samedi 28 octobre 2023

La vie à la campagne

 
Régulièrement (toutes les 6 semaines environ), nous nous réunissons entre collègues financiers de l'ensemble de la France. On est un groupe de 30 environ.

On discutaille alors d'évolution de la réglementation, de problèmes de gestion ou de montages financiers. Ca dure un ou deux jours.

Evidemment, c'est un peu particulier et il y aurait beaucoup à dire sur la petite assemblée que l'on constitue. D'abord, on est tous un peu déguisés, on s'affiche comme des personnes "chics" avec un dress code rigoureux. 

Surtout, il y a une espèce de solidarité absolue entre nous qui se conforte par le carnet d'adresses. On est "du même monde" et il y a ainsi des "spécialistes" qui connaissent par cœur les annuaires des différentes promotions et les parcours de chacun. C'est cet esprit de corps si souvent dénoncé et qui serait "très français". 


Je comprends que, vu de l'extérieur, ça ne peut que susciter la critique acerbe et le ricanement: on serait évidemment des gens complétement hors-sol et forcément odieux. 


Sauf que les choses ne se présentent pas tout à fait comme ça. J'avoue n'avoir jamais rencontré un imbécile parmi mes collègues. Evidemment, la fibre sociale n'est pas leur fort mais est-ce que ça peut être un principe directeur de la gestion d'une entreprise ? On apprend, c'est sûr, à devenir, sinon insensibles, du moins impassibles: l'intérêt général n'est pas la somme des intérêts particuliers. Et puis chacun joue un rôle, tant les employeurs que les salariés. Personne n'est absolument sincère. Mais ça ne saurait bien sûr justifier la brutalité ou l'arrogance.


C'est vrai aussi que, parmi mes collègues, chacun est absolument satisfait, voire imbu, de lui-même. La modestie n'est pas la première qualité mais il est évident que chacun est aussi absolument passionné par son boulot. Ca semble même être le centre exclusif de leur vie et de leurs intérêts. Impossible d'avoir une conversation en dehors des finances. 


Je veille à ne pas être à ce point monocentrée, à ne pas me laisser entièrement absorber. Parce qu'on s'expose alors à beaucoup de désillusions. Le monde du travail demeure, en effet, impitoyable et, qui que l'on soit, on a vite fait de se faire éjecter. Je dois bien ainsi constater qu'à chaque nouvelle réunion, un ou deux anciens collègues ont disparu, remplacés par un(e) autre, plus jeune, plus dynamique. Bientôt, je vais faire figure d'ancienne.


Mais au total, j'aime quand même bien ces réunions et séminaires. J'y scrute, étudie, les attitudes, le comportement de mes collègues. C'est un lieu privilégié d'observation de la grande "comédie humaine".


Surtout, ces réunions sont organisées dans un lieu à chaque fois différent en France. En règle générale, il s'agit de grandes villes et je me contente de faire l'aller et retour sans rien visiter.


Mais grande innovation, il y a quinze jours. On a organisé le séminaire dans un endroit perdu: un petit village de la Mayenne pour s'y mettre au vert.


La Mayenne ? En quoi cette zone nébuleuse peut-elle bien intéresser des financiers ?


Même en France, à peu près personne ne sait où ça se situe (c'est à environ 250 kms, plein Ouest, de Paris). Quant à en citer les villes principales, (il n'y en a que trois d'un plus 10 000 habitants: Laval, Château-Gontier, Mayenne), on préfère généralement donner sa langue au chat.


Il ne viendrait à l'idée de personne d'aller passer des vacances en Mayenne et il est vrai qu'on n'y trouve aucune ville, aucun monument, aucun site naturel absolument remarquables.  C'est joli, agréable, voire mignon, mais de là à déplacer les foules...


La Mayenne, c'est donc un peu le territoire inconnu, celui du "nulle part", du "nowhere". Mais les quelques "locaux" que j'ai interrogés à ce sujet m'ont tout de suite répondu: "Mais c'est tant mieux qu'on ne nous connaisse pas. Il vaut mieux que ça reste ainsi".


La Mayenne, ça passe, en fait, pour un département absolument paysan, absolument plouc. Et les Mayennais eux-mêmes aiment en rajouter en la matière. Non sans humour, ils précisent ainsi qu'ils sont l'un des départements les moins peuplés de France (307 000 habitants) et qu'il y a presque  deux fois plus de vaches (580 000) et de cochons (463 000) que d'habitants. C'est, paraît-il, une situation absolument unique. 


Et quand on sillonne les routes en voiture, c'est vrai que c'est un plaisir. Le grand calme, aucun embouteillage, aucune difficulté pour stationner. Rien que des petits villages charmants à traverser. Les paysages, c'est du bocage avec pleins d'arbres, de haies et de forêts. Ultra bucolique !


On n'imagine vraiment pas qu'on soit très actif et dynamique en Mayenne. On croit plutôt qu'on y végète sur un lopin familial. Et pourtant, c'est l'exact contraire ! 

C'est en fait l'un des départements les plus riches et les plus industrieux de France. 


