samedi 16 mars 2019

Permis/Interdit - La zoophilie



Dans le registre de "l'horrible", de nos limites, je poursuis aujourd'hui avec la zoophilie. Tant pis si vous me considérez légèrement tapée ou obsédée. Je pense qu'on est, malgré tout, tous concernés.

La zoophilie, elle est peut-être, de toutes les "déviances", celle qui fait l'objet de la plus grande réprobation morale. Essayez donc de raconter, au cours d'une soirée entre copines, que vous aimez bien tripoter votre petit chien et qu'il dort dans le même lit que vous. Les sourires vont se figer et vous allez passer pour une grosse "dégueulasse".


Pourtant, on se montre, en l'occurrence, d'une hypocrisie totale.

D'abord parce qu'on a tous une relation complexe, jamais neutre voire trouble, avec les animaux. Ensuite, au regard du Droit, la zoophilie, dans presque tous les pays du monde, n'est pas considérée comme illégale. Sauf "sévices graves" vous n'encouriez même aucune peine, jusqu'à une époque très récente (2004 en France), si vous aviez des relations sexuelles avec votre chien, un âne, un porc. Vous étiez même libres de les vendre ou de les prostituer pour commerce sexuel, bref de créer un véritable bordel d'animaux.

Cet étonnant libéralisme était toutefois récent. Au Moyen-Age et sous l'Ancien Régime, si vous étiez  convaincu de zoophilie, la peine de mort sur un bûcher était le châtiment habituel. Mieux, l'animal lui-même était en même temps condamné, souvent à l'issue d'un "procès d'animaux". Aujourd'hui encore, toutes les religions monothéistes prohibent les relations sexuelles avec des animaux voire les punissent de prison ou de mort (Islam).

C'est la Révolution Française qui, on l'ignore généralement, a tout à coup mis fin à cette extrême sévérité à l'encontre d'un "crime contre nature". Le Code Pénal de 1791 a, en effet, aboli "les crimes de sodomie et de bestialité", c'est à dire a dépénalisé les comportements homosexuels et zoophiles. C'était d'une audace et d'un courage invraisemblables, l'affirmation la plus haute de la "liberté individuelle". C'était aussi en accord avec l'anthropocentrisme de la Philosophie des Lumières et la vision de l'animal machine de Descartes ou "bien meuble" du Code Napoléonien.


Bien sûr, on n'a aucune idée du nombre de personnes qui s'adonnent effectivement à la zoophilie. On va jusqu'à évoquer 3 % d'une population mais ça ferait tout de même près de 2 millions de Français ce qui semble peu crédible. Quoiqu'il en soit, cette grande liberté a perduré jusqu'au début du 21 ème siècle. A partir de là, les mentalités ont changé, évolué.

Sous la pression des mouvements antispécistes et de la Ligue pour la reconnaissance des "droits" de l'animal, on s'est mis à reconnaître les animaux comme des "êtres sensibles". Désormais, le Code Pénal explique que "le fait d'exercer, publiquement ou non, des sévices graves "ou de nature sexuelle" ou de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique ou apprivoisé ou tenu en captivité est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende". C'est un tournant important. Cela signifie désormais que,  si la zoophilie n'est pas condamnée en tant que telle, avoir des relations sexuelles avec des animaux ne peut plus s'exercer en toute liberté. Cela suppose que l'animal ne puisse être considéré comme violenté ce qui apparaît, bien entendu, impossible à établir. Au total, aujourd'hui, je peux caresser voluptueusement,en toute impunité, mon toutou mais le pénétrer ou le masturber m'expose à deux ans de cabane.

Tous les pays européens et américains ont désormais récemment adopté des législations comparables concernant la zoophilie. A ce jour, la Finlande, la Roumanie et la Hongrie demeureraient les derniers pays d'Europe où la zoophilie demeurerait légale sans restriction.

On peut évidemment penser qu'il s'agit là d'un progrès. Sauf qu'il faut bien voir, également, que le Droit établit ici une nouvelle frontière entre l'homme et l'animal en rendant celle-ci plus poreuse. L'animal devient presque mon frère, ma sœur en humanité. On fait sauter l'un des verrous assurant la prééminence de l'homme.

Du reste, la situation devient entièrement paradoxale. On combat la violence zoophile pour lui substituer, en quelque sorte, une zoophilie douce, compatissante, généralisée. On survalorise désormais les animaux, on les humanise, on leur reconnaît toutes les qualités, toutes les vertus d'intelligence et de tempérance.


J'en veux pour preuve l'extraordinaire croissance du nombre d'animaux domestiques et de compagnie.

La proportion de foyers possédant un animal domestique serait ainsi voisine de :
-  68 % aux États-Unis,
- 58 % aux Pays-Bas et au Danemark,
- 52 % en France,
- 50 % en Belgique, Irlande, Grande-Bretagne, Italie,
- 35 % en Allemagne,
- 28 % en Allemagne,

Ça aboutit à des chiffres énormes: 8 millions de chiens, 11 millions de chats en France par exemple.

Qu'est-ce que ça veut dire ? L'explication courante est qu'il s'agit d'un symptôme de la solitude dans les sociétés occidentales. L'animal domestique devient un quasi-membre de la famille. Tous les matins, en traversant de bonne heure le Parc Monceau, je croise ainsi une multitude de femmes qui viennent  faire prendre l'air à leur toutou. C'est évident, celui-ci est un substitut du mari ou de l'enfant même si  elles m'insulteraient si je leur disais ça.

