samedi 5 mars 2022

Les Russes, bourreaux ou victimes ?

 

C'est terrible à dire mais chaque jour de prolongation de la guerre de la Russie contre l'Ukraine, donc chaque souffrance supplémentaire de la population, accroît les motifs d'espoir. Ca semble secouer l'Europe, les puissances occidentales, qui paraissent, enfin, sortir de leur inertie, complaisance, envers la Russie.


Ma grande peur, c'était un écrasement de l'Ukraine en quelques jours : Kyïv immédiatement conquise presque sans combats, Zelensky arrêté, destitué, assassiné. De grandes fêtes, comme celles qui avaient suivi l'annexion de la Crimée, étaient déjà préparées en Russie pour célébrer l'éclatante victoire de son génial tacticien sur l'Occident décadent. Et ensuite, c'était rideau sur l'Ukraine. Après une petite période de fâcherie, les puissances occidentales reprenaient, au bout de quelques mois, leurs relations avec une Russie qui venait de s'essuyer les pieds sur leurs grands principes.

Cette défaite éclair n'aurait pas forcément été un scénario infâmant pour l'Ukraine tant la disproportion des forces militaires, notamment aériennes, est grande. Mais elle aurait donné un poids énorme aux affirmations de Poutine suivant lesquelles l'Ukraine n'existe tout simplement pas: pas de langue ni d'histoire propres dans un Etat artificiel opprimé par des Nazis.

La résistance héroïque des Ukrainiens infirme aujourd'hui complétement ces analyses délirantes du Milosevic russe. De cette résistance, il faut d'ailleurs retenir un symbole marquant : de nombreuses jeunes femmes prennent, elles-mêmes, les armes. J'avoue que je n'aurais pas ce courage. Que pensent d'ailleurs les "féministes" d'Europe de l'Ouest de ces femmes qui font la guerre, se mêlent d'"affaires de mecs" ? 

C'est admirable et terrifiant. Terrifiant parce que Poutine ne vient pas seulement de conforter l'Ukraine comme nation mais il vient surtout d'ériger une barrière de haine entre Ukrainiens et  Russes, une barrière qui n'existait pas jusqu'alors mais qui est maintenant en place pour très longtemps. Et comment les Russes pourront-ils eux-mêmes supporter cette honte et cette culpabilité collectives ? 

Il reste que l'armée russe sera probablement vainqueur militaire, du moins à court terme.  A cette fin, elle n'hésitera pas à recourir à une violence accrue. Mais ensuite ? Combien de temps cela pourra-t-il durer ? 

L'espoir, c'est bien sûr que Poutine soit renversé. Mais cela est-il possible ? Une Révolution de palais, en interne, est peu probable tant le pouvoir est aujourd'hui concentré autour d'un petit nombre de personnes. Ce sont principalement, outre Poutine lui-même: Sergueï Choïgou (Défense), Sergueï Lavrov (affaires étrangères), Sergueï Narychkine (renseignements extérieurs, Dmitri Medvedev (vice-président). Tous aussi "azimutés" et extrémistes que lui. Celui qui me donne des envies de meurtre, c'est Lavrov.

L'espoir, c'est la population russe elle-même. Mais il faut bien reconnaître qu'elle ne bouge pas beaucoup aujourd'hui et que les sondages d'opinion, même s'ils sont d'une qualité douteuse, demeurent largement favorables à Poutine. L'excuse, c'est la férocité de la répression. Mais est-ce un argument soutenable, les Russes sont-ils effectivement "victimes" d'un pouvoir oppressif ? 

Manifester en petit nombre, c'est effectivement très dangereux. Mais ça peut basculer : les manifestations de décembre 2011 (contre le trucage des élections) ont montré que la police russe n'était pas toute puissante et qu'elle pouvait même être débordée et ne plus parvenir à contrôler des foules de plusieurs dizaines de milliers de personnes.  

Je ne peux m'empêcher de penser, comme la quasi-totalité des Ukrainiens, que la population russe est tout de même complice par abstention. Et complice, ça veut dire être complice des bourreaux.

Et c'est vrai que le poutinisme a tout de même réussi, en un peu plus de 20 ans, à façonner suffisamment les mentalités pour pouvoir compter sur une relative adhésion de la population.

On peut ainsi recenser quelques grandes idées qui "marchent" en Russie. Elles puisent dans les tréfonds inavouables de l'âme humaine. Je sais bien que ça peut sembler grossier de comparer Poutine et Hitler mais les méthodes sont tout de même étrangement proches.

- De même que Hitler ressassait que les Allemands avaient été humiliés par le Traité de Versailles, Poutine a réussi à persuader les Russes qu'ils avaient été humiliés, méprisés, par les Occidentaux à la suite de la Chute du mur. Tout le monde a oublié que ça avait aussi été une extraordinaire libération. Mais être puissants, faire peur, même au prix de la misère économique, c'est un fantasme très fort chez les Russes. L'esprit victimaire fonctionne alors à plein : on ne nous aime pas, on n'a pas de considération pour nous. Le plus inquiétant, c'est que de l'esprit victimaire à l'esprit de vengeance, il n'y a qu'un pas vite franchi.

- De même que Hitler faisait rêver les Allemands avec son élargissement de l'espace vital, sa poussée vers l'Est, le projet politico-géographique de Poutine rencontre une assez large approbation. Reconstituer la grande Russie (Russie, Biélorussie, Ukraine), presque tout le monde est pour. On n'en perçoit bien sûr pas les implications (la négation du Droit des autres à l'existence) mais ça explique qu'on soit sensible à l'argument des "terres russes" (presque personne ne s'est opposé à l'annexion de la Crimée) et à la défense des "minorités russes" (argument développé par Hitler pour justifier son intervention dans les Sudètes).