Un véritable "miracle économique" si l'on songe qu'à l'orée des années 80, le territoire était considéré comme plutôt pauvre et condamné au sous-développement. Tous les vents semblaient contraires.


Aujourd'hui, les économistes et les financiers s'intéressent à la Mayenne et essaient de comprendre son "décollage" en toute discrétion. Il y a eu quelques publications à ce sujet qui parlent même d'une "petite Hollande".


C'est vrai d'abord que l'agriculture y est devenue très "pointue" au point de donner naissance au géant mondial de l'industrie agro-alimentaire: Lactalis. Tous les Européens (jusqu'à Moscou, hélas !) consomment, chaque semaine, des produits Lactalis (notamment numéro 1 mondial du lait).


Il s'agit, étonnamment,  d'une entreprise familiale partie de presque zéro aux lendemains de la guerre. Son PDG, Emmanuel Besnier, est bien un Mayennais: on ne sait à peu près rien sur lui, il est à peine connu même en France. Il se targue de vivre modestement déclarant que, de toute manière, on ne trouve aucune marque de luxe à Laval.


Il est quand même la 6ème fortune de France mais il occuperait un rang encore meilleur s'il acceptait que son entreprise soit cotée en Bourse (une "bizarrerie" à ce niveau).


Mais la Mayenne, ça ne se limite pas à une agriculture très technicisée. C'est, en fait, l'industrie qui est le premier secteur pourvoyeur d'emplois (39 %, soit un taux très supérieur à la moyenne nationale) avec une flopée de petites entreprises développées dans chaque village. On connaît bien ainsi à Paris les "Toiles de Mayenne" et on a peut-être remarqué que la plupart de nos bouquins sont imprimés à Mayenne. Ca s'étend même aujourd'hui aux nouvelles technologies et aux recherches sur la réalité virtuelle (middleVR).


Je ne veux pas trop développer là-dessus au risque de vous ennuyer profondément mais la Mayenne se révèle, au total, un petit morceau de France presque idyllique: pas de chômage et un taux d'emploi, notamment féminin, élevé; des possibilités de logement abondantes et à prix modéré; une quasi absence de conflits et problèmes sociaux (la crise des banlieues, on ne connaît guère). Politiquement, on est d'ailleurs très modérés (plutôt centristes) et Mélenchon et Le Pen n'y ont pas bonne presse. En bref, la Mayenne, c'est un havre de paix et de quiétude. 


Au total, on est très loin, en Mayenne, de cette France du bruit, de la fureur et du désespoir que présentent sans cesse les médias. D'où l'interrogation : comment un groupe de ploucs, une sorte de grand village gaulois, a-t-il pu construire tout seul dans son coin, sans rien demander à l'Etat et en dépit d'obstacles majeurs (une absence de grandes écoles), une société paisible et harmonieuse ? Et on sent, effectivement, que les gens semblent assez satisfaits. Dans les cafés, les restaurants, j'écoutais les conversations: je n'entendais personne râler ou se plaindre comme c'est toujours le cas à Paris.

 
Ca m'a fait pas mal réfléchir et ça a ressuscité une question qui, personnellement, me passionne. C'est aussi la question centrale de toute l'économie: comment un pays, une région, un territoire, deviennent-ils riches ?


On a trop tendance à croire, notamment en France, que ça repose largement sur les matières premières, le tourisme et, surtout, l'intervention publique. On est convaincus que l'Etat est principal créateur de richesses et on lui reproche sans cesse de ne pas suffisamment activer la Pompe à Phynances.  


Malheureusement, ça ne se passe pas du tout comme ça et la richesse des nations, elle repose, avant tout, sur l'esprit d'entreprise et la productivité du travail. Le tourisme et les matières premières, ça peut, de ce point de vue, se révéler plutôt un handicap qu'un atout.


La Mayenne en est une démonstration et c'est, en cela, que son expérience, m'a beaucoup intéressée: est-ce qu'elle ne pourrait pas inspirer l'Ukraine ?


J'ai donc prolongé, un petit peu, mon séjour et me suis baladée dans la campagne. J'avais heureusement emporté mon appareil photo.


Quand on vient de Paris, c'est évidemment fascinant d'être plongé dans ce grand bain de verdure, ce bocage que l'on a trop longtemps jugé archaïque, contraire aux exigences d'une agriculture productive. Et puis, ces petits villages proprets, soigneusement peints, dont on s'efforce de préserver le caractère local, authentique, le plus possible éloigné des "horreurs" de la modernité... C'est évidemment un peu artificiel, un peu "vieille France", mais c'est aussi apaisant, réconfortant. Et enfin tous ces châteaux perdus qui cherchent souvent preneurs pour une bouchée de pain, ça m'a donné de multiples occasions de rêver de devenir châtelaine.


Mais je me suis quand même aussi posé plein de questions. Est-ce que je ne fais pas le chemin inverse d'une Bécassine, celui d'une Parisienne prise d'admiration subite pour le naturel, la simplicité et l'authenticité de la province ? C'est vraiment condescendant et puis je me vois quand même bien mal vivre en Mayenne. A petites doses et si on a une famille, c'est peut-être parfait. Mais moi ? Je suis sûre que le bruit, la fureur et l'agitation parisienne me manqueraient vite. J'adore aussi les foules, celles des grands boulevards, des cafés bondés et même du métro.