L'animal-enfant ou l'animal-mari, c'est la nouvelle vision sociétale mais ça m'apparaît extraordinairement aliénant. Considérer l'animal comme un quasi-humain, c'est devenir un peu soi-même un quasi-animal, c'est faire la bête en se montrant bêta.


Que cela est triste et déprimant ! Vouloir à tout prix humaniser l'animal, c'est nier l'altérité radicale dont il est porteur. C'est refuser son étrangeté, sa part d'ombre, tout ce qu'il pourrait nous apprendre. Mais c'est aussi accroître sa propre solitude en reproduisant le modèle familial.

Personnellement, j'aime bien les animaux mais je me sentirais bien incapable d'assumer la responsabilité de la prise en charge de l'un d'eux. Je vivrais ça comme une privation de liberté, une normalisation, banalisation, complète de ma vie.


J'apprécie tout de même particulièrement certaines bêtes: les lapins et les vaches d'abord, des animaux d'une innocence totale, incapables de faire le moindre mal à qui que ce soit (a-t-on jamais entendu parler de tueurs chez des vaches et des lapins ?) mais que l'on extermine par millions en toute bonne conscience.

J'aime bien aussi les rats et les souris parce qu'ils sont des animaux-parias d'une intelligence étonnante. Mon petit jardin parisien est ainsi fréquenté, c'est inévitable dans une ville, par des souris et des mulots mais ça ne me gêne nullement, je veille simplement à ce qu'ils ne rentrent pas dans mon appartement par la terrasse.

Et puis, je prends plaisir à nourrir des couples d'oiseaux, des mésanges et des merles. C'est moins facile qu'on ne l'imagine parce qu'il faut arriver à sélectionner quelques habitués pour éviter d'être envahi.

Les animaux, je ne les considère pas comme nos semblables (des quasi-humains) et j'aime plutôt les considérer du côté de leur étrangeté. Toujours, lorsque j'échange un regard avec un chat, un chien, je me pose cette question: comment me perçoit-il, moi (amicale, hostile, effrayante, belle) ? Ça n'a certainement rien à voir avec nos propres grilles d'appréhension.

En fait, je crois qu'on éprouve tous pour les animaux des sentiments ambigus faits, à la fois, de fascination et de répulsion.

Fascination parce que l'animalité a tout de même été la condition première dont on a du s'arracher. Et peut-être que dans notre rapport à l'animal aujourd'hui, on continue d'éprouver une espèce de nostalgie pour leur brutalité instinctuelle supposée plus libre que la sexualité humaine entravée par les interdits. On se prend à rêver d'une sexualité brute, de relations inconditionnelles sans les médiations compliquées du langage et des fantasmes. On ne se rend pas compte que les instincts animaux, ça n'est que la répétition infinie d'un même schéma comportemental et que ça n'aura jamais la richesse et la polymorphie des pulsions humaines.


Répulsion parce qu'il y a tout de même bien une césure profonde entre l'homme et l'animal. Il est important de rappeler cela aujourd'hui à l'heure où l'on cherche de plus en plus à effacer cette frontière. Vous ne parviendrez à me convaincre du contraire que lorsque vous m'aurez présenté un animal poète ou artiste. L'animal, c'est, incontestablement, la nuit de la conscience, la vie réduite à l'immédiateté. A nos cauchemars sont souvent associées des figures d'animaux : reptiles, rongeurs, grands carnivores qui nous dévorent.La terreur de la nuit animale !

Toutes les cultures se sont construites sur ce rapport ambigu à l'animal. Il y a même parfois un véritable retour de "refoulé". Le tableau que j'ai posté en exergue est ainsi célébrissime en Pologne ("Szal" de Podkowinski), il est presque un symbole national. De même, au Japon, tout le monde connaît et apprécie l'estampe d'Hokusai, "le rêve de la femme du pêcheur". Pourtant, ces deux œuvres sont pour le moins incorrectes, troublantes, et nous remuent aux tréfonds.


Plus trivialement, c'est la grande mode, aujourd'hui, pour une jeune fille russe ou ukrainienne de se faire photographier étreignant, dans ses bras, un animal sauvage, ours, loup, cerf. Quand je fais remarquer que ça fait "sexualité infantile", je me fais presque assassiner.

La sexualité animale, personnellement, elle ne me fait pas du tout rêver.

Mais je reconnais que, quand on est petite fille, on s'intéresse beaucoup aux animaux parce qu'ils sont une  occasion essentielle de s'initier à la sexualité. C'est tout de même l'une des premières sources d'information.

Et puis, les petites filles comprennent bien l'histoire du Petit Chaperon Rouge et elle nous terrorise toutes.

Plus tard, je m'étais prise de passion pour la nouvelle de Prosper Mérimée, "Lokis", qui se situe en Lituanie. C'est l'histoire d'une comtesse balte qui se fait violenter par un ours.


Du côté des hommes, je pense que c'est évidemment différent. Mais j'ai l'impression que leur rapport à l'animalité permet de comprendre certains de leurs comportements. On sait bien en effet que les hommes sont partagés entre deux types de femmes. D'un côté, les femmes classe et distinguées. De l'autre, les femmes moins favorisées, plus "nature" voire moches.

Souvent, contre toute attente, ce sont ces dernières qui tirent leur épingle du jeu et ce sont les trop belles qui sont délaissées.

Peut-être parce que les filles moches savent faire appel à des désirs plus brutaux, plus "animaux". C'est moins compliqué qu'avec une fille distinguée. C'est plus excitant: on peut dominer, donner quelque chose.