- De même que Hitler développait une mythologie du "peuple aryen", le Poutinisme repose sur un "messianisme", sur cette idée (qu'a développée Michel Eltchaninoff) que la Russie est plus que la Russie. Qu'elle est porteuse d'un projet spirituel, qu'elle a une vocation rédemptrice : mettre fin à la décadence des civilisations emportées par un matérialisme sordide.  C'est une version modernisée de cette fameuse "âme slave-âme russe" que je déteste tant parce qu'elle repose sur l'idée d'une identité presque génétique et finalement d'une supériorité des Russes sur les autres peuples. Il faudrait d'ailleurs évoquer le racisme russe pas seulement concentré sur les Caucasiens et Asiatiques mais aussi à l'encontre des Ukrainiens et Biélorusses. Ils sont bien des frères mais tout de même d'un rang inférieur, un peu bêtes et arriérés (on dénomme les Ukrainiens : des "meules de foin") . On les considère avec une incroyable condescendance.


Je ne vais donc pas conclure en disant que je n'en veux qu'à Poutine et que je n'ai rien contre le peuple russe. Je dirai : Russes, votre passivité apparaît insoutenable. Vous n'êtes pas entièrement innocents parce qu'on demeure, malgré tout, responsables des gouvernants que l'on a désignés. Bazardez vos vieilles mythologies, votre panslavisme imbécile. Réveillez-vous, révoltez-vous, cessez de vous comporter en moutons ! Ayez un peu d'honneur afin d'échapper à la honte et à l'infamie qui vous écraseront pendant des décennies.

 Images d'Otto DIX (1891-1969) et Ludwig MEIDNER (1884-1966), peintres expressionnistes allemands.

Je recommande deux livres cette semaine :

- "Les carnets du sous-sol" de Dostoïevsky. Si vous n'avez jamais rien lu de Dostoïevsky, voici une bonne initiation. Retenez surtout la traduction de Markowicz, c'est beaucoup plus juste. En voici le résumé :"Réfugié dans son sous-sol, le personnage que met en scène Dostoïevsky ne cesse de conspuer l'humaine condition pour prôner son droit à la liberté. Et il n'a de répit qu'il n'ait, dans son discours, humilié, diminué, vilipendé les amis de passage ou la maîtresse d'un soir." Terrifiant et évocateur, n'est-ce pas ?

- Mikhaïl BOULGAKOV : "La garde blanche". Le siège de Kyïv durant la guerre civile russe de 1918 avec les avancées des troupes nationalistes ou bolcheviques. La fin du roman : "Tout passera. Les souffrances, les tourments, le sang, la faim et la peste. Le glaive disparaîtra et seules les étoiles demeureront quand il n'y aura plus de trace sur la terre de nos corps et de nos efforts... Alors pourquoi ne voulons-nous pas tourner nos regards vers elles ? Pourquoi ?" Une question à laquelle on ne sait effectivement pas répondre aujourd'hui.

22 commentaires:

Richard a dit…

Bonjour Carmilla!

Cette héroïque résistance nourrit l’espoir. C’est peu, mais c’est au moins cela. Après dix jours de combats les Ukrainiens résistent toujours. Leur Président Volodymyr Zelensky et ses maigres forces sont toujours présents. Ils luttent. Leurs résistances est surprenantes. Rappelez-vous Carmilla, nos réflexions lors qu’il a été élu Président de l’Ukraine. J’avais mes doutes sur cet homme. Il est en train de nous donner une leçon de courage. J’ai de quoi ravaler mes propos. J’ai bien aimé sa réplique aux américains : « Je n’ai pas besoin d’un taxi, j’ai besoin de munitions.» J’espère qu’il va survivre à cette épreuve, ainsi qui tous ceux qui défendent l’Ukraine présentement. Un jour il faudra reconstruire. Comment une telle détermination pourrait être réduite à néant? Ils sont du côté de la liberté, de ceux qui refusent le joug, la soumission, et la défaite. Qui plus est, Zelensky c’est excellent communicateur. C’est court, vif et précis. Il ne se gêne pas, il pointe les dirigeants occidentaux, les interpelle sans ménagement, et les met en garde sur la suite des opérations. Même après la fin des combats, il y aura une suite dans cette histoire. Pour que la Finlande, la Suède, et la Suisse, délaisse leur neutralité, c’est parce qu’on se rend compte du basculement. La Finlande sait de quoi les Russes sont capables parce qu’elle a eu quelques différents avec son voisin. Sans doute que La Suède et la Suisse, se rendent comptes que si l’Europe tombe, ils ne pourront pas défendre leur neutralité tout seul.

D’autre part, hier, nous avons rasé la catastrophe avec la centrale nucléaire de Zaporijia. C’est un genre de jeu dangereux qu’il ne faudrait pas répéter. Je me demande si les Russes sont conscients des dangers s’ils font sauter une centrale nucléaire. On dit que si Zaporijia avait sauté hier, cela aurait six fois Tchernobyl! Ce qui ne regarde plus seulement les Russes et les Ukrainiens, mais nous tous comme humains. Il n’en faut pas beaucoup des fois. Un jeune pilote au commande d’un avion qui décide de larguer ses bombes un peu partout. Un chef de char immature qui décide de faire quelques cartons.

