samedi 2 novembre 2019

Galicie Occidentale


J'ai pris l'habitude de me rendre à Lviv via la Pologne et Cracovie et non via Kiev. En fait, c'est le plus court chemin et ça me permet, surtout, de parcourir d'Ouest en Est, par le train, cette grande région de la Galicie, divisée depuis la guerre. Malgré la séparation, il subsiste une profonde unité architecturale, culturelle, artistique, culinaire.


Pour être simple, je dirai qu'en Galicie, on boit d'abord du café et on mange du chocolat. C'est ce qui nous différencie des Russes qui avaient essayé de nous imposer leur thé infect et ignorent l'institution des cafés. Ça va peut-être vous faire rigoler, parce que vous n'en avez probablement jamais entendu parler, mais, à mon retour en France, je ramène toujours plein de café et de chocolat de Lviv ainsi que des spécialités Wedel de Pologne. C'est plus que correct à mon humble avis.


Surtout, la vie sociale et urbaine s'organise autour de ces cafés qui sont toujours des lieux raffinés et élégants. Rien à voir avec les cafés français dont j''ai déjà dit à quel point je les trouvais moches et "popus", des repaires de machos et de poivrots. Il faut vraiment aimer se faire rabrouer, dévaloriser,  pour les fréquenter. En Galicie, on  y rencontre, à l'inverse, plein de jeunes femmes qui y viennent pour rêver,  pour échanger, ou simplement pour lire. Ils bordent les grandes places et les malls sur les quels ils offrent un poste d'observation privilégié. Le  grand plaisir, c'est de contempler les passants et les clients, d'imaginer leur vie, de critiquer leur look. On peut s'y adonner paisiblement à la passion "de voir et d'être vu". C'est toute une culture qui s'exprime ici.


J'ai donc beaucoup traîné dans les cafés mais pas que...
Cracovie, ça commence en effet à devenir Prague, envahie de touristes anxieusement regroupés autour d'un fanion coloré de ralliement; de "misérables" touristes stressés, harcelés, sermonnés, de bon matin et toute la journée, par leur guide parce qu'"on n'est pas dans les temps", qu'"on aura du mal à faire le programme". Le tourisme comme apprentissage, entretien, de la docilité et de la compliance, c'est ça la modernité.


Je voulais surtout traverser de multiples petites villes, sans doute moins évocatrices, aux noms en apparence imprononçables : Rzeszów, Przemyśl, Biłgoraj, Zamość, Szczebrzeszyn. Il y a un côté affolant, mystérieux, de la langue polonaise dont les autochtones eux-mêmes se réjouissent. On vous teste régulièrement sur votre capacité à énoncer correctement la phrase célèbre qui serait la plus impossible de toutes les langues : "W Szczebrzeszynie chrząszcz brzmi w trzcinie". Même moi, bien sûr, je ne m'en sors pas. C'est comme s'il fallait être initié, porteur d'un secret impossible à divulguer : la fierté polonaise, l'esprit aristocratique, se construit, en partie, là-dessus.


Là-bas, dans toutes ces villes du Sud-Est, il n'y a évidemment plus personne, plus de touristes; et puis ça m'a permis d'abord de mesurer le "miracle économique" polonais qui ne touche pas seulement les villes (comme en Russie) mais aussi, et surtout, les campagnes. Toutes ces petites villes, autrefois sordides, sont maintenant bien équipées, propres comme des sous neufs avec des façades entièrement ravalées. Presque des villages allemands, vivants et animés en plus.




Je ne peux m'empêcher de comparer avec les piteux villages russes ou ukrainiens : traversés par des chaussées boueuses et pleines de trous, bordés de bâtiments en ruines, parcourus au hasard par une foule d'animaux (des chiens errants, des oies, des canards et même des vaches). L'Europe continue de s'arrêter à la frontière des Tsars.




 Pas étonnant qu'à la gare-frontière, à Przemyśl, des trains ukrainiens déversent, par centaines, toutes les deux heures, des "travailleurs importés". J'ai cru être submergée par le flot quand j'ai voulu accéder à mon quai de départ.


Il y aurait plus de 2 millions d'Ukrainiens en Pologne, parfois regroupés dans des villes entières. C'est considérable mais je n'ai jamais entendu que ça posait problème. C'est un peu le retour de l'Histoire : si le mouvement se poursuit, on va ressusciter la Grande Pologne, pas si ancienne que ça (juste antérieure à Napoléon), qui intégrait largement l'Ukraine.


