samedi 27 octobre 2018

Mes feuillets d'automne


Je le dirai tout net: la "rentrée littéraire" française d'automne, celle qui fait les prix, m'a déçue. Habituellement, il émerge trois ou quatre très bons bouquins, de ceux qui feront plus ou moins date.

Mais cette année, c'est vraiment moyen, moyen. Il est vrai que je ne pas lu Philippe Lançon (par lassitude de l'évocation des attentats en France) qui semble rallier tous les suffrages. Et puis, je me suis endormie sur le Jérôme Ferrari ("A son image"), en dépit de son analyse intelligente de la photographie et j'ai carrément détesté "Désintégration" d'Emmanuelle Richard même si son écriture est superbe; mais plus pleurnichard, plus aigre, plus misérabiliste, il n'y a pas.



Alors, je me suis rabattue sur la littérature étrangère. Mais je ne suis quand même pas allée bien loin parce que trois chefs d’œuvre, qui marqueront la littérature mondiale, ont récemment été publiés mais je n'ai pas eu le courage de m'y attaquer (plus de 1 000 pages, denses, pour deux d'entre eux et plus de 600 pages pour le plus léger). Il s'agit de Paul Auster ("4 3 2 1"), Ludmila Oulitskaïa ("L'échelle de Jacob") et Olga Tokarczuk ("Les livres de Jakob"). Si quelqu'un, parmi vous, est venu à bout de l'un de ces bouquins, ça me ferait plaisir qu'il m'en donne des nouvelles.

 
Hormis ces trois grands livres, voici donc ma petite liste de recommandations automnales :

- Lisa HALLIDAY: "Asymétrie". Il est rare que je lise de la littérature américaine mais, là, j'ai vraiment été conquise, emballée. Un bouquin étonnant en trois parties complétement distinctes, sans lien apparent : le récit de la liaison entre l'auteur et le grand écrivain, Philip ROTH, de près de 40 ans son aîné; les tribulations d'un jeune irakien; l'interview imaginaire de Philip ROTH. C'est piquant, drôle, transgressif.



- Elena TCHIJOVA: "La planète des champignons". Avec Sentchine et Bouïda, Tchijova est au nombre de mes écrivains contemporains russes favoris. C'est ici le récit de la confrontation de deux voisins de datchas à la campagne: une businesswoman indépendante et un traducteur de seconde zone enlisé dans ses habitudes. Si on ne connaît pas la Russie d'aujourd'hui, on apprend plein de choses, si on connaît, c'est plus vrai que nature.


- Nancy HUSTON: "Lèvres de pierre". J'adore la franco-canadienne Nancy HUSTON avec la quelle je me sens en complète affinité intellectuelle. Je n'ai pas été déçue par "Lèvres de pierre". C'est un livre un peu bizarre, mi-roman, mi-essai, dans le quel Nancy Huston établit des correspondances étonnantes entre elle-même et le monstre sanguinaire, Pol Pot. Déconcertant mais très fort: une réflexion sur le mal qui habite en chacun de nous.


- Vanessa SCHNEIDER: "Tu t'appelais Maria Schneider". Un portrait fulgurant de l'actrice du "Dernier Tango à Paris" par sa proche cousine, journaliste au "Monde" et fille du célèbre psychanalyste Michel Schneider. La vie tragique, rongée par l'alcool, le tabac, la drogue mais la vie intense, flamboyante, de la fascinante actrice. C'est à ce bouquin que j'accorderais, sans hésitation, un prix littéraire d'automne.


- Christophe DONNER: "Au clair de la lune". Un livre très différent de la production littéraire habituelle de Christophe Donner plutôt consacrée au déchirement sexuel et existentiel. Il relate ici la vie et le parcours de Nicéphore Niepce et d'Edouard-Léon Scott de Martinville, inventeurs de la photographie et de la phonographie, qui ont, littéralement, changé le monde. Leurs travaux ont pourtant été pillés par Daguerre et Edison, les privant de la gloire qui leur était normalement destinée. Ce roman, qui nous apprend plein de choses, dévoile le mystère de cette dépossession, caché dans leurs vies intimes.


Paolo RUMIZ: "Comme des chevaux qui dorment debout". J'aime beaucoup l'écrivain-voyageur italien Paolo Rumiz. En plus, il parle principalement ici de mon pays natal, la Galicie. Mais j'ai quand même été un peu déçue. Le propos est alourdi, obscurci, par la recherche des traces des militaires italiens (de Trieste) enrôlés dans l'armé austro-hongroise au cours de la première guerre mondiale et envoyés en Galicie. C'est intéressant,bien sûr, mais ça aboutit à une vision un peu étrange et réductrice de la Galicie.


