samedi 3 juillet 2021

De la comédie humaine : des piscines et des parcs

Enfin ! Après une bonne année d'inactivité, j'ai retrouvé ma piscine du 8 ème. Après tout ce temps, je me demandais même si je savais encore nager. Mais oui ! La mémoire du corps, c'est vraiment étonnant. Mais il n'y a pas non plus de miracle : mes défauts, je les ai aussi conservés. Je continue donc d'enrager de ne pas avoir une technique parfaite en crawl. Quant à la brasse, je ne cherche même pas à la pratiquer, non seulement parce que je suis nulle mais surtout parce que je trouve ça complétement inesthétique. Imiter une grenouille quand on est une jeune femme, quel repoussoir !

 

 C'est ce qui m'énerve dans la natation : la technique, qu'on appelle la "glisse", est au moins aussi importante que les capacités physiques. Même en m'entraînant comme une dingue, je ne suis pas sûre d'y arriver et je sais déjà que, jamais, je ne serai une championne. L'apparence, les attitudes physiques, on croit que c'est ce qu'il y a de plus simple, de plus évident. On découvre, en fait, en pratiquant la natation, en éprouvant la difficulté à "se corriger", que celui/celle dont on connaît le moins bien l'apparence et les postures, c'est finalement soi-même. Et ça ne vaut pas seulement pour la natation : avoir un regard "objectif" sur son propre corps, c'est presque impossible.

Mais en fait, je ne cherche pas seulement à faire du sport. La piscine, c'est un peu comme le jogging au Parc Monceau. Quand on devient un/une habitué(e), c'est surtout l'occasion de faire une foule de rencontres. Des rencontres que je ne ferais jamais si je me cantonnais à ma sphère professionnelle et à son cercle restreint. Il faut donc bien le dire, il règne, dans les activités sportives mixtes, une ambiance de compétition et de séduction sexuelle, de drague généralisée. Et il est vrai qu'on fait d'abord très attention à son look : son maillot, son bonnet, ses lunettes, ou bien son t-shirt et ses chaussures, tous minutieusement choisis. Et après, on n'arrête pas de s'observer, de se mater.


 C'est très primaire mais ça ne me déplaît pas. Ça me repose presque, en fait, d'être jugée sur ma seule apparence physique et non plus sur des critères embrouillés, professionnels et intellectuels. Une certaine égalité se trouve restaurée. J'aime bien exhiber ma silhouette, ma foulée, ma "glisse". Je suis bêtement fière de mon nouveau maillot, de mes nouvelles Nike. Les sportifs prennent bien soin de la dissimuler mais ils sont, en fait, d'une insupportable arrogance. 

 Mais c'est vrai aussi qu'en ce qui me concerne, j'ai tendance à "réfrigérer" ceux qui voudraient me concurrencer. Difficile de courir ou de nager avec moi, j'ai trop l'esprit de compétition, il faut toujours que je me distingue.

 

Alors, pour compenser, pour m'attirer quand même les sympathies, je joue à "l'idiote". Je me fais passer pour une quelconque "Natacha russe" et ça rassure. Mais c'est alors que la piscine ou le Parc se révèlent des lieux faussement transparents et que la rivalité symbolique y est, au contraire, exacerbée ou plutôt qu'elle y donne, sans frein, libre cours.

A me faire passer pour une "cruche", j'ai alors droit à tous les mythomanes de la place qui s'empressent de faire du rentre-dedans à une fille slave, supposée forcément vénale et facile.

Au début, j'étais quand même impressionnée, je me sentais une véritable "nunuche" et une "pauvresse". Je n'avais affaire qu'à de brillants hommes d'affaires avec des adresses prestigieuses, des acteurs célèbres, des producteurs de cinéma, de grands sportifs. Il y en a même un, récemment, qui a prétendu être un grand financier. A celui là, je n'ai pu m'empêcher de demander son avis sur la MMT (Modern Monetary Theory ou théorie monétaire moderne, nouvel attrape-gogos américain, soutiens, notamment, de Bernie Sanders).

 Mais les baudruches se dégonflent bien vite. Rapidement, tous ces gens exceptionnels se révèlent n'être que de pauvres types ravagés par la solitude et la précarité économique.

 Sans doute, les lieux fréquentés, bourgeois et pleins de fric, encouragent-ils ces comportements aberrants. Et puis, au bord d'une piscine, dans un parc, tout peut "passer" beaucoup plus facilement, le risque d'être contredit est minime. Il y est vraiment facile de s'y inventer une autre vie beaucoup plus chatoyante.