Parce qu'il faut bien dire que l'animation des villages en Mayenne, elle est voisine de zéro. Elle est limitée aux cafés et aux restaurants (excellents au demeurant). Le reste, tous les petits commerces divers des centres-villes, ils ont disparu. Ils se sont déportés dans les grands centres commerciaux avec leur bimbeloterie standardisée et leurs produits alimentaires tous les mêmes et plus ou moins insipides. Si on veut faire des courses, on est donc priés de prendre son véhicule. Si on n'en a pas, je ne sais pas comment on peut survivre. 


Et enfin, je n'ai pas complétement compris la clé du développement économique de la Mayenne. L'esprit d'entreprise, Max Weber (dans son "Ethique protestante et l'esprit du capitalisme") a beaucoup brodé là-dessus. Mais ses thèses ont été largement réfutées. Je n'y crois pas non plus et je ne sais pas ce que ça signifie. En Mayenne, on y a ainsi visiblement l'amour du travail bien fait et on se sentirait déshonoré si le client n'était pas satisfait. Mais on sait aussi que cette "éthique du travail" ne suffit pas. La preuve, les pays dans lesquels on travaille le plus, ce sont les pays pauvres. Pour devenir riche, il faut, en fait, d'abord parvenir à mobiliser de l'épargne et du Capital puis parvenir à s'intégrer à un vaste cercle d'échanges. Mais ça, c'est une autre paire de manches.


La très grande majorité de mes photos a été prise dans deux petites localités mayennaises: Sainte-Suzanne (1 300 habitants) et Lassay-les-Chateaux (2 300 habitants). Deux bleds absolus mais admirables, encore façonnés par le Moyen-Age. J'ai ajouté, à la fin, des images du château de Carrouges, tout proche mais situé dans l'Orne.

Deux artistes célèbres sont originaires de la Mayenne : le peintre, le Douanier Rousseau (dernière image) et l'écrivain Alfred Jarry.

Il faut absolument avoir lu Alfred Jarry, à commencer par "Ubu Roi". C'est d'une acuité politique extraordinaire. Un texte prophétique qu'il serait bon de diffuser, de toute urgence, notamment en Russie.

Et la vie d'Alfred Jarry est, elle-même, terrible, effroyable. Sur ce point, je recommande une remarquable Bande Dessinée (mais oui, j'en lis) :

- RODOLPHE et Daniel CASANAVE: "Merdre- Jarry le père d'Ubu".

20 commentaires:

Julie a dit…

Bonjour, Carmilla
Que l'on aime ou pas y vivre, vos beaux clichés donnent envie d'aller visiter cette région.
Quelle belle ambiance brumeuse, vous avez bien fait d'emporter votre appareil photo.
Question économie, les gens du nord sont sans doute plus courageux que ceux du sud ; moins enclins aux loisirs aussi. Là, je vais me faire lyncher :)
Merci de partager vos pérégrinations heureuses, bien à vous !

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Vous êtes surprenante, parce que votre métier vous amène à vous intéresser aux régions, et vous rembarrez ceux qui pensent qu’un pays se limite aux grandes villes et surtout à leur capitale. Ici au Québec, nous avons un dicton: Telle va la campagne, telle va la ville, si les campagnes se portent bien, les villes devraient suivre, en principe du moins. Je suis comme les habitants de cette région, heureusement que personne nous connaît, nous pouvons même nous faire oublier, de parfaits (ploucs), véritables bouseux de fond de campagne, qui finissent par faire fonctionner des sociétés jusqu’à la frontière de l’autarcie. Nous avons pu le constater lors de la pandémie, lorsque les citadins ont débouchés dans nos campagnes. Ce qui n’était pas très originale, les italiens au Moyen-Âge, lorsqu’une pandémie frappait leur pays, ils allaient se réfugier à la campagne. Nicholas Machiavel en est un exemple.

Voilà que les financiers aboutissent dans une région afin de comprendre comment une société de (ploucs) fonctionnent, qui plus est une société qui réussit. Bravo Carmilla, vous êtes sortie de votre zone de confort, vous avez prolongé votre séjour pour vous poser une question fondamentale : Comment une région devient-elle riche? Et cette question aura été alimentée par l’observation. Ce n’est sans doute pas la première fois que vous vous livrez à ce genre d’exercice. Vous avez eu la chance de voyager dans plusieurs pays, où je suis sûr que vous vous êtes livrée au même genre d’exercice.

Nous parlons beaucoup d’argent, de richesses; mais nous oublions souvent l’humain, celui et celle qui se lève le matin pour aller traire ses vaches, nourrir ses porcs, préparer le terrain pour les semailles, sans oublier que ce genres de besognes, elles s’effectuent sept jours sur sept. Vivre en région c’est une manière toute particulière d’exister, et cette manière particulière d’exister se manifeste dans le travail qui n’est pas toujours une partie de plaisir. Ce qui fait la région, c’est la qualité de l’humain qui l’habite, c’est le point de départ, cette volonté comme vous le soulignez de bien faire les choses et surtout d’être fier de ce que l’on fait, et surtout d’être fier de soi-même.