Parcourir la Galicie et surtout sa campagne, c'est aussi rencontrer les quelques vestiges d'un monde disparu, enseveli : celui des Juifs de Galicie qui représentaient, avant la 2nde Guerre mondiale, une proportion considérable de la population. Dans leur immense majorité, ils vivaient pauvrement, de petits métiers : tailleurs, fourreurs, cabaretiers, aubergistes... Et puis, ils n'étaient pas trop aimés des autres Juifs ashkénazes, ceux de Lituanie notamment, qui les considéraient comme un peu arriérés, irrationnels et peu éduqués. On critiquait leur apparence trop voyante : leur grande barbe, leur caftan, leur grand chapeau (le schtreimel).


Il faut dire que c'est en Galicie qu'a pris naissance (à Berditchev précisément) et s'est développé le mouvement ultra-orthodoxe des hassidims, teinté de mysticisme et refusant la modernité. Pourtant, ce sont ces Juifs "arriérés" de Galicie qui ont donné naissance à une multitude de grands penseurs et écrivains : Sigmund Freud, Samuel Agnon, Joseph Roth, Isaac Bashevis Singer, Georges Charpak.



Ce qui m'a impressionnée, c'est qu'un peu partout maintenant, en Pologne, on entretient soigneusement les cimetières juifs et on reconstruit, rénove, les anciennes synagogues qui deviennent des centres culturels. A Biłgoraj (la ville natale de l'écrivain prix Nobel Isaac Bashevis Singer), on s'est même lancés dans un projet bizarre : la construction d'un village Singer. Ça peut faire réfléchir les Français qui se plaisent à entretenir l'image de Polonais antisémites.


En réponse à cette accusation, je constate les choses suivantes : de belles synagogues, il n'y en a quasiment pas en France (sauf celle d'Hector Guimard dans le Marais) et on n'en construit pas de nouvelles. Quant aux rares monuments juifs existants, ils sont sous protection policière constante. Surtout, les Juifs français que je connais font bien attention à ne pas afficher leur religion de peur d'être agressés, verbalement ou physiquement (à l'inverse en Pologne, il devient même aujourd'hui presque chic de se trouver une ascendance juive et l'exhiber n'est pas un problème). Le contexte français ne se prête donc vraiment pas, à mes yeux, à donner aux autres des leçons d'antisémitisme.



Il reste qu'on parle moins aujourd'hui de la Pologne pour son supposé anti-sémitisme que parce qu'elle serait devenue l'un des bastions de l'extrême-droite européenne, l'alliée de Salvini, Le Pen, Orban,etc...


C'est vrai que le pays est divisé, coupé en deux. Le partage se fait entre l'Est (plus pauvre) et l'Ouest, entre la ville et la campagne, les jeunes et les vieux. Je l'ai constaté en traversant la Pologne en pleine période d'élections à la Diète.


Je n'osais trop m'immiscer mais il était facile de deviner le vote de mes interlocuteurs. Je n'entendais souvent que des horreurs sur Kaczyński,  le chef du parti P.I.S. ("Prawo i Sprawiedliwość", Droit et Justice) qui a finalement triomphé aux élections.


Mais Kaczyński, c'est tout de même une personnalité énigmatique, un homme politique à nul autre pareil en Europe. A cause de son nom, on le surnomme le "canard" (kaczor). Il n'en a cure, il est indifférent à l'opinion publique, il vit dans ses convictions dont les deux principales sont la religion catholique et la patrie.  Dans ce cadre, il entretient le culte de la mémoire de son frère jumeau, ancien Président de la République décédé tragiquement, en 2010, dans un accident d'avion au-dessus de Smolensk. Ça peut vous sembler anecdotique mais 10 ans après, il n'y a pas une seule journée, en Pologne, durant laquelle on n'entende parler de Smolensk. C'est à vous rendre fou !
 

C'est aussi un ascète qui vit très modestement. On ne lui connaît que des passions simples : son chat (célébrissime en Pologne), la pêche et la cueillette des champignons. A un tel personnage, il ne faut bien sûr pas parler du droit des minorités LGBT, du mariage homosexuel, de l'avortement, de la PMA pour tous. Ce ne sont pour lui que des élucubrations d'intellectuels traduisant la décadence de l'Occident. Curieusement cependant, la prostitution individuelle, la pornographie et la gestation pour autrui (GPA) sont autorisées en Pologne.