 Je crois vraiment que la mythomanie est devenue l'une des propensions les plus généralisées de nos sociétés. Cela s'explique aisément tant les frustrations sont exacerbées dans les milieux urbains.

Cette minable comédie humaine est évidemment très triste, presque inquiétante.

Mais personnellement, je ne condamne personne. Tous mes mythomanes de la piscine ou du Parc, en fait je les aime bien. Je me garderais bien de les démasquer. Les "déclassés" m'inspirent toujours compassion. Je préfère les laisser donner libre cours à leurs rêves. Je les écoute même avec attention parce qu'à leur manière ils disent beaucoup de choses sur notre société.

 Je rentre ainsi dans leur jeu et leur sympathie mais est-ce grave ? Est-ce que, telle un thérapeute, je ne leur apporte pas un peu de réconfort et de satisfaction narcissique ? Est-ce qu'on n'aime pas tous profondément, aussi peu recommandables soient-ils, les personnages de la comédie humaine de Balzac ?

Les mythomanes énoncent peut-être une vérité de nos sociétés. Pour vivre, "nous avons besoin d'illusions. Et la fiction est peut-être la seule solution pour échapper à la solitude".


 Tableaux principalement de David HOCKNEY (né en 1937) chez qui le thème de la piscine est récurrent voire obsessionnel. Œuvres également de Lita Albuquerque, Joan Mitchell, Hiroshie Nagai, Caroline Walker. Et en introduction, deux images du film "A Bigger Splash" (2015) de Luca Guadagnino avec Tilda Swinton..

Aux amoureux de la natation, mais pas seulement, je recommande également :

- Chantal THOMAS : "Souvenirs de la marée basse"

- Colombe SCHNECK : "La tendresse du crawl"

- Charles SPRAWSON : "Héros et nageurs". Une merveille, un ouvrage érudit qui passionnera  même les phobiques à l'eau. Nager, c'est tout de même s'échapper un peu. Ça vient de sortir en poche (Flammarion).

11 commentaires:

KOGAN a dit…

Bonjour Carmilla

Vous devriez essayer le dos crawlé , c'est très bon pour le maintien musculaire de la colonne vertébrale ,et beaucoup plus tonifiant, à contrario la brasse coulée creuse la cambrure et fait rapprocher les vertèbres, surtout si les disques sont usés...(pour mon cas) et c'est plutôt une nage de mamie permanentée avec maillot une pièce rose à volants.

Afin de poursuivre de façon taquine, vous êtes "à côté de vos pompes" avec vos nouvelles NIKE ...si belles soient-elles , tout le monde en porte et ne vous différenciez pas des autres...

il n'y a pas non plus de grand rabais en cette période de solde sur cette marque.

Personnellement j'ai opté pour du Japonais que je ne connaissait pas "TOGOSHI" superbe.

Un an sans activité , je n'ai franchement pas connu ce phénomène mais en augmentant mon CA de presque 20% par rapport à l'année précédente et sans avoir bénéficié des aides de l'état. Les particuliers restés chez eux sans pouvoir dépenser dans le loisir sont mes bienfaiteurs.

J'avoue qu'il s'est produit un véritable miracle, et que je ne réalise toujours pas, contrairement à d'autres qui vont malheureusement disparaître définitivement.

Finalement je n'aime pas trop la piscine, mais j'ai une nette préférence pour l'eau de mer en pays Breton vers Pléneuf val André et ses criques sauvages (en dehors des périodes de
vacances et de la marmaille).

Bien à vous
Jeff

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Jeff,

Ravie d'apprendre que vous avez traversé cette période avec succès et surtout en évitant la maladie.

La natation, j'étais, à vrai dire, complétement nulle jusqu'à une époque récente. J'ai alors décidé, il y a environ 3 ans, de me mettre à niveau. Mais la brasse, je n'aime vraiment pas et ça n'est effectivement pas bon pour le dos. De plus, c'est une erreur de penser que la technique en est simple parce que c'est la nage la plus pratiquée. En réalité, 98 % des nageurs ont une technique déplorable en brasse.

Le dos crawlé, je ne sais pas faire. D'abord, c'est moins rapide que le crawl et ensuite, c'est presque inenvisageable dans ma piscine parisienne souvent bondée (c'est évidemment encore pire pour le "papillon"). Je me contente donc du crawl mais je suis très appliquée et très persévérante (j'essaie de nager 4 à 5 heures par semaine). Compte tenu de mon point de départ lamentable, j'estime que j'ai aujourd'hui atteint un niveau honorable mais néanmoins bien éloigné de mon niveau en course à pied.

