dimanche 1 mai 2011

Sérénité


Aujourd’hui, c’est un jour un peu particulier pour moi.

Alors, j’ai choisi un autre registre d’illustration picturale. Ca change, n’est-ce pas ? C’est Pierre Tal-Coat, grand peintre français de la fin du 20ème siècle. Pour moi, il est un peu comme Soulages. Ses toiles ne renvoient qu’à elles-mêmes, sans lien avec l’extérieur, dans l’énigme de leur pure présence. Du coup, la matière et les couleurs se font plus vibrantes que la réalité.

En tout cas, ça dégage pour moi un sentiment de sérénité.



Sérénité, ça me convient bien parce que, vraiment, plus cool que moi, ça n’existe pas.

Personne, je crois, ne peut prétendre m’avoir vue perdre mon contrôle émotionnel ou, simplement, me montrer d’humeur inégale.

Je suis toujours impassible, indécryptable, aussi bien dans ma vie personnelle que professionnelle. J’en joue d’ailleurs parce que je sais que c’est, d’une certaine manière, déstabilisant pour votre interlocuteur. C’est en fait un jeu de pouvoir, ça vous place en position de force par rapport à l’autre.



J’ai toujours été comme ça. Je n’ai jamais aimé « m’exprimer » et j’ai toujours perçu comme une faiblesse l’abandon émotionnel.


Ca s’est évidemment accentué avec mon boulot. Là, c’est une question de survie. Quand on travaille dans les finances, on a 10 000 raisons de psychoter chaque jour : la boîte au bord de l’écroulement financier ou les contrôles qui vous conduisent à une mise en examen, ce ne sont pas seulement de mauvais rêves, ce sont aussi des éventualités sérieuses.

Alors, autant évacuer tout ça et faire comme si de rien n’était. Je comprends très bien ces traders, engagés dans des opérations catastrophiques, qui continuent de vivre normalement, apparemment sans angoisse particulière.



Le malheur, c’est quand on adhère trop au réel parce qu’alors, il vous dévore. Je ne dirais pas que pour survivre, il faut faire abstraction du réel mais il faut au moins prendre ses distances avec lui.

Comme si on le survolait pour mieux le contempler et qu’on était ainsi hors d’atteinte.

Ne pas le considérer dans ses accidents, dans ce qui blesse ponctuellement. Simplement comme une belle synthèse que l’on domine et maîtrise.


Pour finir, je me permets de vous mentionner les récents bouquins que j’ai lus et qui m’ont bien plu, parce que, finalement, on se définit aussi beaucoup par ses lectures. Voici donc ma liste de ces 4 derniers mois. Vous noterez que je suis en fait accro à ce qui sort, à l'actualité, mais ça, c'est mon côté superficiel.


- Julius Margolin : « Voyage au pays des ze-ka » - un extraordinaire témoignage sur les camps soviétiques d’une très grande qualité littéraire.

- Maxime Ossipov : « Ma province » ; la province russe aujourd’hui (mais c’est aussi la province en général) vue par un médecin-cardiologue.

- Chowra Makaremi : « le journal d’Aziz »; la terreur en Iran au lendemain de la révolution. Un livre qui vous fait pleurer. Une période effroyable, totalement occultée.

- Jens Christian Grondahl : « Quatre jours en mars »

- Ferdinand Von Schirach : « Crimes »


- Imre Kertesz : « Journal de galère »

- Jacqueline Raoul-Duval : « Kafka, l’éternel fiancé »

- J.-B. Pontalis : « Un jour, le crime »

- Iegor Gran : « L’écologie en bas de chez moi ». L’écologie comme attentat contre la culture et vaste entreprise d’abrutissement intellectuel. Ca m’a évidemment enchantée et l’auteur est originaire de Moscou.



Ca vous changera de la littérature anglo-saxonne (Jonathan Coe, John Irving, Ian Mc Ewan, Philip Roth), germano-pratine (Mathieu Lindon) ou italienne (Umberto Eco). Tout ça m’est rapidement tombé des mains.



Pierre Tal-Coat

2 commentaires:

Ségolène a dit…

Longtemps que je ne suis plus " de la partie ", dans ma blogobulle, seuls 2 ou 3 blogs que je visite exceptionnellement par amitié profonde. Plus de commentaire, encore moins de visites au hasard, et pourtant la tonalité de votre commentaire chez Valclair m'a amenée jusqu'ici.
Et je ne souhaite pas quitter ce lieu sans vous dire la beauté de ce blog,sa sobriété, sa finesse qui me touchent.
Et Tal Coat et Grondhal qui auront fini de me convaincre de vous laisser ce petit mot admirative de ce que vous faîtes là.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci, Ségolène, pour ce message si sympathique.

Ca me fait bien sûr plaisir mais j'ai aussi l'impression que l'éloge est excessif.

En tous cas, c'est sûr qu'il faut lire le dernier Grondhal et découvrir ou redécouvrir Tal Coat.

Carmilla