Je regardais cette semaine un reportage de Marie-Ève Bédard reporter de Radio-Canada, sur les réfugiés devant la gare de Lviv. Il se pourrait que dans quelques jours ce magnifique édifice soit réduit en ruine. Ces attroupements de civils c’est dangereux. Vous l’avez mentionné dans votre texte Carmilla. L’appel du sang, appelle le sang surtout pour ceux qui auront perdu des membres de leur famille, perdu leur maison, et subit tant de destructions.

Si on résiste pendant une semaine pourquoi pas une autre semaine?

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Bonsoir Carmilla!

Contre toute attente, j’ai pu mettre la main sur : L’Empire du vent par Stanley Stewart, qui soulève la question de l’occupation Russe de la Mongolie pendant 70 ans.

« Les tragédies de la Russie ne sont jamais à la même échelle que celles des autres nations, comme si le désastre avait enfin trouvé, dans ses vastes étendues, assez de place pour s’épanouir. »
Stanley Stewart
L’Empire du vent
Page 72

Que se soit pour provoquer le désastre, ou le subir, les Russes sont vraiment des champions. Nous en avons présentement un exemple cinglant sous les yeux.

« Peut-être était-ce une espèce de liberté, ou alors une espèce de remarquable confiance en soi. Il est difficile de ne pas admirer l’indifférence insouciante d’un peuple qui n’éprouve pas le besoin de marquer son territoire, ni son passage. Mais il en résultait une certaine stérilité. Ici, les notions trépidantes de l’ambition, si cruciales aux énergies créatrices des cités, étaient curieusement absentes. Les steppes ne créaient rien. Le fascinant romantisme d’une Arcadie fuyante, située parmi des pasteurs itinérants, d’une conscience libre de toute attache, que n’emprisonnaient ni les murs, ni les exigences inéluctables du sol à cultiver, était aussi peu substantiel que le vent. »
L’Empire du vent
Page 385

J’ai particulièrement aimé ce paragraphe. Certes, les Ukrainiens ne sont pas des Mongoles. Si l’Ukraine tombe, il n’y aura jamais d’indifférence, juste un esprit de haine.

Impressionnant Stewart. C’est bien écrit avec tout le flegme d’un esprit britannique, mâtiné d’un esprit irlandais rebelle, avec en prime des bouts d’humour tordant. Excellent ouvrage pour se changer les idées en cette période troublante.

L’autre lecture, c’est une merveilleuse découverte. Sur la route de Babadag par Andrzej Stasiuk. Je me reconnais dans cette lecture parce que Stasiuk voyage comme moi. Lorsqu’il ne bifurque pas, il s’arrête partout, parle aux gens qu’ils rencontrent, fait le tour des poteaux, cherchent des endroits que même les habitants du coin ignorent, aucune surprise, bonne ou mauvaise, ne semble l’affecter. Il décrit la Roumanie des années 80. Là aussi on y retrouve cette espèce d’indifférence de la part surtout des habitants des campagnes. Il y a de merveilleuses descriptions de troupeaux de vaches sous la pluie qui rentrent à l’étable pour la traite et qui dégagent des odeurs particulières. Ce qui me rappelle de joyeux souvenirs. Entre Emile Cioran et Nicolae Ceausescu, Stasiuk réserve un large espace aux gens ordinaires. Dans son écriture, je me suis reconnu. Je pense que je vais lire tout ce qui a été traduit en français de cet auteur...

Bonne nuit Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Les Ukrainiens peuvent-ils encore tenir longtemps contre la Russie ?

Ca semble malgré tout peu probable tant ils souffrent de leur infériorité aérienne. Dans les combats au sol, ils font plus que résister et inquiètent de plus en plus les Russes. Malheureusement, ils sont écrasés par les bombes déversées, d'une puissance terrorisante. Que peut-on faire quand on est menacé d'être immédiatement soufflé par une explosion ? Ca freine tout de suite votre audace. Il faut ajouter la faim, l'absence de chauffage, d'eau, d'électricité. L'épuisement se fait de plus en plus sentir. Et puis je me demande ce qu'il va rester des villes après toutes ces destructions ? C'est sûr que cette guerre vient de creuser une haine terrible entre deux peuples.

Le livre de Stewart est effectivement remarquable. Il a remarquablement compris la Mongolie. Ce qui m'étonne, c'est qu'il n'a ensuite quasiment plus rien écrit.

Stasiuk, j'imagine en effet qu'il vous ressemble un peu. Même indifférence à la "frime" sociale, même regard critique sur les "gadgets" de la modernité, intérêt pour tout ce que l'on ne remarque habituellement pas (les choses, les gens, la nature), goût pour les lieux aux quels les guides touristiques ne prêtent pas attention. Pourtant, les endroits moches en apprennent autant, voire plus, que les grands lieux des Tours Operators.

Stasiuk a rencontré un grand succès en Europe, un peu moins aujourd'hui. J'ai bien aimé son dernier bouquin très drôle : "Mon bourricot". Un périple automobile, dans une guimbarde, vers la Mongolie. A titre personnel, je l'aime aussi parce qu'il évoque des lieux que
je connais bien: toutes ces zones obscures des Carpates entre la Pologne, l'Ukraine, la Slovaquie, la Roumanie. Plus perdu en Europe, il n'y a pas.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla!

Affaires de mecs?

