samedi 23 mars 2019

Permis/Interdit - La pornographie


La question sur la quelle règne la plus grande hypocrisie, sur la quelle tout le monde ment, c'est la pornographie.

Si vous interrogez votre entourage, vous pouvez être sûrs que personne n'avouera qu'il regarde de la pornographie. Tout au plus, concèdera-t-on "une fois ou deux, juste pour voir".

Si on est un patron, un puissant, la plus grande terreur c'est qu'on ne fasse courir la rumeur que vous aimez bien le porno et que vous passez beaucoup de temps sur les sites  pendant vos heures de bureau. Rien de plus efficace aujourd'hui pour discréditer quelqu'un que de raconter, en dépit d'une tolérance universelle affichée, qu'il est un "pervers".



Pourtant, certaines enquêtes récentes font apparaître qu'en France, une femme sur cinq et un homme sur deux en visionneraient souvent et régulièrement. Ces chiffres sont d'ailleurs probablement sous-estimés.

D'ailleurs le porno a très mauvaise presse, surtout à l'époque d'une montée du mouvement féministe. Le porno conforterait les rapports de pouvoir et de domination (du masculin sur le féminin), figerait les stéréotypes de genre, normaliserait les apparences physiques (la bimbo blonde à gros seins et le macho au physique de joueur de rugby).



Et puis, ceux qui regardent du porno seraient forcément des frustrés. Bref, c'est des pauvres types qui, en plus, deviendraient rapidement addicts; ça les conduirait à rechercher toujours plus de "hard", toujours plus de violence. Quant à envisager que des enfants, des adolescents puissent regarder du porno, là ce serait carrément la catastrophe, une abomination, il faut absolument les protéger, ces pauvres petits !


Pourtant, dans l'immense majorité des pays démocratiques, la pornographie pour les adultes est légale et on a le droit de produire, consommer, diffuser des ouvrages obscènes et des images pornographiques (y compris dans les très catholiques Pologne et Irlande). Quelques exceptions notables : l'Ukraine où elle est prohibée de même qu'en Chine, en Turquie et aussi en Biélorussie et Lituanie. Il y a aussi des pays où elle est très contrôlée comme la Russie (il faut s'identifier avant d'accéder à YouPorn), la Roumanie et la Bulgarie.  Quant au Japon, il abrite une des plus importantes industries pornographiques au monde mais la Loi impose une pixellisation des parties génitales dans un film pornographique. C'est évidemment dans les pays musulmans qu'il est le plus dangereux d'être un "pornocrate" puisque tout "producteur" s'expose carrément à la peine de mort.



En France, disons qu'il y a une véritable tolérance concernant la pornographie. Elle existe en droit français depuis 1994, date de la suppression par le Code Pénal du délit d'outrage aux bonnes mœurs. Mais attention, cette tolérance ne s'exerce qu'à l'égard des adultes !

 La pornographie est bien autorisée pour les majeurs, avec certaines restrictions toutefois, mais elle est rigoureusement interdite pour les mineurs qu'ils soient acteurs ou spectateurs. Les peines encourues sont même très lourdes :

- 75 000 euros et 5 ans de prison pour la réalisation d'images pornographiques d'enfants mineurs de moins de 15 ans. Si les mineurs (civils) ont entre 15 et 18 ans, la question est de savoir si ces images ont été ou non réalisées en vue d'une diffusion commerciale. Attention donc si vous prenez, sur une plage, une "jeune fille" de 17 ans avec votre smartphone. Ça peut vous coûter 5 ans de cabane si vous diffusez l'image !


- la peine est même portée à 7 ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende, si l'image est diffusée sans "public déterminé", c''est à dire en utilisant un réseau de "communications électroniques".

 - si vous êtes simple "consommateur", ne croyez pas non plus que vous êtes tranquille. Le Code Pénal (article 227-23) punit de 2 ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende "le fait de consulter habituellement ou en contrepartie d'un paiement un service de communication au public" ou même simplement de "détenir" une image pornographique d'enfant mineur. De quoi vous refroidir sérieusement, n'est-ce pas ? Question: est-ce qu'il n'est pas prudent de se dépêcher de balancer les images de David Hamilton ou d'Irina Ionesco que l'on a laissé traîner dans son ordinateur ?