Tandis qu'à une fille belle, on ne peut rien donner, on est forcément dominé, vous pouvez juste prendre.

C'est tellement déroutant, angoissant, qu'on comprend que l'on rêve parfois d'une sexualité où on ne se prend pas la tête, d'une "sexualité animale".

Tableaux de Wladislaw PODKOWINSKI (1866-1895), MICHEL-ANGE ("Leda et le cygne": 1530), HOKUSAI ("Le rêve de la femme du pêcheur" 1804), Emil DOEPLER (1855-1922).

Images et affiches de "la Bête", "Metzengerstein (avec Jane Fonda), "Possession", "Lokis". Photographie d'Olga Barantseva.

Curieusement, alors que le genre littéraire est assez restreint (je conseille néanmoins vivement la nouvelle "Lokis" de Mérimée), les films évoquant la thématique de la zoophilie sont légion. Je conseille en particulier:

- "Porcherie" de Pier Paolo Pasolini (1969). Un Pasolini oublié mais très dérangeant
- "La bête" de Walerian Borowczyk (1975). Une esthétique splendide.
- "Metzengerstein" de Roger Vadim (1968)
- "Possession" d'Andrzej Zulawski (1981) avec Isabelle Adjani
- "Max mon amour" de Nagisa Hoshima (1986)

On peut trouver facilement tous ces films sur Internet.

Je recommande enfin un film très récent et sans aucun rapport:  "Marie Stuart, Reine d’Écosse" réalisé par Josie Rourke. C'est splendide et tout à fait d'actualité.

16 commentaires:

Richard a dit…

Les animaux, les humaines et la zoophilie.

Bonsoir Madame Carmilla

Pendant toute cette semaine qui s'est écoulée, je me suis demandé ce que vous étiez en train de nous concocter comme sujet dans cette suite de textes remarquables entre ce qui est permis et interdits, pendant que je m'épuisais à libérer des toits d'étables de leur épaisse couche de neige, parce que nous sommes passés de -25 degrés à +10 et qu'on avait intérêt à se magniez le train afin que certains bâtiments ne s'écroulent pas, sans oublier de creuser des tranchés dans la glace afin d'évacuer l'eau. Ça tombe bien, en tant que cultivateur, j'en connais un bout sur le sujet. J'ai passé une grande parti de ma vie en compagnie des animaux. Être proche de la terre et des animaux nous éloignent des idéologies, des religions, et des politiques bancales ; mais les paysans, les fermiers, et les bouseux trempent dans la réalité incontournable de la vie quotidienne, de la naissance à la mort en passant par la reproduction donc la sexualité.
J'ai su assez tôt que la zoophilie existait. Les révélations confirmaient les rumeurs, certains qui pratiquaient la chose se faisaient prendre en pleine action. Le tabou était lourd, immense, personne n'en parlait sur le perron de l'église lors de la messe dominicale, mais plusieurs savaient, nous gardions la chose pour nous-mêmes. Nous n'en faisions pas tout un plat. Ça faisait partie de la sexualité humaine quoi qu'on en dise tout comme l’homosexualité. C'était très loin du puritanisme institutionnelle de la saint église catholique, de cette hypocrisie imbuvable de cette institution, qui voulait nous dicter nos comportements sexuels. Je n'affirmerais pas que c'est à ce moment vers 14 ans que j'ai perdu la foi, non, je pense que je n'ai jamais eu la foi ; heureusement, mais je dirais que ce fut le fondement solide de mon athéisme. J'y tiens. Toujours pour ceux qui savaient observer, nous voyions les relations que les animaux avaient entre eux. Pourquoi un taureau essayait de grimper un autre taureau ? Le plus spectaculaire se sont deux matous qui s'enculaient, ce qui tenait plus de la férocité que la sexualité proprement dite. Tout cela est parfaitement normal, mais je ne puis m'empêcher de m'interroger : Pourquoi aujourd'hui dans cette société informée, nous faisons tout un plat de ce genre de chose ? Peut-être que cela nous procure ces petits frissons morbides que la société moralisatrice et puritaine essai nous imposer, comme le faisait certaines institutions religieuses jadis.
Richard St-Laurent

Richard a dit…

Sévisses sur les animaux ? C'est quoi un sévisse grave sur un animal ? Ce n'est certainement pas une relation sexuelle.
Je me souviendrai toujours un dimanche après-midi tard en automne où j'avais assisté à la fécondation d'une jument par un lourd étalon. Après la fécondation, l'étalon a mordu le propriétaire du cheval à l'épaule. Le type s'est fâché, il a ramassé un bout de chaîne qu'on se servait pour traîner les billots en forêt. Il a administré une sévère correction à l'étalon à coups de chaîne, que celui-ci s'est couché sur le sol hurlant de douleur. Personne à l'époque n'a accusé ce fermier de cruauté envers les animaux. J'en ai conservé un souvenir impérissable, j'avais tout juste sept ans à l'époque, mais ce fut un fait marquant dans ma vie. Lorsque je vois aujourd'hui qu'un fermier est arrêté, puis condamné parce qu'il a maltraité un animal, je ne puis m'empêcher de penser que cette société est malade.
Certes, il y avait des salauds, des êtres cruels, des types pas sortables ; mais cela aussi faisait parti de la vie, c'était notre réalité. Même, mes grands-pères, qui étaient des hommes à chevaux, qui les élevaient, les soignaient, et les entraînaient pouvaient être très durs. Oui, malgré la passion qu'ils portaient à leurs chevaux, il arrivait qu'ils les battaient. Tous ces humains et particulièrement mes ancêtres ne sont pas devenus des êtres cruels et violents, ils ne battaient pas leur femme, ni leur enfant. Il pouvait arriver qu'on recevait une claque derrière les oreilles, habituellement c'est parce que nous l'avions mérité.
Ceux qui ont lu les Sept Piliers de La Sagesse de T.E. Lawrence, magnifique récit qui relate le travail de cet homme qui avait réussi à unir les tribus arabes contre les Turques à la Première Guerre mondiale relate que la sexualité entre les hommes et les bêtes étaient monnaies courantes et que personne n'en faisait une montagne, pas plus que l'homosexualité de Lawrence qui d'ailleurs ne se privait pas de coucher avec de jeunes bédouins. C'est juste un bref passage dans son immense ouvrage, ce qui nous indique, que cela a toujours existé. Ouvrage en passant que je relis annuellement, c'est l'un de mes livres de chevet, parce qu'il recèle d'histoires géopolitiques étonnantes et renversantes, très mal reçu à l’époque, parce que justement Lawrence ne fermait pas les yeux, même devant la réalité la plus implacable.
Je viens de terminer Le Manoir de Isaac Bashevis Singer. Il écrit vers la fin de cet ouvrage, un petit bout de phrase que Calman Jacoby récite :
« Le matin répands ta semence, et le soir, ne refuse pas d'accorder ton secours ». Isaac Bashevis Singer, Le Manoir, page -581-
Richard St-Laurent

