samedi 18 novembre 2023

Vivent les espèces sonnantes et trébuchantes !


Les servitudes potentielles et leurs formes diverses, on n'y prête souvent guère attention.

Mieux, on les adopte parfois avec enthousiasme et on tend volontiers nos pieds et nos poings aux fers qui les attendent.



Parce qu'en effet, on est des modernes et que les "vieilleries", il faut s'en débarrasser.

Je m'interroge souvent ainsi sur la disparition prochaine des espèces "en liquide" (billets et pièces) et leur remplacement, pour la totalité des transactions, par la monnaie électronique (ou digitale). Bientôt, il n'y aura plus que des cartes ou, mieux, des smartphones et, encore mieux, une puce que l'on se fera greffer (noyée dans nos tatouages divers, elle sera même invisible). Et la simple reconnaissance faciale pourra probablement bientôt suffire.



Le mouvement semble inéluctable. C'est déjà quasiment fait en Suède, un pays protestant où pourtant, comme en Allemagne, on était plutôt réticent envers l'utilisation de la carte bancaire.

Mais c'est en voie de se faire dans toute l'Union Européenne et personne n'a d'ailleurs vu d'objection à ce que l'on ait récemment supprimé les billets de 500 €. Et trouver des billets de 100 et 200 €, c'est même devenu rare.


Mais de cette évolution, je constate que tout le monde s'en fiche. "C'est plus pratique, c'est le progrès", me dit-on. Cette indifférence me sidère, je ne la comprends pas. Il en va pourtant de nos libertés fondamentales. J'ai en effet tendance à penser que la disparition prochaine des "espèces", sous forme de billets et pièces, correspond à un bouleversement politique et psychologique considérable. On change presque de société et on rompt, tout à coup, avec un usage de ce que l'on appelle encore "l'argent". Un usage qui avait été établi par les Grecs, aux alentours du 4ème siècle avant JC, avec une pièce de base, la drachme (4,3 g d'argent).



La principale caractéristique de cette monnaie grecque, c'est qu'elle reposait sur un contrat de confiance entre le pouvoir politique et ses citoyens.  La valeur des pièces devait être garantie par le Prince (ou, souvent, le Tyran) qui devait tout faire pour en assurer la stabilité. C'est pour cette raison que l'on appelle encore les pièces et les billets "la monnaie fiduciaire" (par distinction avec "la monnaie scripturale" simplement inscrite sur les comptes bancaires des ménages et des entreprises). Et "fiduciaire", ça vient du mot latin "fiducia" qui signifie confiance. 


Il faut bien reconnaître que ce contrat de confiance entre l'Etat et le peuple n'a pas toujours été honoré. D'abord parce que le Souverain, Roi ou Empereur, avait parfois tendance a manipuler la valeur des pèces de monnaie en "rognant" sur leur poids en or ou en argent (l'Empereur Néron par exemple). Ou alors, plus tard, en faisant fonctionner à plein la "planche à billets", provoquant ainsi une extraordinaire inflation. C'est la pratique actuelle.

Il faut à ce sujet lire la fantastique histoire de l'Ecossais John Law qui devint, en 1720, le ministre des Finances de la France après la mort de Louis XIV qui avait légué au Royaume une montagne de dettes. Innovation extraordinaire: il introduisit, pour la première fois, le papier-monnaie en France. Malheureusement, une spéculation effrénée provoqua une gigantesque inflation et finalement une banqueroute du Trésor. De cette expérience malheureuse, on ricane maintenant. Pourtant, presque tous les gouvernements du monde font aujourd'hui du John Law à très grande échelle, sans le dire ou sans le savoir.

Et puis, du côté du peuple, il y avait (et il y a toujours) une méfiance très profonde envers l'argent. Celle-ci a mis des siècles et des siècles à s'atténuer mais non à se dissiper.  C'est ainsi que le Moyen-Age a connu une grande régression économique avec une circulation monétaire très limitée et surtout une proscription absolue (comme dans l'Islam) du prêt à intérêt. Etre usurier, ça vous valait directement l'Enfer, ce qui faisait réfléchir à l'époque. Ca a permis aux Juifs (qui n'étaient pas soumis à cet interdit) de trouver un moyen de subsistance mais ça explique aussi, en bonne partie, le développement de l'antisémitisme avec le mythe du banquier juif.