La pénalisation de la pornographie avec les mineurs, ça ne rigole donc vraiment pas ! Mais même la pornographie adulte est réglementée: elle est d'abord soumise à des taxes, elle est même susceptible d'être frappée d'interdiction. Cela concerne notamment les créations artistiques : le film "Baise moi" de Virginie Despentes et le livre "Rose bonbon" de Nicolas Jones-Gorlin (2002).

De plus en plus, en fait, la tolérance envers la pornographie fait  l’objet d’un débat animé entre ceux qui la critiquent au nom de la dignité humaine et ceux qui la défendent au nom de la liberté d’expression.

Face à un tel dilemme, le Droit s’efforce, tant bien que mal, de concilier ces impératifs contradictoires. Mais on peut craindre, au vu du puritanisme croissant de nos sociétés, une évolution répressive. Par exemple, un pays jusqu'alors très libéral comme l'Islande s'engagerait, en ce moment, dans la voie de l'interdiction de la pornographie au nom du traitement dégradant infligé aux femmes. Les Ligues de la vertu et de la dignité sont, chaque année, plus fortes.


De prime abord, c'est vrai que le porno, ça apparaît d'abord un peu sinistre. On y apprend ainsi (rapport annuel de Porn Hub) que les Anglais et les Américains recherchent des « lesbiennes », tandis que les Canadiens, les Allemands et les Argentins veulent voir des « ados ». Les Italiens veulent voir des « milfs » (pour « mothers I’d like to fuck », des femmes d’âge mûr) et les Russes de la sodomie (« anal »). Quant aux Français, ils se singularisent parce qu'ils veulent voir des « Beurettes ». Ça en dit plus que mille analyses politiques laborieuses sur les rapports des Français à l'Islam.


C'est tellement nul qu'on se dit qu'on pourrait très bien s'en passer. Je crois pourtant que ce serait regrettable et, personnellement, je défendrai toujours la libre diffusion de la pornographie pour au moins deux raisons :

- Les pays sans pornographie sont des pays sinistres. En Union Soviétique, par exemple, la population a été privée pendant près de 70 ans de tout imaginaire érotique et bien sûr de toute pornographie. C'est un aspect qui n'a jamais été ni mentionné ni étudié mais dont l'importance m'apparaît considérable. Il faut ainsi rappeler qu'il n'y avait pas de littérature érotique, pas d’œuvres d'art un peu sensuelles, aucune scène osée au cinéma, ne serait-ce qu'un baiser, pas de bandes dessinées et, d'une manière générale, très peu d'images, rien que des vêtements affreux et surtout pas de lingerie fine. Pour une jeune femme, les seuls modèles virils de son éducation sexuelle étaient la statue de Lénine sur la place du village et les fresques d'ouvriers stakhanovistes. Le summum du porno, c'étaient les magazines féminins occidentaux (Elle, Marie-Claire, Cosmopolitan) mais c'était introuvable et, si l'on était possesseur de l'un d'eux par un heureux concours de circonstances, c'était aussi précieux qu'un incunable. Je suis convaincue que cette privation générale a exercé des ravages psychologiques considérables et a rendu les gens complétement dingues: alcooliques, suicidaires, agressifs. Avoir accès au porno était devenu un rêve fou dans les années qui ont précédé la chute du mur. Aujourd'hui encore, la naïveté et la candeur de la population sont immenses à tel point que lorsque je me rends en Ukraine plein de filles viennent me solliciter pour avoir des conseils. Venant de France, elles me croient très experte.

- La pornographie enrichit, en fait, notre vie et élargit notre esprit. D'abord, je le souligne, indépendamment de la consultation de sites spécialisés, on a tous un vécu pornographique qui n'appartient qu'à nous-mêmes et sur le quel on entretient le plus grand secret. On est sans cesse parcourus, submergés, d'images qui nous attrapent à la gorge, de fantasmes érotiques qui expriment notre rapport au monde et traduisent la grammaire de notre désir. C'est notre vie parallèle, sombre et incommunicable.

Ce vécu pornographique, il n'a à peu près rien à voir avec la vraie vie, la vie concrète avec des gens réels, des amants en chair et en os. C'est à tel point que je dirais qu'on passe sans cesse d'un registre à l'autre, qu'on a tous finalement une double vie, une vie pornographique et une vie sexuelle normale, de concert ou dissociée.

