samedi 21 novembre 2020

L'Etat liberticide ? Du romantisme noir

 

Ce qui me soûle en ce moment, c'est le Covid. Je ne veux plus en parler ni en entendre parler.

Surtout parce que le sujet creuse, immédiatement, d'irrémédiables fractures avec vos interlocuteurs.

Tout de suite, on est confrontés à un apprenti virologue-épidémiologiste qui vous assène quelques chiffres absolument concluants. 


 Ça permet de brandir l'étendard de la révolte, de se faire le porte-parole de tous les "opprimés". Pendant quelques instants, on se prend même à croire que la France est devenue, tout à coup, ultra-libérale. Ce qui est en effet dénoncé avec virulence, c'est l’État, accaparé par des technocrates et grand confiscateur de nos libertés fondamentales. On serait les victimes d'une escroquerie intellectuelle massive sur la quelle s'échafauderait, sous un prétexte fallacieux, une sombre dictature.


 C'est étonnant ! On n'a plus affaire aujourd'hui qu'à de grands lecteurs de Nietzsche ("La généalogie de la morale"), de Kafka " ("Le procès", "La colonie pénitentiaire"), de Michel Foucault ("Surveiller, punir", l'"Histoire de la Folie" et le grand renfermement) et bien sûr d'Orwell ("1984"). Je suis vraiment impressionnée.

L’État oppresseur, liberticide ? Ça devient une opinion commune illustrée au mieux, par exemple, par Sylvain Tesson, écrivain à succès : "L'administration politique trouve dans cette crise sanitaire le moyen d'accomplir sa nature. C'est le principe d'une administration centrale de soumettre sa masse, de la contenir. La réalité donne l'occasion aux États de faire ce pour quoi ils existent".

 Nul doute que de tels propos anarchisants vous font passer pour un penseur profond. La révolte romantique du héros solitaire contre l’État monstre froid, ça ne peut valoir que la sympathie. Mais est-ce que ça n'est pas non plus une énorme ânerie ?


 Parce qu'il faut tout de même bien le dire, la révolte individuelle, ça n'est vraiment glorieux qu'aussi longtemps que ça n'engage pas non plus les autres. Le choix d'une destinée tragique, avec le charme noir qui s'y attache, on ne peut le réserver qu'à soi-même.

 Quant à l’État oppresseur par nature, c'est un cliché éculé et complotiste. Au nom de quels intérêts agirait-il d'ailleurs ainsi ? Certainement pas ceux du "Grand Capital" particulièrement mis à mal en ce moment. L’État ne retire certainement aucun bénéfice de l'effondrement de l'activité économique.

Alors quand j'entends parler de l'installation progressive d'une dictature, notamment en France, ça me fait rigoler mais ça m'inquiète aussi, c'est comme ça qu'on en prépare le véritable avènement. Une dictature, ça commence par un bâillonnement complet de l'information et des medias. Mais il me semble quand même qu'on peut toujours exprimer en France n'importe quelle opinion, fût elle idiote, sans s'exposer à conséquences judiciaires. Orwell, il est plutôt à Moscou, Pékin et Pyongyang.

Que l’État moderne, européen, soit maternant, voire infantilisant, je veux bien l'admettre. Mais on est bien loin d'une dictature. D'ailleurs, j'ai l'impression que ceux qui ont le plus la pétoche, ceux qui sont soumis à la plus grande pression, ce sont nos gouvernants, constamment sous la menace d'être accusés d'avoir mis en danger la vie d'autrui. 

Un État maternant, un État sanitaire, c'est tout de même bien mieux qu'un État guerrier ou un État nationaliste. C'en est même la face exactement inverse. J'irais jusqu'à dire, et tant pis si je choque, que la pandémie actuelle permet de mieux comprendre avec quelle facilité a pu se développer l'idéologie nazie. Il y aurait des vies qui ne méritent plus d'être vécues et qui pèsent sur la société des gens sains. 