Il y avait ainsi, dans l'Europe du Moyen-Age, un véritable tabou religieux sur l'argent qui faisait qu'on considérait que l'argent avait un caractère magique, qu'il était, en fait, un instrument du Diable et de ses tentations. On ne comprenait pas et, surtout, on ne voulait pas que l'argent engendre l'argent, qu'il ne soit pas le produit d'un travail concret. On retrouve ça aujourd'hui dans les imprécations moralisatrices contre la Finance et dans le rêve d'une nouvelle société écologique, plus frugale, repliée sur le "local", faisant même une large place au troc et à l'abri des échanges de la mondialisation. On est demeurés très religieux, en fait, y compris, et peut-être surtout, ceux qui s'affichent les plus progressistes.


L'Histoire de l'argent est donc mouvementée, faite de multiples soubresauts. Et c'est seulement aujourd'hui que la financiarisation généralisée du monde est en passe d'être achevée avec sa consécration ultime à venir: la dématérialisation de la monnaie. 


On a complétement oublié que, récemment encore (jusqu'au début de la 1ère Guerre mondiale), on payait largement, en Europe et dans le monde, avec des pièces d'or ou d'argent. Elles inspiraient davantage confiance que le papier-monnaie qui n'a été que, lentement et tardivement, introduit et accepté durant le 19ème siècle (d'abord par la Suède puis l'Angleterre). 


Mais on ne sait souvent même pas que, depuis peu de temps (accords de Bretton Woods en 1971), notre bel argent a perdu toute référence à l'Or et que sa "valeur réelle" dépend simplement des fluctuations des marchés des changes et des politiques plus ou moins aventureuses de nos gouvernants. On a, en quelque sorte, réalisé le projet de Lénine qui, voulant démontrer l'inutilité et l'inanité de l'Or, projetait de construire des toilettes en or dans l'enceinte du Kremlin.


Tout s'est, en fait, énormément accéléré à partir de ces fameuses années 1970. C'est généralement effacé des mémoires mais, en fait, la bancarisation du monde, c'est très récent. Si la possibilité d'ouverture d'un compte courant bancaire  est assez ancienne (1918), sa généralisation (avec des chèques, cartes, prélèvements, virements) ne date, en revanche, que de la fin des années 60. Jusqu'à cette date, les salariés français recevaient leur paie sous forme d'une enveloppe de billets qui était ensuite "cachée" dans une armoire. Et la quasi totalité des paiements s'effectuait alors en liquide. On pouvait même, récemment encore, acheter une voiture, sans craindre le fisc, avec une simple valise de billets. Aujourd'hui, les paiements en espèces sont limités à 1 000 € et les dépôts en banque, sans justificatif, à 8 000 €.


On relate souvent, comme preuve d'archaïsme patriarcal, que c'est seulement en 1965, que les femmes françaises ont eu la possibilité d'ouvrir un compte bancaire sans l'autorisation de leur mari. C'est vrai et ça n'est pas glorieux mais, à cette époque, beaucoup de ménages (et ni le mari, ni l'épouse) n'avaient tout simplement pas de compte bancaire. Le plus sidérant pour moi, c'est, en fait, qu'il ait fallu attendre 1967 pour que les femmes soient autorisées à entrer à la Bourse de Paris et à y spéculer (heureusement que je ne suis pas née 40 ans plus tôt). Et que dire des pays communistes censés être progressistes ? Jusqu'à la chute du Mur, on n'y a quasiment connu que les paiements en espèces (c'était, à vrai dire, le seul espace de liberté offert qui autorisait, en toute impunité, tous les trafics possibles).