Richard a dit…

Un lapin ou une vache ne peuvent faire de mal à personne, ils sont d'une innocence totale ? Je pense que vous n'avez jamais élevé d'animaux de votre vie, ce n'est pas un reproche, ni une remarque inappropriée, encore moins un reproche. Je vais vous raconter une histoire qui m'est arrivée voilà quinze ans.
C'était à cette époque de l'année, au début d'avril. Le troupeau était encore dans l'étable et c'était la période des vêlages, donc beaucoup de travail et surtout beaucoup de surveillances.
Un soir, après avoir nettoyé l'étable, sorti le fumier, avant de donner le foin aux vaches, voilà qu'une de mes vaches commencent à battre de la queue, à tirer sur sa chaîne, et à ruer, elle commençait ses contractions. J'ai attendu avant de soigner. Elle s'est couchée et en quelques minutes a donné naissance à une belle génisse en forme, qui n'a pas manquée de se lever et d'aller téter. C'est ce que nous surveillions, la première tétée, à cause des anticorps dans le lait de la vache, ce qui procure une certaine immunité chez le veau qui l'absorbe. Après j'ai poussé le veau en face de la mère qu'il l'a nettoyé à grands coups de langue. Puis, j'ai donné le foin, vérifier les auges, fermé les lumières. Les besognes étaient terminées. Je suis revenu vers minuit pour vérifier si tout allait bien et s'il n'y avait pas d'autres vêlages en cours.
Le lendemain matin, je suis arrivé tôt. Le veau était toujours en forme. Après le nettoyage je l'ai poussé vers le pis de la mère. Elle l'a rué violemment. Il y a un vieux truc que je pratiquais. Tu attrapes le nez de la vache, tu y rentre le pouce dans une narine et l'indexe dans l'autre et tu serres le cartilage au milieux du nez. Les bovins sont très sensibles du nez. Habituellement, cela leur fait tellement mal, qu'il se calme. Cette vache ma ruée avec sa patte avant gauche, me faisant glisser sur le pontage humide en ciment, et je me suis retrouvé étendu de tout mon long, c'est alors qu'elle a essayé de m'écraser. Elle a mis sa patte arrière gauche sur ma jambe droite, juste en bas du genou. À toute les fois que cette histoire me revient à l'esprit, je sens encore son sabot qui glisse sur mon os, je pense que c'est la pire douleur que je n'aie jamais subi dans ma vie. J'ai pensé que j'avais la jambe cassée. Je me suis roulé dans la crèche, puis glissé sous l'auge, pour aboutir sur un paquet de foin humide. Fallait que je sache si ma jambe droite était cassée, alors j'ai décidé de me mettre debout. Je me suis agrippé au mur, et je me suis mis sur mes deux jambes, et j'ai su immédiatement que ma jambe malgré la douleur n'était pas cassée. Après je me suis rendu compte, qu'elle aurait pu m'écraser de tout son poids. Cela aurait pu être ma fin. Je ne serais pas là à vous raconter cette histoire. Pas si innocent que cela une vache !
Richard St-Laurent

Richard a dit…

Depuis cet accident, lorsque quelqu'un me demande comment ça va ? Je lui réponds : Vivant, je suis vivant.
N'oubliez pas que les lapins peuvent vous griffer. Ils peuvent vous infliger des blessures douloureuses.
J’ai découvert la raison pour laquelle cette vache avait ruée son veau. Elle avait des gerçures aux trayons.