Jamais. Lorsque vous êtes attaqués c’est l’affaire de tout le monde, autant des femmes que des hommes. Vous pensez que vous n’avez pas ce courage. Le courage vient facilement lorsque tu es plongé dans l’action des événements, que ton pays est attaqué, que tes enfants sont en dangers. Surtout dans les combats de rues. Tu as intérêt à apprendre rapidement. La preuve, c’est que dans beaucoup de pays, y compris au Canada, les femmes sont admises dans les forces armées, et même dans les unités combattantes. Une femme peut tirer aussi bien qu’un homme, certaines mêmes deviennent de véritables tireuses d’élites. Elles deviennent des snipers. Dans le temps, il y en avaient qui opéraient à Sarajevo, et elles n’avaient aucun complexe d’infériorité. Dans le règne animal, il faut voir comment les femelles défendent leurs petits. Une chatte peut faire reculer n’importe quel chien qui s’approche de sa portée. Je regarde ces femmes ukrainiennes qui témoignent devant les caméras. Oui, certaines pleurent, mais ce n’est pas des larmes de peur ou de pitié, c’est des larmes de rages. D’autres comme cette jolie blonde qui est députée au Parlement Ukrainiens, mère de trois enfants, qui communique sur le web dans un excellent français, avec à porté de main son AK 47. Elle n’a pas l’air de quelqu’un qui veut reculer, ni capituler. Je plains le premier conscrit Russe qui se pointera devant sa porte. Tout cela est bien étrange. Prenons Zelenski qui n’avait jamais fait de politique, qui n’était même pas du milieu, qui n’a sans doute jamais imaginé qu’il vivrait ce qu’il est en train de vivre présentement, il se révèle un grand leader. Des fois, nous jugeons mal nos semblables. Arrive des événements, où des personnes qu’on jugeait indigne de confiance se révéler braves. Il appert que, vous ne vous cachez pas avec votre envie de cribler de balles Lavrov. Qui sait, vous avez peut-être des talents cachés que vous ignorez vous-même! Vous pourriez chausser les chaussures de Mata Hari. Je plaisante, mais à peine. Dans la vie tout est possible même l’impensable. C’est sans doute une bonne chose d’ignorer ce que nous réserve le destin. J’avoue que c’est émouvants de voir toutes ses femmes ukrainiennes qui se préparent au pire. Alors nous pouvons oublier les féministes de l’ouest qui n’ont pas grand-chose à dire, parce que dans le combat nous sommes tous égaux devant la mort. C’est une époque qui est en train à nous ramener à l’essentiel, la vie, la souffrance, et la mort, qui pulvérisent bien des débats luxueux et futiles.

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Merci Carmilla!

C’était prévisible, maintenant ce conflit va entrer dans ce qu’on nomme une sale guerre, ce que toutes les armées du monde redoutent : les combats urbains. Tu peux bien maîtriser l’air, les champs ouverts, les armées en général sont fait pour cela; mais les sales guerres urbaines c’est autre chose. Ceux qui attaquent doive avoir un ratio de 10 contre un. Ça va prendre 10 russes pour eutraliser un Ukrainien. Chaque tas de gravier, de pierre, ou de débris peut se transformer en piège. C’est pour ces raisons que je vous ai demandé si les habitants de Kiev étaient prêt à transformer leur ville en Stalingrad. Les événements tentent à penser qu’on se dirige vers ce genre de saloperies. Vaincre c’est une chose, occuper un territoire s’en est une autre.

Tant qu’à l’aviation, que désire tant Zelensky, il est trop tard. C’est facile d’acheter des appareils. Oui des appareils, mais pour être piloté par qui? Le problème ce n’est pas les avions, se sont les pilotes. Ça prend du temps pour les former. Ce qui a été le problème des Britanniques dans La Bataille d’Angleterre. Après, il faut acquérir le sens du combat aérien, donc amasser de l’expérience opérationnelle, ce qui dans les circonstances n’est jamais donné.

Comme l’OTAN ne veut pas s’embarquer dans l’histoire d’une zone aérienne d’exclusion, les Ukrainiens devront revoir leur stratégie. Pas de bataille rangée à découvert, surtout lorsqu’on regarde les vastes plaines où il est difficile de se cacher. Alors, on en revient au point de départ, les villes en ruines. C’est dommage, Kiev avait l’air d’une belle ville très agréable avant ces événements regrettables.

Salutations distinguées Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Ce qui se profile, en effet, ce sont des combats urbains.

Mais on connaît la tactique des Russes, déjà maintes fois mise en oeuvre en Tchétchénie à Grozny, à Mossoul, en Syrie. On commence par bombarder intensivement, pendant des jours et des jours, une ville. Ils font semblant d'organiser des couloirs humanitaires dont ils rejettent l'échec sur les "terroristes" adverses. Ils ne sont pas très téméraires et c'est seulement quand la population est épouvantée, épuisée, qu'ils commencent à intervenir. Dans ces conditions affreuses, il est vraiment difficile d'espérer un peu.

C'est vrai qu'une guerre révèle beaucoup de personnalités. J'avoue que j'étais désolée quand Zelensky a été élu Président. Je le considérais comme un "populiste". Il est cependant quelqu'un d'éduqué et cultivé. Son épouse est notamment une femme très bien. Mais aujourd'hui, il révèle une véritable grandeur. Son ton, ses propos, sont justes et il "entraîne" véritablement la population. C'est ce qui permet à l'Ukraine de ne pas s'écrouler d'autant que, contre toute attente, l'administration et l'Etat continuent de fonctionner.