Vos magnifiques photos viennent appuyer vos propos. Je vous assure que je ne serais pas perdu dans cette région magnifique, où l’on croise les vieilles pierres de tant de générations. Vous ne vous êtes pas privée de vous épancher, à ce qui ressemble à un souhait, si l’Ukraine ne pourrait pas copier cet exemple d’une région de France qui a réussi. On entend partout, que La France va mal. Si je regarde cette région, je ne trouve pas que La France va si mal que cela. Ça ressemble plutôt à un pays de cocagnes. Je me verrais très bien rouler sur ces petites routes pittoresques de campagne, et marcher les champs et les forêts. Je comprend vos rêves de devenir châtelaine. Des fois, comme cela, les rêves débouchent sur des réalités qu’on n’avait pas anticipées. Est-ce que les foules parisiennes vous manqueraient? Permettez-moi d’avoir quelques doutes à ce sujet.

Merci pour votre texte Carmilla et surtout vos magnifiques photos!

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Julie,

Votre appréciation favorable sur mes images m'encourage un peu. Parfois, j'ai envie de renoncer à faire des photos.

C'est vrai qu'en Europe, les régions du Sud sont généralement moins riches que celles du Nord. Mais je ne crois pas que ça s'explique par une moindre ardeur au travail. La psychologie des peuples (l'Allemand sérieux, l'Italien frivole), ça ne me convainc pas.

J'ai aussi tendance à penser (c'est l'une de mes thèses personnelles) que dans les régions du Sud, on a exagérément développé l'économie touristique. On croit trop que le tourisme (de même que le pétrole ou les matières premières), c'est une richesse. C'est contestable. La Grèce, l'Espagne, les Antilles, la Thaïlande, ne sont pas, en effet, les régions les plus riches du monde. On y a d'ailleurs construit beaucoup d'"horreurs" surdimensionnées et qui se retrouvent vite en faillite. Le développement excessif du tourisme se fait au détriment d'autres secteurs économiques, plus productifs et à plus forte valeur ajoutée, et absorbe une grande partie de la main d'œuvre qualifiée. Le tourisme, c'est de l'économie primitive et ce n'est pas vraiment ça qui peut rendre un pays riche. La vraie richesse, elle est, avant tout, industrielle.

Veuillez excuser ce côté professoral mais ça fait partie des questions qui me tiennent à coeur.

Bien à vous,

Carmilla

Ariane a dit…

Bonjour Carmilla !

Tout comme vos correspondants je vais moi aussi vous féliciter pour vos photos. Ce matin, en les découvrant, j'ai vraiment été enthousiasmée par ces paysages qui, pour beaucoup, ressemblent un peu à ma Normandie d'adoption.
Celles de Lassay les Chateaux est si belle que je l'ai piquée pour mon fond d'écran.
La France nous réserve quand même bien des surprises, je ne m'en lasse pas.
Moi qui ai vécu au Pays Basque, dans le Quercy et aujourdhui en Cotentin, je confirme, c'est beau et...tranquille !
Merci encore Carmilla.
Ariane.

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Choisir l’agriculture n’exige pas seulement du courage, mais aussi beaucoup d’abnégation, financer c’est un choix et tout ce qui va avec, les paiements, les angoisses, et l’on peut se rendre ainsi jusqu’à la maladie mentale. Lorsque je suis revenu de mes aventures dans le nord, j’ai repris la ferme, mais avec beaucoup de caractère, j’ai choisi l’autre manière, celle de monter un troupeau en comptant sur le temps. Ce n’était pas le chemin le plus facile, j’ai travaillé très dur pour y arriver, en revanche, j’étais libre, libre de dettes et de bien d’autres choses. Avec moi, cette fameuse liberté, on y revient toujours. Il y avait beaucoup d’abnégation en moi dans une espèce de foi du charbonnier. Le soir lorsque je me couchais, j’avais peut-être mal aux muscles, mais je n’avais jamais mal à la tête. De toute façon, je n’ai jamais emprunté les chemins à la mode au cours de ma vie et j’en suis très fier.

Les consommateurs ne s’en rendent pas compte, mais encore aujourd’hui, ils paient très peu pour se nourrir, et les producteurs agricoles reçoivent tout juste de quoi couvrir leurs coups de productions. Le jour où ils vendent leur ferme, lorsqu’ils ont payé leurs dettes, ils ne leur restent plus beaucoup, certains tombent carrément dans la pauvreté.

Voilà un mois, j’ai rencontré mon ami Sylvain qui est agronome, qui était en train de récolter dans un champ du canton des échantillons de terre pour des analyses de sol. Pas besoin de nous motiver pour démarrer une discussion. Nous avons parlé de techniques de cultures, mais nous avons aussi abordé les questions de financements, et ils me disaient que plusieurs agriculteurs n’arrivaient même pas à rembourser le capital. Alors pour ne pas que le gouvernement et les institutions financières se retrouvent avec les clés sur le comptoir, ils refinancent. Le genre de fuite en avant, tout le contraire de la liberté.