J'ai ainsi des aventures amoureuses réelles, d'un soir ou de quelques jours, mais à côté, en même temps ou pas, j'ai un vécu mental pornographique et celui-ci est souvent plus excitant que faire banalement l'amour. Mon porno intérieur, il est constitué d'images, de mots, de visages, de morceaux de corps, de situations, de scénarios entiers qui me procurent une émotion folle lorsqu'il se mettent à tourner dans ma tête.


Enfant déjà, j'ai glané plein d'images fortes dans des livres d'Art: Artemisia Gentileschi, Gustave Moreau, Leonor Fini, ça me retournait bizarrement d'un trouble que je ne savais pas encore identifier. Et puis, à l'adolescence, il y a eu les bandes dessinées de Guido Crepax puis de Milo Manara. C'est avec elles que j'ai commencé à éprouver le miracle et la tempête de l'orgasme.



En même temps, je m'habillais de façon provocante et je piquais de jolis dessous dans les grands magasins. Et je ne parle pas de ma lecture précoce des auteurs érotiques du 18 ème siècle.

C'est à partir de là, de l'adolescence, que notre vécu pornographique, on le tient bien caché et il faut reconnaître qu'il n'a rien de glorieux ni de distingué.

Chez moi, la jouissance passe par des sentiments mêlés de honte et de triomphe.

- j'ai comme ça des fantasmes très forts d'humiliation, soumission: je rêve ainsi que des hommes vulgaires, parfois des grosses brutes ou des vieux ou des Blacks ou des Arabes, m'agressent et me violentent, me demandent de cesser de faire "ma mijaurée", m'en font voir de toutes les couleurs avant, finalement, de m'abandonner toute nue dans une rue. Ou alors des filles de banlieue me séquestrent, me forcent à vivre comme elles, à m'habiller comme elles, à sortir en boîte le week-end pour y effectuer un numéro de strip-tease et terminer par une partouze lesbienne. Ça doit être parce que j'ai un côté "princesse hautaine".

- ou bien, j'ai des rêves exhibitionnistes. J'aime me sentir matée, déshabillée aussi bien par des hommes que par des femmes, j'aime que l'on cherche à surprendre un éclair de ma peau, de mes seins, de mes dessous. Faire l'amour dans un train, un avion, un ascenseur, ça m'excite à proportion du risque d'être surpris.


Je me construis là-dessus plein d'histoires, la nuit, mais ça ne veut pas dire que je mets ça, un jour, à exécution. Je baise d'un côté, je rêve de l'autre mais ça n'a pas grand rapport. Simplement, tout se passe comme si les fantasmes recelaient une vérité plus forte que celle des relations tissées avec des personnes réelles.

Évidemment, ça pose plein de questions désagréables: ton porno, c'est vraiment du mainstream, c'est horrible, c'est sexiste, raciste, ça conforte tous les rapports de domination sociale. Comment tu peux rêver qu'on te traite comme une pute, que tu te fasses prendre contre ton gré ? Tu soutiens la culture du viol, c'est l'aliénation totale. Où sont tes convictions féministes ?

 

C'est sûr que je ne suis pas fière de mes fantasmes (plus stéréotypé, il n'y a pas), mais ça ne se contrôle pas.  Le porno féministe, j'aimerais bien mais rien à faire, ça ne me branche pas.

De toute manière, le porno, c'est la transgression. Alors un porno en accord avec nos convictions, ça ne peut pas du tout nous exciter. Donc mes fantasmes de soumission, ça ne veut pas forcément dire que je suis une bourgeoise docile.

Le porno, il me permet en réalité de comprendre comment je fonctionne, il trace mes "chemins de désirs", l'enchaînement des images qui va me faire chavirer. Ces chemins ne sont certes pas bien jolis mais il y a, malgré tout, du jeu dans nos fantasmes et pouvoir élaborer des récits autour de ces fantasmes permet de comprendre de quels rapports de pouvoir je suis constituée. C'est un regard critique et ça me permet alors, éventuellement, de les réécrire, de les décaler.


En ce sens, en permettant d'explorer différentes voies, le porno participe de la construction de soi. Ça permet de repenser son corps, sa signification, son expression; de s'ouvrir à des perceptions, des sensations; de se laisser absorber par certaines images mais aussi d'en fermer d'autres et d'essayer de réorganiser tout ça dans un nouveau schéma de vie.