Quant à l'aviation, je ne suis pas spécialiste. Je pense qu'il y a quand même des pilotes en Ukraine mais ils ne connaissent évidemment que les anciens avions russes (MIG 29 et Soukhoï). C'est sans doute dépassé mais c'est mieux que rien. C'est ce que l'on cherche à exporter à l'Ukraine, via la Pologne.

En toute objectivité, Kiev est, en effet, une ville très agréable. Elle ne donne absolument pas l'image d'un pays pauvre. Noyée dans la verdure d'abord, en bordure du fleuve Dniepr extrêmement large (on a installé de véritables plages pour la baignade sur ses berges), avec un patrimoine architectural remarquable. J'ajoute qu'on peut bien s'y amuser car on peut y trouver une multitude de lieux de loisir, cafés, restaurants, dancings. Malheureusement, tout cela est du passé.

Compte tenu de l'extrême motivation de ses habitants pour assurer la défense de la ville, on peut craindre, en effet, je ne dirai pas un Stalingrad mais un nouveau "martyre" de Kiev.

Bien à vous,

Carmilla

Nuages a dit…

Je suis allé, dimanche après-midi, à une manifestation de soutien à l'Ukraine, à Bruxelles. Il y avait entre 5000 et 8000 personnes. C'était un moment très fort, très émouvant. J'y ai fait quelques photos, que je montrerai prochainement sur mon blog, même si ce n'est pas facile de faire des photos dans une manifestation en mouvement.

Richard a dit…

La raison et la motivation

Les Ukrainiens savent pourquoi il luttent. Leurs raisons stimulent leurs motivations. Ils sentent, ils savent, ils veulent. Aucune peine, aucune souffrance, aucun sacrifice ne pourra restreindre leur volonté, et encore moins justifier une abdication honteuse. Chaque jour qui passe, même après les découragements passagers, les blessés, les morts, et les destructions, se transforment en une petite victoire. Un jour de plus, un jour à la fois, ils résistent, pour augmenter petit à petit la confiance en soi, cela permet de faire taire la tyrannie de l’agonie. Bien sûr la raison demeure un concept purement intellectuel dans des temps normaux, une affaire d’intellectuel bien gras en sécurité entre ses ouvrages. Dans l’épreuve, et surtout celle que vive les Ukrainiens présentement, elle s’installe dans la réalité et n’exige aucune réflexion, aucun raisonnement. Elle pousse à l’action. Et, il faudra, pousser fort pour infléchir le cours des événements défavorables. Oublions pendant un moment, la terre maternelle, la patrie, parce que cela se déroule au cœur de l’humain, en un sentiment puissant de notre réalité du vivant, puisque avant d’être des Ukrainiens, des Canadiens, des Français, ou des Québécois, peut importe, nous restons des hommes avec des aspirations personnelles de liberté, de libre arbitre, de sécurité, entre la joie et le malheur, entre la peine et la réussite. Chaque humain anime en lui son propre pays intérieur, ses propres valeurs, pas si différentes de celles de ses voisins. Lorsqu’un conflit éclate, si vous vous retrouvez du côté de cette raison, alors inutile de vous justifier, même de chercher le droit, parce que se sera cette raison qui vous animera. Vos actions, peu importe victoire ou défaite, vous éviteront peut-être la servitude du joug dans la honte; et si vous en réchappez, de vivre debout, franc et fier en tout quiétude. Nous souhaitons tous vivre en paix, pour masquer cette vérité inconfortable, que la paix pour germer requière malheureusement la guerre. Constat désagréable, mais souvent incontournable, alors que le crépuscule tombe sur nous pour nous surprendre à découvert dans notre plus grande vulnérabilité. Nous ne pouvons pas baisser les bras, encore moins nous soumettre parce que cette situation deviendra insoutenable. L’humain dans sa grande naïveté ose penser qu’il faut impérativement éviter l’épreuve. J’ose affirmer qu’il faut la traverser. Autrement, comment se dire dire humain? Nous désirons rire tout le temps en pensant que plus jamais nous ne pleurerons. Les larmes finissent toujours par nous rejoindre sur les routes du regret. Faisons ce que nous avons à faire dans nos quotidiens qui nous semblent souvent si routiniers qu’ils n’en deviennent banals, c’est peut-être la meilleure manière de se tenir debout avec en prime tous nos morceaux, et surtout, avec toutes les personnes bien vivantes de nos entourages. Et, qui sait, à l’image des Ukrainiens, si le destin nous appellera pour nous imposer un fardeau qu’il faudra regarder droit dans les yeux avant de le subir? Nous pouvons alors nous interroger immédiatement sur la motivation de nos décisions et de nos actions, si notre raison justifiera notre motivation.

Je vous laisse sur cela Carmilla…

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages,

Les manifestations en Occident contre la guerre n'impressionnent sans doute pas beaucoup Poutine mais elles constituent un réconfort pour les Ukrainiens. Ce qui avait en effet été difficile, c'est qu'en 2014, l'annexion de la Crimée et d'une partie du Donbass avait laissé l'opinion publique à peu près indifférente voire favorable à la Russie. Et c'est cette indifférence qui a enhardi Poutine.

J'attends bien sûr vos photos de cette manif mais j'ai bien conscience, en effet, de la difficulté des prises de vues.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Certes les Ukrainiens sont extrêmement motivés et savent pourquoi ils se battent.

Mais je crains que, dans les guerres modernes, le courage et la volonté ne suffisent pas face à la puissance des armes. On n'est plus dans l'affrontement individuel. Qu'est-ce qu'on peut faire quand votre rue est bombardée ou traversée par des missiles ?