Lorsque j’entends les consommateurs se plaindre que les prix des denrées alimentaires sont élevés, qu’ils ont beaucoup augmentés, je leur réponds que les prix n’ont pas encore assez augmenté. Vous l’avez constaté dans votre commentaire, depuis un siècle en Europe comme en Amérique, les nombres de producteurs agricoles a diminué drastiquement, ce qui nous indique deux choses, un : les conditions de vie sur une ferme sont difficiles, parfois pénibles, deux: les contraintes économiques sont énormes et bien des producteurs ne peuvent les supporter.

Nous n’avons peut-être pas encore vu la fin de ces augmentations de prix, après avoir connu la pandémie, puis les guerres qui sont loin d’être terminées, pourquoi on ne connaîtrait pas la famine? Nous sommes bien partis pour une sale période de l’existence. La viande à 100 euros le kilos, et les tablettes vides pourraient bien être notre lot. C’est juste un exemple que je donne comme cela en passant. J’espère qu’on n’en n’arriveront pas à ces extrémités.

Richard St-Laurent

Richard a dit…

On peut déplorer cette évolution mais elle est irréversible.

J’ai retenu dans votre texte cette phrase qui résume toute la situation dans un sens, et qui pose un regard existentiel sur notre avenir.

Mais qu’est-ce qui est irréversible dans l’existence?

Nous avons déjà connu des crises économiques et vous en conviendrez, nous allons en connaître encore, une récession est toujours dans le domaine du possible. On se rappellera en autre 1929 et il y en a eu d’autres.

Ce qui va sans doute exiger plus que des pirouettes technologiques et du refinancement. Sylvain et moi nous sommes bien conscients de ces situations. Il évoquait l’époque des Seigneurs qui dominaient leurs serfs. Aujourd’hui les Seigneurs se sont les prêteurs, et en autre les gouvernements. Vous allez me dire que la comparaison est grossières et non avenue, mais je dirais : pas tant que cela. Être étouffé par les dettes c’est un genre d’esclavage. J’en ai vu des entreprises agricoles au cours de ma vie qui ont fait faillite, des producteurs qui se sont retrouvés dans la rue, qui ont tous perdu, même leur dignité. D’autres ont préféré le suicide à la honte. Comment évoquer ces faits cruels entre les collines bucoliques? Quelles sont les solutions pour sortir de cette sorte de spirale? Comment peut-on imaginer ce monde en régression? Cette régression n’est jamais irréversible, nous pourrions connaître des périodes de reculs. Pendant des années, et encore aujourd’hui, les gouvernements occidentaux, ont subventionné l’agriculture, qui en fait, est une subvention à la consommation, ce qui signifie que dans les faits, nous n’avons jamais payé les véritables prix pour nos nourritures. Nos sociétés ont été subventionnées, et nous craignons avec raisons que la fin est proche, mais elle toujours été proche. Les produits laitiers qui sont vendus sur le marché de Moscou, on ne me viendra pas me faire croire que c’est juste du commerce, tout comme les raisins qui proviennent du Chili et qui se vendent $2.50 le kilo sur nos tablettes, s’ils parviennent sur nos tablettes, c’est que d’une manière ou d’une autre, qu’ils sont subventionnés, le tout transporté par des énergies fossiles. À $2.50 le kilos de raisins, je me demande toujours ce que le producteurs reçoivent à l’autre bout de la planète? Et, que dire de l’ouvrier agricole! Les grandes organisations mondiales du commerce passent la plus part de leur temps de réunions en négociation sur les tarifs, et nous les canadiens nous en savons un bout parce que nous sommes toujours en train de négocier avec notre voisin du sud, les USA. Ici au Canada nous avons des quottas de production de lait, et au USA, ils n’ont pas ce système. Mais, nos voisins voudraient bien envahir notre marché de production laitière. Cela est juste un exemple dans une partie du monde, différents que l’on retrouve ailleurs aussi! Tout est irréversible? Il faudra peut-être changer certains paradigmes, certaines manières de faire, certaines façons de négocier, et l’on peut en convenir cela ne plaira pas à tout le monde. Vous les Européens vous le savez d’expérience surtout lorsque vous négociez les tarifs et subventions agricoles dans l’Union Européenne!

Bonne fin de journée Carmilla et merci de vous intéresser à ces questions.

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Ariane,

Votre appréciation sur mes photos me fait bien sûr plaisir. J'hésite souvent, en effet, à poster ma propre production d'autant que les images Internet sont fortement compressées, dénaturées.

Vous avez vécu dans de bien belles régions mais, à vrai dire, la province et la campagne françaises sont toujours intéressantes. Ce qui est surtout fascinant, en France, c'est que chaque région, chaque département, sont très différents. De mon expérience de voyageuse, je puis vous assurer que ce n'est pas du tout ainsi dans le monde.

A Lassay, il y a en fait 3 châteaux. On peut y visiter notamment l'un des plus beaux châteaux médiévaux de France. A lui seul, il mérite un déplacement. Je n'ai malheureusement pu ni le visiter (fermé hors saison touristique) ni le prendre correctement en photo (gros travaux avec échafaudages disgracieux sur l'une des tours).