L'autre sujet que je vais aborder et que vous avez très bien résumé, c'est notre nature profonde nous les hommes entre les femmes belles et distinguées et les autres moins belles, voir moches comme vous le dites. J'ignore pourquoi, mais cette société de consommations fait continuellement l'éloge de la belle femme, nous faisant croire que se sont toutes des bombes sexuelles d'un érotisme torride. Vous l'avez écrit, les moches s'en sortent mieux. Pourquoi ? Parce qu'elles n'ont pas toujours le choix et que lorsqu'elle mettent le grappin sur un type vous pouvez être sûr que le mec, il est ferré. Alors elles feront tout en leur pouvoir pour retenir l'homme de leur vie. C'est toujours un drame pour ces femmes, lorsque leur mari meurt surtout s'il y a trois ou quatre enfants, ou bien, si elle est larguée. Comme on dit localement, elle chauffe le poêle et ne lésine pas sur la vaseline. C'est le genre de femmes qu'on rencontrent dans nos campagnes, pas très jolies, mais fiables, honnêtes, et solides. J'en ai côtoyé plusieurs. Elles travaillaient comme nous tous et certaines étaient aussi fortes et habiles que les hommes. Elles déchargeaient du foin, trayaient des vaches, conduisaient des tracteurs, ramassaient des pierres avant les semailles, fendaient du bois de chauffage à la hache, etc. Ce pays du Québec comme le Canada, ne serait pas ce qu'il est devenu sans ces femmes, nous leurs devons beaucoup. Je suis sûr que c'est la même situation en Ukraine et partout en Russie, cela doit être ainsi en France dans les campagnes. La jolie femme distinguée peut faire battre un cœur, la moche elle fait vivre. Elle va durer dans le temps. L'érotisme ne se résume pas à la beauté physique, c'est beaucoup plus que cela. Il m'arrive souvent lorsque je rencontre de ces couples, je je me demande : qu'est-ce qui les unis ? Leur érotisme comporte quelle charge émotionnelle ? Qu'est-ce qu'ils ou qu'elles trouvent chez l'autre ?
Je suis content que vous ayez touché ce sujet, parce que c'est tellement humain, que cela dans un certain sens rachète ce qu'il y a de moins beau dans nos sociétés. Nous devrions moins nous plaindre, moins parler de sexe pour le pratiquer intensément. C'est ce que font ces femmes et ces hommes.
Bonne nuit pour ce qu'il en reste et merci pour cet autre texte inspirant.
Au crépuscule
Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

On peut s'interroger effectivement sur l'intérêt de chercher à légiférer sur tous les comportements humains. L'argument est de prévenir la violence mais on en génère souvent d'autres formes.

J'ai noté, accessoirement, qu'une Loi récente au Canada interdirait et punirait désormais la zoophilie en tant que telle, ce qui diffère sensiblement de la législation des autres pays occidentaux.

Je conçois bien, par ailleurs, qu'une vache, ne serait-ce qu'en raison de sa taille, puisse être un animal dangereux. Il faut, par principe, être toujours prudent avec un animal qui vendra toujours chèrement sa peau. Cela étant, je constate que 4,8 millions bovins sont, chaque année, exterminés en France. On ne dispose d'aucune statistique sur les humains et autres animaux exterminés par des vaches mais je pense que c'est proche de zéro.

Quant aux lapins, j'ai eu un gros (8 kilos) lapin de compagnie lorsque j'étais petite. Je n'ai jamais été griffée ni mordue mais il est vrai que j'évitais de le porter (ils prennent peur). C'est un animal très doux, absolument pas agressif et dont l'intelligence est comparable à celle d'un chat.

Quant aux femmes russes et ukrainiennes, je ne suis pas sûre qu'elles soient comme les Canadiennes ou les Françaises, même à la campagne. La nouvelle génération post-soviétique est vraiment très différente.

J'espère enfin que vous avez apprécié "Le manoir" de Singer.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour madame Carmilla et merci pour vos commentaires.

J'ignorais que le Gouvernement Canadien avait légiféré sur la zoophilie. Il y a bien des projets de lois qui sont adoptés et dont nous n'entendons jamais parler. Le Canada est un pays multiculturel et multireligieux, sans compté dans certaines régions très puritain. Dans ces milieux isolés vivent des communautés ultra-religieuse où l'on pratique la polygamie, dans d'autres des rythmes que nous pensions derrière nous. Les députés ici peuvent soumette en chambre ce qu'on appel des Bill Privé. Souvent ils sont adoptés rapidement, ne font pas l'objet de débats passionnés et les commettants n'en entendent jamais parler.
Seulement dans ma famille, mon grand-père été blessé à plusieurs reprises par des chevaux, mon père à eu une jambe fracturé par une ruade de cheval, a reçu un coup de corne d'une vache dans les côtes, j'ai été piétiné par cette vache dont je vous ai raconté l'histoire. J'ai connu des cultivateurs qui ont été tué par leur taureau. Nous sommes loin de l'idée idyllique littéraire de la campagne. Le milieu agricole est un milieu aussi dangereux, que les mines et la foresterie. Toute fois, à mes yeux ils demeurent des milieux passionnants.
Un lapin de 8 kilos c'est énorme. J’élevais une bonne centaines de lapins par année dans mon clapier, en plus des poules pour mes œufs, mes poulets de grain, des fois des oies, et souvent quelques cochons. S'ajoutais à cela mes vastes jardins. À ce chapitre c'était l’autarcie. Il me reste encore les jardins. Pour moi aussi c'est une question de liberté, j'aime la ferme, mais j'aime aussi les voyages. Je me souviens que les lapins il fallait les saisir derrière les oreilles sur le dos afin de ne pas se faire griffer.
J'aime bien aller vadrouiller dans le fond des campagnes afin de constater comment les gens d'un pays vivent. C'est quoi le quotidien des tous ces quidams ? Fréquemment, ces gens, sont traditionalistes et conservateurs, sans même connaître ces mots. Il faut visiter ces petites communautés canadiennes isolées aussi discrètement que possible et d'ouvrir l’œil. Quelle différence par rapport au Québec ! C'est loin d'être monolithique le Canada, qu'on se le dise.
Singer en fait référence dans Le manoir et encore plus dans Le domaine surtout lorsque Clara fait son voyage de Varsovie à New York. L'intégration, et vous en savez quelque chose, vous qui avez voyagé, que ces adaptations ne sont pas toujours faciles. Il me reste une cinquantaine de page à lire dans Le domaine, et je vais revenir sur cette lecture pour vous faire part de mes observations et réflexions.
Bonne fin de journée
Richard St-Laurent