- Abnousse SHALMANI: "Les exilés meurent aussi d'amour". La description d'une communauté iranienne à Paris, fantasque et cocasse, de réfugiés communistes. C'est drôle, magique, peuplé de personnages déconcertants. Je vous conseille néanmoins de lire d'abord: "Khomeiny, Sade et moi", épatant et percutant.

- Agnès DESARTHE: "La chance de leur vie". Une famille française envoyée dans une université américaine en Caroline du Nord. La France et les Etats-Unis vus à distance. Les tourments des cœurs et des corps, le besoin d'imprimer une direction à son existence mais le constat, finalement, que l'on demeure étranger à son destin.

-  

Je clos, enfin, ma liste en mentionnant le livre de Richard H. THALER : "Misbehaving Les découvertes de l'économie comportementale". Richard H.THALER a été Prix Nobel d'économie 2017. Je lis en effet, également, beaucoup de livres de finance, économie. Normal, c'est tout de même en rapport avec mon boulot. De toute manière, ça me passionne. Ce livre de Thaler est facile à lire. Il démontre que, contrairement aux analyses classiques, l'homme n'a pas un comportement économique rationnel. C'est novateur et j'ai été intéressée. Un reproche toutefois: l'auteur n'a vraiment pas l'esprit de synthèse. Son bouquin fait plus de 500 pages alors que 100 pages auraient largement suffi.

Photographies de Tim PARCHIKOV né à Moscou en 1983; photographe russe dont les œuvres commencent à être bien cotées.


Enfin, je vous conseille au cinéma: "Cold War" de Pawel PAWLIKOWSKI.

8 commentaires:

Richard a dit…

Bonsoir Dame Carmilla !
Voilà un automne riche en feuilles.
J'attendais le livre de Auster avec impatience, on nous l'avais annoncé pour septembre 2017, mais il est arrivé au Québec qu'en janvier 2018. Je puis comprendre le retard, la tâche à due être colossale pour la traduction sans oublier le reste, la mise ne page, la construction physique du livre, lorsqu'on ouvre un livre, beaucoup de lecteurs n'imaginent pas tout le travail que cela implique.
J'aime Paul Auster, j'aime à la fois l'homme lucide face à la réalité, mais aussi l'écrivain qui écrit ses livres lentement, qui vous attire, puis vous amène dans son univers, pour finalement vous ensorceler. Que voulez-vous il a cela en lui, ça déborde, vous submerge et finalement vous enchante.
Le titre de 4321 est bien étrange, mais c'est quatre histoires possibles du même personnage, c'est un peu, et j'aime cette comparaison, comme si vous aviez deux pianos dans la même pièce et quatre pianistes, qui s'apprêtent à interpréter rhapsodie pour deux pianos à huit mains.
Auster commence lentement, il faut vraiment franchir les premières pages, pour se retrouver dans quatre destins différents. Naturellement Auster laisse monter la pâte à chaque chapitre, alors que vous êtes plongé dans l'un de ces chapitres, il vous enlève l'assiette sous le nez, le remplace par un autre plat, ce qui est déroutant, mais on finit par s'y faire, lentement, sûrement, volontairement, d'impressions en impressions, et l'on en vient à se dire : voilà, c'est cela la vie, ça pourrait être la mienne. Auster vous embarque en vous mystifiant. C'est beaucoup plus qu'un tour de force, c'est de la virtuosité mur à mur. Pour un type de 70 ans j'ai trouvé la chose fabuleuse. Ça vibre, ça craque de toute part, c'est comme de plonger dans ma rivière, l'eau est froide, elle saisie le corps, puis après quelques brasses, vous vous sentez mieux, et finalement confortable, alors la traversée peut commencer sérieusement. Dame Carmilla ne venez pas me dire que vous êtes incapable de traverser la Seine à la nage et un ouvrage de mille pages ne devrait pas vous effrayer. J'aime pénétrer dans des univers complexes et c'est ce que m'a offert Auster, ce dont je le remercie grandement. Auster habite New York et si je devais visiter cette ville, c'est en sa compagnie que j'aimerais le faire, je pense que se serait fabuleux et qu'on aurait beaucoup de plaisir ensemble. Entrer dans l'univers de Auster ce n'est pas donné ; mais comme tout ce qui n'est pas donné cela en vaut souvent la peine.
En attendant la tempête
Richard St-Laurent