Mais tout à coup, aux lendemains, en fait, de Mai 68, on s'est mis à faire confiance aux banques pour la gestion de son quotidien. On a compris qu'on pouvait se décharger sur elles du souci de la paperasse et des échéances avec les chèques et les prélèvements automatiques. Mais surtout, on s'est mis à adorer notre carte bancaire, plus précisément cette carte à puce, conçue en 1974 par un ingénieur français (Moreno), qui a révolutionné les paiements. La carte à puce, c'est bien mieux que le virement ou le chèque. C'est très sûr et, surtout, ça modifie complétement notre relation psychologique à l'argent. Dépenser, effectuer un achat, c'est beaucoup moins culpabilisant avec une carte bancaire. C'est immatériel, presque irréel, on ne voit pas fondre son argent. Et quand on utilise son smartphone, c'est encore plus indolore. C'est vraiment l'instrument idéal de la société de consommation.


Du coup, la part des espèces dans le volume des paiements de la vie quotidienne (moins de 50% aujourd'hui) s'effondre régulièrement à tel point qu'on peut prédire leur disparition prochaine.


Et d'ailleurs quand on a mis en place l'euro, on s'est d'emblée préparés à cette échéance en introduisant des billets archi moches. Des billets avec les quels on ne peut vraiment avoir aucun rapport affectif et dont on a envie de se débarrasser le plus vite possible. Il est bien difficile, en outre, de trouver des billets supérieurs à 50 €. Quant aux petites sommes, on s'est délibérément abstenus d'imprimer des billets de 1€ cependant moins coûteux à produire (il existe pourtant un billet de 1 dollar), cela pour stimuler la consommation (il est, en effet, curieusement plus facile, psychologiquement, de payer en pièces qu'en billets).


Cette "mocheté" des billets de l'euro offre un contraste saisissant avec la Suisse, par exemple, où circulent de très beaux billets de banques et où demeure couramment utilisé un billet de 1 000 Francs suisses (soit, à peu près, l'équivalent en euros). Cette laideur des billets de l'euro m'irrite vraiment d'autant que j'aime bien les anciens billets nationaux dont certains avaient de réelles qualités esthétiques et, surtout, disaient beaucoup de la culture d'un pays. Je n'ai pas l'âme collectionneuse mais j'aime bien acheter d'anciens billets que je sélectionne simplement en fonction de leurs qualités esthétiques ou historiques.


Mais ça n'est pas grave cette laideur puisque, bientôt, on en sera débarrassés, me dit-on. Il n'y aurait rien à faire, on peut toujours grogner, on ne parviendra pas à contrecarrer "l'extinction des espèces". S'opposer, c'est prêcher dans le désert.

Du point de vue des banques et de "la Finance", il n'y a, en effet, que des avantages. Ca permet de gonfler leur bilan et d'augmenter leur capacité de financement.

Du point de vue de l'Etat, ça permettrait d'économiser le coût de fabrication des billets et pièces (négligeable, en fait) et, surtout, de lutter contre le travail au noir, la fraude fiscale, le crime organisé, le terrorisme, le trafic de drogues, la prostitution...


Comment ne pas souscrire à toutes ces belles intentions ? Il y a toute une propagande qui laisse entendre qu'il n'y a que les vieux, que les handicapés ou les malvoyants qui s'y opposent. On peut ajouter que les femmes sont aussi généralement plus réticentes à recourir à la carte bancaire. Mais tous les "jeunes" sont enthousiastes, c'est tellement plus "cool".


Mais personne ne s'avise de ce qu'on ne nous raconte peut-être que des fariboles concernant la fraude et le crime. S'il suffisait de supprimer les billets en euros pour les éradiquer, ce serait, en effet, beaucoup trop simple. Un simple petit calcul mental, dont presque personne ne prend la peine, suffit à comprendre que la mesure n'est pas à la hauteur du problème. Et d'ailleurs les grands fraudeurs, les grands criminels financiers et autres, n'opèrent absolument pas avec des valises de billets mais justement avec la monnaie électronique.