Cela pour dire qu'il est bien différent des crapules de l'extrême-droite européenne (Le Pen, Salvini) aux quelles il refuse d'ailleurs de s'associer. 


C'est plutôt un personnage désuet, ringard (mais ni idiot, ni inculte), pétri de certitudes et dont les soucis principaux sont le rapprochement de l’Église et de l’État, la préservation de l'ordre moral et la promotion de l'Europe des Nations.


Il n'est donc pas un fasciste (du reste, la véritable extrême-droite est marginale en Pologne). Mais il n'est pas non plus un démocrate. Le plus bizarre pour moi était de regarder la Télévision Publique Polonaise (heureusement, il existe aussi des chaînes privées plus ou moins contrôlées). On y est abreuvés de religion. Pas seulement des messes mais une multitude de débats, politiques, sociaux, au cours des quels on sollicite systématiquement l'avis d'un religieux. J'ai presque eu l'impression d'être revenue en Iran.


Mais on peut penser que Kaczyński et le P.I.S., parvenus au pouvoir en 2015 contre toute attente, sont encore là pour longtemps, même si c'est au désespoir de la classe éduquée. 

La Pologne, c'est devenu un cas d'école du populisme et elle interroge tous les pays d'Europe.


Parce que quoi qu'on pense de Kaczyński, il faut bien reconnaître qu'il affiche un bilan économique impressionnant sur ces quatre dernières années: l'économie tourne à plein, le chômage a été éradiqué (il y a même une telle pénurie de main d’œuvre qu'on crée des agences de seniors), le niveau de vie des classes pauvres et des familles a été sensiblement revalorisé, les jeunes vont être exemptés d'impôt sur le revenu, l'âge de la retraite a été abaissé.
   

Finalement Kaczyński a réalisé ce que réclament tous les mouvements et partis populistes de droite et de gauche en Europe. C'est exactement cela que veulent par exemple Mélenchon et Le Pen ainsi qu'une immense partie de l'opinion publique française. Kaczyński peut à bon droit évoquer le bonheur de vivre aujourd'hui en Pologne : un pays paisible et moralement sain qui a réduit les inégalités et fait place aux classes pauvres et déshéritées.


C'est cela qui est troublant, effrayant : un populisme qui réussit ! Qu'importe alors si les électeurs sont achetés et si toute cette généreuse politique sociale est financée on ne sait comment, avec de la monnaie de singe. Au risque bien sûr d'entraîner, bientôt, un brutal retournement de tendance.


Mais aux yeux de l'opinion, c'est de toute manière: "Après nous le Déluge !"


Et en France même, on souscrirait volontiers à pareille politique et on serait prêts à signer aveuglément pour un programme à la "Kaczyński" avec du "social" à fond, la fin du chômage et un bonheur entre Français. Il y a une ambiguïté énorme de toutes les politiques "sociales".


La force du populisme, c'est qu'il parvient en fait à susciter l'adhésion émotionnelle des masses en s'appuyant commodément sur la haine des élites. On permet ainsi au peuple de rêver en mangeant le plat froid de la vengeance.


Cela permet d'excuser, oublier, toutes les entorses à la démocratie et la répression des mœurs.


A contrario, malheureusement, la démocratie, c'est beaucoup plus difficile et exigeant. Il faut en particulier s'interdire les rêves parce qu'un jour, les réalités économiques refont inévitablement surface.


Photos de Carmilla Le Golem dans plusieurs villes du Sud-Est de la Pologne : Cracovie, Rzeszów, Przemyśl, Biłgoraj, Zamość, Szczebrzeszyn, Jarosław, Leżajsk .

Peut-être vous rendrez-vous un jour à Cracovie. Voici donc mes petites adresses. 

* 1 Hôtel :

- "Hotel Francuski": construit en 1912, il vous plongera dans l'ambiance de l'ancienne Autriche-Hongrie

* 3 cafés (visites obligatoires) :

- "Jama Michalika": ancien lieu de réunion, au début du 20 ème siècle, des artistes Art Nouveau ("Mloda Polska")

- "HEVRE". Il vient d'ouvrir dans une ancienne synagogue (dans le quartier de Kazimierz).  Cela fait polémique mais il faut reconnaître que c'est magnifique.

- "E. WEDEL Chocolate Lounge". C'est sur le Rynek. Allez surtout jusqu'au fond du café dans l'immense salle.