Je crois, en effet, que la Mayenne ressemble beaucoup à la Normandie du moins dans sa partie Nord qui en est frontalière.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Le manque d'objectivité des consommateurs est fascinant. Dire que les prix des biens de consommation sont bas, c'est passer tout de suite pour un infâme bourgeois. On a totalement oublié que la part du budget de l'alimentation dans les dépenses des ménages a beaucoup baissé au cours de ces dernières décennies.

Aujourd'hui, je trouve, par exemple, sur mes marchés parisiens des pommes, des clémentines, des tomates, des poivrons et même des fraises et des framboises pour presque rien. En ce moment, il y a même des asperges du Pérou (très bonnes) pour 8 € les deux bottes. Et bientôt, on pourra acheter, à pris accessible, des cerises du Chili. Quant à la viande, on trouve maintenant du poulet rôti ukrainien à 8 € l'unité.

Avec de tels prix, il est évident qu'un producteur individuel ne peut pas survivre. Même avoir un jardin dans lequel on fait pousser ses propres fruits et légumes n'a plus aucun sens économique aujourd'hui.

Pour résister et survivre, je ne vois donc d'autre solution pour les agriculteurs que de se regrouper et de s'associer le plus possible. L'emprunt bancaire, je suis également sceptique parce que le coût des équipements est très élevé. Constituer des sociétés par actions m'apparaîtrait judicieux mais je sais aussi que les mentalités n'y sont pas préparées et que c'est quand même compliqué.

Et c'est vrai aussi que le mécanisme européen des subventions agricoles a une foule d'effets pervers. Mais le supprimer provoquerait aussi un tsunami.

Enfin, il ne faut pas oublier que les consommateurs ont une grande responsabilité dans cette évolution. Ils sont tellement obsédés par les prix les plus bas qu'ils ne fréquentent plus que les grandes surfaces commerciales. Tant pis s'il faut faire 20 kms en voiture pour s'y rendre, tant pis pour la qualité des produits, tant pis pour les petits commerçants locaux et l'animation des villages.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Un seul mot ce matin

Neige!

C’est la première bordée de neige de la saison.

Personnellement, c’est tout simplement féerique!

Quelle surprise!

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Vous avez bien de la chance. La magie de l'hiver et de la neige, on ne la connaît plus en Europe.

Il continue de faire très doux (aux alentours de 15°, y compris à Moscou). En revanche, on est submergés, depuis une quinzaine de jours, par des tombereaux de flotte et ça n'est pas près de s'arrêter. Seul avantage: les médias ont cessé, provisoirement, de nous casser les pieds avec la sécheresse.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Vous avez un sens de l’humour tout à fait particulier, je dirais même que vous pratiquez l’humour avec une certaine dose de sérieux. J’aime bien l’expression (tombereaux de flotte), parce qu’ici au Québec, l’expression tombereau est employé pour le transport et l’épandage du fumier de ferme.

Cette première neige n’était qu’une éphémère entrée en la matière, vers midi le point de congélation a été dépassé et cette belle neige s’est transformée en pluie. C’était à prévoir.

« Mon pays ce n’est pas un pays, c’est l’hiver. »

Chante encore Gilles Vigneault.

J’en suis!

Ma véritable poésie, c’est la neige, c’est mon être, c’est ma vie.

Et comme le chante Claude Gauthier : Je suis de janvier sous zéro.

L’hiver au Québec, pour moi, c’est toujours inspirant.

Bonne fin de journée Carmilla

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Je crois que c'est bien aussi le sens du mot en français. Mais peut-être, en effet, que l'on n'emploie pas souvent cette expression dans la langue courante.

Il faut savoir que le français, je l'ai appris essentiellement en lisant et que j'ai donc tendance à m'exprimer comme dans un livre. Je parle avec trop d'application et je ne connais pas vraiment le langage de la rue.

C'est ce qui fait que, parfois, on me dit que je ne suis peut-être pas complétement Française.

Quant à la neige, c'est effectivement très inspirant. Mais en Europe, même en Pologne, même dans les Etats Baltes ou le Sud de la Scandinavie, il n'y en a plus guère. Et sûrement pas dès fin octobre.