 Mais je m'arrêterai là, je déteste les polémiques. Je préfère rester dans mon coin. Je suis Républicaine, alors je respecte bêtement les prescriptions. Tant pis si c'est moins flamboyant, si je peux passer pour un mouton pétochard. 

Bien sûr que le confinement, ça m'embête et m'attriste. Mais être privé, pour quelque temps, de restaurants, de cafés, de commerces, de cinémas, de voyages, ça n'est pas bien grave (sauf, bien sûr, pour les professionnels des secteurs). Il y a tellement pire et la vie ne se résume pas à ça. Je précise d'ailleurs que ces choses là n'existaient quasiment pas dans l'ancienne Union Soviétique mais que ça n'était pas le premier motif d'insatisfaction et qu'il y avait même, malgré tout, des gens heureux. La liberté des cafés, des restaurants et des vacances, à  la quelle semble tant tenir les Français, est un peu misérable à bien des égards; c'est la simple liberté de la distraction et de l'oubli.

C'est une illusion de penser que l’État est aujourd'hui dans nos têtes. La banalisation de nos vies et de nos pensées, il n'en est pas l'auteur. C'est nous-mêmes qui adoptons des comportements mimétiques, nous-mêmes qui suivons les meutes. Le vrai danger, c'est plutôt que l’État est sans cesse agité par la menace de sa propre désintégration. 

Freud soulignait que le crime et la déréliction signaient la condition humaine. La vie en société permettait du moins de canaliser la violence voire de la sublimer. Mais cela ne dure qu'un temps, tout projet de société, tout tentative d'"ensembliser" les individus, rencontre l'échec tôt ou tard. La répression des instincts primaires apparaît intolérable et, un jour, les digues cèdent et l'ordre social est submergé par le flot des haines. Ça explique qu'aucune forme d’État n'est stable et que le pire, comme le meilleur, peuvent surgir des révolutions à venir. La destruction de l’État, c'est généralement l'instauration de la barbarie.

Tableaux principalement de Franz Von Stück (1863-1928), Caspar David Friedrich (1774-1840), Ernst Ferdinand Oehme (1797-1855) et bien sûr Jérôme Bosch (1450-1516).

J'ai quand même parlé du Covid mais c'est bien la dernière fois.

Un livre de référence : Timothy Snyder : "L'holocauste et pourquoi il peut se répéter". Snyder envisage l'avènement de régimes totalitaires à le suite d'une désagrégation de l’État et sous la pression écologique, notamment.


11 commentaires:

Richard a dit…

Bonsoir Carmilla !
La route vide s'étire devant moi. Je viens de quitter la forêt après ma journée de bûchage. Fatigué je rentre à ma tanière. Habituellement dans le canton, le samedi après-midi, il y a toujours beaucoup de circulations, les gens vont aux provisions pour préparer le repas du soir, on peut sentir la fébrilité de la fête hebdomadaire, la célébration de la fin de semaine. Un coup d’œil dans le rétroviseur, je suis aussi seul que j'étais solitaire en forêt. Il n'y aura pas de fête au village. Je pense que c'est très bien ainsi en cette période de crise sanitaire. Les gouvernements n'exigent pas qu'on sacrifie nos libertés ; ils nous demandent simplement de sauver nos vies et celles de nos proches, c'est pourtant simple à comprendre. Pourquoi faudrait-il faire de la petite politique ? Accuser celui-ci, maudire celui-là, dénigrer nos élus. À quoi ces élucubrations nous mènent-ils ? Je redoutais ce moment. Je savais que cela allait se produire. Nous avons toujours comme humain des difficultés avec la patience et le sacrifice. S'isoler c'est une petite épreuve. Se soumette aux directives ce n'est pas sacrifier sa liberté, c'est essayer de sauver sa vie. Éviter les foules c'est déjà un pas dans la bonne direction, ce qui ne signifie pas qu'on va s'en sortir, ce virus est très contagieux. Mais au moins, nous aurons fait ce que nous avions à faire. Nous aurons pris nos dispositions.
Ce midi, j'étais assis devant un bon feu de camp. Soudain, le ciel gris s'est déchiré momentanément, laissant place à un magnifique soleil. Jamais le café n'avait été aussi succulent. J'ai salué la chance d'être encore vivant en me disant que ce moment était unique, que j'étais tout simplement bien assis sur ma butte de terre, tendre vers l'essentiel, se sentir bien dans sa peau, droit dans ses bottes ; qu'est-ce que je pourrais demander de plus ? Cette époque que nous déplorons, que nous maudissons, dans les faits, elle nous ramène à l'essentiel, être en santé, savoir ses proches en sécurité, avoir un toit, ne pas manquer de nourriture, et surtout savoir qu'on va s'en sortir. Voilà qui s'appelle la confiance en soi. Avoir confiance même si nous ignorons ce qui se dressent devant nous. Et, tout cela se passe entre nos deux oreilles. La vie est un état d'esprit, ce que nous oublions souvent. Ce n'est pas le temps de perdre les pédales, de plonger dans le (complot), de mettre la faute sur quelqu'un, d'accuser inutilement. La réalité est ainsi, il faut faire avec, et surtout n'oublions pas que les gouvernements c'est nous autres, pas seulement parce que nous les élisons ou les congédions, mais parce que nous en sommes les parties prenantes. Ceux qui sont aux affaires présentement, de manière générale, ils font ce qu'ils peuvent et comme vous l'écrivez si bien Carmilla, ils n'ont pas intérêt à l'effondrement généralisé.
La journée aura été excellente. Le travail avance. Le bûchage m'enchante. Je suis en train de libérer un coin de renversé. Il m'arrive de me coucher le soir en sentant le sapin.

Bonne fin de nuit Carmilla, dormez bien.

Richard St-Laurent

Richard a dit…

« Parce qu'il faut tout de même bien le dire, la révolte individuelle, ça n'est vraiment glorieux qu'aussi longtemps que ça n'engage pas non plus les autres. Le choix d'une destinée tragique, avec le charme noir qui s'y attache, on ne peut le réserver qu'à soi-même. »

J'apprécie ce paragraphe parce que cela signifie une responsabilité lorsque tu engages les autres, chaque être humain se doit d'en être responsable, si tu veux mourir en martyr c'est ton affaire, pas besoin d'entraîner l'humanité derrière toi.

Merci pour votre texte Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Je crois que beaucoup de gens se laissent en effet emporter par une vision fausse et futile de la Liberté. On en vient à confondre l'accessoire et l'essentiel. Peut-être parce que (et tant pis si je passe pour une vieille idiote), la vraie dictature et la Terreur, on ne les a jamais connues dans un pays comme la France. Je veux bien écouter ces jérémiades mais attention à ne pas choisir des fers qui se révéleront beaucoup plus lourds à porter. La démocratie, c'est très fragile.

Merci pour votre description d'un week-end, chez vous au Québec.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonsoir Carmilla !

« Je crois que beaucoup de gens se laissent en effet emporter par une vision fausse et futile de la Liberté. »

Ouais, ça ressemble à cela, vous avez raison.

La liberté, c'est beaucoup plus que simplement faire ce que nos désirs nous dictent.

La liberté implique la responsabilité, c'est pour cela qu'elle est grande. Tenir compte des gens qui nous entourent, des faits incontournables. Nous ne pouvons pas être libres si nous sommes irresponsables. Certes, vous avez raison, les gens se laissent emporter, ils se noient d'inconscience.

« On en vient à confondre l'accessoire et l'essentiel. »

Sommes-nous aussi inconscients ?

Sur la route glissante de l'égoïsme, c'est inquiétant.

Dans tous les cas, comme vieille idiote, vous êtes rudement lucide.