Il est vrai qu'il faut être très motivé pour fréquenter les piscines parisiennes. Elles sont tellement surpeuplées qu'éclatent de nombreux incidents entre les nageurs. Mais la natation dans la Manche, voire sur les côtes bretonnes, c'est vraiment trop froid pour moi. J'ai l'impression que c'est pire que dans la Mer Baltique. Quant aux maillots de bains féminins, vous avez du remarquer que les codes viennent de s'inverser. Ce sont maintenant les mamies qui portent des bikinis tandis que les jeunes femmes ont des maillots une pièce.

C'est vrai qu'avoir des Nike, ce n'est absolument pas original, voire un peu plouc. Ce sont néanmoins les seules qui, depuis toujours, me conviennent. C'est d'abord un problème de forme de la chaussure et de son propre axe de course. Nike produit ainsi beaucoup de modèles pour "supinateurs" (axe courbe) qui conviennent généralement aux coureurs rapides. La plupart des autres marques fabriquent surtout des modèles pour "pronateurs" (axe droit). Mais j'avoue que je ne connais pas les "Togoshi".

Bien à vous,

Carmilla

KOGAN a dit…

Bonjour Carmilla

Merci pour l'explication technique de NIKE. C'est en effet important mais je ne pratique pas le RUN... mon poids n'est plus compatible avec la légèreté de ma foulée d'antan...à cet effet je ne m'habille plus qu'en noir tout le temps...je gagne 10kgs.

Je prends note également pour les maillots de bain... Pour nous les hommes pas de mise en valeur de ce côté-là ...Il faut être juste bien foutu.

Bonne semaine à vous.

Jeff

Nuages a dit…

Ça fait des années que je n'ai plus nagé (je pratique uniquement la brasse, parfois sur le dos). Il est vrai que je n'aime pas les piscines, je préfère les lacs, les rivières, voire la mer, et les occasions ne se sont pas présentées.

Peut-être que je ferais une visite à la piscine en cas de canicule, mais les piscines risquent d'être surpeuplées à ce moment-là.

Je m'interroge un peu sur l'absence de commentaires de Richard. J'espère qu'il va bien. J'apprécie toujours ses (longs) commentaires, pleins de vie et d'expériences personnelles.

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Jeff,

Je n'utilise surtout pas de Nike pour marcher (quelle horreur !) mais uniquement pour courir.

Mais il est vrai que le poids est un facteur essentiel dans la course de fond. 50 kilos pour les femmes et 60 kilos pour les hommes, ce sont des plafonds, à quelques exceptions près, pour faire de la compétition. C'est la grande différence avec la natation dans la quelle le surpoids n'est pas un handicap.

Mais si vous voulez maigrir (c'est essentiel pour votre santé et votre espérance de vie), rien de tel que le jogging. A condition d'être très régulier et très persévérant : 5 fois par semaine durant, au moins, une demi-heure, à train modéré. En sachant que l'adaptation cardio-vasculaire est lente et progressive avec des paliers de 3 mois. C'est très éprouvant au début mais on arrive à trouver une certaine aisance au bout de 6 mois.

Veuillez excuser ces conseils mais la course de fond est, probablement, le seul domaine dans le quel j'ai un peu de talent et de compétence.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Nuages,

Je crois que l'amour de l'eau n'a rien de naturel. Pour devenir bon nageur, il faut vaincre beaucoup d'obstacles psychologiques.

J'étais comme vous, je ne pratiquais presque pas en arguant d'obstacles matériels. Finalement, j'étais nulle.

Et puis, j'ai appris que pour parvenir à bien nager, il ne fallait surtout pas se battre contre l'eau mais s'appuyer sur elle, s'en faire une alliée. C'est ce que l'on appelle "trouver la glisse" et ça change tout : on arrive alors à nager presque sans effort.

Cela dit, je répugne à nager dans les rivières, les lacs et même en mer profonde : est-ce qu'il n'y a pas plein de sales bêtes en dessous ? Quant aux piscines, c'est vrai que, dans les grandes villes, il faut être très motivé.

S'agissant de Richard, je suis, comme vous, très inquiète. La localisation géographique par pays, sur Google, des consultations de mon blog m'indique qu'il n'est, visiblement, plus présent. Je crains donc un grave accident mais je n'ai aucun moyen de m'informer car je ne dispose d'aucune adresse électronique.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

J'ai omis un dernier point, Jeff,

S'agissant des maillots de bain masculins, ils sont, eux aussi, soumis à des codes. Aujourd'hui, on est dans la tenue décente (de même que pour les footballeurs dont on nous parle beaucoup en ce moment).