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Je vous considère comme pleinement française avec une note internationale. Cela se sent lorsqu’on vous lit, et même des fois, je suis surpris, que je me demande, vous qui n’avez jamais visité le Québec, que je retrouve dans vos phrases une manière québécoise de vous exprimer que j’en demeure agréablement surpris. Mais, il y a plus, cet autre apport des pays de l’est, ce qui est loin d’être un défaut, au contraire, c’est un enrichissement de la pensée en multipliant les manières de dire. Une langue c’est l’outil de la penser, non seulement pour se faire comprendre, mais aussi pour imaginer, ce qui est dans votre expression, très originale, parce que vous conjuguez plusieurs niveaux d’expressions, ce qui est très subtile. Ce qui incite le lecteur à jouer sur plusieurs tableaux de raisonnements. Votre écriture, il ne faut pas seulement la lire, il faut la sentir. Cette dernière phrase que je viens d’écrire, c’est du Michel de Montaigne, toute crachée. Je pourrais piger dans l’une des chanson de Léo Ferré : (C’est extra). Un autre exemple que je peux avancer, l’écrivaine Amélie Nothomb, je ne parlerai pas du caractère littéraire de son œuvre, on aime ou on n’aime pas, mais de sa manière d’exprimer, de raconter, nous sentons au fil des phrases qu’il y a une subtilité qui n’est pas seulement du français. À votre image, c’est une femme, fille de diplomate qui a beaucoup voyagé, qui a bénéficié de plusieurs formations, et cela se sent lorsqu’on la lit. Je pourrais prendre aussi des auteurs comme Milan Kundera, Émile Cioran, Marguerite Yourcenar, les deux premiers ont appris et perfectionné leur français tard dans leur existence, ce qui est tout à leur honneur; tant qu’à Yourcenar, je reconnais le summum de la perfection, pour ne pas dire du perfectionnisme, mais avec sa touche d’européenne universelle, lorsqu’on la lit, on la sent, pour parvenir à la savourer. Ce qui est un véritable plaisir. Je suis en train de lire en parallèle deux auteurs complètement différents. Sunset Park de l’auteur américain Paul Auster, et Les désorientés par le libanais d’origine libanaise Amin Maalouf, qui vient d’être élu : Secrétaire de l’Académie Française, les deux parlent un excellent français, si Paul Auster à ma connaissance n’a pas écrit de livre en français, il faut se pencher sur l’oeuvre de Maalouf, qu’il faut prendre en considération, surtout en cette période trouble que nous vivons parce que cet auteur provient d’un carrefour de l’humanité, le Liban. Auster a vécu plusieurs années à Paris où il a appris son français. Lorsque je le lis et relis, je sens qu’il a écrit en anglais, mais qu’il pense beaucoup en français. Je suis fasciné par tous ces destins d’auteurs, non seulement parce qu’ils ont vécu au quotidien, mais encore plus, parce qu’ils sont devenus avec leurs manières de penser et d’imaginer. Je suis fasciné par toutes ces existences d’auteurs que je trouve particulières. Je me sens particulièrement privilégié d’avoir navigué dans ce genre d’humanité qui entretient notre humanisme. Qui plus est, Carmilla, d’une certaine manière, qui vous est très personnelle, vous en faites partie!

En passant, j’ai commandé le dernier essai d’Amin Maalouf : « Le labyrinthe des égarés », qui vient de sortir. J’ignore combien de temps il prendra pour franchir l’Atlantique car je suis très impatient de le lire.

Bonne fin de journée Carmilla
Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Ce qui est sûr, c'est que je ne parle sûrement pas québécois. Ma chance, c'est d'avoir plusieurs langues plus ou moins dans la tête. Mais, je fais aussi des mélanges. Par exemple, j'aime bien les expressions slaves, "acheter un chat dans un sac" ou "on pourrait voler des chevaux avec elle (ou lui)", mais je me rends compte que ça n'est pas compris par les Français (pourtant, ça existe bien).

L'inconvénient, c'est que je ne sais pas écrire poétiquement. J'ai une écriture simplement instrumentale.

Quant aux écrivains que vous citez, je suis évidemment à mille lieux d'eux mais ça ne me dépite pas: je n'ai pas l'ambition, je n'oserais dire de les égaler mais simplement de les approcher.

Auster, Yourcenar, Kundera et même certains livres d'Amélie Nothomb, bien sûr que je les apprécie.

Quant à Maalouf, ses bouquins sont vraiment intéressants. Il a surtout une remarquable connaissance du Moyen-Orient. J'avais beaucoup aimé "Samarcande" et "Les jardins de lumière". Ce qui est étonnant, c'est que le français continue d'être parlé par nombre de Libanais alors qu'il est de plus en plus rejeté dans nombre d'autres pays (Algérie notamment).

Bien à vous,

Carmilla

Richard a dit…

Bonjour Carmilla

Je suis intrigué par vos deux expressions et je vais essayer de découvrir leur signification :

Acheter un chat dans un sac? J’avoue d’entrée de jeu, j’aime bien cette expression, j’imagine que acheter une chat dans un sac, c’est acheter tout compris.

Tant qu’à voler des chevaux avec lui ou elle, je dirais que ce serait être complice, je passerais ma vie avec cette personne, quelque chose du genre.

Remarquez que je procède au hasard et que je suis peut-être très loin de leurs véritables significations.


Je reconnais que je n’ai jamais été très fort dans les devinettes.

Ce que vous dites sur ceux qui pratiquent plusieurs langues, j’ai été témoin de certains mélanges, erreurs, incompréhensions, qui des fois nous amène à des situations fâcheuses ou désagréables. Une expression tout à fait banale, peut devenir dans une autre langue, à cause d’une mauvaise traduction, une insulte.

Est-ce que pour ce faire, nous devrions parler une seule langue? Et Ce n’est pas une question banale. Est-ce que lorsque nous laissons des langues mourir, nous nous privons des certaines manières de penser, que nous perdons un certain sens de la vie? Délaisser une langue, est-ce se priver d’imaginaire?