Ceux qui fraudent avec des billets, ce sont, pour la plupart, des gens comme vous, comme moi, des particuliers, des petits commerçants. Des gens qui manient, en fait, des sommes ridicules, mais que l'Etat se plaît à harceler. Je fais ainsi régulièrement appel au gardien de mon immeuble pour effectuer de petits travaux (plomberie, électricité, jardinage). Mais je ne m'embête pas, bien sûr, à lui faire une fiche de paie avec toute sa paperasse pour déclaration au fisc. Et je paie généralement en liquide mon coiffeur ou des hôtes sympas Airbnb. Ca leur fait plaisir.



Je n'ai aucun scrupule parce que c'est d'ailleurs une illusion de croire qu'en luttant contre l'économie souterraine, un Etat pourra se remettre à flot. L'argent liquide que je donne à mon gardien, il retourne bien vite, je suppose, dans l'économie réelle dûment taxée. Il n'y a donc aucun détournement fiscal réel. Et surtout, s'il n'y a plus la possibilité de payer en liquide, ce sont des milliers de petites activités qui disparaîtront. Je réparerai moi-même ma robinetterie ou mon électricité.

Et puis, dans un monde sans pièces et billets, comment survivront ceux qui n'ont pas de compte bancaire ou en sont privés (étrangers en situation irrégulière, interdits bancaires) ? Les banques ne rempliront plus une fonction d'intégration mais d'exclusion.

Les liquidités frauduleuses, ça ne recouvre au total que des montants dérisoires mais l'administration fiscale préfère, hypocritement, s'y attaquer parce qu'il est plus facile de persécuter le boulanger, le coiffeur ou le cafetier du coin plutôt que les grands professionnels de la fraude.


La grande fraude, la grande criminalité (celle des yachts et des jets privés), elle est, en effet, d'abord suffisamment bétonnée juridiquement pour décourager les Etats de s'engager dans des procédures interminables et incertaines. Et surtout, je le souligne à nouveau, il y a longtemps qu'elle ne passe plus par des valises de billets. 


Le comble de l'hypocrisie ou de l'aveuglement, il est d'ailleurs pour moi atteint quand je constate qu'en même temps qu'on envisage la suppression des billets de banque, on laisse se développer, avec complaisance, cette grande escroquerie mondiale que sont les cryptomonnaies. C'est par elles, pourtant, que passe maintenant la grande criminalité. Mais ça ne semble émouvoir personne, on laisse faire parce qu'on est libéraux. 



Il est même devenu chic de spéculer sur le Bitcoin, ça permet d'apparaître un grand financier. Il y a même des "tutoriels" de gestion du Bitcoin et des experts affichés en la matière. Ca me ferait rigoler si ce n'était pitoyable. Ces experts, ce ne sont que des experts en "peaux de lapin", tout simplement parce . que la valeur d'une cryptomonnaie ne repose que sur du vent (à la différence d'une devise nationale qui traduit tout de même la force, ou la faiblesse, d'une économie). Ca ne vaut donc guère mieux qu'une pyramide de Ponzi, c'est juste un peu plus sophistiqué et ça n'est efficace que pour séduire et plumer les gogos. Et je ne parle même pas des NFT (non fungible tokens) qui prétendent investir le marché de l'Art, voire devenir, eux aussi, un moyen de paiement. On est carrément dans l'absurde et le n'importe quoi: la valeur d'une œuvre d'Art, ce serait simplement sa rareté, sa reproductibilité, contrôlée.


Et le pire, c'est que Marc Zuckerberg veut s'y lancer avec son Libra. Et pourquoi pas bientôt, Musk et Bezos puisqu'on n'a pas clairement exprimé d'interdiction. Nos grandes banques centrales n'ont rien vu venir alors que c'est leur existence même qui est menacée. On nous présente ça sous les plus beaux atours, comme un instrument souple et libertaire, affranchi des contraintes et rigidités étatiques. Bienvenue dans le nouveau monde, "le meilleur des mondes" peut-être mais il n'est pas sûr qu'on y rigole beaucoup. Réfléchissons un peu, en effet, à ce que pourrait être une grande monnaie mondiale, ayant évincé quasiment toutes les autres, pilotée par un mégalomane du type Zuckerberg ou Musk, avec, bien sûr, le concours de la grande criminalité financière et enrichie de toutes les données des utilisateurs de Facebook et X (ex Twitter).