Richard a dit…

ReBonsoir !
Non, je n'en avait pas terminé, Paul Auster n'était qu'une entrée en la matière. Il y a tellement d'autres choses à dire, pour commencer il est 17 heures 30, que la pluie s'est transformée en neige et qu'il en sera ainsi au cours de toute cette nuit.
Après 4321, j'ai très envie de Ludmila OulitskaÏa : L'échelle de Jacob et Olga Tokarczuk : Les livres de Jacob. Si tel est les cas, je vous en donnerai des nouvelles.
Lorsque je vois un pavé je salive, je me dis voilà quelqu'un qui a quelque chose à dire,. On ne passe pas autant de temps à pondre des feuillets pour ne rien dire. J'aime les longues histoires celles qui meublent les soirées. Dernièrement vous avez évoqué que les Islandais et les Finlandais produisaient des écrivains à la pelle. Les peuples nordiques ont un avantage sur les autres peuples situés plus au sud, c'est qu'il fait noir une bonne partie de l'année, alors il ne reste plus qu'à s'enfoncer sous les couvertures et à lire si la télévision ou l'alcoolisme ne viennent pas à bout de votre insomnie.
Après Paul Auster, comment ne pas parler de sa femme Siri Hustvedt, qui me rappelle Nancy Huston. Il y a quelque chose apparenté entre ces deux femmes, un sens logique, une franchise désarmante, un réalisme déroutant. Elles parlent et écrivent sur les sens de la vie et elles le font merveilleusement bien. J'ai parlé de : Les Mirages de la Certitude de Hustvedt, vous pouvez être sûr que je vais lire attentivement : Lèvres de Pierre. Je trouve que c'est un beau titre, c'est évocateur : lèvres de pierre. C'est quand même fabuleux le destin de cette femme née à Calgary et qui est devenue une figure de la littérature française. À tous les français imbus d'eux-mêmes, la francophonie c'est cela et attendez-vous à d'autres surprises. Je vous recommande : Reflets dans un œil d'homme, après vous pourrez me parler de ( Moi-aussi). Et, je vous jure, moi qui ne jure pas souvent, que le débat va être coriace. Autant chez Hustvedt que chez Huston, c'est un réalisme solide. Je ne connais pas beaucoup d'auteurs qui par leurs recherches et leurs proses sont capables de pousser au pieds du mur un type comme Harari. Hustvedt trace une piste entre le corps et l'esprit et nous nous vantons déjà que nous pouvons créer un esprit artificiel ; mais un humain c'est un esprit réel dans un corps biologique ; c'est le propos de Hustvedt, à sa lecture on sent qu'elle est informée qu'elle a fait des recherches et que son écriture sur le sujet n'est pas gratuite. Je ne me lasse pas de telles auteures. Oui, au féminin pluriel, n'en déplaisent à certains.
Voilà, la neige vient de se transformer en verglas
Richard St-Laurent

Richard a dit…

Oui, c'est vraiment du verglas, une vraie saloperie qui nous tombe dessus.
Je suis d'accord avec vous, ce n'est pas une très grande entrée littéraire 2018, mais on ne peut pas avoir : Les Bienveillantes à toutes les années, sauf que j'ai lu Philippe Lançon, que je n'aurais jamais connu, ni lu, s'il ne s'était pas fait tiré. C'est le parcours du combattant, celui qui ne renonce pas. La partie de ce livre où il est étendu sur le plancher, baignant dans son sang et le sang des autres et qu'il voit les bottes de ses agresseurs qui déambulent après leur massacre c'est vraiment insoutenable de tension. Il fait le mort pour éviter de se faire achever. Ne pas bouger, souffrir en silence dans la plus grande détresse. L'autre moment c'est lorsqu'il se regarde dans son portable et qu'il constate qu'il n'a plus de mâchoire inférieure.
Après c'est une lente remontée, le parcours du combattant, l'impuissance des estropiés, la diminution de son être, les interventions chirurgicales, et comment nourrir un type qui n'a plus de mâchoire inférieure.
Une fois pris dans le récit, vous ne pouvez plus quitter ce livre. Vous accompagnez ce type, vous aussi vous voulez aller jusqu'au bout.
Vous pouvez être fier de votre système de santé en France, ils ont fait du bon travail. Il n'ont pas seulement sauvé Lançon, ils l'ont entouré, réconforté, supporté ; il faut lire les échanges qu'il a avec ses médecins et chirurgiens, ça vaut le déplacement, du très grand humanisme haut de gamme. Pendant une longue période, sa seule façon de communiquer, et pensez-y bien, c'était sa tablette où il écrivait ce qu'il voulait.
Le moment aussi où il prend sa première douche seul. Se laver tout simplement, un geste très intime qu'il redécouvre, un autre moment fort. Nous les biens portants, nous n'y pensons jamais, mais celui à qui il manque des morceaux, celui qui est estropié, lui est dans l'incapacité.
C'est le genre de récit qu'on n’oublie pas, poignant jusque dans le fond des tripes, qui plus est, ne jamais oublier que tous autant que nous sommes, que c'est chacun de nous qui pourrait un jour se retrouver dans le fond d'un lit comme Lançon. Qu'est-ce qui nous différencie de ces personnes qui ont été abattues dans ce journal ou encore au Bataclan ? Ça n'arrive pas juste aux autres. On peut toujours se retrouver en première ligne. Souvenez-vous que vous avez une histoire et que certains ont payé le prix fort pour votre liberté. Et, cette liberté, c'est vraiment tout ce qui compte. Je vais vous laisser sur une citation que je recopie dans la première page de mon agenda à chaque nouvelle année :

« La liberté n'a pas de prix, et nous n'entendons pas payer celui de la souffrance. »
Claude Guillon et Yves Bonniec
Tiré du livre : Suicide mode d'emploi
Livre qui a fait scandale en France dans les années 1970.
Le verglas a cessé. La nuit est très sombre.
Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard pour ces analyses et compte-rendus fort instructifs.