Et puis, il faut maintenant compter avec l'explosion du porno en ligne, sur Internet et sur mon smartphone. Le porno s'intègre maintenant dans la routine quotidienne. Surtout, avec les tags, il n'est plus cantonné dans la répétition des mêmes schémas, il ouvre, au contraire, de nouveaux horizons sexuels, il sert à découvrir de nouvelles pratiques. Si je tape par exemple "femme soumise", je trouve tout de suite des déclinaisons infinies, de nouvelles constellations, des dimensions différentes.

J'aborde des îles mystérieuses, d'une perversité sans nom, qui dessinent une nouvelle carte du monde.


Photographies de l'artiste chinois REN HANG, né en 1987 et suicidé par défenestration en 2017. Une très belle exposition lui est actuellement consacrée à la Maison Européenne de la Photograhie, rue de Fourcy, 75004.

Ce post s'inscrit dans le prolongement direct du récent livre, percutant et dérangeant, de Claire Richard: "Les chemins de désir".

Autres livres dérangeants que j'aime bien, à lire ou à relire: Alain Roger: "Le misogyne", Elisabeth Barillé: "Corps de jeune fille" et "Exaucez-nous", Claire Legendre: "Viande" et puis bien sûr Georges Bataille: "Madame Edwarda", "Histoire de l'oeil", "Ma mère", "le Bleu du Ciel".

Je signale enfin le très bon livre de Colas DUFLO: "Philosophie des pornographes". Ça vient de paraître et c'est consacré à la littérature libertine du 18 ème siècle. 

9 commentaires:

Richard a dit…

Je vais jeter un peu d'huile sur le feu.

Bonne nuit Carmilla, ici le soleil vient de se coucher, chez-vous à Paris, il doit être minuit.

Je vais commencer par un extrait de mon journal personnel sur un livre que j'ai lu dernièrement afin d'amorcer la discussion : Les enténébrés par Sarah Chiche.

Nitchequon -302- vendredi, 22 mars 2019.
Terminé la lecture de : Les enténébrés par Sarah Chiche.
Retenu quelques citations.

« L'amour, dès qu'il cherche à se raconter devient une face dite par un aveugle à un sourd, le couinement obscène d'animaux humaines qui n'ont même pas la simplicité des bêtes pour se renifler le derrière sans faire toute une histoire quand ils sont contents de se rencontrer ».
Sarah Chiche
Les enténébrés
Page -66-
Sommes-nous trop propre pour nous lécher le cul ?
Surtout sans faire tout un plat.

« Nous avons beau nous mettre en route vers le monde, sur le chemin de la vie, arrive toujours un moment une station de notre voyage, où nous sommes ramenés; à cette question : mais de quoi sommes-nous la faute ? »
Sarah Chiche
Les enténébrés
Page -304-

Mais de quoi sommes-nous la faute ?
Faudrait-il être la faute de quelqu'un ?
Que dire, d'un pur ou d'une impure inconnue ?

Ce livre, c'est le récit de la folie avant d'être un ouvrage sur la passion. En ce domaine, ma science est nulle. C'est ainsi lorsqu'on évite les champs de ruines truffés de mines. Il n'est pas question d'y sauter à pied joint, surtout lorsqu'il est question de santé mentale.
Je ne connaissais pas cette auteure. J'ai choisi encore une fois sur un coup de tête. Tous les personnages de ce récit sont réellement des enténébrés pris dans le brouillard inexplicable de l'existence. Chiche écrit bien. Elle dit ce qu'elle a à dire. Sarah va se faire percer par Paul son mari sur sa liaison avec son amant Richard. Il sait le code du téléphone de sa femme Sarah. Lorsqu'on laisse des traces partout, on finit par se faire pister, et si on se fait pister, on finit par être débusqué. C'est une question de temps.

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Suite de l'extrait du journal

L'homme du désert, des espaces froids, le sasquatch des neiges que je suis a lu ce livre avec étonnement.

Je ne me souvenais par que Chostakovitch et Staline fussent morts à quelques heures d'intervalle.
Oui, ils se sont haïs pour se tuer.
Pourtant Staline l'a épargné.

Si mes souvenirs sont bons, c'est la même musique que dans le film de Kubrick : Eyes Wilde Shut.

J'aime Chostakovitch comme j’aime Kubrick.
Je ne me lasse pas de la valse NO.2

Entre le bien et le mal, quelque part, se cache la vérité. Jamais innocente et toujours douloureuse.
Pour cette lecture mon intuition ne m'a pas trompée.