* 3 restaurants :

- "ARIEL" et "Klezmer Hoïs", tous deux dans le quartier de Kazimierz. Une résurrection de la Galicie juive. Ne pas tenir compte des critiques idiotes des médias français qui parlent de récupération commerciale. C'est géré par des intellectuels et des artistes.

- "Restauracja Galicyjska"

* Enfin, pour acheter de l'Art contemporain polonais à prix raisonnables (ça peut même être un excellent investissement) :

- Galeria Coco Art Lampert : rue Florianska
- Galeria Kersten : dans la même rue Florianska


8 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonjour Carmilla,

Merci pour cette belle lecture de voyage. La photo prise avec le soleil voilé dans les arbres, ce qui ressemble à un manoir et les tas de feuilles mortes est très réussie. Elle m’évoque tout ce qu’est le début de l’automne : l’inversion des sens. Je prends bonne note pour les références que vous proposez. Je me demande si on peut camper mais je vais me renseigner.

On connaît mal la Galicie et la Pologne en France. Ou on n’en connait que ce que furent les Polonais ici. Je ne savais pas (mais je l’avais déjà lu chez vous) l’importance de l’élégance et de l’esprit aristocratique qui transparait très bien dans certaines photos. Le café y est une institution, ce qui paraît bien en faire un critère de l’européanité (il n’y a tout de même pas que des bars à ploucs en France). A Arras sur la Grand Place, on peut également s’adonner à la parade de l’échange réciproque et courtois de regards. A Bruges et à Ostende aussi, près du casino. Il suffit juste de bien choisir son endroit et chacun trouve instinctivement le lieu qui sied à ce qu’il est ou à ce qu’il veut être.

On est donc bien loin de cette Pologne, ici. La Pologne se sont des milliers de mineurs, des rues entières de corons, des sportifs (les Kopa, Stablinski, et tant d’autres). Et puis des bals populaires à Noeux les mines où nous nous rendions avec mes parents quand j’étais tout petit. On y mangeait une soupe de choux et de pommes de terre pour trois francs six sous avant de se lancer dans une farandole au son d’une troupe d’accordéons de diverses taille. Les organisateurs étaient costumés, fiers de leurs racines, et tellement ouverts ! C’était en quelque sorte une fête familiale élargie aux inconnus. Un esprit à part, mais qui relève peut-être davantage de la Pologne des campagnes.

Je ne pense pas que Kaczynski soit un personnage désuet. Je le trouve au contraire très postmoderne. Il incarne le rejet de tout ce que les sociétés ordo-libérales apparemment progressistes ont produit comme médiocrité (en particulier intellectuelle). Je ne dis pas que je partage, mais c’est pour moi le sens de l’histoire.

Bien à vous.

Alban

Carmilla Le Golem a dit…

Carmilla Le Golem a dit...

Merci Alban,

Curieusement, la Pologne est peut-être moins connue aujourd'hui des Français qu'elle ne l'était au 19 ème siècle où elle bénéficiait d'un fort soutien populaire (notamment Hugo) dans sa lutte pour la reconquête de son indépendance contre la Russie. Mais dans la pratique, et comme cela se répétera souvent (notamment en 1939), la France n'a rien fait.

Il est vrai aussi que le territoire de la Pologne a été très mouvant. On plaint les Palestiniens mais que dire de la Pologne dont le vrai territoire se situait jusqu'aux portes de Kiev ?

Les Polonais sont généralement des gens fiers mais ils demeurent très conviviaux. Si vous allez là-bas, vous serez sans doute surpris de la facilité des contacts et de la gentillesse de la population. Vous pouvez facilement engager la conversation avec un(e) inconnu(e); ça ne sera pas mal interprété comme en France où la barrière public-privé est énorme. Prendre le train est par exemple instructif : vous êtes tout de suite convié à raconter votre vie.

Je connais un peu Lens et les villes avoisinantes. Effectivement, il existe des quartiers polonais mais c'est très curieux: ce sont les survivances d'un monde révolu, celui d'avant-guerre.

Kopa et Stablinski, je ne connaissais pas. Pour moi, c'est Michel Jazy qui a été l'un des plus grands coureurs à pied du monde. Ses performances (3mn 36s sur 1 500 m et 13 mn 27s sur 5 000 m) sont encore d'actualité si l'on rappelle qu'il courait sur cendrée et non sur tartan (la différence est énorme).

Je n'ai aucune information sur le camping en Pologne. Le principal obstacle, c'est tout de même le climat. Il y a également plein de formules de logements bon marché, notamment chez l'habitant. C'est très facile, les choses sont moins réglementées qu'en France.