S'agissant de "4 3 2 1" de Paul Auster, je vais sûrement l'aborder un jour, j'ai feuilleté le livre à maintes reprises et je m'y retrouve tout de suite, il répond à beaucoup de mes préoccupations. J'ai simplement du mal avec les livres trop longs pour deux raisons: d'abord, je lis toujours, en simultané, 3 ou 4 livres à la fois, voire plus (mais je ne m'embrouille jamais), ce qui peut allonger considérablement (3 semaines, un mois ?) la période de lecture d'un pavé; ensuite, j'ai l'esprit hyper-synthétique (j'ai surtout appris ça dans mes études et mon travail)et j'ai tendance à considérer qu'on doit pouvoir tout dire en peu de mots.

Sinon, il faut sans doute lire également Ludmila Oulitskaïa et Olga Tokarczuk. Olga Tokarczuk (prononcer tokartchouk en accentuant sur le a)est moins connue (sans doute parce qu'elle écrit en polonais) mais ses livres, et notamment son dernier, sont extrêmement puissants. Elle est nobélisable.

Je n'ai peut-être pas fait suffisamment l'éloge de Nancy Huston. "Lèvres de pierre" est vraiment excellent et passionnant. Les lèvres de pierre, c'est le sourire figé des Bouddhas, ou de Pol Pot (qui était, paraît-il, continuellement souriant), ou de beaucoup d'Américains. Les propos de Nancy Huston m'apparaissent toujours extrêmement justes et éclairants. J'ai bien sûr adoré "Reflets dans un œil d'homme". Étrangement, ce livre n'a pas été très bien accueilli par la critique française et, parfois même, jugé réactionnaire. Ridicule ! Dans "Lèvres de pierre", elle parle longuement d'elle-même et de sa jeunesse. Cela permet de mesurer les difficultés à se libérer de toutes les emprises quand on est une jeune femme. Elle décrit aussi, avec une grande justesse,le climat intolérant, dominé par la pensée marxiste, de la France des années 70: ce n'était sûrement pas la grande liberté intellectuelle.

En ce qui concerne enfin Philippe Lançon, je l'aime bien: il est d'abord un grand critique littéraire, avec une plume acérée. Simplement, je ne suis pas d'humeur à lire aujourd'hui son dernier bouquin. Ça viendra sans doute...

Merci encore et bien à vous,

Carmilla

Anonyme a dit…

Bonjour Dame Carmilla,

Connaissez-vous Jean-Louis Costes ? C’est un artiste intéressant, qui regarde vraiment le mal en face. Son livre “Grand-père” est très réussi et pourrait vous plaire, ainsi que ses vidéos (la dernière en date, Jesus Macron, est d’une grande drôlerie). Il a également joué dans Irréversible de Gaspar Noé, il se fiste le cul au début. Je vous le recommande.

Mustapha la Quiche

Carmilla Le Golem a dit…

Vous ne manquez pas d'humour, Mustapha la Quiche.

Je ne connais pas Jean-Louis Costes mais je ne crois pas qu'il corresponde à mon univers.

La provocation et la transgression gratuites ne font pas l'art et sombrent simplement dans le kitsch. On peut aussi rappeler que Sade n'était pas sadique et Masoch masochiste.

L'"expérience des limites" n'a pas forcément besoin de formes triviales. A titre personnel, je ne raffole pas de la sodomie. Quant au fist, ça me dépasse carrément.

Bien à vous,

Carmilla

Anonyme a dit…

Bonjour dame Carmilla,

Je comprends que l’esthéthique de Costes puisse déplaire, j’aurais essayé !
Quant au fist fucking, Michel Foucault le comparait à du « yoga anal » et il n’avait pas tort. Lorsque convenablement pratiquée, il mériterai 4 étoiles dans le guide Michelin !

M. La Quiche

Carmilla Le Golem a dit…

Mais non Mustapha La Quiche,

Je n'ai pas encore essayé de lire Jean-Louis Costes mais je vais essayer. Promis !

En revanche, je suis curieuse de connaître les références du texte où Michel Foucault parle de "yoga anal".

Il faut tout de même rappeler qu'il n'a jamais fait son coming-out concernant son homosexualité, ce qui est déconcertant aujourd'hui mais les temps changent ...

Carmilla