Et puis il faut peut-être savoir opérer des replis tactiques. Certains sacrifices peuvent être inutiles.

Je demeure hélas très pessimiste même si j'aimerais que vous ayez raison.

Dernier point: l'armé ukrainienne est l'une des plus féminisées au monde : 22 %, soit infiniment plus qu'en Russie ou en France (moins de 5%).

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Un combat est un combat, le sort des armes peut être capricieux et plein de surprises. Les Américains n’aiment pas beaucoup lorsque l’on évoque la guerre du Vietnam. Pourtant ce n’est pas celui qui était le mieux armé qui a gagné. Les jeunes américains conscrits ne comprenaient pas ce qu’ils faisaient au Vietnam, sans doute pas plus que les jeunes conscrits russes qui sont présentement en Ukraine. Lorsqu’une guerre éclate on ne sait jamais comment les choses vont tourner. Dans sa biographie Ariel Sharon consacre plusieurs pages à ce phénomène du plus fort. Une situation peut t’échapper et en moins de quelques minutes être complètement reverser. C’est lui qui les a sorti de la guerre de 1973 du Yom Kippour. Au début tout le monde a été surpris et les Israéliens encore plus. Les arabes voulaient en démordre, mais comme ils avaient subi beaucoup de défaites, ils ont profité d’une grande fête juive pour attaquer par surprise. Sharon a renversé la situation précaire dans laquelle s’était retrouvé le pays. Les exemples ne manquent pas. Personne ne voulait parier sur les Anglais après la défaite de la France et pourtant, ils ont gagné la Bataille d’Angleterre. Napoléon a livré la majorité de ses batailles en infériorité numérique souvent dans des conditions précaires. Ne jamais sous-estimer un ennemi, ne jamais s’engager dans une guerre en pensant que cela va être facile. La situation peut être désespérante, mais pas question d’être désespéré.

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Lorsque je regarde ces colonnes de réfugiés, je constate que c’est l’hiver en Ukraine même s’il n’y a pas de neige. Les gens sont habillés chaudement. Les enfants portent des survêtements. En y regardant de plus prêt, ces Ukrainiens ressemblent aux Québécois. Ici, c’est encore l’hiver, nous avons connu +12 degrés dimanche dernier. Non, l’hiver n’est pas encore terminé. Il n’y a peut-être pas beaucoup de neige au sol, mais la glace sur la rivière est épaisse. Deux jours avant ce dimanche doux, il avait fait -27 degrés un matin. Ce qui est fascinant avec ces femmes et ces enfants, c’est que les mères ressemblent à nos mères, que les enfants ressemblent à nos enfants, tous emmitouflés ainsi. C’est vraiment touchant. Et aussi les hommes qui nous ressemblent lorsqu’on les regarde, les observe, dans leur plus grande simplicité. Eux savent pour qui ils se battent.

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Bonsoir Carmilla!

« Il est bon de venir dans un pays dont on ne sait presque rien.  Les pensées, dès lors , se taisent, deviennent inutiles. Il faut tout recommencer depuis le début. Dans un pays dont on ne sait presque rien, la mémoire perd son sens. On peut comparer les couleurs, les odeurs ou encore les souvenirs indéterminés. La vie devient quelque peu enfantine et animale. Objet et événements évoquent bien quelque chose, mais somme toute ils ne se transforment en rien d’autre et restent ce qu’ils sont en réalité. Ils commencent à l’endroit même où nous les remarquons et s’achèvent immédiatement, recouverts par d’autres. À vrai dire, ils sont dépourvus de signification. Ils sont constitués de matière originelle qui, certes, touche nos sens mais qui est trop légère, trop délicate pour pouvoir servir de leçon. »
Andrzej Stasiuk
Sur la route de Babadag
Page 120

Comment ne pas me reconnaître dans ces propos de Stasiuk? J’ai déjà vécu cela en Grèce. Ce fut un moment tout à fait particulier et fabuleux dans mon existence. Fendre des foules dont je ne comprenais pas la langue, et lorsqu’on ne comprend pas, on imagine. Je me débrouillais comme Stasiuk avec trois mots glanés, du front tout le tour de la tête, moi l’étranger, je m’imposais, avec ma veste militaire déchirée, mes bottines usées, mon jean taché avec un perpétuel fond de sommeil dans le fond de mes yeux. Je gobais tout, les nourritures et les musiques qui se perdaient entre les tables des marchands dans des marchés à ciel ouvert. Je sentais que je pouvais vivre ainsi, le restant de mon existence à me promener le nez en l’air au-dessus des odeurs que je découvrais. Que pour me rendre quelque part, je pouvais jeûner pendant des jours, souffrir de la soif, peiner pour rien. Je passais du beau à la laideur sans déception parce que ça faisait parti du voyage. Et cette laideur faisait la leçon à la beauté. Je découvrais qu’elle pouvait devenir séduisante.

Chaque phrase de Stasiuk dans : Sur la route de Babadag, me touche. Je n’ai pas l’impression de lire un écrivain, mais de boire les paroles d’un voyageur. Le genre de type que je rencontrais dans le fond d’un troquet, solitaire devant sa bière, aussi mal fagoté que je pouvais l’être. Dans divers langages l’échange pouvait commencer. C’est étrange de rencontrer un type, une seule et unique fois dans sa vie, d’échanger, et ne plus jamais le revoir.

Bonne nuit Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

La démarche de Stasiuk est en effet novatrice : une attention portée aux petites choses, à ce qui est moche, déglingué, périmé, aux pays non touristiques et surtout aux gens humbles qui vivent de débrouillardise.