Richard a dit…

Bonsoir madame Carmilla !
Je viens de terminer la lecture : Le domaine après celle du manoir par Isaac Beshevis Singer.
Il est impossible de demander à un lecteur, s'il a aimé ou détesté un ouvrage dans ce genre. C'est un peu plus compliqué que cela. Par contre, je reconnais votre finesse d'esprit, lorsque vous utilisez le mot : apprécié. Dans ces deux ouvrages, nous pouvons apprécier la finesse des développements philosophiques et détester quelques personnages odieux. En cette période insidieuse où souffle un petit vent crasseux autour du monde et particulièrement en provenance d'Europe, qui sent l'antisémitisme, nous aurions tout intérêt à lire le genre d'ouvrage que je viens de citer. Ceux qui se livrent à ce genre d'activité malsaine pourrait y ajouter l'ouvrage de Delphine Horvilleur, Réflexions sur la question antisémite. Pourquoi cette haine envers le juifs ? Parce que ceux qui se livrent à cette haine sont jaloux pas des avoirs des Juifs, mais de leurs pensées.
Je n’élaborerai pas d'avantage et je vais vous laisser quelques citations provenant de rabbins tiré de cette saga juive fin XIXième siècle en Pologne. Je reviendrai quotidiennement vous laisser un petit billet.

« Le judaïsme est fondé sur un compromis entre le corps et l'âme, et non sur une guerre entre les deux. »

Isaac Bashevis Singer
Le domaine
Page -483-

J'ai été séduit par cette pensée.

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Bonjour madame Carmilla

Chez les juifs d'après ce que j'en sais, le divorce a toujours été reconnu comme une solution. Un homme pouvait répudier sa femme et une femme son mari. Loin d'en faire un plat comme les catholiques romains ou les musulmans, lorsqu'une relation ne fonctionnaient plus, le divorce devenait une solution. Dans ce récit proche de la réalité, Singer en a fait de larges et intenses descriptions de ces unions qui éclataient et souvent pire encore, lorsqu'ils s'agissaient d'union inter-religieuses. Nous n'avons pas l'exclusivité des souffrances sexuelles et nous n'avons pas inventé l'infidélité. Bien sûr le tout, dans des conditions matériels déplorables teintées de pauvreté et de violence. Lorsque je lis de telles histoires, je me demande : De quoi avons-nous à nous plaindre ?
Le manoir et plus encore Le domaine trace un portrait très réaliste des conditions sociales de la Pologne entre 1850 et 1900.
Je vous laisse sur cette citation.

« Les femmes haïssent tous les hommes qu'elles ne réussissent pas à dominer et à asservir, et c'est ce qu'elles appellent l'amour. »
Isaac Bashevis Singer
Le domaine
Page -462-

Par la dernière journée officiel de l'hiver par -17 ce matin sous ciel clair.

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Je vous prie de m'excuser si j'ai pu laisser entendre que les animaux d'élevage n'étaient pas dangereux. Quand j'étais adolescente, je m'étais intéressée à la profession de vétérinaire et les contacts que j'avais pris m'avaient vite permis de comprendre que ce n'était vraiment pas pour moi. C'est un métier dangereux et beaucoup de vétérinaires subissent de graves blessures: coups de pied de chevaux, morsures diverses, griffures...

Mon lapin était en fait un "géant des Flandres". C'est un lapin très paisible, particulièrement adapté pour être animal de compagnie. Avoir un lapin a, en fait, été très formateur pour moi. On ne peut, en effet, rien tirer d'un lapin si on ne fait pas preuve vis-à-vis de lui de la plus grande bienveillance. C'est un animal excessivement émotif et se mettre en colère, crier, le frapper est totalement contre-productif. Si le lapin prend peur, c'est fini, définitivement fini ! Ce n'est vraiment pas l'animal que l'on peut élever à la trique. S'il est au contraire en confiance avec vous et qu'il bénéficie d'un environnement calme et sûr, vous pourrez l'éduquer très facilement et il sera disposé à vous obéir en tout. Enfin, on n'attrape jamais, en effet, un lapin par les oreilles.

Je n'ignore pas que le Canada est un pays extraordinairement multi-culturel qui rassemble tous les pays et toutes les communautés du monde. La France l'est aussi mais, peut-être, d'une manière différente: il faut adhérer à son modèle républicain et ses valeurs culturelles.

S'agissant de Singer, je ne sais pas si la question de l'antisémitisme est centrale dans son œuvre. Il restitue, avec une grande vérité, un monde écroulé, disparu il y a très peu de temps (avec la 2nde guerre mondiale). La Pologne ( qui s'étendait sur un territoire complétement différent, recouvrant largement l'Ukraine) était alors le pays le plus multi-culturel d'Europe. Il y avait certes deux communautés (de tailles équivalentes dans les milieux urbains) qui se côtoyaient mais ne communiquaient pas (ni langue, ni système juridique communs). L'antisémitisme était bien sûr présent mais il faut rappeler, d'une part, que son expression était autrefois infiniment plus forte qu'aujourd'hui, d'autre part, que les Juifs se sont massivement installés en Pologne parce qu'ils y disposaient des conditions d'accueil les plus favorables.

