations

Richard St-Laurent

Anonyme a dit…

Vous êtes attachante, marrante, subversive, ça fait du bien de vous lire

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Jeff pour ces commentaires très érudits mais qui, je l'avoue, me passent un peu au-dessus du chignon.

En outre, vous avez tendance à rapprocher la sexualité et l'orgasme. Est-ce que ce n'est pas réducteur ?

C'est d'abord un éveil permanent (même si ça passe par l'angoisse), le contraire de l'apathie. Et ça n'est pas non plus toujours la jouissance.

Bien à vous

Carmilla

KOGAN a dit…

Pour votre chignon...

Pour ma part, l’art de jouir est un jeu à merveille(s).

Affirmation contestable sous-entendez-vous… j’en conviens aussi.

Mais la confrontation aux bisbilles entre homme et femme, et autres chipotages génitaux, ruine la fiction d’une sexualité bambocheuse…

La sexualité est si peu amusante que la majorité de ses fidèles la pratiquent sans conviction et sans humour…

Il faut aussi se garder, dans le cadre démographique, des attraits du boute-en-train de l’art vétérinaire, mais ce n’est plus mon cas...

Humour…toujours.

Bien à vous
Jeff

Carmilla Le Golem a dit…

Bonjour Richard,

J'avoue que j'entends rarement hurler les loups ou les coyotes hurler près de ma tente. D'abord, je déteste le camping. Et puis, les loups, on ne commence à en rencontrer, en Europe, qu'en Pologne mais c'est quand même très rare. A Varsovie, toutefois, les animaux sont de plus en plus audacieux et on croise fréquemment, dans les zones vertes, des sangliers ou des renards.

C'est très bien que vous soyez serein mais je suis quand même un peu sceptique. L'angoisse, ça fait partie de la condition humaine.

Sinon, je suis d'accord avec vous. "Le crime est le fait de l'espèce humaine". Cependant, je ne pourrais jamais chasser ou tuer un animal.

Enfin, la mort est bien le sel de la vie. C'est elle qui nous conduit à avoir des projets, à agir. Si nous étions immortels, nous reporterions tout, sans cesse, au lendemain.

Bien à vous

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Anonyme pour votre si gentil message.

C'est bien de cette manière qu'il faut me lire.

Marrante, ça me convient même si je ne pense pas être très drôle dans vie quotidienne. Mais je ne voudrais pas que mes petits textes apparaissent trop lourds.

Quant à subversive, je ne sais pas mais c'est sûr que je déteste la pensée commune.

Bien à vous

Carmilla