Il est effectivement un grand écrivain. Je pense qu'on peut trouver assez facilement tous ses livres parce qu'ils se vendent assez bien. C'est souvent également assez burlesque et déjanté. Je vous laisse faire votre choix. J'ai bien aimé "L'Est", "Taksim, "Le corbeau blanc".

Oui, il fait encore assez froid en Ukraine (- 2°, - 10° à Kiev en ce moment). Pour les populations privées de chauffage, c'est évidemment très dur. Le climat est cependant très changeant à cette époque et généralement tout change vers le 21 mars.

Nul ne peut prédire, bien sûr, l'évolution du conflit. Ce qui est sûr, aujourd'hui, c'est que la lourde armée russe, tellement convaincue d'être la plus forte du monde, s'enlise. L'assurance d'une guerre-éclair, c'est fini. Malheureusement, Poutine est un jusqu'au bout'iste. Tant qu'il n'aura pas complétement écrasé l'Ukraine, qu'il ne pourra pas se proclamer incontestable grand vainqueur, il ne se retirera pas. Il a la même obstination qu'un Hitler, il est incapable de rationalité. Ca peut donc durer très longtemps avec d'effroyables conséquences pour le monde entier.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla!

Nous sommes le 9 mars aujourd’hui, dans une semaine la « raspoutitsa » devrait débuter. Cela devrait ralentir les Russes dans leur opérations. Cette période de dégèle nous la connaissons bien au Québec, pas question d’aller se promener en tracteur dans les champs, encore plus pour de la machinerie lourde, en autre les blindés. Ça va peut-être donner une chance à l’armée ukrainienne.

J’ignorais que la Pologne avait des Mig 29. Ça pourrait être intéressant. Ce temps de raspoutitsa pourrait être le temps de l’aviation. Imaginez des centaines de blindés bloqués par la boue, une aubaine pour des aviateurs en maraude.

Une autre semaine de passé. S’en fait deux. Il y a tout lieu d’espérer!

Bonne fin de journée

Richard st-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Je ne pense malheureusement pas que le dégel puisse changer grand chose. D'abord parce qu'il fait tout de même moins froid en Ukraine qu'au Canada ou en Sibérie et que la terre est moins prise. Donc, il y aura moins de boue.

Cela dit, il est vrai que le réseau routier ukrainien, à l'exception de quelques tronçons, est dans un état lamentable. On parle de "nids de poule" en français mais je vous assure qu'on peut faire tenir tout un poulailler dans les trous ukrainiens. Mieux vaut éviter de rouler la nuit.

Oui, la résistance ukrainienne est impressionnante mais je suis bien obligée de constater que, malgré tout, les Russes gagnent, petit à petit, du terrain. Et ils se montrent impitoyables, leur violence, notamment envers les populations civiles, ne cesse de s'accroître. Il risque de venir un moment où les Ukrainiens n'en pourront plus de cette terreur exercée.

Les MIG 29 polonais datent de la période soviétique. Ils ont donc plus de 30 ans et ne sont sûrement plus à la pointe de la modernité. Mais ils peuvent être immédiatement opérationnels. Mais les Occidentaux ont maintenant peur de livrer ces avions pourtant indispensables.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla!

Pas besoin d’être un devin pour s’apercevoir que l’OTAN marche sur des œufs. Ils ne veulent pas provoquer les russes, mais il fournissent des armes, se servir du prétexte politiques je trouve cela malhabile pour refuser des avions à l’Ukraine. Les Polonais se voulaient généreux dans leur offre, mais envoyer ces avions sur une base américaine en Allemagne pour des mises à niveau, ce n’était peut-être pas la meilleure idée. C’est peut-être des appareils qui n’ont pas volé depuis des années. Peut-être aussi des problèmes de pièces, de moteurs, d’armements, d’électroniques?

J’ai hâte de voir comment les événements vont se dérouler dans ce dégel. Est-ce que la terre est gelé sur 30cm, ou un mètre d’épaisseur? Ils semblent que la compositions du sol ukrainien est particulier. Je n’en sais rien, je n’y suis jamais allé. Je n’ai jamais tenu de cette terre dans mes mains. Mais il y plusieurs armées qui ont été immobilisées dans ces régions. Les Allemands à l’automne 1941 et les Russes au printemps 1943. On peut comprendre que les russes aimeraient bien en terminer avec les Ukrainiens avant la (raspoutitsa). Depuis une semaine, c’est gris, froid, incertain, mais tout cela peut changer très rapidement. Nous sentons que les russes font des efforts, mais que les résultats ne sont pas à la hauteur. Ça ressemble vu d’ici, plus à une démolition qu’à une conquête. La rage est en train d’aveugler les russes. Ce que j’ai vu hier sur vidéo à la maternité de Marioupol est tout à fait inadmissible. Des femmes sur le point d’accoucher, évacuées dans des draps ou des couvertures en guise de civière, c’est la grande misère. Des militaires qui tirent sur des civils, c’est du massacre. Honte sur nous tous, il n’y a pas lieu d’être fier de cette humanité.

Est-ce que vous avez encore des communications avec vos amis? Est-ce qu’ils parviennent à survivre? Est-ce que Internet et le téléphone fonctionne encore?

Je pense souvent à vous Carmilla, vous devez être dans tous vos états, comme je pense à toutes ces personnes qui fuient sous les bombes et à toutes celles qui pleurent devant leur maison en flamme, tous ces blessés et ces morts. J’espère que toute l’aide qu’on a envoyé en Ukraine arrive à bon port.