Il y a aujourd'hui en France un antisémitisme sournois. Pourtant les Juifs sont peu nombreux et "discrets". Je n'ose imaginer ce qui se passerait s'ils étaient 20 millions (la proportion d'autrefois en Pologne) et pour la plupart des hassidims ne parlant pas le français.

Je crois que ce que l'on hait surtout chez les Juifs, c'est leur volonté d'excellence et leur réussite. La haine des élites, c'est très répandu, notamment en France (on est convaincus qui si on a réussi, c'est, uniquement, par chance et non en raison de son talent).

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour madame Carmilla.
Effectivement lors de votre premier commentaire, c'est l'impression que j'ai eu que les animaux ne sont pas dangereux, au contraire dans certaines circonstances, ils peuvent vous infliger des blessures graves où vous tuer.
La photo de la femme qui est blottie entre les pattes d'un ours, laisse à penser pour un citadin que l'on peut se livrer à ce genre de caresses. Je sais que c'était pour illustré vos propos, mais la réalité est tout autre. En plus il ressemble à un grizzli, armé je ne le laisserai pas approcher à moins de 30 mètres de moi. Mais habituellement les ours ne veulent rien avoir à faire avec les hommes, généralement ils fuient. Par contre si vous n'avez pas nettoyé votre table à pique-nique, vous pourriez bien recevoir une visite inopportune.
Julien était vétérinaire, c'était un brave type, un homme avant tout, un humain magnifique, qui plus est un ami. J'étais content lorsqu'il venait à la ferme pour soigner les animaux. Doublé d'une érudition incroyable nous avons eu des discussions passionnantes derrière les vaches, les deux pieds dans le fumier. Vulgarisateur hors pair il partageait sa science généreusement, ne s'imposait jamais, le tout dans une modestie qui l'honorait, lorsqu'il disait : Je ne sais pas. Nous avons pratiqué ensemble quelques césariennes sur des vaches. Je me faisais un plaisir de l'aider et surtout d'observer.
Le fait que vous avez évoqué vouloir vous engager en médecine vétérinaire, m'a rappelé le nom de julien qui m'est revenu à l'esprit. Il a cessé de pratiquer et nous nous sommes perdus de vue malheureusement. C'était un esprit universel qui dépassait son domaine. Aucun sujet nous était étranger, et si nous ne savions pas, nous cherchions. Voilà un autre moment fabuleux de ma vie. Je vous souhaite un jour de rencontrer un type comme Julien, ces genres de personnages vous apporte beaucoup.

Bonne fin de journée en plénitude.

Merci de vos commentaires

Richard St-Laurent

Richard a dit…

Bonjour Madame Carmilla
l'atmosphère ne semblait pas très chaleureuse entre les Polonais, les Russes et les Juifs en Pologne, j'y ai senti un antisémitisme notoire. Remarquez bien que c'est une impression toute personnelle que j'ai eu en lisant ces livres. Eux ignoraient ce qui se préparait, ils ne connaissaient pas le futur. Nous, nous savons, parce que nous connaissons l'histoire. Ils ne pouvaient pas s'imaginer que leurs descendants allaient mourir dans des camps d'exterminations.

Le personnage de Calman Jacoby que Singer dresse en témoin de cette époque mérite qu'on s'y attarde. Un homme modeste et humble, qui à force de persévérances devient riche. Il ne cesse de s'interroger sur lui-même, sur le beau et le laid, sur le bon et le mauvais. Sa religion devient sa culture. Elle l'aide à traverser les épreuves.

Je viens de terminer la lecture de : Je t'aime, je te trompe d'Esther Perel, et je n'ai pu m'empêcher de faire le lien avec Calman lorsque Clara le roule dans la farine. Comment un homme aussi clairvoyant se laissent tromper ainsi ? Comment peut-il éprouvez des sentiments pour cette femme plus jeune que lui, qui se comporte comme une garce ?

Ce qui m'a rappelé un citation tiré du livre : Le domaine.

« Nos grands-pères et nos grands-mères n'étaient pas anxieux, et pourtant eux aussi connaissaient des tourments et des sévices. Le mal pour eux n'était pas une maladie mais une tentation ».
Isaac Bashevis Singer
Le domaine
Page -462-

Étrangement, il m'a fallut un peu de temps pour m'adapter à l'écriture de Singer. J'y reviendrai...

Merci Carmilla, Tokarczkuk et Oulitskaïa m'auront conduit loin. Mystérieusement, je désire encore aller plus loin.

Bonne nuit et dormez bien

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Veuillez d'abord m'excuser ! J'ai perdu votre dernier message (22 mars 14 H 15) sans doute à la suite d'une mauvaise manipulation de ma part. Réexpédiez le moi si vous l'avez conservé.

Ce qui est sûr, c'est que Polonais et Russes se détestent cordialement. C'est d'abord le fruit de l'histoire, le résultat de la rivalité entre les deux nations slaves dominantes.

Jusqu'à la fin du 18 ème siècle, la Pologne était le pays dominant sur un territoire important (de la Baltique à la Mer Noire)et beaucoup plus à l'Est (donc beaucoup plus proche de Moscou et de Kiev) que celui d'aujourd'hui.

Les Russes ruminent sans cesse que les Polonais ont conquis Moscou en 1610. Ils ont également été battus par la toute jeune armée polonaise en 1920.