Fin de l’extrait de mon journal.

Est-ce que le livre de Sarah Chiche est pornographique ?

Votre texte encore une fois tombe bien Carmilla.

Chiche ne nous épargne rien.

Bien non, dirait certain, c'est de la littérature.
Trêve d'hypocrisie

Mais, de quoi parlons-nous lorsqu'on parle de la pornographie. En fait, c'est quoi la pornographie ?
Qui pourrait me donner une définition sur ce que signifie le mot : Pornographie ?
J'ai lu les jurisprudences canadiennes sur divers jugements sur la pornographie juvéniles. Je vous avoue que c'est assez déstabilisant et à la fois passionnant.
Je pourrais classer la chose dans la rubrique : jugement de valeur. Ce qui dépasse la reproduction graphique de l'acte sexuel.
Comment peut-on se promener complètement nu dans certains pays sans qu'on en fasse de cas et d'autre part, pourquoi en faire une procès dans d'autres ?
La nudité est la nudité et la sexualité est la sexualité.
Comment établir la mince ligne juridique entre la pornographie et une œuvre d'art ?
Belle question, très intéressante.
Richard St-Laurent

Richard a dit…

Je reconnais que j'aime les photos de nus, surtout celle des corps en noire et blanc, homme ou femme confondue. Si je présente ces phots à des gens, certains dirons que c'est de l'art, d'autre les décrirons comme de la pornographie. Je suis assez exigeant en la matière, l'érotisme doit se marier avec l'art, que dire, le grand art.

C'est quoi la différence entre l'érotisme et la pornographie ?

Une autre ligne mince.

Si je regarde des hommes ou des femmes âgés nus.
Est-ce que c'est leur nudité, leur sexe, ou bien, leur décrépitude, voir leurs rides qui sont pornographiques ?

J'en vois d'ici grimacer.

On vient sans doute de quitter la pornographie pour le réalisme.

Tant qu'à être dans le sujet poussons la chose à l'extrême.

C'est qui le plus pornographique, le plus immoral.
Celui qui vient de nettoyer et remonter 45/70 et qui l'admire sur la table de la cuisine ; ou l'autre qui est en train de regarder une femme se faire enculer par un super Mâle ?

Celui qui regarde un film porno gay ; ou bien celui qui regarde des cadavres photographiés à Auschwitz ?

J'attends déjà les objections : cela n'a pas rapport.

Pas rapport ?

Ça joue en plein dans l'état de droit.

Certains prévenus peuvent être condamnés pour des peccadilles, tandis que de véritables criminels vont s'en sortir.

Et, dire que nous sommes incapables d'en faire un vrai débat. C'est vrai l'hypocrisie c'est plus confortable.

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Une société incapable de tolérer la moindre transgression est une société malade, inconfortable dans les reformes comme incapable de révolution. Carmilla vous avez donnez de très bons exemples, la Russie, la Chine, et quelques autres. Les exemples ne manquent pas. Des sociétés comme vous dites, mornes, sans rêve, ruinés intérieurement, passives, en perte de jouissance à la puissance dix. Des gens plus confortables de sortir le samedi soir avec leur arme qu'avec leur sexe. Est-ce cela que nous voulons lorsque nous voyons des groupuscules qui se lèvent et qui nous rappelle du déjà vu imbuvable. Lorsque j'ai évoqué les problèmes intérieurs de la Chine et de La Russie, ce que je viens d'évoquer en fait parti. Vous évoquez ce chinois qui s'est défenestré dans ce pays qui écrase son peuple. Cela est révélateur. Quoi qu'on en dise, quoi qu'on en pense, la sexualité dans certains pays sert strictement à accroître la population, surtout celle des combattants. Par ici la sortie pour l'érotisme et le rêve. Ces sociétés-là ne veulent pas que leur peuple rêve, j'en prends à témoin cette censure d'internet. Voilà une soumission qui me répugne. Ces régimes savent que la liberté totale serait leur fin. Je dirais surtout la liberté sexuelle. Le puritanisme n'est pas seulement l'adage de la religion catholique mais aussi de d'autres religions, et aussi des partis communistes et autres régimes autoritaires. Voilà ce qui les réunis et les attaches à des fondements invivables, c'est leur fond de commerce à tous. Je me demande souvent pourquoi, toute cette humanité à du mal avec le sexe, et surtout la jouissance ? Pourquoi faudrait-il que la jouissance soit fautive ? Je ne puis m'empêcher de penser à la domination et à la soumission. Si nous étirons le sujet, ça nous mène loin. L'occident n'est pas en reste avec cette nouvelle inquisition des scandales sexuels, tribunaux populaires par le biais des fameux médias sociaux dont je me méfie comme la peste, que qualifierais de dictatures de l'obligation de se prononcer immédiatement sur des faits divers qui n'ont rien à voir avec la politique. J'ai hâte de voir la suite du cas d'un producteur local qui a été soumis en examen sur quinze dossiers d'agressions sexuelles. Les procureurs de la poursuite n'en n'ont retenu qu'un, ce qui nous laisse douter du sérieux des accusations portées. J'en référerais au cas de DSK que tout le monde connaît. Nous savons comment la chose s'est terminée devant les tribunaux américains.
Pourquoi avons-nous tellement de mal avec notre jouissance, notre sensualité et notre liberté ?
En cela, je n'ai pas de réponse et je cherche encore.
Selon les fuseaux horaire, le soleil va bientôt se lever sur Paris.
Bonjour Carmilla et bon dimanche
Richard St-Laurent