Mais impossible de se faire entendre. On m'accuse de ringardise. Pourtant, je suis convaincue que la question essentielle à se poser concernant ces innovations financières (suppression des pièces et billets et cryptomonnaies), c'est d'abord celle du respect de la vie privée de ses utilisateurs.


"Je n'ai rien à cacher" allez-vous me dire. J'espère bien que si parce que si vous dites vraiment la vérité, votre vie doit être bien ennuyeuse et triste. On a tous quelque chose à cacher. Avez-vous envie, par exemple, que le banquier, auprès du quel vous sollicitez un prêt, remarque que vous consultez régulièrement un oncologue ? Ou que vous achetez une caisse de whisky et 3 cartouches de cigarettes chaque semaine ? Et je ne parle même pas de vos aventures scabreuses.

Un système économique doit offrir des "soupapes de sécurité" à ses acteurs. Tant est puissant l'attrait de l'interdit et de l'illicite dans le coeur des hommes. C'est une part importante de la saveur de la vie. L'occulter est pernicieux car une grande répression génère une grande criminalité.


C'est pour cette raison que je défends ardemment la préservation de la "monnaie physique" (même si c'est, d'ailleurs, contraire aux intérêts de ma paroisse). C'est la seule qui permette de maintenir une relation de confiance monétaire entre l'Etat et ses citoyens.



On dit que ce sont les vieux et les femmes qui sont réticents envers la monnaie électronique. Mais est-ce qu'ils ne sont pas plus lucides que les autres ? Est-ce qu'on ne rentre pas dans une société folle, une espèce de "dictature virtuelle" ? Que penser, en effet, d'un monde dans lequel toute richesse se dissout dans la consommation immédiate; dans lequel, surtout, presque plus personne n'est capable de retenir un chiffre ou un code, d'effectuer un calcul mental élémentaire, de se souvenir de dates de mariage ou de naissance, d'avoir en tête son agenda ou ses listes de courses, de rédiger un court texte construit et argumenté et enfin de rentrer chez soi sans le concours de son GPS ?


Tableaux en particulier de Jérôme BOSCH, de Martial RAYSSE et d'un peintre peu connu Albert MAIGNAN. Il s'agit de "La fortune passe" (1ère image) et "Les voix du Destin" (dernière image), un tableau prodigieux, gigantesque, exposé à Amiens.

Je crains bien d'apparaître terriblement ennuyeuse avec ce post. Mais il s'agit d'un sujet qui me tient à  cœur parce que l'économie politique est, tout de même, l'une de mes grandes marottes. Pourquoi l'occulter dans mon blog où je donne sans doute une image faussée de mes préoccupations ? Et puis dans cette affaire de démonétisation, qui n'intéresse peut-être pas grand monde, il s'agit tout de même bien de nos libertés essentielles. J'espère seulement avoir été suffisamment pédagogue pour m'être fait comprendre.

Je recommande enfin :

- Michel BOURGEOIS: "Si l'argent nous était conté - Grande histoire et petites anecdotes de la monnaie physique". Par un économiste belge (ce qui est gage d'iconoclasme et d'humour), un bouquin vraiment épatant, souvent drôle et jamais ennuyeux. Même si vous n'en avez rien à fiche de l'économie, je vous invite à le lire. C'est parfaitement accessible et, surtout, cela nous invite à réfléchir à notre rapport personnel à l'argent. Et, sur ce point, on est tous concernés.

- Nicolas BUAT : "John LAW - La Dette ou comment s'en débarrasser" et "David Ricardo - L'économiste capital". Il s'agit de deux biographies remarquables situant bien ces deux économistes dans leur époque (le 18ème siècle et le début du 19ème). Ricardo, c'est, en économie, mon principal maître à penser (c'est bien plus fort que Marx ou Keynes). Quant à John Law, il a, à sa manière, été un révolutionnaire. On dit généralement que son expérience française a été un désastre mais ce n'est pas aussi évident que ça. 