Ne vous avisez pas ainsi de ressortir d'anciens slips de bain que vous portiez, peut-être, il y a une ou deux décennies. Vous passeriez tout de suite pour un affreux pervers.

Bien à vous,

Carmilla

KOGAN a dit…

Merci pour ces conseils de Pro chère CARMILLA mais pour le RUN c'est en fini pour moi dans ce domaine.
Avec une carcasse d'ancien Judoka je n'arriverais même plus à finir 5 kms...
Pour le maillot de bain homme je n'ai pas conservé ceux de mon père style après guerre avec poche Kangourou...Et de toute façon le pervers, on le voit tout de suite à son regard avant qu'il ne se dénude non?

Bien à vous

Jeff

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Jeff,

Personne, même avec des dispositions exceptionnelles, n'est capable de courir 5 kms sans entraînement (ou alors l'arrivée se fait en agonisant).

Pour ce qui vous concerne, j'imagine que vous n'ambitionnez pas la compétition. Mais l'essentiel, c'est votre bonne forme cardiaque. Pour cela, il n'est jamais trop tard.

A cette fin, vous devez cultiver votre endurance (qualité distincte et presque contraire de la résistance). Pour cela, vous devez d'abord vous astreindre à trottiner, très régulièrement (si possible 5 fois par semaine), pendant au moins trois mois, à petite vitesse (7/8 kms/heure), sans jamais vous essouffler ni, surtout, vous mettre dans le rouge.

C'est évidemment lancinant et ennuyeux mais c'est le paradoxe de l'entraînement en course à pied : c'est en s'entraînant lentement qu'on parvient à courir longtemps et vite. Si vous ne respectez pas cette règle de base, vous n'y arriverez pas.

Au bout de trois mois environ, vous parviendrez à allonger les distances. Au bout de 6 mois, vous vous sentirez mieux sur le plan cardiaque et vous pourrez aller plus vite. Au bout d'un an, vous commencerez à atteindre votre potentiel. Vous pourrez alors envisager quelques pointes de vitesse (de la résistance) mais jamais trop : c'est l'endurance et non la résistance qui forge les capacités cardiaques.

Il faut donc surtout être très patient mais ça vaut le coup. Je donne peut-être l'impression d'être une horrible casse-pieds et une donneuse de leçons mais j'ai surtout le souci d'apporter quelque chose aux autres en communiquant mon expérience. Je pense avoir, du moins à ce sujet, une légitimité, car j'ai fait de la compétition à bon niveau. De toute façon, rien ne vous oblige à suivre mes (bons) conseils,

Bien à vous,

Carmilla

KOGAN a dit…

Merci Carmilla

Même mon cardiologue ne m'a jamais parlé de cette façon...on parle de tout ensemble sauf du coeur, mais il m'a rassuré le mois dernier lors de la visite annuelle en me disant que je n'allais pas mourir tout de suite! en fixant l'écran sur mon échographie, un sourire au coin des lèvres...Il venait pour sa part de sortir du Covid, en ayant perdu 25kgs...

Il s'en est sorti.

Celà me donne envie d'essayer votre programme, en douceur comme vous le préconisez.

C'est encourageant, et le poids va diminuer aussi en douceur.
Je mets ces paramètres sur l'appli.

Bien à vous

Jeff

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Jeff,

Je ne veux pas apparaître prétentieuse mais l'entraînement cardiaque, entraîneurs et concurrent(e)s) m'ont appris en quoi ça consistait.

La grande erreur, c'est de vouloir aller vite, se défoncer et courir comme un dératé, surtout quand on débute. Il faut savoir être patient, courir lentement, voire très lentement (même les grands champions pratiquent ainsi), quitte à passer pour nul aux yeux des autres. Petit à petit, vous parviendrez à allonger les distances.

Je vous garantis l'efficacité de la méthode, sous réserve que vous soyez persévérant. Il faut que vous puissiez vous entrainer au moins 3 fois par semaine et, si possible, 5 fois. Ne s'entraîner qu'une fois, comme le font les joggeurs du dimanche, ça n'apporte rien et c'est même éventuellement nocif (si on va trop vite).

Durant les premiers mois, la performance, n'y pensez surtout pas. Mais je vous assure que vous verrez diminuer votre poids, votre tension artérielle et votre rythme cardiaque.

Bien à vous,

Carmilla