samedi 4 janvier 2025

Ce Désir qui nous fait vivre


C'est une nouvelle année, un nouveau départ. 


On s'adresse, échange, des vœux. On prend aussi de bonnes résolutions pour ne plus se laisser aller. On se met à rêver d'autre chose. Comme s'il était possible de corriger le cours de nos vies.


Mais on sait bien qu'on se dépêchera d'oublier tout ça et que ça partira, dès demain, en fumée. 


Parce que personne ne maîtrise son Destin et que nul ne sait vraiment ce qu'il souhaite et désire.


On dit, en effet, qu'on est des êtres de Désir. Pourquoi pas ? Mais si le Désir, c'est cet objet qui nous fait vivre, il faut bien reconnaître qu'on est absolument infichus de le décrire et de dire à quoi il correspond précisément pour nous. 


On croit savoir, on a une idée de ce qu'il est, mais quand quelque chose nous arrive, ça ne correspond jamais entièrement, ça n'est jamais tout à fait ça. Il y a toujours un truc qui manque ou qui fait tâche.


Ce serait vraiment trop simple si le Désir pouvait s'incarner dans quelque chose ou quelqu'un de bien identifié: un homme, une femme, des sensations, voire un simple objet concret et précieux.


"Cet obscur objet du Désir", c'est le titre bien choisi d'un film du grand cinéaste Luis Bunuel.


On vit, en effet, dans un état de méconnaissance complète de l'objet du Désir mais ça ne nous décourage nullement. Ca nous incite, au contraire, à nous agiter, à nous démener sans cesse, dans l'espoir de donner, un jour, incarnation à cette pulsion qui nous anime. 


Ca explique qu'on soit de perpétuels insatisfaits et qu'on vive dans une intranquillité permanente. On se sent toujours en état de manque, on est des alcooliques de la vie. Mais ce manque, c'est aussi un moteur qui nous entraîne à la poursuite des signes de notre Désir et essaie de les organiser dans des actions, des projets, des créations, une manière de vivre...


Et on arrive, finalement, à force de persévérance, à donner une forme à notre Désir, même si ça n'est qu'en  partie et jamais exactement ça.


Mais c'est cette errance constructive qui fait aussi la beauté de notre condition.


Je terminerai en précisant que les deux meilleurs films que j'ai vus l'an dernier étaient, peut-être, "Morsures" de Romain de Saint-Blanquat et "Miséricorde" d'Alain Guiraudie.


Tout un programme. Des Morsures, on a besoin d'en prendre et d'en donner. La vie, ça n'est jamais cool. Quant à la Miséricorde, le mot est en voie de disparition mais c'est plus grand et plus fort que le Pardon. 


A méditer pour cette nouvelle année. A défaut de Désirs forcément irréalisables, qu'elle soit, du moins, pour vous, exempte de chagrins.


Mes petites photos avec mon cadeau de Noël, un nouvel appareil que je commence à tester (à Paris puis en Normandie). Et je précise que si tout est sombre, c'est qu'il a fait un temps de cochon.

Je recommande:

- "Le Désir, l'objet qui nous fait vivre". Un petit bouquin issu de la contribution de plusieurs psychanalystes (Paul-Laurent Assoun, Gérard Bonnet, Denise Bouchet-Kervella, Marjolaine Hatzfeld, Monique Schneider). Ca n'est pas jargonnant et c'est stimulant.

- Grégoire Bouiller : "Le syndrome de l'orangerie". L'un des bouquins les plus singuliers de cet automne. Un gros pavé consacré aux fameux nymphéas de Claude Monet. 450 pages là-dessus et pourtant, ça tient, à peu près, la route (mais on peut aussi détester). Disons simplement que ce n'est pas nous qui regardons une œuvre d'Art mais c'est elle qui nous regarde. Au point de, presque, nous pétrifier. Parce qu'elle énonce quelque chose de la vérité de notre Désir en la quelle nous nous reconnaissons immédiatement. Et s'agissant des Nymphéas, ce Désir a trait à la Mort.


4 commentaires:

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Ce désir qui nous fait vivre ?

Je me pose toujours des questions sur ce fameux désir : Doit-on toujours souscrire à tous nos désirs ? Est-ce que les désirs doivent être la locomotive de notre existence ? Est-ce qu’on peut maîtriser ses désirs ?

Laissons derrière nous ce désir de possessions, qui souvent, sont décevants, dès que nous possédons l’objet de notre désir.

De la possession, j’abandonne ce désir de posséder, pour en venir au désir d’être, qui lui, est beaucoup plus fondamental. Savons-nous vraiment ce que nous voulons être ? Ce que nous pouvons être ? Est-ce que nous parvenons à réaliser ce désir de métamorphose ?

Le désir se pointe dans notre existence sans s’annoncer. C’est la surprise totale. Nous sommes désarçonnés.

« Mais c'est cette errance constructive qui fait aussi la beauté de notre condition. »

C’est ainsi, que ceux qui errent ne sont pas perdus.