« Je veux bien écouter ces jérémiades mais attention à ne pas choisir des fers qui se révéleront beaucoup plus lourds à porter. La démocratie, c'est très fragile. »

Voilà ce qui nous pend au bout du nez. Oui, la démocratie c'est fragile, tout comme la vie, tout comme la liberté. Il faudrait s'interroger là-dessus. Je m'interroge sur la suite des événements de cette crise sanitaire. Un jour, il nous faudra quitter l'incertitude, et, se ne sera peut-être pas la certitude.

Les routes sont toujours aussi vides. Je suis allé bûché aujourd'hui, même si c'était dimanche, parce qu'en fin de journée la neige a commencé à tomber et que demain lundi, les prévisions sont vraiment mauvaises. Alors, pour moi, lundi deviendra un dimanche. C'est quand même pas mal, six jours en ligne de travail, et ce soir sous la neige, je me sens merveilleusement bien, la forme physique est là, et l'esprit suit!

Merci pour votre commentaire, il y a de quoi réfléchir.

Bonne fin de nuit Carmilla !

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Être libre, ce n'est pas simplement faire ce que l'on souhaite, c'est aussi être capable de faire ce dont on n'a pas envie, d'aller, en fait, à l'encontre de son désir.

La neige en Europe, ça devient un lointain souvenir.
Quant à Paris, malgré le confinement, les rues demeurent relativement animées.

Je vais même aller voir, ce soir, les illuminations des Champs-Elysées pour les fêtes (ça demeure dans mon périmètre autorisé).

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonsoir Carmilla !

Tommy Caldwell est né sept semaines avant terme, il ne pesait que deux kilos, on n'aurait pas parié beaucoup sur son avenir, pourtant, il allait devenir un des plus grands grimpeurs au monde jusqu'à se frotter au Dawn Wall, 900 mètres de roc presque lisse. Je viens de terminer la lecture de son ouvrage qui s'intitule : Push, la vie au bout des mains.

Il écrit : « Je suis convaincu que le don que la vie m'a accordé est celui de désirer fortement les choses. Et mon désir comme mon attrait pour l'inconnu, trouve sa plus grande expression sur le rocher. »
Tommy Caldwell
Push
La vie au bout des mains
Page -395-

Ce n'est pas juste l'histoire d'un grimpeur, mais une vie d'humain qui frappe souvent des murs. Les cheminements qui mènent aux murs sont riches d'enseignements.

J'ai toujours envié les grimpeurs, ça m'a toujours fasciné cette manière de se débrouiller sur un rocher à la vertical. Je me suis lancé dans cette lecture sans dételer. Livre à lire. J'ai bien aimé.

D'autre part, j'ai aussi lu : Yoga par Emmanuel Carrère, ce qui est une autre lutte dans une certaine forme de courage qui n'est pas si éloigné de Caldwell. Les murs ne sont pas tous en rocher, ils peuvent revêtir bien d'autres formes comme la dépression et le Yoga n'est pas toujours le remède pour y remédier.

« Il y a l'Ombre mais aussi la joie pure, et peut-être qu'il ne peut y avoir de joie pure sans Ombre et que ça vaut la peine, alors, de vivre avec l'Ombre. »
Emmanuel Carrère
Yoga
page -337-

Voilà deux citations pas si éloignées l'une de l'autre.

Bonne fin de nuit Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

J'admire bien sûr les alpinistes mais je n'envisage pas de pratiquer: j'ai un fort instinct de conservation et j'ai tout de suite le vertige. Même le 1er étage de la Tour Eiffel, c'est très éprouvant pour moi. Dans le genre alpinisme, j'ai conseillé très récemment :"Alpinistes de Staline" de Cédric Gras.