Richard a dit…

J'ajouterais que ces tous ces textes nocturnes ont été inspirés par Esther Perel, Sarah Chiche et Olga Tokarczuk.

Richard St-Laurent

Nuages a dit…

"La honte et le triomphe"... Si jamais vous écriviez un livre, un jour, peut-être que ce serait un bon titre.

Richard a dit…

Bonjour madame Carmilla

Merci Nuages pour votre suggestion.

La honte et le triomphe ?

C'est un beau titre très inspirant.

La honte c'est proche de l'humiliation voir de la soumission qui accompagne l'amertume.

Tant qu'au triomphe, nous savons, pour ceux qui ont bu les défaites à répétition, que les victoires sont rares.

Difficile de maîtriser le volcan que je suis, lorsque je me retrouve devant cette honte, cette humiliation, pire, nos errances hypocrites, nos mensonges par omissions, nos indifférences coupables.

Je suis conscient que j'ai peinturé épais samedi dernier, mais c'était pleinement volontaire, j'assume.

Votre suggestion me rappelle un autre titre : Le hasard et les jours, du pilote britannique Peter Townsend qui a volé sur Hurricane lors de la bataille d'Angleterre et qui est l'auteur de ce magnifique livre : Un duel d'aigle.

Le hasard et les jours, relate sa vie après le triomphe.

Comment vit-on un triomphe après la victoire ?
Comment rentre-t-on chez soi après la honte de la défaite, la queue entre les deux jambes ?

Encore une fois merci Nuages et salutations distinguées.

Hommage à vous Carmilla qui avez permis ce moment.

Richard St-Laurent



Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Effectivement, on constate qu'il y a une superposition des États totalitaires et de l'interdiction de la pornographie.

Mais les choses ne sont quand même pas aussi simples.

D'abord parce qu'Internet permet de contourner largement les interdits. En Ukraine par exemple, la pornographie, de même que la prostitution, est illégale (3 ans de prison)mais, dans la pratique, tout est à peu près possible. Ce qui fait fureur, là-bas, ce sont les "tchats" érotiques.

Ensuite parce que dans les pays "démocratiques", il y a une répression accrue de la pornographie.

Et c'est vrai qu'on ne connaît pas bien les frontières de la décence et de l'abjection.

S'agissant enfin de Sarah Chiche, elle était quasiment inconnue jusqu'à ces derniers mois, c'est à dire jusqu'à la publication, presque coup sur coup, de deux livres talentueux. Elle est une personne très subtile.

Bien à vous,

Carmilla

PS : j'ai terminé Tooze. Je vous en reparlerai bientôt

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages,

Ce serait effectivement un bon titre.

A une réserve majeure près : il n'entre aucunement dans mes projets d'écrire un livre. La raison en est simple: je sais très bien, sans fausse modestie, que je n'ai pas de talent littéraire (ni qualités d'écriture, ni qualités d'imagination). Il faut savoir être réaliste et il vaut mieux que je me cantonne à mes chiffres et à mon blog.

Bien à vous,

Carmilla