Quant aux Polonais, ils ont tout de même été soumis au joug russe jusqu'à une époque récente et cela pendant près de deux siècles (depuis le premier partage de la Pologne en 1772). Ils ont donc de bonnes raisons de détester les Russes qu'ils perçoivent comme des barbares alors qu'eux se sentent Européens. Mon sentiment personnel est que les Polonais et les Russes sont à la fois très proches (la langue, la cuisine) et très lointains (la culture, la démocratie).

Si vous continuez de vous intéresser à Singer, je signale que l'on vient d'éditer en poche toutes ses nouvelles. Je conseille en particulier le recueil intitulé: "Le beau Monsieur de Cracovie". C'est très facile à lire et addictif.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Bonjour Mustapha la Quiche,

Je vous prie de m'excuser, j'ai perdu votre message d'hier(vendredi 22 mars) sans doute à l'issue d'une mauvaise manipulation.

Je ne voulais bien sûr pas vous censurer.

J'ai quand même retenu que vous proposiez la transgression suprême : manger un panda après l'avoir violenté.

Ça n'est pas mal ! Mais outre la difficulté pratique ( ces espèces de nounours sont sans doute plus violents qu'on ne le croit), je pense qu'on peut trouver encore mieux.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Ultime précision Richard,

La photo de la jeune fille avec un ours a été réalisée par une photographe russe Olga Barantseva dont vous pouvez consulter le site.

Comme je l'ai précisé, on aime bien en Ukraine et en Russie se faire photographier avec des animaux sauvages et improbables: des aigles, des chouettes, des loups, des ours... Personnellement, je n'aime pas du tout.

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Dame Carmilla

Petit matin sous un ciel gris en attente d'une tempête, neige, pluie, vent violent. Ce dernier élément fut caractéristique de l'hiver que nous avons vécu et qui n'est pas totalement terminé. Dans nos quotidiens, il me semble que le vent est revenu souvent nous visiter.

Pour revenir à Singer, son étrange écriture, nous rappelle que c'est un écrivain qui écrit sur des propos modernes avec un style ancien. J'y ai retrouvé avec plaisir des archaïsmes. Il s'en dégage un parfum du XIXième siècle. Dans certaines pages j'avais l'impression de lire du Balzac ou du Hugo.

Qui aujourd'hui connaît le mot alêne, ou tranchet ? Ce sont des mots qui désignent des outils de cordonnerie, que j'ai eu le plaisir de retrouver dans Le manoir.

Je possède une alêne, que mon Grand-père avait fabriqué de ses mains, manche sculpté au couteau. Ce n'est pas une œuvre d'art. Je la conserve précieusement et il m'arrive de l'utiliser.

L'autre point sur lequel je veux revenir, c'est son style d'écriture, qui personnellement, a exigé de moi une adaptation, parce que je l'ai trouvé syncopé, si l'on compare à nos auteurs modernes surtout ceux après la Deuxième Guerre mondiale, force nous est de constater qu'il y a eu une évolution fulgurante. Passer de Singer à Chiche ou Perel, au niveau du style, c'est un dépaysement assuré. Ce qui n'est pas pour me déplaire.

« Ne t'impose rien par la force. Mieux faire peu de bien avec bonne volonté que beaucoup sous la contrainte ».
Isaac Bashevis Singer
Le domaine
Page -483-

Vous comprenez Carmilla les raisons pour les quelles j'aime l'esprit Juif !

Ce texte se termine par un moment de grâce. Les outardes sont revenus. Ils viennent d'amerrir à l'eau libre, sous ma fenêtre.
En toutes sortes d'esprits, cordialement vôtre.
Richard St-Laurent

Richard a dit…

Bonjour madame Carmilla !
Vous savez maintenant que tous les textes que je vous ai envoyés sont dans mes dossiers, ainsi j'ai pu vous le renvoyer.
Les ordinateurs, il faut s'en méfier. Ils nous rendent paresseux et inattentif.
Par contre étant un grand fautif dans tous les domaines de ma vie, je sympathise avec ceux, innombrable, qui commettent des fautes. Nos erreurs sont aussi des marques de progrès. Ce qui me rassure, c'est que je ne suis pas seul à faire des erreurs. L'humaine a encore sa place. À cet égard, les accidents des Boeing 737 sont révélateurs.

En plus des outardes et des canards d'hier, j'ai reçu un livre que j'attendais depuis longtemps : Les Pérégrins par Olga Tokarczuk. Je n'ai pas pu résister. Je suis demeuré à la bibliothèque et j'en ai lu 50 pages d'un coup. Quelle écriture ! Je comprends maintenant pourquoi il m'a fallu m'adapter à l'écriture de Singer, c'est que dans mon esprit je m'attendais à quelques choses d'équivalent voir de plus fort. Ces deux auteurs ne sont pas comparables.

« On ne peut pas être plus sage que le destin. »
Isaac Bashevis Singer
Le domaine
Page -13-

Cette citation m'est revenu à l'esprit, lorsque j'ai lu de Tokarczkuk :

« Debout sur la digue, les yeux rivés sur le courant tumultueux de l'Oder, j'ai pris conscience que ce qui est en mouvement – en dépit de ses dangers – sera toujours meilleur que ce qui est immobile, et que le changement sera toujours quelque chose de plus noble que l'invariance ; car ce qui stagne est voué inévitablement à la dégénérescence, à la décomposition et en fin de compte au néant, alors que tout ce qui évolue saura durer, et même éternellement. »
Olga Tokarczuk
Les Pérégrins
Page -10-

Le destin et l'évolution se tiennent par la main.
Tout ce que je souhaite, c'est qu'ils nous serons favorables.
Que le destin et l'évolution vous soit favorables Carmilla.
Richard St-Laurent