8 commentaires:

Ariane. a dit…

Merci mille fois Carmilla pour cet excellent article, qui moi m'intéresse beaucoup et que je vais même garder de côté pour le montrer !
Je suis entièrement d'accord avec toutes les réserves que vous émettez et n'y connaissant rien en finances, je suis tout à fait contente de vos explications qui rejoignent tout à fait ce que je pense, surtout en ce qui concerne notre liberté future si cette disparition de la monnaie physique était avérée.

Ariane.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Ariane,

Heureuse que mon article vous ait intéressée !

Ce n'est pas facile pour moi de parler de ces histoires financières qui ne suscitent, généralement, qu'une indifférence polie.

Mais j'avoue que j'aime bien m'efforcer d'être claire et pédagogue pour communiquer sur ces questions qui réclament tout de même d'être un peu du "milieu". Je suis donc contente que ce petit texte ait retenu votre attention. Il est vrai que je suis entièrement convaincue en la matière et qu'il s'agit vraiment d'un combat pour la préservation de nos libertés.

Il n'est, heureusement, pas encore complétement acté que l'on passe au tout numérique. Mais si personne ne dit rien et ne fait rien, ça se fera: pour les banques et pour l'Etat, ça ne présente, en effet, que des avantages (augmentation des ressources, minoration des coûts, contrôle absolu de toutes les transactions, lutte contre la fraude et la criminalité).

En France, je n'ai encore entendu aucune objection. Mais je sais qu'en Allemagne et en Autriche (deux pays où la carte bancaire a mis du temps à s'implanter), il y a heureusement des gens qui commencent à grogner.

Bien à vous,

Carmilla

Nuages a dit…

Et que pensez-vous de l'"euro numérique" que la BCE a le projet de créer ? Je n'en comprends pas bien l'utilité ou la finalité.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages,

Oui, l'Euro numérique peut être, sous quelques aspects, intéressant.

Ca consisterait, pour l'essentiel, en un porte-monnaie numérique qui ne serait pas rattaché à votre banque commerciale mais directement à la Banque Centrale Européenne.

Ca permettrait, en particulier, à des gens qui n'ont pas de compte bancaire de régler tout de même quelques achats dans des commerces de proximité. L'adossement à la BCE offrirait à ceux-ci une garantie de paiement. Et l'objectif premier, c'est de contrer les crypto-monnaies (Libra ou autres).

Mais d'abord, ça n'est pas près de voir le jour. La BCE vient seulement de décider de lancer une expérimentation sur deux ans. On ne verra donc pas d'euro-numérique avant, au mieux, 2027.

Ensuite, il y a une querelle entre la BCE et les Banques commerciales sur les montants autorisés de ce porte-monnaie : entre 500 € et 3 000 €, des montants tout de même assez faibles.

Et puis, il faudra bien sûr passer par un smartphone (dont tout le monde ne dispose pas). Et ce seront, cette fois-ci les gouvernements (et non les banques commerciales) qui pourront être tentés de vous contrôler.

Je continue donc de penser que le mieux, c'est de conserver le bon vieux billet de banque.

Bien à vous,

Carmilla

Anonyme a dit…

Vous avez entièrement raison et je vous conseille de lire Colaricocovirus du philosophe Mehdi Belhaj Kacem.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Anonyme,

Voilà au moins un sujet sur le quel nous sommes d'accord.

Merci aussi pour la référence. Mehdi Belhaj Kacem, il ne m'est pas inconnu mais je n'ai pas lu.

Bien à vous,

Carmilla

Nuages a dit…

Le livre de Mehdi Belhaj Kacem est en tout cas préfacé par Louis Fouché, un des pires covidosceptiques, désinformateurs et complotistes qui soient à propos du Covid, ce qui, a priori, n'a rien d'engageant.

Carmilla Le Golem a dit…

En effet Nuages,

Je suis en outre rebutée par l'inspiration heideggerienne de Mehdi Belhaj Kacem. J'ai toujours eu une aversion envers le bonhomme et sa prose franchement indigeste (mais il est vrai que j'ai vite décroché). Une énigme pour moi: son histoire d'amour avec Anna Arendt.

Bien à vous,

Carmilla