samedi 18 décembre 2010

L’hiver est à nous


Quel plaisir d’avoir un peu de froid et de neige, d’errer dans des nuits glauques et ruisselantes d’où émergent, tout à coup, des visages troubles. Et puis on peut frimer en manteau de fourrure en affrontant les regards réprobateurs.

J’illustre ma joie avec la peinture russe, celle de Boris Kustodiev (Борис Кустодиев) en premier lieu. Vous remarquerez évidemment que la neige donne lieu en Russie à fêtes, réjouissances, sorties, jeux, rencontres. Ca nous change de la France où tout le monde se calfeutre et affiche une mine atterrée.


Il y a aussi la part de mystère avec la rencontre possible, dans des bois ténébreux, de la Princesse des Neiges. Ce mythe d’Europe Nord, qui incarne une vision marmoréenne et hiératique de la sexualité, demeure très vivace.

Puisqu’on est en Russie, je vais vous parler de mes récentes découvertes. Je lis ou parcours évidemment tout ce qui se rapporte au pays des ours. Voilà ce que j’ai retenu récemment :

Hélène Carrère d’Encausse : « La Russie entre deux mondes ». Je sais bien qu’on la considère en France comme « la » grande spécialiste mais moi, je ne me retrouve pas dans ses bouquins. Elle ne sait appréhender la Russie qu’à travers le prisme de l’histoire diplomatique; ça ne peut intéresser qu’un étudiant de Sciences-Po et c’est incroyablement réducteur. J’en viens à me demander si elle a jamais mis les pieds en Russie.



Colin Thubron : "En Sibérie". J’avais détesté son bouquin « Parmi les Russes », sorti en 1983 et encensé par la critique ; il ne s’y exprimait que la paranoïa de l’occidental en voyage à l’Est : ridicule ! Là, c’est un peu mieux mais c’est toujours bourré de clichés : dans une Sibérie d’Apocalypse, Colin Thubron ne rencontre que des dingues, des alcooliques, des exaltés religieux, des épaves sociales, bref toute une cour des miracles. Ca se veut non distancié, au plus près du quotidien (anglais, quoi !), mais on se retrouve en fait en pleine fiction.

Dominique Bromberger : «C’est ça la Russie ». Je craignais le pire mais il y a une confrontation intéressante entre un premier voyage effectué dans les années 60 et aujourd’hui. Et puis il y a un réel effort de découverte des lieux et des gens.


Géraldine Dunbar : « Seule sur le Transsibérien ». Un livre très sympathique écrit par une jeune franco-anglaise qui connaît bien la langue et la culture russes. C’est l’anti Thubron, c’est presque trop idéalisé. Mais Géraldine Dunbar montre au moins qu’une jeune femme (pourvu qu’elle parle un peu de russe) peut parfaitement voyager seule, sans courir aucun danger, en Russie (j’oserais même dire que c’est moins problématique qu’en France). Elle sera partout accueillie avec chaleur.

Dominique Fernandez : « Russies » et « Tolstoï ». Je ne suis pas toujours fan de Dominique Fernandez mais je trouve très bons et très intelligents tous ses récents ouvrages consacrés à la Russie. Il montre bien en particulier qu’en Russie la dimension culturelle est prépondérante et que c’est à ce titre l’un des derniers pays qui résiste à la mondialisation.


Enfin, allez voir absolument, il est encore temps, deux films russes, russes : « My Joy » de Sergueï Loznitsa (Лозница) et « Le dernier voyage de Tania » de Alekseï Fedortchenko. C’est l’école russe dans toute sa splendeur, celle qui a donné Zviaguintsev (Звягинцев), Sokourov (Сокуров), Tarkovsky (Тарковский).



Boris Kustodiev (Борис Кустодиев),
Alexandre Glazounov (Александр Глазунов)
Kazimierz Stabrowski
Victor Vasnetson (Виктор Васнецов)

4 commentaires:

Olga a dit…

Je viens te souhaiter un très beau Noël!...
Merveilleuses, tes images choisies!

Carmilla Le Golem a dit…

Joyeux Noël à toi aussi, Olga !

Carmilla

nuages a dit…

J'avais beaucoup aimé un livre de Jean-Pierre Thibaudat (ancien journaliste à Libération, spécialiste du théâtre) sur la Russie. Le titre était, je crois, "Rien ne sera plus pareil à la frontière finno-chinoise". Vous connaissez ce livre ?

Carmilla Le Golem a dit…

Oui, Nuages !

J'ai effectivement lu ce livre il y a 2 ou 3 ans et je confirme que c'est effectivement très bon et objectif.

Carmilla