Quant à Emmanuel Carrère, je lirai sûrement mais je suis pas d'humeur, aujourd'hui, à lire le récit d'une dépression. Ça risque de m'irriter. Quant au Yoga et à la méditation, je me sens étrangère à ça.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonsoir Carmilla
Mon médium favori demeure la radio. Hier, j'ai eu l'occasion d'écouter une entrevue à la radio de Radio-Canada entre l'animatrice d'une émission littéraire, Marie-Louise Arsenault et cette étonnante personne, Christiane Taubira, femme de tête qui n'a pas la langue dans sa poche, un être d'une grande culture à la détermination farouche et doté d'un gros bon sens. Certains, en France souhaitent qu'elle se présente à la prochaine élection présidentielle. C'est peut-être ce que le français ont besoin après des années d'incertitudes, d'errances et de tâtonnements, comme un genre d'électrochoc qui sonnerait le réveil. Terminé la paresse sur ses lauriers, la renommé, la France mérite ce qu'il y a de mieux, genre la mère qui passe le torchon sur la table en vous disant votre vérité les yeux dans les yeux. Elle peut contrer le populisme qui s'élève, ce qui éviterait des cheminements tortueux à la Trump. Nous venons d'assister à un réveil de l'Amérique, maintenant nous savons ce que les américains ont dans les tripes, voilà le tour venu pour vous les français de nous démontrer de quel bois vous vous chauffez. Son expérience parle pour elle, avec tout ce qu'elle a vécu, je pense qu'elle possède le bagage pour accéder au poste de Présidente. Et, pourquoi pas une femme comme Présidente ? Ça vous changerait des politiciens ringards à la petite semaine. Elle ne fais pas de quartier, évite la langue de bois. C'est un genre de lueur qui promet. Lueur qui passe, et qui serait dommage de laisser passer. Est-ce un rendez-vous avec l'histoire ? Peut-être, du moins je le souhaite. Le constat demeure, qu'on ne se bouscule pas au portillon pour occuper des postes de responsabilités élevées. Ménager la chèvre et le chou n'a rien d'une vision politique des affaires de l'État. Ce n'est même pas du mauvais compromis. S'il y a une personne qui peut réunir la France, c'est elle. Reste à savoir si elle va monter dans le bateau ? Dans ses propos, j'ai senti une hésitation, certes, cette décision exige réflexion. Elle se donne du temps parce qu'elle respecte la fonction. Je verrais bien une campagne présidentielle entre Christiane Taubira et Édouard Philippe, ça rehausserait les débats. Vous auriez de quoi vous mettre sous la dent. Il n'y aurait pas de spectacle, seulement des arguments. C'est le temps de rehausser le niveau en cette époque de populisme éhonté, et, en cette période de crise, nous n'avons jamais eu autant besoin de gouvernement que présentement composé de personnes de grandes qualités. C'est notre responsabilité en tant que citoyen. Et qui sait, pour reprendre les paroles d'un chant que vous connaissez très bien...le jour de gloire est arrivé... Histoire à suivre.

Bonne fin de nuit Carmilla
Richard St-Laurent

NB : Je ne manquerai pas de lire : Gran Elan par Christiane Taubira. Elle possède une belle plume.

NB : Mon intention n'était pas de donner des leçons, ce n'était que quelques réflexions sur la France, un pays que j'apprécie beaucoup.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Je n'ai pas d'opinion concernant Christiane Taubira car je ne m'intéresse pas aux personnalités politiques. Tout m'apparaît construit, convenu, chez eux. La politique, je ne l'appréhende qu'au travers des questions économiques et financières. L'essentiel pour moi, c'est que tout le monde ait un emploi décemment rémunéré. Le reste, ça m'apparaît un peu secondaire.

Je sais que Christiane Taubira cherche à apparaître "lettrée": elle ne dédaigne pas les envolées lyriques et cite René Char. Elle l'est peut-être effectivement mais ce n'est peut-être aussi qu'un vernis ou un affichage. Je ne sais pas, je ne la connais quasiment pas.