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

L'hiver a été plutôt doux, cette année, en Ukraine (notamment en février). Et puis, il y a des différences significatives de température entre le Nord et le Sud du pays. Il est vrai qu'en ce moment, il fait - 10° à Kiev. Ce qui fait que les soldats russes crèvent de froid, la nuit dans leur tank.

Mais je ne pense pas que la terre soit profondément gelée. Cette terre ukrainienne (la terre noire) est assez souple, peu argileuse. Il y aura donc, bien sûr, de la boue mais peut-être pas des fleuves.

Ce qui est sûr, c'est que Poutine, emporté par sa mégalomanie et son mépris des Ukrainiens, n'imaginait pas une pareille résistance. Il était convaincu de régler le problème en quelques jours. On sait d'ores et déjà que même s'il réussit à vaincre militairement, ce ne sera qu'une victoire de court terme car la Russie sera complétement isolée, mise au banc des nations. J'ose espérer que les pays occidentaux feront tout, alors, pour déstabiliser et punir cet Etat criminel.

Sur l'affaire de la fourniture des armes à l'Ukraine, je pense que l'Otan est beaucoup trop timoré. En ne fournissant pas, ces dernières années, d'armes à l'Ukraine, on a encouragé l'agression de Poutine.

Les liaisons Internet et téléphoniques avec l'Ukraine continuent de fonctionner sauf dans les villes encerclées par les Russes. Etonnamment, le pays continue de fonctionner. Mes relations avec le pays sont plutôt à l'Ouest qui demeure relativement préservé.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Marc pour cette vidéo édifiante.

Elle peut permettre à mes lecteurs non russophones d'appréhender l'odieux cynisme de la politique poutinienne.

Quant à son porte-parole, auteur de cette vidéo (le sinistre Xavier Moreau), sa suffisance est à proportion de son insuffisance. Il se prétend expert et consultant en relations internationales, exerçant à Moscou. J'espère qu'il ne facture pas trop cher ses prestations parce qu'il se contente de reproduire, tels quels, les délires de Poutine et de l'Etat-Major russe.

Je ne crois même pas que ce soit la peine d'en discuter parce qu'on n'est pas au même niveau ni de rationalité ni d'humanité. Que dire quand la bêtise et l'ignorance le disputent à la servilité et à l'odieux ?

Il faudrait donc "nettoyer" l'Ukraine et ça devrait prendre encore quelques semaines (jusqu'à la fin du mois de mars). Je crois que ces opérations de "nettoyage", ça a déjà été pratiqué il n'y a pas si longtemps.

J'ai quand même retenu que ce "brave" M.Moreau préconisait de ne pas s'attaquer à l'Ouest de l'Ukraine (notamment Lviv) parce que les populations y sont "sauvages" et inassimilables. C'est bien vu parce qu'en effet, en tant que Galicienne, sauvage et inassimilable, c'est exactement, ce que je suis.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Marc,

Je suis lasse de cet argument sans cesse ressassé des nazis en Ukraine. Qui est d'ailleurs ce Pierre Hillard qui joue au grand spécialiste mais dont je doute qu'il parle russe ? A-t-il jamais rencontré un des ces nazis qu'il évoque ?

Je ne vais bien sûr pas vous dire qu'il n'y a pas d'antisémitisme en Ukraine mais je crois quand même que le pays a été vacciné contre cela. Au point, notamment, d'élire un Président juif. Quant à l'extrême-droite en Ukraine, elle ne recueille que des suffrages marginaux bien inférieurs aux 30 % potentiels en France.

S'agissant de la Crimée qui serait russe, je trouve ça stupide d'abord parce que la Crimée est séparée géographiquement, naturellement, de la Russie; elle n'a pas de contact terrestre avec elle. Surtout, que ça plaise ou non, elle est ukrainienne au regard du Droit international et le Droit, c'est ce qui gère aujourd'hui, de manière absolue et intangible, les relations entre pays. Parce que le Droit, c'est ce qui s'oppose à la force.

Que dire enfin des délires de ce M. Hillard sur l'Ukraine pion des USA et de l'Otan ? Je pense plutôt que l'Ukraine a été largement négligée par les pays occidentaux et j'aurais aimé qu'ils y viennent et y investissent davantage pour apporter un peu de prospérité au pays (c'est avec la Moldavie le pays le plus pauvre d'Europe).

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Marc,

Cette Christelle est en effet fascinante, à sa manière. Elle semble même croire à ce qu'elle raconte. Tant mieux pour elle si elle s'épanouit, si elle a trouvé sa voie, dans une République séparatiste du Donbass. Mais je la trouve franchement effrayante.

Je me sens tellement loin d'elle que je n'ai rien à dire. Mais attention : les victoires militaires qu'elle entrevoit risquent de se transformer en terribles défaites politiques.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Marc,

Je suis désolée mais ce Général qui se prétend un "expert" est, à mes yeux, un Grand Ignorant. Tout ce qu'il raconte est erroné mais le reprendre point par point me prendrait trop de temps. Il se contente, en fait, de reprendre, point par point, la propagande poutinienne.

Quant à ce Christian Dubuis-Santini, je reconnais qu'il a effectivement des connaissances (lacaniennes) en psychanalyse et il s'exprime de manière assez pédagogique. Mais comment peut-on se prétendre psychanalyste et afficher, par ailleurs, une telle haine, vulgarité et mépris vis-à-vis des autres ?

Bien à vous,

Carmilla