En une seule et unique phrase Carmilla, vous avez touché l’essentiel de cette réflexion. Réaliser un petit ou un grand désir, peu importe, parvenir à évoluer avec le bagage passé pour déboucher sur une autre façon de vivre, ce qui peut être très valorisant, mais ce peut être aussi l’échec, parce que le désir n’est jamais une certitude. À manœuvrer avec précaution afin d’éviter la souffrance, le chagrin comme vous l’écrivez. La vie est rude, mais le désir peut être encore plus dévastateur. Et, ce n’est pas juste une question de réussite. Nous avons peut-être un désir, mais pour l’atteindre et le réaliser, nous sommes peut-être sur le mauvais chemin, avec une mauvaise manière.

Si tu veux connaître réellement une personne, interroge-là sur ses désirs. Ce qui peut être intéressant et surtout très révélateur. C’est une dimension chez l’humain, du moins il me semble, que nous avons tendance à négliger. Avons-nous peur de nos désirs? Est-ce que nous pouvons atteindre le détachement par le désir? Ce fameux détachement qui confère un pouvoir infini, comme l’affirmait Sénèque?

Excellente fin de journée Carmilla.
Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Il est en effet toujours intéressant d'interroger quelqu'un sur ce qu'il désire dans la vie.

Mais il ne faut pas s'attendre à avoir un réponse sincère et juste. On vous parle généralement d'argent, de position sociale, de partenaire amoureux ou même simplement de tranquillité ou de vie paisible.

Mais ce qui est exprimé est, à peu près, faux et inadéquat. Et en tous cas, n'a pas grand chose à voir avec notre désir profond, inconscient, qui, dans notre enfance, a façonné notre rapport à l'Autre et aux autres.

Celui-ci s'exprime, en partie et de manière déguisée, dans nos rêves, voire dans nos élaborations artistiques (peinture, musique, écriture etc...) et même dans tous les petits actes irraisonnés de notre vie quotidienne.

Ce qui est sûr, c'est que soi-même, on ne connaît pas son propre Désir mais on ne cesse de le rechercher. On arrive quand même à lui trouver quelques substituts mais qui ne nous laissent jamais pleinement satisfaits. Les gens complétement contents, ça n'existe pas et je n'y crois pas. Il y a toujours quelque chose qui manque. La satisfaction affichée masque toujours une grande frustration.

C'est pour ça qu'on ne cesse de s'agiter, d'être toujours en mouvement. D'être à la recherche de quelque chose d'autre. C'est évidemment plus ou moins prononcé selon les individus et il y en a certains qui se résignent, qui préfèrent renoncer et s'enfermer dans une existence cadenassée et obsessionnelle, faite de manies et d'habitudes.

Mais au total, ne pas connaître son Désir, c'est ce qui fait le malheur et la beauté de la condition humaine. Et même si notre recherche est vouée à l'échec, elle parvient quand même à s'incarner dans quelques projets et créations ou même, simplement, dans une manière de vivre. L'important, c'est de s'arracher, de s'extirper, d'une vie absolument conforme. Ne pas être absolument comme tout le monde, avoir le sentiment de porter, en soi, quelque chose d'unique et d'inéchangeable, c'est déjà réconfortant.

Bien à vous,

Carmilla

Nuages a dit…

A propos, quel est votre nouvel appareil photo ?
Et le temps de cochon... je crois savoir que vous n'aimez pas le soleil ?

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages,

Oui, c'est vrai... j'aime bien le temps de cochon mais ça n'est pas très propice pour la photo.

Quant à mon nouvel appareil, j'ai fini par me décider pour le Leica Q3.

Ca n'est bien sûr pas un achat entièrement rationnel mais mon matériel Nikon ne me convenait plus du tout. Beaucoup trop lourd et encombrant (à peu près 2 kilos). Aujourd'hui, le meilleur appareil photo, c'est celui que l'on a à portée de main. Et puis, je n'ai jamais réussi à me faire aux menus effroyablement compliqués de Nikon. Finalement, je ne faisais plus que du tout auto, ce qui n'était pas satisfaisant.

Le Leica, il a pour premier avantage d'être peu encombrant et discret. Je peux l'emporter à chaque sortie ou promenade. Ses menus sont ensuite très simples. Je peux tout de suite choisir le diaphragme, la vitesse, la sensibilité etc...Il est vraiment très facile à utiliser sans même consulter le manuel d'utilisation.

Evidemment, ce n'est qu'une focale fixe mais je dois reconnaître que le zoom numérique, avec ses 60 Mpx, ça marche vraiment très bien et c'est impressionnant. Je dois dire que je suis, pour le moment, très contente des premières images, même si je ne fais, pour débuter, que du JPEG. En sus, on peut connecter l'appareil à son smartphone et c'est très rapide et efficace.

Enfin, avec un Leica, on est certes toujours ramené à la question du prix. Bien sûr qu'on peut trouver aussi bien pour moins cher. Mais, je dirais que c'est quand même un appareil qui donne envie de faire des photos. Et puis, si on veut revendre son appareil, un Leica se déprécie beaucoup moins que les autres marques.

Bien à vous,

Carmilla