Ce qui est important, ce n’est pas de devenir comme certains auteurs, ou certaines personnes que nous admirons, non, l’important c’est de devenir nous-mêmes. Et, c’est sans doute l’exercice le plus difficile auquel un humain sera confronté au cours de son existence, parce que devenir soi-même, c’est écrit nulle part. Un modèle n’est pas une copie. J’admire Michel de Montaigne, mais je sais très bien que je ne serai jamais Michel de Montaigne.

Bonne fin de journée

Richard St-Laurent

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Richard,

Acheter un chat dans un sac, ça veut dire acheter quelque chose les yeux fermés, sans s'assurer de la qualité réelle du produit. C'est par exemple acheter sur Internet.

Etre prêt à voler des chevaux avec quelqu'un, c'est éprouver des affinités si profondes avec une personne qu'on serait même disposé à commettre des délits avec elle.

Chaque langue comporte ainsi quelques expressions favorites. J'ai tendance à en importer mais je me rends compte que si ça n'est pas difficile à traduire, ça n'est pas ensuite compris.

Mais ça n'est qu'un aspect de la difficulté à ne pas mélanger les langues, plus précisément leur vocabulaire, quand on en a plusieurs dans la tête.

Le problème ne se pose guère entre le français et les langues slaves. C'est vraiment trop différent.

En revanche, quand il s'agit de langues très proches comme les langues slaves, je trouve que ça devient vite infernal. Je ne sais plus moi-même, quelquefois, si un mot est russe, polonais, ukrainien. Ou bien quand j'étais en République tchèque, en juin dernier : je comprenais généralement ce qu'on me disait mais ça m'énervait beaucoup parce que ça introduisait une salade supplémentaire dans ma tête. Et puis, j'avais envie de corriger mes interlocuteurs.

Cela dit, je n'aimerais vraiment pas être monolingue. Une autre langue, quand elle est très différente, c'est aussi une autre manière de penser. Dans une langue slave, on exprime par exemple une autre conception du temps. Et puis, on peut composer une phrase non pas en suivant un ordre impératif et rigoureux comme en français (sujet + verbe + complément) mais en fonction de l'importance hiérarchique que l'on accorde à chaque mot. D'une certaine manière, c'est beaucoup plus souple.

Quant à devenir soi-même, ça je ne sais vraiment pas. Encore faudrait-il que j'ai une identité fixe et stable. Mais j'ai l'impression que c'est vraiment très mouvant chez moi. Ca n'est qu'une façade provisoire contre les doutes et les monstres qui nous assaillent.

Bien à vous,

Carmilla

Julie a dit…

Bonjour Carmilla, bonjour Richard
Vos échanges sur les expressions, me parlent :) En ce moment j'y attelle à apprendre le corse. Ayant quelques notions d'italien, plein de mots se ressemblent ; cependant la prononciation diffère. Il paraît que le Corse du nord est très bien compris en Toscane. J'utilise la méthode Assimil, les enregistrements sont d'une aide précieuse. J'adore le corse, si vivant et coloré, ses expressions sont souvent drôles et imagées. Mais ce qu'il me frappe le plus, c'est la proximité avec le roumain... Bref, que du bonheur ! Reste à m'inscrire à un atelier afin de le pratiquer en immersion.
Une petite expression ? Lorsque on va chez quelqu'un pour dîner, on ne doit pas y aller juste : "cù a bocca è cù i denti". :)

Anonyme a dit…

Mais non, Carmilla Le Golem, ni critique acerbe ni ricanement, juste de la mansuétude souriante, tendrement amusée pour ces médiocres autant qu’intéressants à observer Verdurin de la Phynance !

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Julie,

Chaque langue est une autre façon de comprendre le monde et l'ouverture à une autre sensibilité.

J'avoue que lorsque je me suis rendue en Roumanie, je ne comprenais absolument rien. C'est pourtant une langue romane et, à partir du français, on devrait pouvoir se débrouiller un peu (c'est le cas pour l'espagnol et l'italien mais, il est vrai, pas pour le portugais).

Quant au corse, j'en ignore tout et, du reste, je ne suis jamais allée en Corse. Sa proximité avec l'italien et le toscan est, en effet, vraisemblable.

D'expérience, je sais qu'il n'est pas facile d'apprendre une langue proche. La proximité brouille les choses et on a tendance à tout mélanger. D'une certaine manière, je préfère les langues complétement différentes.

Bien à vous,

Carmilla

Carmilla Le Golem a dit…

Merci Inconnu,

En effet, les Verdurin ne sont pas complétement antipathiques.

Ce serait trop simple si les gens que l'on n'aime pas étaient faits d'un seul bloc: carrément odieux et carrément bêtes.

Quant au milieu de la Phynance, je ne peux vraiment pas dire qu'il soit constitué d'imbéciles. On y rencontre même de sacrées mécaniques intellectuelles. La caractéristique, c'est qu'ils sont quand même tous des gens passionnés et qu'ils tournent et carburent dans leur propre monde.

Mais pas tous...et j'espère, justement, ne pas être complétement comme ça.

Bien à vous,

Carmilla