Bien sûr que j'exagère quand j'évoque les cafés français. Mais je suis comme ça: très abrupte. Les nuances, la modération, je n'aime pas car j'ai l'impression que je n'arrive pas à me faire comprendre. Cela dit, les cafés en France sont quand même, dans leur immense majorité, des institutions viriles. Une femme seule s'y fait rapidement remarquer. Si, de plus, elle vient régulièrement, elle suscite des opinions négatives. Il y a en France un mouvement féministe que je soutiens et qui réclame le simple droit des femmes à fréquenter les cafés.

Enfin, est-ce que notre époque est médiocre ? Je n'en suis pas sûre. C'est vrai qu'il y a peut-être un conformisme grandissant (mais est-il plus grand qu'il y a 20 ou 30 ans ?). J'ai surtout l'impression que les gens sont de plus en plus frustrés et haineux (alors même que les conditions de vie s'égalisent, contrairement à ce qu'affirme l'opinion commune). La vision freudienne du "Malaise dans la civilisation" m'apparaît de plus en plus d'actualité.


Bien à vous,

Carmilla

Anonyme a dit…

Bonjour Carmilla,

merci pour votre réponse.

La France n'a rien fait en 1939 parce qu'on lui prête une puissance politico-militaire qu'elle a perdue en 1815. Il n'aura d'ailleurs pas fallu plus d'une semaine à l'armée allemande pour pulvériser ses pauvres défenses. Alors qu'aurait-elle pu faire si loin à l'Est?

Vous avez rendu la Pologne attrayante, comme beaucoup d'autres pays (sauf la Russie) et je m'y rendrai, c'est écrit. C'est cette convivialité, que je relatais à propos de mon expérience d'enfant, qui attire. Sans doute est-ce aussi ce qui a permis à la communauté polonaise de réussir aussi bien son intégration.

Les performances de Jazy sont en effet bluffantes. Elles le sont d'autant plus que les courses internationales actuelles se jouent souvent autour de 3'35 ou 13'30, alors que les coureurs portent des chaussures avec des semelles composées de lames de carbone et de bulles d'air injectées, ce qui donne au contact de la piste un effet ressort. Auraient-ils battu Jazy, Zatopek ou Clarke avec leurs godasses ?

Kopa était un footballeur élu meilleur joueur européen et membre du 11 de légende du plus grand club du monde : le Real Madrid. Quant à Stablinski, c'est un des rares cyclistes à faire partie du club des + de 100 victoires professionnelles. Il a été champion du monde. Ce qui est étonnant, c'est que ces trois "Polonais" dominaient le sport français (et mondial) à la même époque.

A propos des cafés, je comprends vos propos de femme. En tant qu'homme, j'aime m'y rendre pour lire dans le brouhaha. Donc effectivement, je suis assez peu concerné par les échanges de séduction virile.

"Médiocre" est sûrement exagéré. Mais il n'en demeure pas moins que l'accès à la connaissance généralisée via les réseaux sociaux a nivelé les niveaux de savoir et que la pensée n'en sort pas grandie. J'avais écrit à ce sujet à propos de la PMA et du port du voile. Quand j'avais 10 ans il y a presque quarante ans, la société était plus paisible en France qu'elle ne l'est aujourd'hui. C'est une évidence pour moi, et je partage votre constat sur la frustration et la haine, mais je me garderais bien d'en faire une généralité. Je n'ai pas ressenti cette défiance systémique en Flandres.

Bon dimanche (que je vais passer avec "Néandertal mon frère").
Bien à vous.

Alban

Ariane a dit…

Quel plaisir d'arriver chez vous le dimanche matin !
Merci Carmilla pour ces très jolies photos qui nous font vraiment voyager et non pas parcourir un catalogue d'agence de tourisme.
Et comme cette jeune polonaise est belle !

Je suis bien d'accord avec vous en ce qui concerne les cafés français. Il est très difficile pour une femme d'y venir souvent sans qu'on pense immédiatement que vous êtes en chasse ou qu'on est une pauvre laissée-pour-compte...
J'ai fini par cesser d'y aller, ou alors dans le Marais, où on nous laisse à peu près tranquille et où les serveurs nous accueillent souvent avec le sourire.