Ce qui est sûr, c'est qu'on ne fait pas de bonne littérature simplement avec du beau style et des idées généreuses: la littérature n'énonce pas le Bien et le Beau.

Beaucoup d'hommes politiques se piquent ainsi, en France, de littérature mais, à ce jour, aucun de leurs livres publiés n'a démontré qu'ils avaient un quelconque talent d'écrivain. Rien de disruptif chez eux, c'est toujours boursouflé et grandiloquent, une grande crème enrobant un ramassis d'idées convenues.

Mais je vais quand même aller feuilleter, sur votre indication, "Gran Elan". L'occasion s'y prête : les librairies rouvrent demain en France. Je pourrai peut-être, alors, avoir un jugement mieux étayé.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla !

Au contraire de vous, moi je m'intéresse à ces gens qui se font élire et qu'on nomme des politiciens. Si on les a élu c'est pour qu'ils nous représentent. Alors, il ne faut pas leur laisser la bride sur le dos. Dans son dernier ouvrage, (Il faut s'adapter) Barbara Stiegler élabore sur ce sujet. Avons-nous besoin des politiciens ou bien on abandonne toute critique ? Est-ce qu'un peuple peut être maître de sa destiné ? Quoi qu'on en dise, la politique fait parti de ce tout (social). On vient d'en avoir un exemple au sud de nos frontières.

« D'une façon très général, le marché régule l'allocation du capital et du travail avec une certaine efficacité. Mais il y a une très large marge d'erreur qui, en termes humains, signifie une misère personnelle, (…). Les fluctuations à court terme des prix sont souvent trompeuses, et suffisamment violentes pour pouvoir briser beaucoup de vies avant que les hommes puissent se réadapter. »
Walter Lippmann

Qu'est-ce que voulait le Blondinet et ses supporter, c'était justement moins de gouvernement, moins de règles contraignantes, moins de politiques. Et lorsque cela ne fonctionne plus, qu'on ne peut plus taper sur les politiciens, on se tourne vers les tribunaux. Il n'a pas encore reconnu sa défaite qu'il est déjà devant en campagne judiciaire.

Je désire lire le livre de Taubira pour me faire une idée. Tant qu'aux politiciens-écrivains, c'est comme dans la société en général, il y en a des bons, d'autres moins bons. Pourtant l'histoire de la France est parsemée de grands écrivains qui ont fait de la politique en autre, Michel de Montaigne, Jean Jaurès, Georges Clemenceau, sans oublier Andrée Malraux, et que dire de Charles de Gaule, pour n'en nommer que quelques uns.

Et si on traverse La Manche, que dire de Winston Churchill et ses Mémoires de Guerres. (Prix Nobel de Littérature)

Je vais lire Gran Elen lorsque je le recevrai. Il y aura peut-être matière à débat ?

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Vous avez sans doute raison mais je suis néanmoins persuadée que les "politiques" sont surtout des acteurs et que leur image médiatique n'a pas grand chose à voir avec leur personnalité réelle.

La répartition Capital/Travail, c'est devenu le grand mot de la politique aujourd'hui. C'est largement du Piketty. Mais j'ai beaucoup de mal avec cette idée parce qu'on met en relation des choux et des carottes, deux choses qui ne relèvent pas de la même sphère. Le Capital, c'est une notion de Bilan, tandis que le Travail, c'est une notion de Compte d'Exploitation. A partir de là, j'aimerais qu'on m'explique comment on peut dicter une répartition. Ça m'apparaît une belle ânerie.

Le Grand Blond n'était pas un libéral : il était hostile à la mondialisation et au libre-échange, il prônait l'isolationnisme et le retour sur soi.

Malraux, De Gaulle, je n'ai pas lu et je ne sais pas si j'en serais capable. De même Churchill. Et même Obama ou Clinton, pour lesquels j'ai de la sympathie, je ne crois que leurs livres aient un intérêt littéraire.

Bien à vous,

Carmilla