Une époque où la haine, l'envie, sont souvent de mise, alors oui je suis d'accord !
Je suis peut-être un peu vieux jeu, mais il me semble qu'avant on se contentait de regarder les gens en les admirant ou ...pas, mais on ne les neviait pas de cette façon.
Bon dimanche à vous chère Carmilla !

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Alban,

Ça demeure tout de même une grande interrogation de l'Histoire. Pourquoi la France a-t-elle choisi de ne pas bouger lorsque Hitler a attaqué la Pologne (à la quelle elle était liée par des accords)? La période de septembre à novembre 1939 était pourtant idéale puisque toutes les divisions allemandes étaient mobilisées à l'Est. La France aurait pu rentrer en territoire allemand à cette époque et son armée pouvait facilement rivaliser. On ne sait pas si elle aurait gagné mais elle n'aurait du moins pas perdu l'honneur. Une même coupable inertie se retrouve aujourd'hui dans les affaires ukrainienne et syrienne.

La Russie ? C'est tout de même le pays où je passe la plus inaperçue. On ne m'y demande jamais d'où je viens. Je déteste simplement l'actuelle politique agressive de la Russie qui vise tout de même, rappelons-le, à la décomposition de l'Europe. Et puis en Russie, il n'y a pas de milieu : les gens sont soit odieux (surtout dans l'espace public), soit charmants. Cela dit, j'estime qu'il faut absolument avoir visité dans sa vie Moscou et Saint-Pétersbourg. Le problème, c'est que le voyage individuel demeure cher et compliqué. Et puis, c'est sûrement difficile et pas très agréable si on n'est pas russophone.

On peut penser en effet que Michel Jazy, sur une piste et avec un équipement modernes, rivaliserait aujourd'hui avec les meilleurs coureurs mondiaux.

La France plus paisible, il y a 40 ans ? Je ne peux bien sûr me prononcer mais j'ai quand même l'impression qu'il y a, en Europe, une pacification générale des mœurs et un recul de la violence. Paris aurait-il élu un maire homosexuel puis une femme il y a 40 ans ? Les cris racistes dans les stades de football n'étaient-ils pas jugés normaux ? Sans parler de la mortalité routière et de l'alcoolisme, symptômes d'une violence réprimée. Quant à la criminalité elle-même, elle a beaucoup baissé. Je terminerai en précisant que le niveau global culturel et d'éducation de l'ensemble de la population a sensiblement progressé, même si on colporte dans les médias l'idée contraire.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Ariane,

Grand plaisir de vous lire également.

La photo, j'essaie de m'appliquer mais j'avoue que j'ai du mal. Parfois, j'ai envie de cesser d'en faire.

Sur la fréquentation des cafés par des femmes, il faut bien constater que ça ne pose aucun problème dans les pays d'Europe du Nord et d'Europe Centrale. En France, en revanche, une femme seule, en dehors de quelques cafés huppés, s'attire tout de suite des regards désobligeants surtout si elle vient régulièrement. Il faudrait vraiment que les mentalités évoluent sur ce point parce qu'il n'y a pas beaucoup de lieux où l'on peut se reposer dans une ville.

J'ai déjà exprimé que ce qui me gênait beaucoup en France, c'étaient la jalousie et la rancœur sociale. On ne supporte pas que le voisin possède trois sous de plus que soi-même. C'est au point qu'on n'ose pas dire quelle est sa profession ni, surtout, sa rémunération. Je n'ai pourtant pas l'impression que la France soit un pays spécialement inégalitaire (les comparaisons internationales montrent même le contraire). En fait, j'ai tendance à penser que la "passion égalitaire" française est surtout le masque de la haine et de la frustration. C'est inquiétant.

Bien à vous,

Carmilla

Nuages a dit…

C'est un fait très peu connu, mais il y a eu un début d'offensive française en Allemagne, dans la Sarre, en septembre 1939.
Les forces françaises ont pénétré en Allemagne sur 8 km et occupé plusieurs villages, sans rencontrer de résistance. Puis, mystérieusement (?), l'ordre de retraite a été donné.

Un article de Wikipédia très clair à ce sujet : https://fr.wikipedia.org/wiki/Offensive_de_la_Sarre

Carmilla Le Golem a dit…

Effectivement Nuages.

J'ai moi-même vu des images, à la télévision française, de cette offensive en septembre dernier. L'armée française est rentrée "comme dans du beurre" et a commencé à s'installer dans quelques villages de la Sarre.

Et puis en effet, ils se sont retirés au bout de quelques jours.

C'est vraiment rageant.

Carmilla